Malheureusement, non.MlleHulotte a écrit : ↑lundi 11 avril 2022 à 23:07Bonsoir Comte_Pseudonyme,Comte_Pseudonyme a écrit : ↑jeudi 31 mars 2022 à 16:11 Macron disait vouloir faire de la France une entreprise
Est-ce que tu aurais une source (déclaration orale ou écrite de Macron) de cette ambition de Macron (suffisamment robuste pour être citée dans un article) ?
Je n'ai pas de source solide, orale ou écrite, de la part de Macron, indiquant noir sur blanc que c'était son objectif. Mais ce n'est pas pour cela que cette expression est un procès d'intention ou quelle est erronée.
En fait, cette expression est née du fait qu'il parlait beaucoup (en 2016-2017) de la start-up, du monde l'entreprise, voulant même faire de la France une "start-up nation". Beaucoup de commentateurs ont remarqué que le président/candidat (alors juste candidat) voulait appliquer, encore plus, les logiques du privé au secteur publique. L'idée que Macron veut gouverner la France "comme une entreprise" à été forgée les pratiques du gouvernent et ses lois, mais aussi avec une interpénétration toujours plus importante entre les secteurs publics et privés, ainsi qu'une analyse de ce qui est lisible et compréhensible du discours présidentiel et gouvernemental.
Après une recherche au pif, quelques articles qui remontent pour parler de cette mentalité Macron :Spoiler : Il parle beaucoup, pour en même temps rien dire :
https://www.novethic.fr/actualite/socia ... 44595.html
https://www.boursorama.com/actualite-ec ... 1af280a41f
https://lentreprise.lexpress.fr/interna ... 18278.html
https://www.lamontagne.fr/paris-75000/a ... _14102251/
Un commentaire de Ségolène Royale :
https://lanouvelletribune.info/2018/10/ ... ntreprise/
Des articles du Monde Diplo sur la question : Macron contre l'État profond (la Bureaucratie quoi (voir l'indispensable (si tu aimes les trucs dans ce genre (ce qui est mon cas )) Théorie Générale de la Bureaucratie https://www.eyrolles.com/Loisirs/Livre/ ... 717830408/ de Nicolas GrandGuillaume) et Macron qui gouverne avec des logiques de secteur privée.
https://www.monde-diplomatique.fr/2019/05/MUSSO/59844
https://www.monde-diplomatique.fr/2020/ ... WELD/62194
Les livres (et travaux) de Marc Endeweld vont dans cette direction. Il remarque notamment qu'Emmanuel Macron à substitué les diplomates de métier au recours à des réseaux d'entreprises privées (je ne me souviens plus du timecode, désolé... mais j'ose espérer que ça se retrouve facilement dans la table des matières du livre ? https://www.blast-info.fr/articles/2022 ... UfUVLAG5Og). De manière général, Emmanuel Macron ne dit pas ouvertement qu'il veut couper les effectifs de fonctionnaire, et réduire l'État à un rôle de lanceurs d'appels d'offre. Pour être franc, je ne sais même pas si c'est son objectif.
Mais entre les bribes solides de ce qu'il dit et ce qu'il fait, il me semble probable et congruent que Macron soit en effet contre la logique même d'un État fort, sauf peut-être pour des aspects de maintiens de l'ordre (alors même qu'il délègue la diplomatie au privée, ce qui est pourtant là aussi un truc régalien par excellence... ). Tout le reste doit répondre à des impératifs de rentabilité efficacité. (Parce que, là aussi, il y a un gros problème de terme. C'est quoi une administration efficace ? Comment est-ce qu'on peut le mesurer ? Est-ce qu'un guichet d'impôt est efficace en fonction de nombre de personnes traitées à l'heure, ou en fonction de la qualité des explications données aux usagers, du temps pris pour les aider à comprendre le système, ce qui est beaucoup plus difficile à mesurer ? https://journals.openedition.org/lectures/40225 (Muller, Tyrannie des Métriques))
Une étape majeur de cette histoire, c'est le discours au congrès de Versailles, le 3 juillet 2017. S'il n'est pas littéralement dit que la France doit être gouvernée comme une entreprise avec la phrase "Je veux gouverner la France comme une entreprise." il est notamment évoqué des termes comme "République contractuelle". Si l'on ne doit pas éviter les errements de la surinterprétation (bon sang que j'aime cet article de Paul Veyne https://journals.openedition.org/enquete/623) il y a quand même pas mal de marqueurs. (Et pas mal de mots creux. Ce qui est amusant quand on lit qu'il dénonce les mots creux des autres, mais passons.) Passer du contrat social, implicite, à une contractualité, peut-être littérale, ce n'est pas rien. Mais comment savoir ce qu'il pensait vraiment ? Quelle était son intention ? Je ne sais pas. Et c'est bien ce qui m'emmerde au quotidien en tant qu'étudiant en histoire.
De manière général, je trouve qu'il y parle beaucoup de rupture, de recherche de l'efficacité, de la responsabilité aussi. (Je n'ai pas compté, parce la flemme, mais avec un ctrl F, je pense que ce sont des termes qui reviennent assez fréquemment, ou des termes appartenant à ce champ lexical.) C'est difficile de savoir exactement ce qu'il entend par là, mais on sait ce qui s'est passé dans la mandat : l'efficacité passe par la mise en concurrence des écoles, par exemple, la responsabilité tombe désormais sur l'agent. C'est par exemple l'idée du professeur "cadre" qui est "libre" d'innover, de choisir son établissement, etc. Dans le texte ici, c'est aussi quelque chose qui est évoqué pour les ministres et les directeurs d'administration et de cabinet. Chacun à sa feuille de route, ses moyens et le mot d'ordre est "démerde toi". C'est une vieille idée, qui, j'en suis désolée, mais à été forgée en Allemagne dans les années 1930. Voir www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/NR ... es-d-obeir
Bref, je suis désolé et j'ai un peu l'impression de noyer le poisson, parce que j'aimerai beaucoup avoir des éléments plus solides. Mais j'espère que ce que j'expose ici n'est pas délirant, que c'est au contraire cohérent, et correctement construit. Si tu as des éléments allant pour ou contre la thèse de "Macron veut gouverner la France comme une entreprise", je suis plus que prêt à les entendre. Et j'annonce d'avance qu'il y aura forcément des paradoxes et des incohérences, ne serait-ce que pour une raison simple : la France, n'est pas, une entreprise. On ne peut pas prendre une institution à but non lucratif, à savoir l'État, qui à des missions et tout un tas de choses qui, d'un point de vue économique, si l'on ne prend pas en compte les externalités, ne rapportent rien (exemple : quels sont les profits dégagés par les sapeurs pompiers ?) et réellement gérer ça comme une entreprise, en moins de cinq ans.
Cependant, on peut noter que la privatisation des secteurs de l'énergie et des transports (pour ces derniers, avec les cars dit "Macrons") correspond à ces logiques. D'aucuns diraient que c'est de l'anticipation, mais de la même manière que les communes passent des contrats avec des entreprises privées pour la gestion de l'eau et que les régies publiques se font de plus en plus rare, il n'est pas impossible qu'un jour, des gens disent que la mise en concurrence des secours à la personne (sapeurs pompiers par exemple) verraient une augmentation de la qualité s'ils étaient mis en concurrence, et que diverses entreprises devaient proposer leurs services au niveau départemental ou régional. Si vous trouvez ça absurde, je pointerai juste du doigt que c'est déjà le cas pour le transport TER, l'énergie, et beaucoup de services à la personne, ne serait-ce qu'avec les maisons de retraites par exemple, ou même les cliniques privées.
Pour conclure : la phrase "Macron veut diriger la France comme une entreprise" n'est peut-être pas à comprendre au sens littérale, mais elle veut dire, au moins à ce que j'en comprend, que c'est un ultra-libéral (dit plus couramment néo-libéral) économique (sur les libertés individuelles, franchement, j'en doute...) qui veut réduire drastiquement le rôle de l'État et déléguer les services publics, voir revoir de plus en plus de choses qui est considéré comme un service public (encore une fois, exemple avec l'eau, l'électricité, les transports, même le service postal et la distribution du matériel électoral, qui avait été externalisée aux élections municipales il me semble).
https://www.huffingtonpost.fr/2018/05/3 ... _23446822/
Bref, à nouveau, j'espère que ça répond de façon rigoureuse et honnête à ta question, qui est moins simple qu'elle n'y paraît. C'est un peu du "non, mais en fait oui, en première approximation."