(Tiens, encore un bon côté de l'avancée technologique : je n'ai jamais autant approfondi ce sujet qu'ici, avec d'autres autistes.
)
freeshost a écrit : ↑samedi 2 septembre 2023 à 6:52Disons que l'étourdissement (ou la mise à mort) de l'animal est plus visible (car visuel, car à court terme, car demandant peu d'effort cognitif pour être compris) que les implications et les conséquences de la production industrielle (sur le long terme ; les ressources nécessaires à la fabrication des bâtiments, des outils, etc.).
D'accord, merci pour l'éclaircissement.
Dans l'opposition des deux en guise de "concepts bruts", tu as raison sur la visibilité, la sévérité constatable sur le court/long terme.
Mais il y a un problème : c'est que la réalité du monde actuel n'est pas prise en compte.
La construction d'une installation, l'utilisation de ressources, d'espace (terrains), l'impact environnemental potentiel... tout cela bénéficie, ne serait-ce que par la présence matérielle, de visibilité. On va remarquer quand un terrain en périphérie de sa ville commence à se remplir, un beau jour. On va parfois protester contre la construction de bâtiments, pas toujours des usines d'ailleurs — ce peut être un magasin de grande distribution que nous ne voulons pas à cet emplacement.
Une médiatisation se produit bien souvent.
L'abattage, on préfère ne pas y penser. On le cache : abattoirs, eux-mêmes dissimulés.
Lors de mon retour de Lorient en bus début août, il aura fallu que je vois les bétaillères sur le parking pour comprendre que l'usine que je regardais par la fenêtre était un abattoir.
On dissocie le produit animal de l'animal en tant qu'individu :
"J'achète du lait, pas le lait maternel d'une autre espèce."
"J'achète un steak, pas un morceau d'animal mort, et je peux me vexer si on parle de cadavre alors que, très objectivement, c'est du cadavre".
Il faut des vidéos trash pour "comprendre" ; encore faut-il qu'elles eussent été filmées illégalement, encore faut-il que les personnes acceptent de regarder, encore faut-il qu'elles regardent comme si c'était n'importe quel autre animal (leur chat ? leur chien ?) que l'on abattait.
Il y a des vidéos légales aussi, je me souviens d'un docu' où l'on voyait un abattoir pour les cochons (Arte peut-être ?)
Mais même là, on ne montrait "que" la saignée, se faisant post-étourdissement sur des cochons inconscients, et proprement, avec des poches pour recueillir le sang.
Même là, on ne montrait pas comment cela se passait pour les cochons à l'intérieur des chambres à gaz/puits de Co₂, on les voyait y entrer conscients et en ressortir inconscients.
Là encore, il aura fallu que des vidéos clandestines fuitent (sur YouYoute justement
).
Quant à "l'étourdissement", c'est un concept vague pour la population générale, on crée même une guéguerre entre l'étourdissement/non-étourdissement. Or, cela ne change rien à la finalité (supprimer la vie à un être ayant un intérêt personnel à la garder).
On ne nous parle pas ouvertement des méthodes d'étourdissement, ni du risque de ratés. Un exemple pour l'étourdissement au Matador (âmes sensibles s'abstenir) :
J'ajouterais l'importance de la condition humaine dans les abattoirs, dont l'impact psychologique peut être désastreux.
La compréhension de la mise à mort, comme concept, comme définition, ne demande pas d'efforts cognitifs particuliers, tu as raison.
Le constat de la mise à mort, avec ce qu'elle implique, lorsque l'on nous met devant le fait accompli, demande un effort cognitif considérable. Ce n'est pas pour rien que l'on parle de
dissonance cognitive.
Moi par exemple, je suis passée par une phase où je regardais des reportages plus ou moins explicites tout en mangeant des produits animaux. Je suis passée par le "oui c'est un problème mais c'est trop bon et on ne peut rien faire de toute manière..."
freeshost a écrit : ↑samedi 2 septembre 2023 à 6:52Deoxys a écrit : ↑samedi 2 septembre 2023 à 3:08
On n'en n'a pas besoin pour vivre, pourtant on admet un certain degrès d'impact écologique en y ayant recours, parce que la logique selon laquelle on pourrait vivre sans est, pour ainsi dire, incompatible avec le monde moderne actuel.
Mais nous sommes justement en train de remettre en question le monde moderne actuel.
Oui, c'est vrai, ça manque de développement dit comme ça !
Je veux dire : l'idée de faire sans transports est incompatible avec le monde moderne, parce qu'il faut bien pouvoir se rendre au travail, aux urgences, aux courses ; plus globalement, cela permet de relier les diverses zones du monde entre elles. Utilisés à bon escient, ils vont polluer, mais de manière justifiée : on ne peut pas raisonnablement envisager de ne plus utiliser que ses petites jambes ou son vélo, ne serait-ce que pour son quotidien ; alors pour le fonctionnement global du monde...
Une industrialisation (production de végétaux, B12 synthétique ici) serait indispensable car peu de personnes seraient en mesure de cultiver leurs propres végétaux et synthétiser leur propre B12.
(ou élever leur propres poules, à la limite ; mais combien de personnes dans le monde ont un jardin pour le faire ; combien de personnes parmi ces personnes ont le temps/l'argent/la volonté pour le faire ?)
freeshost a écrit : ↑samedi 2 septembre 2023 à 6:52
Nous pouvons leur laisser des écosystèmes naturels au lieu de vouloir une croissance effrénée de la population (par déni/refus de la mort), une espérance de vie croissante (c'es-tu vraiment ça l'but ?) et la conquête urbaine de toute la Terre (notamment pour l'industrie du divertissement, qui est quand même moins prioritaire que l'alimentation).
Ah, la croissance effrénée de la population, ça c'est à prendre en compte. Idéalement, il serait bon de ne pas trop se reproduire (moi je n'ai jamais voulu d'enfants
).
Pour autant, il va bien falloir nourrir cette population grandissante... Déjà qu'une partie souffre de la faim à l'heure actuelle.
Mais alors, n'y a-t-il pas un non-sens actuellement à consacrer, si je reprends les chiffres de la FAO, 59% des surfaces agricoles exploitées pour nourrir des animaux qui ne vont même pas profiter à tout le monde (et ne représenter qu'une partie de l'assiette pour les gens à qui ils profitent) ?
N'y aurait-il pas un non-sens dans un monde futur hypothétiquement pro-élevage plein air, à mobiliser des ressources, des efforts, causer de la pollution, à nourrir des animaux qui seraient consommés avec modération (donc de manière non-prioritaire), au lieu de prioriser directement l'alimentation humaine ?
Le problème justement de la considération écologique, c'est qu'elle ne reconnaît pas un droit fondamental à l'animal, du moins pas systématiquement (spécisme).
Tiens, j'ai fait ma petite recherche sur la supplémentation en B12 des animaux d'élevage !
[Source 1 (cochons/bovins de viande-lait/moutons/chevaux) + Source 2 (poulets/poules)]
Je ne suis pas en mesure de tirer des conclusions expertes ni d'analyser ces chiffres ; déjà parce que je n'ai pas la méthodologie, mais surtout parce que la fréquence des dosages et la fréquence d'utilisation de cette supplémentation dans l'élevage est floue...
Je me suis tout de même adonnée à une petite simulation
(je ne peux rien affirmer) :
Pour un être humain entre 19 et 50 ans, le besoin journalier en B12 est de
2,4 μg.
Si on prend ce besoin comme moyenne (sachant que les plus jeunes ont besoin de moins de B12 mais qu'une grossesse/un allaitement en nécessite plus), on arrive approximativement à :
un besoin annuel en B12 pour les 7,8 milliards d'humains·es d'à peu près 6,8 millions de litres.
Dans l'élevage, en prenant la fourchette basse et supposant une dose unique dans la vie de chaque animal (les sources semblent suggérer le contraire mais il y a aussi certainement des élevages sans supplémentation), et en se basant sur le nombre d'animaux tués selon L214
[mon précédent message], on arrive à :
- pour les bovins : 293 000 litres ;
- pour les cochons : 1 millions de litres ;
- pour les moutons : 590 000 litres ;
- pour les chevaux : 5 000 litres ;
- pour les poulets : 2,1 millions de litres ;
- pour les poules : 175 000 litres.
Soit supposément 4,15 millions de litres de B12 qui serviraient à l'élevage, sachant que je n'émets cette supposition que pour les animaux terrestres — 6 % de l'élevage seulement.
Les 94 % restants sont de poissons et crustacés pour lesquels je ne trouve pas grand chose
(des éléments semblent favorables à son utilisation pour palier des soucis de fertilité dans la filière aquacole.)
Ce chiffre peut être plus ou moins élevé en vrai, mais ça permet d'imaginer ce que représente potentiellement la production industrielle de B12 actuellement.
freeshost a écrit : ↑samedi 2 septembre 2023 à 6:52Deoxys a écrit : ↑samedi 2 septembre 2023 à 3:08Après, le vrai fond du problème avec l'exploitation animale, ce n'est pas l'aspect écologique (même s'il y a un impact), c'est l'aspect éthique. On prend en compte l'individu, pas juste un ensemble.
On pourrait aussi dire : "On prend en compte l'ensemble, pas juste un individu. L'aspect écologique est quand même au moins aussi important que l'aspect éthique." C'est un autre point de vue. Entre prioriser le général ou le particulier.
Non, ce n'est pas juste une question de point de vue justement...
Je vais essayer d'être synthétique (comme la B12 haha) :
La B12 devrait être produite industriellement pour les humains (moins/plus que maintenant, je n'en sais rien). Cela générerait de la pollution, détruirait forcément des écosystèmes et des vies (tout comme le fait de cultiver des végétaux pour se nourrir, pour les carburants et produits nécessaires).
On génère aussi de la pollution, on détruit aussi des écosystèmes et des vies (pour pouvoir nourrir ce bétail). On ne mobilise pas les ressources/l'espace/l'énergie humaine et technologique pour nourrir directement les humains.
Mais surtout, et c'est là que
l'éthique joue un rôle primordial dans la compréhension intrinsèque du problème :
Avant tout, oui, l'éthique concerne aussi le global, l'écologie.
Par contre, dans l'éthique, il y a aussi la notion du respect d'un individu, de son intégrité, de sa sentience.
Et justement, dans ce second cas, on ajoute aux morts collétarales des morts
volontaires et
évitables. On fait venir des animaux au monde, on les tue. Ces animaux sont des êtres sensibles, on pourrait faire autrement ; ce modèle est donc moins moral que le premier.
L'idée n'est pas de faire du premier une option parfaite et du second une option complètement conne, mais d'assumer notre responsabilité d'êtres humains.
Dire qu'il faut préférer les avancées technologiques (qui évoluent constamment en outre) à la violation d'un droit (que l'on reconnaît pourtant à nos animaux de compagnie), cela ne relève pas d'un point de vue.
La planète en pâtira nécessairement, mais de la même manière que l'on pourrait estimer bon de stériliser une partie des êtres humains à la naissance pour limiter les populations. Elle en pâtira davantage si on ne le fait pas... et pourtant —
heureusement ! — on ne le fait pas, parce que certains droits individuels priment sur la potentielle réduction de l'impact global.
Les ressources, les végetaux, la planète, bien que précieux, ne sont pas sentients. Nous pouvons donc nous autoriser, dans la mesure du raisonnable, des choses que nous ne pouvons pas nous autoriser sur le vivant sensible.
Pour imager : j'ose espérer que les gens qui jardinent ont conscience qu'il y a une différence entre tailler son buisson et taillader le chat du voisin.
freeshost a écrit : ↑samedi 2 septembre 2023 à 6:52Générer des montagnes de déchets n'est guère souhaitable non plus.
Passer du temps à ne rien faire en attendant les transports publics (comme je le disais avant) me semble possible et souhaitable. On n'est pas obligé de sécréter de la dopamine chaque minute. Et il y a des moyens différents et meilleurs de la stimuler (en montant en montagne, par exemple, en courant, en pédalant, etc.).
C'est là que je vois les limites du TDAH.
Non.