La personne est-elle dans l'état de faire un choix raisonné ?
Déjà ce n'est pas si évident. Laissons ses proches et les médecins décider.
Je crois au contraire que c'est à la personne de décider et pas aux proches, peu importe la situation (sinon quel beau moyen d'hériter plus vite). S'il s'agit de "folie", je pense qu'il faut prendre les dispositions avec la personne avant qu'elle perde la raison ou alors il faut la maintenir en vie. Tant pis.
Quant aux comas, je pense qu'il faudrait laisser les médecins décider plutôt que les proches.
C'est vrai que les cas peuvent être multiples et très complexes. Au delà des fanatiques qui ne veulent pas entendre parler d'euthanasie, même en partant sur l'idée d'un "oui", les règles seraient très difficiles à mettre en place.
J'ai trois cas d'école en tête.
Le premier c'est ma propre grand mère qui est décédée en début d'année.
Ça faisait 5 ans qu'elle disait qu'elle voulait mourir. Probablement un effet de la dépression, ok mais plus les mois passaient, moins elle pouvait bouger (arthrite), plus la douleur était intense. Elle ne pouvait plus rien faire d'autre qu'écouter et parler (parce que bien sûr il n'y a que le physique qui déconnait, elle avait toute sa tête).
Au début, on trouvait qu'elle exagérait, que c'était juste "le moral", mais ces deux dernières années on voyait qu'elle était très affaiblie et puis elle le disait elle même : "je ne sers plus à rien, je suis un poids". La mort de mon oncle il y a quatre ans a été un traumatisme violent, elle aurait voulu partir avant lui, pour ne pas avoir le douleur de perdre un enfant même un enfant de 65 ans.
Le second est celui de la grande tante de mon compagnon. Elle souffrait de parkinson. Une maladie dégénérative affreuse car sur la fin (je ne l'ai vu que sur la fin) elle ne pouvait plus se nourrir : impossible de mâcher, d'avaler puis d'ingurgiter. Elle s'affaiblissait de jour en jour par sousalimentation en plus de la maladie car on a interdiction d'alimenter les gens par perfusion. Elle avait juste quelques cachets contre certaines carences. Pour moi on pouvait résumé le truc par : "on l'a laissé mourir de faim" à petit feu. En gros sa seule nourriture était trois cuillères de purée qu'elle arrivait péniblement à avaler une le matin, une le midi, une le soir.
A priori elle avait sa lucidité mais ne pouvait plus parler, pouvait à peine faire un geste ou même pleurer (seules quelques larmes coulaient). C'était donc impossible pour elle d'exprimer sa souffrance d'une quelconque manière, pas de cri, pas de larme, pas de geste...
De mes propres yeux, je n'ai jamais rien vu d'aussi ignoble de toute ma vie.
Le troisième cas est celui du père de mon ancien chef (celui qui présente des points communs avec le père de Philigram dans les "techniques pédagogiques").
Comme ma grand mère, il vieillissait mal. Ancien artisan, il ne pouvait plus trop bouger alors il se sentait inutile et ne voulait pas être dépendant. Il a essayé de se suicider je ne sais plus comment mais ils l'ont trouvé et soigné. Pendant trois mois il a été hospitalisé, ils l'ont retapé et pourtant il n'arrêtait pas de dire que ça ne servait à rien qu'il voulait mourir.
Au bout des trois mois ils l'ont renvoyé chez lui, une semaine après il est mort, suicide. Je ne me rappelle plus des détails, je me souviens juste qu'il avait eu du mal à trouver un moyen efficace vu que son état physique se dégradait trop pour pouvoir se pendre par exemple. Je me demande s'il n'a pas fait comme mon grand père et retrouvé un fusil de chasse.
Bref, dans ces trois cas les personnes étaient âgées de plus de 70 ans (beaucoup plus dans le cas de ma grand mère de 94 ans) et voulaient mourir car leur souffrance dépassait la simple dépression.
A titre personnel, je me fiche que la société entretienne des "poids morts" improductifs, ce sont des humains, des êtres vivants qui méritent d'être maintenus en vie mais uniquement si eux y trouvent de l'intérêt. Quand les gens sentent qu'il n'y a plus rien à faire, que leur temps est terminé, pourquoi les laisser se débattre contre une maladie plus forte qu'eux ou les laisser se suicider par leurs propres moyens en faisant des trucs sales et douloureux ?
Tout l'argent qu'on leur donne en guise de retraite passe dans des soins, tout leur temps aussi, ce n'est plus une vie c'est une survie sans avenir.