Autisme et amitié fusionnel

Je suis autiste ou Asperger, j'aimerais partager mon expérience. Je ne suis ni autiste ni Asperger, mais j'aimerais comprendre comment ils fonctionnent en le leur demandant.
Grokachu
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Autisme et amitié fusionnel

Message par Grokachu »

Bonsoir,

Je suis fils unique et j'ai vécu une enfance assez solitaire. Je ne sortais quasiment jamais seul, toujours avec mes parents et les rares fois ou j'étais invité chez mon meilleur ami du primaire, mes parents qui me surprotégeaient ont toujours refusés de me laisser y aller.

D'ailleurs avec cet ami du primaire, j'avais une relation proche de celle que je vais aborder plus bas à savoir qu'on était inséparable, je me souviens d'ailleurs qu'au début lorsqu'il est arrivé dans la classe, les autres le qualifiait de bizarre. Moi au contraire, je l'ai tout de suite apprécié et les rares fois que ça a dérapé, c'était à cause des autres qui voulaient nous séparer. Au final, lors des dernières années du primaire, on était dans une sorte de bulle, on ne parlait quasiment jamais aux autres et lorsqu'il fallait se mettre en rang, on se tenait fermement par la main au point que la prof nous charriait en disant qu'on se comportait comme des mariés dans notre façon de se tenir la main.
Je me souviens qu'une fois, pour éviter qu'on jacasse ensemble, la prof nous avait mis dans deux équipes séparés pour jouer à la balle au prisonnier. Sa réaction a été direct, il a pris la direction du portail de l'école pour partir, furieux. Moi au contraire, je le regardais faire mais je n'étais pas indifférent à sa réaction car je ne voulais pas non plus être séparé de lui.
À la cour de récré, on passait notre temps libre à s'imaginer des histoires qui tournaient autour de nos passions communes, à savoir, les dessins animés. On a certainement dû discuter de choses plus sérieuses mais je n'arrive plus à m'en souvenir, je sais juste qu'avec cet ami, on avait une relation très fusionnel mais ça n'a jamais dépassé le stade de l'amitié.
Finalement, on a perdu le contact à la fin du primaire car comme je vous l'expliquais, on a toujours refusé que j'aille chez lui, et mes parents lui ont jamais proposé de venir non plus. Mes tentatives pour le retrouver sur internet ce sont révélés infructueuses. C'est dommage mais on y peut rien :cry:

Passons à la seconde amitié qui a eu lieu à l'âge adulte ou presque (je devais avoir dans les 17-19 ans).
Avec l'arrivé d'internet chez mes parents au début des années 2000, j'ai voulu combler ce vide que j'ai toujours eu, notamment du au fait que je sois fils unique et qu'hormis l'ami que j'évoque plus haut, je n'ai jamais réellement eu d'ami par la suite.

J'ai pendant longtemps été à la recherche d'un « frère de cœur » qui remplacerait celui que je n'ai jamais eu dans ma famille. J'ai fini par trouver cette personne avec qui on a eu une amitié très fusionnel, on pouvait passer des heures à discuter sur MSN, il m'appelait « frerot », on s'est même rencontré à 3 ou 4 reprises, j'étais heureux.

Seulement, j'ai l'impression que cette amitié a mal été perçu par son entourage. En effet, la personne en question était marié, moi célibataire. Si la première rencontre s'est bien passé avec lui et sa famille, lors de la seconde, il est venu seul me voir sur ses jours de congés. Ça s'est très bien passé là aussi, au point qu'on s'est même fait des câlins (j'insiste, c'était juste des câlins, il y a jamais rien eu de plus entre nous, on se tenait souvent par la main aussi mais là encore, ça rentrait dans le cadre d'une amitié que je jugeais normal pour ma part) mais lorsque mon tour est venu d'aller passer quelques jours chez lui, ça a été catastrophique.

En fait de mon côté j'avais l'impression que tout allait bien mais sa femme semblait jalouse de ce lien extrêmement puissant qu'on avait et les parents de ce « frère » craignait que leur fils change de bord. Je me souviens également que si le premier jour, tout c'était à peu près bien passé (repas normal, puis TV en famille sur le canapé), le second jour, j'ai commencé à devenir plus égoïste car je ne comprenais pas ce rituel d'aller voir la télévision après le repas et surtout, personne me disait de venir, du coup, je restais seul sur la table et ça a crée une sorte de malaise.
Le jour ou j'ai du rentrer chez moi, j'ai passé la matinée à pleurer, au point que lui aussi ça l'a fait pleurer et j'ai insisté pour qu'il monte derrière avec moi dans la voiture pour qu'il me tienne la main le trajet malgré qu'il avait des problèmes de nausées. Il a fini par monter à l'avant pour solutionner le problème mais j'ai compris après coup que j'ai eu une réaction égoïste, ne pensant qu'à mon bonheur et pas au sien.

Lorsque je suis rentré chez moi, les choses était plus comme avant, ce frère que j'avais trouvé était devenu plus distant et j'ai fini par lui dire qu'à cause de son comportement, je n'avais plus confiance. Sa réaction a été immédiate et il m'a bloqué de MSN. Malgré mes nombreux appels, il ne répondait plus et lorsqu'il a fini par me débloquer pour me parler, j'ai eu l'impression que c'était pour une sorte de vengeance car je sentais une sorte de moquerie dans sa façon d'écrire. Il m'avait également expliqué entretemps qu'il ne pouvait plus me parler car sa femme lui interdisait.

J'ai finalement tourné la page mais ça s'est fait au prix de beaucoup de tristesse, de journées à pleurer, à ne pas comprendre ce que j'avais fait de mal.

Aujourd'hui, je souhaiterai savoir si d'autres personnes asperger ont vécus des expériences similaires ?
En fait, je remarque que chez moi, il y a deux types de relations : celle ou je suis totalement désintéressé, au point ou je peux me barrer en cours de conversation et celles ou je suis timide au début mais lorsque je prends confiance, je devient dominant et sans m'en rendre compte, je me soucis pas de l'avis du concerné ou de son entourage.

Au plaisir de vous lire :)
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freeshost
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Re: Autisme et amitié fusionnel

Message par freeshost »

Pour ma part, le célibat me va bien. Je ne suis pas du genre à tout miser sur une seule carte. Je fais attention au consentement ou à l'absence de consentement d'autrui en général.

Mieux vaut vivre en solo qu'en mauvaise compagnie.

Mieux vaut vivre en solo que devenir mauvaise compagnie (nuire à autrui).
Pardon, humilité, humour, hasard, confiance, humanisme, partage, curiosité et diversité sont des gros piliers de la liberté et de la sérénité.

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Re: Autisme et amitié fusionnel

Message par user3571 »

Grokachu a écrit : mardi 13 juin 2023 à 1:29 Bonsoir,

Je suis fils unique et j'ai vécu une enfance assez solitaire. Je ne sortais quasiment jamais seul, toujours avec mes parents et les rares fois ou j'étais invité chez mon meilleur ami du primaire, mes parents qui me surprotégeaient ont toujours refusés de me laisser y aller.

D'ailleurs avec cet ami du primaire, j'avais une relation proche de celle que je vais aborder plus bas à savoir qu'on était inséparable, je me souviens d'ailleurs qu'au début lorsqu'il est arrivé dans la classe, les autres le qualifiait de bizarre. Moi au contraire, je l'ai tout de suite apprécié et les rares fois que ça a dérapé, c'était à cause des autres qui voulaient nous séparer. Au final, lors des dernières années du primaire, on était dans une sorte de bulle, on ne parlait quasiment jamais aux autres et lorsqu'il fallait se mettre en rang, on se tenait fermement par la main au point que la prof nous charriait en disant qu'on se comportait comme des mariés dans notre façon de se tenir la main.
Je me souviens qu'une fois, pour éviter qu'on jacasse ensemble, la prof nous avait mis dans deux équipes séparés pour jouer à la balle au prisonnier. Sa réaction a été direct, il a pris la direction du portail de l'école pour partir, furieux. Moi au contraire, je le regardais faire mais je n'étais pas indifférent à sa réaction car je ne voulais pas non plus être séparé de lui.
À la cour de récré, on passait notre temps libre à s'imaginer des histoires qui tournaient autour de nos passions communes, à savoir, les dessins animés. On a certainement dû discuter de choses plus sérieuses mais je n'arrive plus à m'en souvenir, je sais juste qu'avec cet ami, on avait une relation très fusionnel mais ça n'a jamais dépassé le stade de l'amitié.
Finalement, on a perdu le contact à la fin du primaire car comme je vous l'expliquais, on a toujours refusé que j'aille chez lui, et mes parents lui ont jamais proposé de venir non plus. Mes tentatives pour le retrouver sur internet ce sont révélés infructueuses. C'est dommage mais on y peut rien :cry:

Passons à la seconde amitié qui a eu lieu à l'âge adulte ou presque (je devais avoir dans les 17-19 ans).
Avec l'arrivé d'internet chez mes parents au début des années 2000, j'ai voulu combler ce vide que j'ai toujours eu, notamment du au fait que je sois fils unique et qu'hormis l'ami que j'évoque plus haut, je n'ai jamais réellement eu d'ami par la suite.

J'ai pendant longtemps été à la recherche d'un « frère de cœur » qui remplacerait celui que je n'ai jamais eu dans ma famille. J'ai fini par trouver cette personne avec qui on a eu une amitié très fusionnel, on pouvait passer des heures à discuter sur MSN, il m'appelait « frerot », on s'est même rencontré à 3 ou 4 reprises, j'étais heureux.

Seulement, j'ai l'impression que cette amitié a mal été perçu par son entourage. En effet, la personne en question était marié, moi célibataire. Si la première rencontre s'est bien passé avec lui et sa famille, lors de la seconde, il est venu seul me voir sur ses jours de congés. Ça s'est très bien passé là aussi, au point qu'on s'est même fait des câlins (j'insiste, c'était juste des câlins, il y a jamais rien eu de plus entre nous, on se tenait souvent par la main aussi mais là encore, ça rentrait dans le cadre d'une amitié que je jugeais normal pour ma part) mais lorsque mon tour est venu d'aller passer quelques jours chez lui, ça a été catastrophique.

En fait de mon côté j'avais l'impression que tout allait bien mais sa femme semblait jalouse de ce lien extrêmement puissant qu'on avait et les parents de ce « frère » craignait que leur fils change de bord. Je me souviens également que si le premier jour, tout c'était à peu près bien passé (repas normal, puis TV en famille sur le canapé), le second jour, j'ai commencé à devenir plus égoïste car je ne comprenais pas ce rituel d'aller voir la télévision après le repas et surtout, personne me disait de venir, du coup, je restais seul sur la table et ça a crée une sorte de malaise.
Le jour ou j'ai du rentrer chez moi, j'ai passé la matinée à pleurer, au point que lui aussi ça l'a fait pleurer et j'ai insisté pour qu'il monte derrière avec moi dans la voiture pour qu'il me tienne la main le trajet malgré qu'il avait des problèmes de nausées. Il a fini par monter à l'avant pour solutionner le problème mais j'ai compris après coup que j'ai eu une réaction égoïste, ne pensant qu'à mon bonheur et pas au sien.

Lorsque je suis rentré chez moi, les choses était plus comme avant, ce frère que j'avais trouvé était devenu plus distant et j'ai fini par lui dire qu'à cause de son comportement, je n'avais plus confiance. Sa réaction a été immédiate et il m'a bloqué de MSN. Malgré mes nombreux appels, il ne répondait plus et lorsqu'il a fini par me débloquer pour me parler, j'ai eu l'impression que c'était pour une sorte de vengeance car je sentais une sorte de moquerie dans sa façon d'écrire. Il m'avait également expliqué entretemps qu'il ne pouvait plus me parler car sa femme lui interdisait.

J'ai finalement tourné la page mais ça s'est fait au prix de beaucoup de tristesse, de journées à pleurer, à ne pas comprendre ce que j'avais fait de mal.

Aujourd'hui, je souhaiterai savoir si d'autres personnes asperger ont vécus des expériences similaires ?
En fait, je remarque que chez moi, il y a deux types de relations : celle ou je suis totalement désintéressé, au point ou je peux me barrer en cours de conversation et celles ou je suis timide au début mais lorsque je prends confiance, je devient dominant et sans m'en rendre compte, je me soucis pas de l'avis du concerné ou de son entourage.

Au plaisir de vous lire :)
Des amis et amies sont passés dans ma vie et tu sais même ceux et celles que tu pense connaître de longue date peuvent se révéler monstrueux. Je me souviens d'une dite copine de collège je me sentais pas à l'aise . Je n'aimais pas à mon égard son absence de considération pour mes besoins de recharge, de sollitude. Jamais et ce même des années, elle n'a pu entendre et concevoir que j'étais autiste et que certaines de ses attitudes m'avaient bloqué. Dont toucher les seins d'une amie commune et parait il que c'était pas méchant? Ah bon ? Une petite femme en devenir me giffle a 12 ans, c'était la preuve que ca allait pas...

Je n'ai jamais invité personne parce que dans mon collège j'ai appris la méfiance, la vigilance tout le temps, ne jamais considérer marques de sympathies ponctuelles comme marques d'intentions dignes pour amitié. J'étais hors normes, j'estimais une amitié on va dire hors réalité, impossible.

Et puis arrivé au lycée, eclatement de la bulle.

Je suis plus en affinité avec un certain type de femmes. Pour les hommes, c'est pas que je voudrait pas, juste que les affinités sont pas en phase.
Diagnostique autiste par le CRA en mars 2009

Si vi pacem, para bellum

Traduction Latine: Si tu veux la paix, prépare la guerre

Contrôleur des finances publiques 2ème classe en trésorerie municipale.

Adepte de la course à pied.
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mathieu frank
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Re: Autisme et amitié fusionnel

Message par mathieu frank »

comme toi fils unique et je suis exclusif et possessif

j ai un parcourt trés similaire au tien
dans l'enfance un ami unique ou on passait notre temps ensemble , dans l'adoléssence pareil
et aussi a partir de 18 ans une amitié tout aussi exclusive et la famille a aussi pensé a une homosexualité :lol:

je n'arrive pas a avoir plusieurs amis comme semble le faire la plupart des gens

avec le recul , je me dis que j'ai ete nocif car du coup j'isolais les gens , vu que je n'arrive a fonctionner a peu prés, qu"avec une personne a la fois

quand ils vont vers d'autres personnes , je le prenais pour une trahison , donc pas simple

comme toi c'est tout ou rien
tsa confirmé psychiatre libéral et comorbidités
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Re: Autisme et amitié fusionnel

Message par Grokachu »

Merci à tous pour vos réponses !

Je suis content de voir que malgré qu'on ai tous des expériences différentes, il y a chez certaines personnes des similarités par rapport à moi, notamment dans les écrits de Mathieu Frank :)

Une autre question que je me suis souvent posé et qui je pense entre dans le cadre de ce topic : les autistes s'attirent-ils entre eux ?
Je pose cette question car j'ai une sorte 7ème sens qui fait que sans m'en rendre compte, les personnes avec lesquelles j'arrive à nouer des amitiés plus ou moins durables sont autistes.

Ma meilleure amie que j'ai rencontrée sur internet est comme moi autiste asperger et bien qu'on ce soit jamais rencontrés, à l'époque ou elle était très active sur internet, c'était un truc de malade on pouvait parler au micro toute la journée non stop (genre 10h voir plus) sans se lasser, au point ou limite, ça m'embêtait de devoir aller manger :lol:
C'était pour ainsi dire la seule personne (en dehors de mon conjoint, qui d'ailleurs, était soupçonné d'être autiste mais qui finalement s'est révélé avoir un trouble de la personnalité dyssociale) avec qui je me suis jamais pris la tête, on pouvait discuter de tout et n'importe quoi sans tabou, sans jugement, même les sujets extrêmement sensible, on pouvait les aborder sans prendre de gants.
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piedsboueux
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Re: Autisme et amitié fusionnel

Message par piedsboueux »

Je fonctionnais sur ce mode là aussi enfant et ados, avec un besoin d'intimité, mais avec les "amis de coeur" ça a toujours systématiquement
- homophobie ambiante des parents ou de l'entourage: nous avons pas le droit de nous voir
- "la copine est jalouse".
- peur et refus des câlins.
Il n'y a pas de place pour l'amour d'amitié dans notre société, soit on baise, soit "on est baisé".
Diagnostiqué Aspi vers 37 ans (2007)
le reste c'est 100 intérêts