Toutes discussions concernant l'autisme et le syndrome d'Asperger, leurs définitions, les méthodes de diagnostic, l'état de la recherche, les nouveautés, etc.
laura a écrit :... sans passer mon temps à dire : "olala, mais qu'est-ce qu'ils sont bizarres ces NTs, mais pourquoi diable ils font toutes ces choses qui ne me semblent avoir aucun sens". Et pourtant j'en bave vraiment, j'échoue la plupart du temps à comprendre... mais personne ne viendra jamais m'épauler pour ça. C'est la dure et triste vérité.
Pour illustrer ce que dit Laura, et à destination de Brigitte :
- ce soir en rentrant avec le tram, il y avait un groupe de filles ados et un garçon ado qui attendaient avec moi à l'arrêt. Ils ont passé leur temps à se chamailler comme des enfants de 4 ans alors qu'ils en avaient 14 ou 15. A celui/celle qui crierait le plus fort, à s'agiter comme s'ils étaient tout seul sur le quai, voire à faire les idiots sur la voie quand le tram est arrivé. En face, cela faisait rire des adultes. J'en ai conclu que c'est cela la normalité des NT.
- plus tard, j'ai accompagné Lucie chez le médecin pour sa piqure de désensibilisation aux allergies des pollens (elle déguste la mémère en ce moment). Dans la salle d'attente, un homme et une femme sont entrés en même temps et devaient se connaitre, ils ont commencé à papoter de c. sur la politique, les gens riches, etc ... comme s'ils étaient seuls dans la salle d'attente. Nous étions là avec ma Lulu depuis 1/4 d'heure car il y avait du retard. J'ai du supporter leurs jérémiades, et Lulu me jetait des regards lourds de conséquence. Moi je feignais de ne pas les voir en terminant un sudoku difficile trouvé sur une table de la salle d'attente. Parler pour ne rien dire, et passer son temps à faire du bruit, c'est la normalité. Ceux qui se taisent et baissent les yeux sont les anormaux !
Bernard (55 ans, aspie) papa de 3 enfants (dont 2 aspies)
Brigitte a écrit :Bernard, mais pourquoi est-ce si angoissant ?
Je pense qu'il y a 2 choses qui se passent.
La 1ère, c'est ce qu'explique Alexis avec la détection exacerbée de son environnement.
La 2nde, à mon avis, c'est que le cerveau des aspies ne s'arrête jamais. Si on introduit une question ouverte (tu veux manger quoi ?) ou bien si une incertitude apparait, le cerveau va essayer toutes les possibilités sur cette incertitude au lieu de tourner à vide et certaines possibilités vont conduire à des situations mal à l'aise donc à une anxiété et une angoisse. Puis la tension monte et comme le régulateur NT n'existe pas ici, il faut trouver une soupape artificielle. Tony dit que c'est l'agitation des mains, les colères subites, les tics, et même les TOCs qui ont pour but de faire redescendre la pression.
Quand Tony Attwood aura sorti son CAT-kit en octobre, je vais l'acheter pour avoir le thermomètre à anxiété pour Lucie et moi. Ainsi on pourra montrer aux NT qu'on est déjà à 9/10 quand ils lisent sur notre visage qu'on est à 2/10 (sic Tony). Cela pourra peut-être nous aider à limiter les situations de stress que nous infligent les NT (sans le vouloir bien sur).
Bernard (55 ans, aspie) papa de 3 enfants (dont 2 aspies)
Si tu permets un avis Bernard, ce que tu viens de raconter sur les ados dans le tram et les adultes dans la salle d'attente, je déteste ces attitudes au plus haut point, ça me donne envie de devenir ermite.
J'espère de tout coeur que ce n'est pas la normalité des NT's. Dans mon entourage, je t'assure que ça ne l'est pas.
Atypique sans être aspie. Maman de 2 jeunes filles dont une aspie.
Brigitte a écrit :
Laura, je me suis certainement mal exprimée : ma question avait pour seul but d'aider Florent à être moins angoissé, car être angoissé pour des choses qui n'en valent pas la peine gâche forcément la vie... Mon but n'était absolument ni de juger, ni de critiquer. Et je ne pense pas être " très forte pour comprendre les autres ", sinon, je ne poserai aucune question....
je suis bien d'accord sur le fait que ça ne vaut pas la peine d'être angoissé pour ça... simplement ça sonne creux dans ma tête quand je lis ça... parce que ça nous fait justement tant de peine toute cette angoisse. Et en plus quand on est habitué à vivre constamment à des niveaux élevés d'angoisse, entendre quelqu'un dire "que ça n'en vaut pas la peine" ça ne veut rien dire parce qu'on ne peut pas se le représenter justement... puisque qu'on connait si peu de répis... comment évaluer ce qui en vaut et ce qui n'en vaut pas la peine dans ces conditions ?
Comme dis plus haut j'étais énervée... encore désolée d'avoir secoué le cocotier sans doute un peu fort
"Sans la liberté de lier, il n’est point d’internet."
bernard a écrit :
Quand Tony Attwood aura sorti son CAT-kit en octobre, je vais l'acheter pour avoir le thermomètre à anxiété pour Lucie et moi. Ainsi on pourra montrer aux NT qu'on est déjà à 9/10 quand ils lisent sur notre visage qu'on est à 2/10 (sic Tony). Cela pourra peut-être nous aider à limiter les situations de stress que nous infligent les NT (sans le vouloir bien sur).
excellente idée ce thermomètre
je vais essayer de m'en procurer un moi aussi
"Sans la liberté de lier, il n’est point d’internet."
Moi aussi, je suis anxieux pour pas grand chose. Devoir passer un coup de téléphone me rend anxieux: que dire, comment commencer la conversation et que faire si je tombe sur un répondeur (sûrement le pire de tout)? Et lorsqu'on dit qu'on va me rappeler et qu'on ne le fait pas, je pense au pire: si c'est un employeur, je pense qu'il a dit qu'il allait me rappeler uniquement par politesse. Lorsqu'il s'agit d'une personne de confiance, je pense qui lui est arrivée quelque chose. En fait, le fait d'attendre une réponse (à un e-mail par exemple), l'incertitude, ça m'angoisse. Jusqu'à présent, j'ai su vaincre pas mal de difficultés, sauf l'anxiété. Je n'ai jamais trouvé de solution à ce problème. Et les NT qui m'entourent qui disent "ça ne sert à rien de stresser ainsi, reste zen". Pour eux, c'est peut-être facile, mais pas pour moi.
Concernant les jeunes qui chahutent, je trouve ça insupportable également. J'essaie de les éviter. Passer près d'eux me rend mal à l'aise.
Je crois bien ne jamais avoir laissé un message sur un répondeur.
S'agissant des groupes de jeunes qui chahutent ils me mettent également très mal à l'aise - ne serait-ce que parce que je n'ai jamais été comme eux ! - et j'essaye de m'en maintenir aussi éloigné que possible (par exemple aux arrêts de bus). Ils ont tendance à bouger dans tous les sens et si je me retrouve au milieu d'eux je ne sais pas trop comment me comporter...
Heureusement maintenant mon apparence extérieure doit faire suffisamment impression pour que je n'attire plus les moqueries, je crois que même si je suis très faible et tendu à l'intérieur ça ne se voit pas trop.
Je suis certaine que la "zenitude" n'est pas automatique chez les NT, j'en connais beaucoup qui stressent pour des raisons souvent dérisoires (moi entre autres).
Ne pensez-vous pas que ce soit plutôt une affaire de personnalité ?
Atypique sans être aspie. Maman de 2 jeunes filles dont une aspie.
Les problèmes d'angoisse ne sont pas une exclusivité Aspie, ça c'est certain et une partie de l'angoisse des Aspies est certainement induite par le vécu et propre à chacun...
... Mais je vois chez moi bien des choses qui font monter l'angoisse qui n'ont je pense rien de très communes.
(je dirais au passage attention à ne pas confondre angoisse avec peur... quand je parle d'angoisse pour moi c'est souvent un trop plein de petites choses comme les bruits, la lumière - qui me mettent en état d'insécurité et rendent tout plus exacerbé, me font déconnecter, ralentir et effectivement potentiellement paniquer. Le tout me semble largement lié aux sens et qui ne se limite pas à l'anxiété "sociale" à proprement parler... Je ne sais pas si l'idée est compréhensible En un certain sens je parle de quelque chose de quasi-permanent qui se module allant du tout à fait supportable à l'absolument insupportable).
En tous cas il me semble acquis qu'être Aspie prédispose à devenir sujet à l'anxiété.
Je suis tout à fait convaincue par ton explication : les "agressions" sensorielles contribuent certainement à générer un état de stress et d'angoisse quasi permanent chez les aspies...
Atypique sans être aspie. Maman de 2 jeunes filles dont une aspie.
Hier soir, j'étais dans ma chambre, au calme, bien calé sous ma couette, la lumière tamisée, tourné vers le mur, un livre intéressant entre les mains. Sans doute un de mes environnements préférés d'autant que rien dans la pièce ne risquait de venir énerver mon regard lors de mes fréquents tours d'horizon : tout était à sa place.
J'étais séparé de mes parents et de la télévision par un couloir, un étage et deux portes fermées. Le programme devait être drôle parce que ma mère s'est mise à rire fréquemment... Une porte que je connais bien a grincé... C'était suffisant pour me rendre tendu, nerveux, déconcentré, angoissé, irrité, je ne sais pas quel mot est le plus juste. Je crois même m'être mis à deviner le son de la télévision, comme si mon ouïe avait soudainement été plus sensible.
Rien de dramatique au fond, après avoir tenté de me concentrer j'ai refermé mon livre, éteint la lumière et me suis plongé sous ma couette en prenant bien soin de couvrir mes oreilles, c'est drôle cette vieille habitude qui m'est peut-être venue d'être dérangé par les petits bruits... Je ne vais pas demander aux autres d'arrêter de rire, d'arrêter de vivre. C'est juste un exemple... (facile à analyser parce qu'il n'y a pas beaucoup de paramètres qui entrent en compte contrairement à ce que je peux ressentir dans la rue par exemple)
Quand on a est angoissé par les araignées, par un proche entretien d'embauche, la peur d'arriver en retard ou de se faire agresser il y a au départ quelque chose de concret même si l'angoisse peut être disproportionnée et irrationnelle... Quelque part il y a une raison valable d'être angoissé et donc - paradoxalement - on peut se raisonner en relativisant le tout.
Mais que peut la raison quand on se retrouve dans cet état à cause d'un simple rire qui ne vous vise pas, en-dehors de tout contexte ? Il n'y a aucune raison un tant soit peu objective d'être angoissé et donc, à mon sens, aucun moyen de raisonner l'angoisse... Tout au plus lorsque l'on se sait potentiellement un peu plus sensible que la moyenne on peut se dire que c'est normal et cesser de se demander pourquoi ?
Dans ce cas je crois que le recours à la raison est au contraire néfaste. Petit, déjà perturbé dans mon lit par ces choses, je cherchais des raisons... Je me disais que si le son lointain des voix de mes proches me mettait dans un tel état c'était que je devais me sentir coupable, très coupable... Restait à savoir de quoi mais avec de l'imagination on trouve toujours des raisons de s'en vouloir...
nicolas était un multiangoissé dans sa petite enfance; puis vers les 14 ans "environ"... il s'est ouvert aux gens, au monde proche...
... disons que jusque là, il ne reconnaissait pas les gens, ne leur disait pas bonjour ni au revoir... il connaissait plus du dauphin à bosse et de l'histoire d'un pays lointain que du chat de la maison et de reconnaître un genêt...
là, beaucoup d'angoisses se sont envolées;
à la suite ont subsité le téléphone, s'exprimer pour demander un renseignement, ne pas réussir une démarche et que quelqu'un se moque de lui...
depuis lorsqu'il doit tenter quelque chose de nouveau, on la prépare, on suppose une solution de dépanage... et go!!!
çà prend du temps, mais petit à petit il devient plus zen.
"petits bouts par petits bouts... les bouts étant mis bout à bout."
"en chacun de nous sommeille un dragon... il faut y croire." (devise "bat-toi florent")
Tiens, une vieille angoisse à laquelle j'ai repensé hier soir c'est celle que mon père utilise son klaxon lorsqu'il venait me chercher quelque part - à vrai dire je ne sais pas s'il aimait jouer du klaxon ou s'il me voyait de loin avec l'air vraiment paumé et voulait attirer mon attention. Il faut dire que le fait que quelqu'un me cherche était déjà angoissant à cause de l'éventuel retard et puis malgré mes lunettes j'ai longtemps eu l'appréhension plus ou moins justifiée de ne pas tout de suite reconnaître la personne qui venait me chercher surtout si je ne savais avec certitude si ce serait mon père ou ma mère, quelle serait la voiture... (allez, j'ajoute la peur de me faire malmener devant mes parents)
Dans le même goût la peur persistante de me tromper de bus ou de le rater.