les dialogues du reportage sur le packing de France 5.
http://www.dailymotion.com/video/x1qp34 ... nce-5_tech
Une soignante : Notre ambition en fait, c'est que ces enfants puissent vraiment se mettre à parler.
VOIX OFF : Stéphane, le psychomotricien sort des draps humides du réfrigérateur, ces draps, d'une température de 5 à 10 degrés vont servir au pack d'Omar (on entend Omar qui prononce quelques syllabes en i)
Le pack, une technique utilisée depuis les années 50 sur des adultes et depuis plus de 20 ans en pédopsychiatrie consiste à envelopper l'enfant dans des draps humides et froids, mais sans jamais le forcer. (on emballe Omar qui crie 'maman')
LA VOIX OFF CONTINUE : Sous l'effet du froid, le corps réagit, la peau se rétracte, les vaisseaux sanguins se dilatent, ce qui fait remonter la température du corps. Cette arrivée massive de chaleur détend l'enfant, apaise ses angoisses et lui permet de prendre progressivement conscience de son corps.
Stéphane : d'un seul coup, on est un petit peu inquiet. (il fait répéter hiwiliwilili à Omar qui s'exécute)
Stéphane devant la caméra : Le but du pack c'est de contenir là où ça fuit quelque part, il y a des enfants qui sont très agités ou dans une rage dans une des crises d'angoisse massive., On a envie de les prendre ... Tout un chacun a envie de les protéger , de les prendre, de les tenir dans ses bras, c'est ce qu'on fait avec le pack sauf que l'on provoque quelque chose de fort avec le froid, on les tient, on les saisit. Il faut les saisir, ils ont besoin de ça. On a vu très rapidement des enfants s'apaiser, même des enfants les plus malades. Et on a réellement vu l'enfant derrière l'autiste, avec ce beau regard, et des fois, des sourires aussi.
VOIX OFF : La technique du pack a été adoptée par La Pomme Bleue après plus d'un an de réflexion. Au départ, divisée sur son utilisation, l'équipe a finalement constaté qu'elle donnait de bons résultats. (Omar prononce quelques syllabes en i).
Une fois par semaine, les 14 thérapeutes du centre se réunissent pour échanger leurs réflexions sur les progrès ou les difficultés de chaque enfant.
(discussion dans la salle de réunion):
- On va passer au nouveau point de l'ordre du jour qui est Manon.
- On est un peu en difficulté avec elle au pack, et puis, je voulais qu'on en parle en général dans tous les ateliers. Comment ça se passe?
- Nous aussi, C'est vrai, nous à l'atelier contines, à l'atelier contes, nous sommes en difficulté parce qu'un jour, je ne sais plus si c'était à l'atelier contines ou contes, un autre enfant a éteint la lumière. On s'est retrouvé dans le noir, et là, vraiment, ça a été pour elle très difficile à gérer. Elle a pu dire qu'elle avait peur et depuis elle ne veut plus venir. Par contre, nous savons par les autres soignants quelle est derrière la porte, qu'elle écoute et que parfois elle participe la porte fermée. Et elle accepte maintenant de venir en décalage par rapport à l'horaire de l'atelier revisiter un peu la pièce de l'atelier contes et qu'on redise qu'on reparle de la lumière qui a été éteinte etc. Elle dit 'j'ai peur ' mais elle consent à y rester un peu.
- VOIX OFF : L'enjeu de ces réunions hebdomadaires est de recouper les informations recueillies par chaque soignant pour adapter la prise en charge à l'évolution de chaque enfant.
- Elle fait des personnages en pâte à modeler. Elle me demande de faire une petite fille et elle pack la petite fille, elle lui dit : 'c'est pour te soigner, il faut parler, c'est pour parler'.
- Stéphane : Elle fait une sorte de couverture?
- Ha non, c'est bien fermé, très serré mais délicatement. C'est vraiment bien fermé, très serré. Mais quand elle défait, on retrouve la petite fille à l'intérieur. Je trouve que c'est intéressant.
- Stéphane : Je trouve ça rassurant, parce que nous on, on galère
(De nouveau Stéphane est seul devant la caméra.)
Stéphane : Le travail de groupe ici, c'est très important parce que ça permet de se tenir , on n'est pas seul. Sinon, on est seul avec la pathologie de l'enfant, la résonance affective que ça nous fait , et ça, c'est très violent.
(la chambre du pack)
VOIX OFF : Stéphane, le psychomotricien et Catherine, l'infirmière psychiatrique préparent le pack de Manon. Pendant des mois, Manon est venue à ces séances avec plaisir, mais depuis quelques temps, elle exprime des peurs nouvelles.
- Stéphane à Catherine : On a mis chaud aujourd'hui, pour voir
- Stéphane : C'est presque prêt pour toi
- Manon : j'veux pas, j'ai peur
- Stéphane : si Tu veux pas, alors, hé bien alors, on écoutera. Je peux me rapprocher moi
(Stéphane s'assoie sur le banc)
- Stéphane : la petite Manon ( il lui prend les épaules, appuie sur son dos et sa poitrine)
-Stéphane : Et puis elle parle du pack tout le temps, alors qu'est-ce qu'on va faire ( Manon semble paralysée par la peur). On peut parler de la peur si tu veux, (la voix devient grave et lente), la peur... d'être dedans.... Peut être, c'est la peur d'avoir des émotions.
VOIX OFF: Même si Manon refuse d'entrer dans les draps, les soignants tiennent à respecter les horaires des séances. La régularité des ateliers est un pilier des soins. C'est un repère essentiel à la construction de l'enfant. Et puis, c'est aussi l'occasion de travailler sur ses angoisses et ses peurs.
- Stéphane : On peut être avec toi? (Stéphane essaye de prendre la main de Manon qui la retire)
- Manon : j'veux pas
- Stéphane : tu n'veux pas non plus
- Stéphane : Les draps, tu viens, viens toucher, viens juste, tu ne vas pas entrer dedans si tu veux. Viens toucher, viens. (Manon s'exécute et se penche sur le lit)
- Stéphane : Tu te rappelles quand tu étais dedans, enveloppée, tu t'rappelles, .
- Catherine : bien serrée
- Stéphane : bien serrée, ouais, avec un ? tout autour sur la peau. Tu t'rappelles.
(Manon se redresse et regarde dehors. La voix de Stéphane devient autoritaire.)
- Stéphane : Dehors, il y a les autres enfants, mais nous, on est dedans.
- Manon : on va s'arrêter
- Stéphane : oui, on va s'arrêter tout à l'heure, oui, tu veux qu'on s'arrête maintenant?
- (Cri de) Manon : oui
- Stéphane : tu veux qu'on s'en aille maintenant?
- Manon : balançoire
- Stéphane : Ha la balançoire, laisse la, la balançoire, c'est dehors.
- VOIX OFF : Manon ne supporte pas la frustration. Stéphane est là aussi pour lui apprendre en douceur à accepter les règles, les limites mais sans provoquer de nouvelles angoisses qui la ferait régresser, question de doigté.
- Manon : je m'en vais (Manon qui a été très calme jusqu'à présent commence à s'énerver)
- Stéphane : Ho, qu'elle n'est pas contente, holala, elle est pas contente, elle est pas contente. Allez, viens. (il la prend dans ses bras, elle se débat) Je vais te serrer fort, fort. On n'est pas contente, pas contente. Hoooonh, je la tiens.
VOIX OFF : Comme tous les enfants, Manon doit apprendre à tenir compte de la réalité et des contraintes du monde extérieur. Un effort particulièrement difficile pour cette petite fille qui sort peu à peu de son autisme et alterne les moments d'ouverture au monde et de repli sur elle-même.