Du risque de ne plus se définir QUE comme autiste...

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Ciders
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Du risque de ne plus se définir QUE comme autiste...

Message par Ciders »

Bonsoir à toutes et tous,



Je me rends bien compte que la question que je me pose est tout à fait paradoxale sur un site consacré exclusivement au syndrome d'Asperger, mais j'ai tout simplement peur en lisant plusieurs personnes ici, que trop de gens en viennent à ne plus s'identifier que par leurs seuls symptômes, et finissent par oublier tout le reste, c'est à dire tout ce qui fait quand même d'eux des êtres humains au sens complet du terme.

Cela rejoint ce que je tentais de dire au sujet de ce brave Josef Schovanec lors de ma propre présentation sur ce site, en décembre dernier (pour ceux qui seraient intéressés de la relire). Loin de moi l'idée de remettre en question tous les efforts que ce cher Josef déploie inlassablement afin de sensibiliser ce que l'on nomme "le grand public" à ce trouble encore méconnu, ce n'est pas cela le problème même si l'on m'a vertement et aussitôt critiqué sur ce point. Dans le principe, ce qu'il fait est remarquable et sans doute est-il fondamentalement très bien intentionné.
Ce qui me gêne en revanche déjà bien plus, c'est de constater qu'à force de ne voir que la même personne encore encore et encore dès que l'on aborde cette question, de façon très perverse ce même "grand public" semble être en train de se servir de l'image de Josef pour se construire une nouvelle version stéréotypée et totalement caricaturale de ce que pourrait bien être un Autiste Asperger à ses yeux, c'est à dire qu'à une image d'Epinal on est très vraisemblablement en train d'en substituer une autre. Ce qui ne fait à mon humble avis en rien avancer un éventuel débat de fond.
Les symptômes de Josef sont très particuliers et dans l'ensemble assez peu représentatifs de quoi que ce soit d'autre que lui-même, or du fait de l'influence de ses livres, de ses conférences, de ses émissions et de ses nombreuses interventions un peu partout, certains milieux médiatiques voire médicaux cédant sans aucun doute à une forme de facilité, semblent actuellement tentés de se servir de lui afin de définir un nouveau genre de norme, un nouvel étalon de l'autisme, ce qui représente en réalité l'énième avatar en date de cette forme de pensée dangereuse consistant à ne plus se baser que sur quelques exemples types, c'est à dire sur cette forme de réduction du réel que l'on nomme précisément l'essentialisme. Ce type de récupération est bien entendu inévitable (les situationnistes m'en sont témoins), mais il ne s'agit pas d'en être dupe non plus.

"Comment, vous êtes diagnostiqué Asperger??? Mais vous ne ressemblez en rien à ces exemples que j'ai vu à la télé, et notamment ... blablabla" etc...
Combien de fois ai-je été confronté à ce genre de jugement, y compris par des médecins! :lol:

Car en effet, lorsqu'on se confronte à des Aspies en vrai, et bien il y a et il existe de tout. La réalité constatée est très différente. Certes, je veux bien admettre qu'il existe comme un vague bruit de fond commun -car sinon ce forum n'aurait pas lieu d'être :roll: - , mais les comparaisons généralement s'arrêtent là. On est en face de sujets humains tous irréductiblement différents, aux histoires et aux passifs tous différents. Et les symptômes exhibés par les adultes sont, en règle générale, bien moins caricaturaux et bien moins visibles... Ce qui ne va pas forcément dans le sens de ce que ces médias ou même ces émissions de vulgarisation recherchent, elles qui, au contraire, ne privilégieront que des cas soit hyper extrêmes, ou soit dotés d'une dose suffisante de narcissisme ou de tendance à l'exhibition les rendant capables de "bien passer" devant une caméra. Ou bien les deux.

Mais mettons de côté ces cas d'autistes devenus autant de nouvelles icônes médiatiques (parfois malgré eux, mais pas que).

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Plus spécifiquement, il me semble qu'un vrai danger réside dans ce processus d'identification à outrance avec un symptôme affectant aussi lourdement la psyché. Car si tous ces médias tendent inévitablement à essentialiser les autistes, à les réduire à une image ou à une définition facilement et clairement identifiable pour le grand public, ce phénomène existe paradoxalement au sein des autistes eux-mêmes. C'est à dire qu'en fin de compte ce que je vois autour de moi, c'est que quantité de personnes fragiles socialement prennent le risque de ne plus se définir en tant que personne que par le prisme exclusif de l'autisme.

Or nous sommes tous bien plus que cela. Je ne suis pas que cela, en ce qui me concerne, et ça n'est pas être dans du déni que de l'affirmer clairement.

L'essentialisation, c'est le fait de considérer que l'essence précède l'existence. Or j'aurais plutôt tendance à dire que nos existences (= nos personnalités en quelque sorte, et tout ce qui nous rend unique) précèdent cette myriade de symptômes qui, additionnés éventuellement entre eux, peuvent éventuellement conduire vers un diagnostic de type Asperger.

Même pour toutes celles et ceux que l'on a diagnostiqué un jour -et c'est mon cas-, il me semble que nous avons tous des caractères différents, et que nous faisons certainement preuve en la matière d'une quantité de nuances au moins équivalente à celle de la plupart des NT, et que nombre de nos propres traits de caractère échappent d'ailleurs à ce diagnostic ou ne sont pas forcément directement concernés par ce dernier (ou de façon très marginale).
Au delà même de nos "passions" qui forcément nous distinguent les uns des autres, j'ai connu des SA qui étaient de vraies brutes sans aucune pitié avec les autres, et qui s'assumaient comme tels -sans doute une forme de défense par rapport aux persécutions autrefois subies durant leur jeunesse-. Et j'ai connu, au contraire des précédents, des SA très attentifs, d'une gentillesse et d'une douceur incroyable.
J'ai connu des SA hyper-narcissiques, et j'ai connu des SA qui au contraire doutaient presque pathologiquement d'eux-mêmes et de leurs compétences.
J'ai connu des SA broyés par leur entourage et devenus méchants, j'ai connu des SA au contraire indifférents à tout, et j'ai également connu des SA toujours prompts à aider autrui.
Et politiquement, j'ai connu des SA défendant des positions d'extrême gauche, d'autres d'extrême droite, et bien entendu des SA centristes ou libéraux bon teints. Il n'y a aucune règle de ce côté.

Toute cette gigantesque palette comportementale existe, et aucun des exemples que je prends ne seraient d'ailleurs capables de résumer à eux seuls toutes ces nuances que justement l'on y retrouve, tout ce qui fait de nous avant tout des individus tous remarquables, certes affligé d'un trouble neurologique très particulier, mais qui ne saurait devenir notre unique limite, notre seule horizon lorsqu'il s'agit de nous décrire et de nous définir auprès d'autrui.
Et nos comportements sont certainement aussi variés que nos propres apparences le sont.

Or le risque de ne plus se définir que comme "autiste", de ne plus voir et discuter de façon privilégiée qu'avec des "autistes", de ne plus vivre de façon exclusive que dans cet "Autistan" -pour reprendre ce néologisme de Josef qui semble être également devenu dans son cas un genre de prophétie auto-réalisatrice-, oui, ce risque me semble tout à fait réel pour nombre de personnes que je vois ça et là aussi bien sur la toile qu'IRL. Et c'est sans doute pensé, favorisé et voulu, là encore, avec les meilleures intentions du monde, et en pensant certainement très bien faire afin de pallier aux problèmes engendrés par nombres nos interactions parfois difficiles avec certains NT, et ce en proposant cette alternative que représenterait un "entre-soi" autiste.
Ce risque existe d'autant plus que nos propres identités ont longtemps été malmenées, que nous nous sommes très longtemps posés la question de ce qui n'allait pas forcément chez nous ou a contrario de ce qui semblait nous rendre uniques et différents, et que ce diagnostic final peut dès lors être très facilement confondu avec ce qu'il n'est pourtant pas.
Plusieurs d'entre nous sont certainement très fragiles et très vulnérables de ce côté-là.

-----

Je m'arrête ici pour ce soir.

Mais est-ce que d'autres ont néanmoins compris où je voulais éventuellement en venir?

Je vous remercie de m'avoir lu, et n'hésitez pas à réagir si vous vous en sentez l'envie.
Modifié en dernier par Ciders le vendredi 1 juillet 2016 à 12:47, modifié 1 fois.
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Benoit
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Re: Du risque de ne plus se définir QUE comme autiste...

Message par Benoit »

Salut,

J'espère avoir compris ton propos,

L'autisme fait partie de moi, mais il est loin de me définir. Je pense que c'est le cas pour la majorité des gens sur le forum.

Pour aller peut être plus loin par rapport à ton propos, même accepter (et éventuellement revendiquer) cette part d'autisme suffit pour être catégorisé dans une très mauvaise case par le monde extérieur. Je blâme la mésinformation (et la malveillance aussi).

Ca conduit à une sorte de grand écart entre la nécessité d'accepter sa part d'autisme et l'obligation de tenter de la cacher, ce qui est très difficile à vivre en société, ou alors il faut être très souple.
Spoiler :  : 
Sur ce je reparts mettre mes pointes et faire des entrechats. :wink:
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Manichéenne
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Re: Du risque de ne plus se définir QUE comme autiste...

Message par Manichéenne »

C'est un sujet intéressant.
Le risque me semble important effectivement de s'identifier de trop aux TSA. C'est plutôt normal : à un moment il faut accepter le diagnostic, s'y reconnaitre, et ça se fait trop souvent après des années de rejet et d'isolement.
Du coup on passe de "je suis nul/bizarre/inadapté et seul" à "je fais partie d'un groupe de gens avec les mêmes particularités". Sauf qu'effectivement ces quelques particularités laissent place à une diversité très importante. Mais si on lit les quelques discours sur les TSA comme différence mais sans difficultés autres que celles imposées par un société trop normative, alors même qu'on lutte pour se reconnaitre un valeur après un diagnostic difficile et les rejets passés, il est facile de vouloir n'être plus qu'un membre de ce groupe à part.

Les médias sont certes un gros problème pour l'image des TSA, mais c'est loin d'être spécifique. C'est le cas pour tous les troubles psy, et bien d'autres choses encore.

Pour se rendre compte de la diversité, tout de même, je trouve que les rencontres Asperger sont très instructives. C'est parfois flagrant, les différences d'intérêt, de milieu, de croyances, de réflexions, etc.
Certes, ne fréquenter que des asperger peut faire penser à un repli, à une trop grande identification au syndrome d'Asperger. Mais n'est-ce pas contradictoire avec cette diversité, justement ?


Une réflexion relativement proche du sujet que je me faisais ces derniers jours : j'ai remarqué que plusieurs personnes, après leur diagnostic, en prenant conscience de leurs traits autistiques, les assument. Dans le sens où ils ne cherchent pas à les masquer ou à les minimiser, ils organisent leur vie en fonction voire même affirment haut et fort "tu ne peux pas me le reprocher, je suis autiste !".
J'ai eu plutôt la réaction inverse, qui n'est pas forcément plus juste, de profiter de ces nouvelles connaissances sur mes différences pour tenter de les masquer encore plus. C'est mauvais pour moi niveau acceptation et efforts, mais utile en société.
Je suppose que toute la difficulté est de trouver un équilibre entre ces comportements, ce qui rejoint le propos de Benoit.
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Allan
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Re: Du risque de ne plus se définir QUE comme autiste...

Message par Allan »

J'ai lu ce long texte qui a le mérite de relayer une pensée argumentée, mais...

Dès le début j'ai compris le propos, le titre révélait tout, et j'avoue avoir survoler la fin, non pas que ce n'était pas intéressant, mais parce que je ne suis pas en disposition pour absorber ce sujet, je m'explique.
Quand on vient d'être diagnostiqué, il est nécessaire de digérer, un an est un minimum, pendant cette période il s'opère une métamorphose où se définir comme autiste est difficilement contournable. Alors, comme je suis dans cette phase, il est très difficile pour moi de faire autrement, et j'enverrai promener toute personne osant se reproche en lui disant d'aller cueillir des fraises, c'est la saison...
Pour le moment, dans l'état actuel de ma métamorphose, après 50 ans d'avoir trainé ma vie comme un cul-de-jatte sur des moignons, j'ai accès aux béquilles. J'ai passé une vie entière à croire que j'allais réussir à être ce qu'on attendait de moi, et les souffrance et les échecs ont été retentissants, alors il me ferait beau voir maintenant, qu'on me demande de ne pas me définir que comme autiste, alors que j'ai failli en crever plusieurs fois au cours de ma vie de ne pas le savoir.
La société se vit "NT", comme elle se vit aussi "hétérosexuel", c'est l'écrasante majorité, sans jamais utiliser ces mots et sans jamais se définir comme tel, on ne reproche à personne de ne se définir que comme NT, aucun risque, cette réalité n'est jamais décrite, mais dès lors que les personnes concernées vont utiliser le mot "autisme" pour eux-même et que la majorité utilise pour désigner l'autre, des voix vont se lever pour dire qu'on s'enferme dans des étiquettes, en brandissant le mot "communautarisme", en renversant la vapeur, qui est celle des minorités écrasés par la majorité qui se croit sans étiquette et pourtant...

Je sais que le texte que j'ai lu était plus subtil que ça, mais je dis ce qui me passe par la tête en l'ayant lu, et pour tout dire j'ai du mal au regard de ce que je traverse actuellement.

A vrai dire, j'ai soupé de ce genre d'arguments, et je me définis comme je veux. J'ai passé ma vie à ne pas comprendre ce qui se passait chez les hétéros comme chez les homos, chez les hommes comme chez les femmes, chez les filles comme chez les garçons quand j'étais enfant, je me sentais bien une identité différente mais je n'arrivais à m'identifier nulle part, je me trompais toujours de différence, j'en avais une autre que je ne savais pas, bien plus prégnante. J'ai compris que l'autisme me définit bien davantage et je peux me reconnaître enfin parmi mes pairs pour la première fois de ma vie. Chez les autistes ont ne clive pas , je peux être comme je suis y compris dans mes comportements jugés comme non adaptés en société.

Alors, un peu de paix au milieu du chaos qu'a été ma vie en me définissant autiste n'est pas un gros défaut, mais un juste retour des choses puisque j'ai la chance d'être encore vivant et ne pas être mort de la mort que j'ai voulu me donner plusieurs fois, pour enfin connaitre la réponse de ce qui peut me définir et sauver la dernière partie de ma vie.

Rencontrer des autistes quatre fois dans l'année, venir sur le forum tous les jours depuis un an, ne plus me forcer à la sociabilité NT, est un risque que je prends et il me convient parfaitement pour le moment, et je laisse la culpabilisation à d'autres. Le risque, je l'ai connu à vouloir être NT, en me niant complètement et en devenant une autre personne quasi mutante.
Le risque, s'il y en a un, est de se vivre NT en ignorant son identité d'autiste, et si la survie réside à se définir que comme autiste, alors je vote pour, ca sera toujours moins pire que d'essayer vainement d'être NT comme je l'ai fait toute ma vie.

Pour ma part, ca ne me viendrait même pas à l'idée d'essayer développer ce sujet "du risque de ne plus se définir QUE comme autiste". Y-a-t-il vraiment un danger comme pour le tabac, les drogues ou l'alcool? Je vis ce sujet comme une provocation, même si je me doute que ce n'est pas l'intention.

Je sais que je suis excessif et sans nuance, mais voilà, c'est dit! (et je suis sur les nerfs en ce moment, ce qui n'arrange rien!)
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Re: Du risque de ne plus se définir QUE comme autiste...

Message par Ciders »

Merci pour ces premières réactions.

Juste histoire d'enfoncer le clou, je repensais tantôt à cet autre film désormais réputé "incontournable" qu'est devenu "le cerveau d'Hugo".

Or qu'y voit-on?

On y découvre un cas hyper extrême interprété par un acteur professionnel. Non pas qu'il n'y ait pas quelques points communs entre cette forme scénarisée et moi-même, mais dans l'entre deux il existe ce que l'on appelle la nuance et vraie vie (par opposition à une fiction), et il ne faut surtout pas confondre les deux.
Plus pernicieux cependant, il y a l'idée martelée durant ce docufiction que toute tentative de la part d'Hugo de se faire réellement comprendre par des NT ne peut que déboucher sur un échec, ou au mieux sur des succès très partiels. Et il ne trouve sa rédemption qu'au cours de l'un de ces fameux "café asperger", comme si seuls d'autres Aspergers étaient susceptibles de réellement comprendre, aimer ou accepter pleinement d'autres Aspergers. Le docufiction en profite d'ailleurs pour nous présenter un coupe d'Asperger "équilibré et heureux" -tant mieux pour eux-, comme s'il s'agissait, là encore, de la seule voie possible.

Je trouve pour ma part cela très pervers, d'autant que c'est, selon toutes vraisemblances, complètement faux. J'ai connu des SA tout à fait hermétiques, incapables de comprendre autrui et totalement recroquevillés dans le bulle... Mais cela peut également être le cas de certains NT!
La capacité à accepter autrui, à être tolérant ou pas, ne me semble pas dépendante du syndrome en soi, mais de l'expérience vécue. Ces qualités-là, si elles se manifesteront sans doute de manière différente selon les NT ou les SA, n'en sont pas moins des traits uniques, les résultantes d'histoires uniques toutes différentes.
Modifié en dernier par Ciders le vendredi 1 juillet 2016 à 13:43, modifié 2 fois.
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Re: Du risque de ne plus se définir QUE comme autiste...

Message par Benoit »

A mon avis, la question du "communautarisme" ne peut pas s'appliquer à l'autisme, parce que beaucoup d'autistes ne sentent pas en situation de communauté avec toutes les formes et possibilités d'autisme (même simplement de S.A.). Le rattachement avec l'idée de l'autisme est purement une idée (souvent personnelle, qui plus est, liée à une perception individuelle de ce qu'est l'autisme, il suffit de lire les critères de diag pour constater qu'il y a beaucoup de profils différents et autant de cheminements que d'individu).

Je pense que ça te viendra avec le cheminement, tu remarqueras qu'il y a beaucoup d'autistes que tu auras aussi peu envie de cotoyer que de neurotypiques. Qu'il y a encore plus de risques d'être mis dans une case quand on est autiste même Asperger (je ne vais pas parler de la question de l'Emploi même si ça me démange). Parce qu'être autiste signifie n'être qu'un autiste, la phrase fonctionne aussi dans ce sens là et quand on est qu'un autiste, on ne connaît personnellement qu'une forme d'autisme bien individuelle.

Cela suscite un énorme problème de représentation, quelque part tant que la pluralité autistique n'aura pas été acceptée dans les esprits, une personne publique "autiste" contribue également à ne rendre public qu'un des nombreux visages de l'autisme.
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Re: Du risque de ne plus se définir QUE comme autiste...

Message par bézèdach44 »

Je peux comprendre que cela t'enerve "le cerveau d'Hugo", de voir ce personnage "extreme", mais en même temps, et je pose la question à tout le monde : peut-on réèllement faire un film sur l'autisme qui n'irrite pas à un moment donné quelqu'un ? Je m'explique plus clairement : L'autisme est un spectre, on sait tous (ici) que chaque autiste est réellement différent, que meme deux Asperger peuvent etre totalement à l'opposé (l'un autonome, l'autre pas du tout, l'un HPI l'autre non etc.). Alors à partir de ce moment là, impossible de faire un film qui "convienne" à tout le monde, puisque chaque autiste est extrement différent dans ses symptome, son caractère, sa façon de vivre. Alors, on ne fait plus de film avec des personnages autistes ? Non, pas forcément, il faut juste admettre que le scénariste a voulu créer tel personnage, avec tel caractère, et voilà. Car il y a certainement des autistes asperger qui sont a peu près comme Hugo. Tout comme il y en a qui sont a peu près comme Rainman ou d'autres qui sont a peu près comme Nathan (Cf le monde de Nathan). La question de l'autisme est tellement délicate en même temps, difficile de faire des films, des livres ou même de l'humour avec. C'est beaucoup trop vaste. Enfin, je trouve. Après, il conviendrait peut etre de mettre une petites note explicative au début ou la fin du Cerveau d'Hugo, expliquant que chaque autiste est totalement différent car l'autisme est un spectre et que ce personnage n'est qu'une fiction, cela te conviendrais peut etre mieux ?
Manichéenne a écrit : Une réflexion relativement proche du sujet que je me faisais ces derniers jours : j'ai remarqué que plusieurs personnes, après leur diagnostic, en prenant conscience de leurs traits autistiques, les assument. Dans le sens où ils ne cherchent pas à les masquer ou à les minimiser, ils organisent leur vie en fonction voire même affirment haut et fort "tu ne peux pas me le reprocher, je suis autiste !".
Je réagis juste ça, car peut être que tu parles de moi (en autre) suite à mon post sur le sujet "etre ou ne pas etre sois" (je crois je me souviens plus trop :lol: ). J'apporte une nuance, concernant mon cas en tout cas : je disais qu'avant, je cachais mes comportements "autistes", et que maintenant que j'ai le diag, je les assume et que mes nouveau amis n'ont cas s'en accomoder. Avant, je minimisais et cachais, car je croyais vraiment que j'étais folle, que ce n'etait pas normal, mais aussi parce que, au collège, ça amenait beaucoup de moqueries, de harcelement. J'ai donc pris l'habitude de les cacher, aussi pour pouvoir éviter la question "mais pourquoi tu fais ça ?" a laquelle je n'avais aucune réponse, je le faisais, c'est tout. (mais les gens n'aime pas cette réponse, elle n'amène que d'autres question encore plus chiantes). Maintenant que je sais pourquoi, et que non seulement je suis capable de les expliquer d'un point de vu médical (= je suis autiste), mais aussi, en lisant des témoignages, sur des forums, ce genre de choses, j'ai pu apporter des explications pour moi même, des explication plus précises et rationnel (car au final, "je suis autiste" ne répond pas vraiment à la question "pourquoi te bouches les oreilles en te balançant ?"). A la question "pourquoi tu te bouches les oreilles en te balançant", je suis capable de répondre "Enfaite, je suis autiste, j'ai une hypersenbilité au niveau des sens, notamment de l'ouïe, et le bruit me stress beaucoup. Me boucher les oreilles atténue le bruit, et me balancer permet de m'aider à gerer mon stress". Non seulement les gens savent pourquoi tu fais ça, mais en plus - en tout cas jusqu'à maintenant - les gens ne se moquent pas, car ils savent que c'est dû à un reel "probleme" d'ordre médical. Oui car les gens ne comprenne pas trop qu'on puisse avoir des comportements différents si on a pas un "problemes" .....
Après je ne sais si c'est l'age, si c'est les gens avec qui j'ai l'habitude de passer du temps, qui sont différents des gens avec qui j'étais avant, mais voilà en tout cas aujourd'hui, quand je dis que je suis autiste, non seulement on se moque pas (ou pas devant moi en tout cas), mais en plus on m'aide à gérer les situation, du genre, "Là y'a trop de bruit/trop de monde, bah attend du coup on va se mettre à l'écart avec Bézèdach44 pour que ça se passe mieux pour elle". L'inclusion quoi, ce qui aiderait beaucoup les gens différents quels qu'ils soient, si tout le monde essayait de les inclure un peu plus dans la société :)
Donc voilà, ce n'est pas "tu ne peux pas me le reprocher, je suis autiste !" (pour ma part en tout cas), c'est juste que je peux apporter des réponses concrète qui découle d'études, de témoignages, de faits avérés, et que du coup j'ai tendance à moins me stresser pour cacher mes anormalités, et à être plus moi même. Ca veut pas dire que je fourni plus d'effort pour faire au mieux comme la société le veux hein :)
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Re: Du risque de ne plus se définir QUE comme autiste...

Message par Allan »

@Benoit, je suis bien d'accord avec ce que tu dis, cependant ce que tu décris peut, à mon avis s'appliquer à n'importe quelle communauté. La communauté n'existe que virtuellement, on peut s'adresser à une communauté suite à un attentat par exemple pour s'adresser à l'identité de ceux qui sont visés sans que tout un chacun ne se sente pas appartenir à une réelle communauté. C'est valable pour toute communauté pas seulement pour les autistes. Pour le moment les autistes en France ne sont pas représentés et n'existent pas, sauf par la tutelle des parents d'enfants... c'est dire. On en est pas à se sentir en effet appartenir à une communauté. Quant à dire qu'elle ne pourra pas s'appliquer un jour aux autistes à voir... je ne sais pas.
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Re: Du risque de ne plus se définir QUE comme autiste...

Message par Daredevil »

Je ne suis pas diagnostiqué mais je comprend bien allan.
Pour ma part je me sens plus bienveillant envers moi-même depuis que j'ai envisagé cette nouvelle pièce (TSA) expliquative de mon passé, de mon présent et de mes possibilités à venir.
Je suis moins exigeant envers moi-même pour ce qui concerne le relationnel et plus en paix lorsque des "bourdes " sont en lien avec mes difficultés.

En cela je fais comme Allan je me définis comme autiste.

Bien sûr sans diagnostic, "pas QUE" :-P mais beaucoup,... Mais je ne me réclame pas de l'identité "autiste" le spectre est trop large ? :?
:mrgreen:
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Re: Du risque de ne plus se définir QUE comme autiste...

Message par Allan »

Ciders a écrit :
Et la question, je le répète, ne me semble pas tant de mettre en place ces structures plus ou moins communautaristes, mais du danger qu'il y a à ne plus considérer sa propre identité que sous l'angle de ce qui n'est qu'un trouble neurologique parmi tant d'autres.
On passe du "risque" au "danger', rien que ça!
Faut-il rire après la virgule ou juste continuer à lire des élucubrations fantaisistes avec un air intellectuel inspiré devant autant de savant verbiage qui véhicule des propos et des mots de plus en plus vermoulus au fur et à mesure que tout cela s'écrit?

Vous parlez de votre chapelle psychanalysante ou juste moralisante?
Modifié en dernier par Allan le vendredi 1 juillet 2016 à 14:32, modifié 1 fois.
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Re: Du risque de ne plus se définir QUE comme autiste...

Message par Ciders »

Lorsque je lis de nombreux témoignages ici-même et ailleurs, beaucoup d'Aspies ont l'air de répéter que le diagnostic officiel a en effet changé leur vie. Certes... du moins, cela a forcément changé le regard que l'on posait sur soi, cela aide à comprendre.

Un des problèmes souvent évoqué, notamment chez les adultes diagnostiqués tardivement (c'est mon cas) était la mise en place de "faux-self", de stratégies de compensation parfois très élaborées afin de se sentir plus ou moins "intégré". Après le diagnostic, c'est souvent une digue qui lâche, et c'est l'aspect autistique le plus caricatural et le plus débridé qui finit parfois par reprendre du poil de la bête et se manifester dans l'autre sens... avec le risque, me semble t-il, de la constitution d'un deuxième "faux-self", en réaction au premier, comme si l'un était le symétrique de l'autre.

Être "soi-même" ne me semble pas être un acte devant se résumer à l'imitation de modèles, mais de trouver son propre équilibre. Je conçois bien que cet équilibre ne puisse non plus se résumer à la recherche d'un barycentre entre NT et SA (compte du tenu du déséquilibre démographique entre les deux, entre 99% et moins d'1% de l'autre), c'est bien plus compliqué.

Trouver son propre équilibre ne signifie pas trouver une explication qui au fond ne concerne que nos propres peurs et qui ne satisfasse que notre propre définition de l'identité, c'est à dire aller dans un faux dialogue n'allant en réalité que de soi vers soi.
Trouver son équilibre, c'est savoir être là, entre soi et les autres.
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Re: Du risque de ne plus se définir QUE comme autiste...

Message par Ciders »

Allan a écrit :
Ciders a écrit :
Et la question, je le répète, ne me semble pas tant de mettre en place ces structures plus ou moins communautaristes, mais du danger qu'il y a à ne plus considérer sa propre identité que sous l'angle de ce qui n'est qu'un trouble neurologique parmi tant d'autres.
On passe du "risque" au "danger', rien que ça!
Faut-il rire après la virgule ou juste continuer à lire des élucubrations fantaisistes avec un air intellectuel inspiré devant autant de savant verbiage qui véhicule des propos et des mots de plus en plus vermoulue au fur et à mesure que tout cela s'écrit?

Vous parlez de votre chapelle psychanalysante ou juste moralisante?
Voilà la démonstration patente qu'être tous les deux autistes vous et moi ne saurait constituer un critère suffisant pour se comprendre ou sympathiser.

Je n'ai jamais parlé de psychanalyse, et je suis d'ailleurs extrêmement critique avec cette théorie. Là, c'est vous qui projetez.
Adulte diagnostiqué tardivement Asperger HPI (2015)
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freeshost
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Re: Du risque de ne plus se définir QUE comme autiste...

Message par freeshost »

Il est vrai que, dans l'absolu, chaque être a sa propre combinaison de caractéristique.

Exemple :

- freeshost est Asperger,
- freeshost est un homme,
- freeshost aime le célibat,
- freeshost aime la mathématique,
- freeshost n'aime pas le café,
- freeshost a les yeux bruns,
- freeshost a pour langue maternelle la langue française, et aime apprendre d'autres langues,
- freeshost vit en Suisse,
- freeshost est né en Inde,
- freeshost aime jouer aux échecs comme au poker,
- freeshost mesure 170 cm environ,
- freeshost participe au forum Asperansa,
- freeshost est plutôt athée et/ou agnostique,
- freeshost n'est pour l'instant jamais allé en Océanie,
- ...

Vous ne trouverez personne d'autre qui a toutes ces mêmes caractéristiques. :mrgreen:

Après, d'un contexte à l'autre, il est utile voire nécessaire de mettre l'accent sur certaines caractéristiques, notamment celles moins visibles, moins connues ou moins acceptées.
Pardon, humilité, humour, hasard, confiance, humanisme, partage, curiosité et diversité sont des gros piliers de la liberté et de la sérénité.

Diagnostiqué autiste en l'été 2014 :)
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rainbow
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Re: Du risque de ne plus se définir QUE comme autiste...

Message par rainbow »

* mode casse-bonbon ON*
freeshost a écrit :Exemple :

- freeshost est Asperger, .
Tiens pourquoi t'as commencé par ça ? :mrgreen:

* mode casse-bonbon OFF*
Enfin diagnostiquée Syndrome d'Asperger à 36 ans ! et TDA(H) à 38 ans !

http://hors-competition.over-blog.com
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freeshost
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Re: Du risque de ne plus se définir QUE comme autiste...

Message par freeshost »

Parce qu'on est sur un forum qui parle de cela. :mrgreen:

Et puis, c'est un handicap invisible peu connu. Et il faut le faire connaître. :P
Pardon, humilité, humour, hasard, confiance, humanisme, partage, curiosité et diversité sont des gros piliers de la liberté et de la sérénité.

Diagnostiqué autiste en l'été 2014 :)