Mes collègues me donnent l'impression d'être un monstre...

Je suis autiste ou Asperger, j'aimerais partager mon expérience. Je ne suis ni autiste ni Asperger, mais j'aimerais comprendre comment ils fonctionnent en le leur demandant.
Aliehta
Nouveau
Messages : 4
Enregistré le : mercredi 11 mars 2020 à 18:21

Mes collègues me donnent l'impression d'être un monstre...

Message par Aliehta »

Bonsoir ici,

Cela fait quelques années que je me suis inscrite sur ce forum et pourtant je n'y ai jamais rien posté...

C'est un peu comme un cheveux sur la soupe que je viens chercher écoute et conseils au sujet du travail.
C'est un problème récurrent chez moi : gardé un travail, ou plutôt me sentir bien avec mes collègues au travail.

Je suis toujours dans l'enseignement, enfin la formation pour adulte puisque cela fait longtemps que j'ai abandonné l'idée de pouvoir un jour intégrer l'EN.
J'ai fais deux ans dans un CFA où j'enseignais à des BTS en alternance, aucun soucis avec les apprentis mais voilà je n'ai pas été renouvelée faute, soit disant, de poste disponible. C'est ma remplaçante qui a pris mon poste parce qu'elle était déjà en CDI et moi je ne l'étais pas. Pas de bol, j'étais enceinte et je l'ai très mal vécu... Mes collègues ont trouvé ça injuste, mais l'administration n'a rien trouvé de choquant.
Bref, là-bas ça se passait bien. J'avais réussi mon intégration, j'avais des collègues avec qui me m'entendais bien, mais rien ne dure.

Après un accouchement, six mois passé à la maison à m'occuper de ma fille, j'ai réussi à trouvé un nouvel emploi dans la formation. C'est toujours un CFA mais celui-ci ne dépend pas de l'EN. Ouf, comme ça ils n'ont pas été raconté n'importe quoi à mon sujet comme ils l'avaient fait pour le précédent poste.
Je suis arrivée au plein milieu d'année, avec énormément de classe à charges dont presque la moitié allaient passer sous peu leur examen ponctuel ou en CCF. Je suis venue en remplacement d'un homme qu'on m'a dépeint comme un gros macho, qui avait harcelé une collègue féminine et se comportait mal avec les autres, qui ne respectait pas sa hiérarchie et les élèves, qui faisaient ses cours à l'arrache et était incapable de tenir un minimum d'ordre dans sa classe.
Les personnes qui m'ont recrutée, le directeur de l'établissement et la responsable pédagogique, m'ont dit avoir "flashé" sur moi lors de l'entretien : je leur ai donné l'impression d'avoir la vocation. (Il est indéniable que j'aime enseigné, que cela m’épanouit). Ils m'ont engagé en connaissance de cause, je n'aime pas caché mon TSA, à quoi bon ?.
Des adaptations ont été mises en place : j'ai un bureau pour moi toute seule, avec la possibilité d'avoir un collègue. Il y a peu de passage dans mon couloir, on m'a donné deux trois personnes référentes à qui poser des questions.
Vous vous demandez sans doute, quel est le problème ?
Eh bien, au début, il n'y en avait pas. Hormis un manager (oui, la structure où j'enseigne à la particularité que l'on doit resté sur site 5/7j durant les heures d'ouverture du CFA ; un travail de journée en 39h quoi) qui est au abonné absent, qui me promet des points hebdomadaires dont je n'ai pas vu la couleur... Mais ce Monsieur est un cas à part.
Donc, pas de problème au début. J'ai tenu à prévenir le manager de la section où je dispensais 80% de mes cours de mes antécédents psychologique et demandé à faire une réunion des collègues de mon bâtiment afin de leur annoncé que j'avais un TSA. J'ai fais simple, pas la peine de rentrer dans les détails je me suis dis que s'ils voulaient mieux comprendre, ils iraient se renseigner. J'ai juste annoncé que j'avais du mal avec les règles sociales et que tout ce qui était implicite, blague/humour, second degré, j'avais du mal. On m'a dit "Pas de soucis, tu verras, on est sympa !"
Que de déception depuis...
Les blagues j'y ai le droit régulièrement et je me sens vraiment idiote de ne jamais les comprendre.
Mes impaires sociaux sont critiqués dans mon dos. On me dit que c'est très surprenant de s'inquiéter qu'un apprenti, qui n'est pas le mien, ce soit coupé un doigt au point d'aller aux urgences pour se le faire recoudre. Qu'avec ma maladie (oui, oui, je suis malade aux dernières nouvelles !), il est difficile d'interagir avec moi, que je pose trop de questions au point d'être oppressante. Qu'en voulant être serviable, on te dit clairement qu'il faut que tu ne te mêles pas de tes affaires et qu'en respectant la consigne, tu n'es plus serviable !
On me dit que lorsque j'attends sagement dans le couloir que mon manager ait fini de parler avec la personne dans son bureau, je fais le pied de grue et que c'est oppressant. Mes collègues eux ne font pas le pied de grue vu qu'il frappe et entre sans attendre quoi que ce soit, voir ne frappe pas et se mette à taper la discussion avec mon manager alors que je suis là...
On me dit que parce que je ne suis pas à 100% tous les conseils et avis qu'on me donne (que j'ai été demandé par soucis de bien faire), je suis très oppressante et que de toute façon il ne sert à rien de discuter avec moi puisque je ne comprends rien. Dans quel monde doit-on appliquer un conseil qui va à l'encontre de qui l'on est et de ce en quoi l'on croit ?

Bref, je me sens mal au boulot. Le peu d’interaction que j'ai pu avoir avec mes collègues ont été vécu comme une véritable oppression. Je n'ai pas le droit d'avoir des sentiments, d'être susceptible sur certains points mais on peut se permettre de me dire que ma présence est insignifiante, que je suis bête.
Que faire ? Cela fait des jours que tout cela tourne dans ma tête, j'ai essayé d'en parler avec mon manager, il m'a dit d'être mon susceptible. J'ai essayé d'en parlé avec la responsable pédagogique, elle m'a dit qu'il fallait que je comprenne les autres et que je fasse des efforts.
Mais des efforts, je n'ai fais que ça. Aller en pause et participer aux conversations. Dire bonjour à tout le monde, prendre en considération les avis très divergents de mes collègues, ne pas rentrer dans les conflits internes, aller au restaurant avec eux, apprendre les prénoms pour ne pas faire d'impaire, m'intéresser à leur matières, à leur vie. Et cela ne suffit pas ? Que faut-il faire d'autres ?
En quoi poser des questions relatives au travail est-il oppressant ? Je précise que je passais pas mes journées à aller dans le bureau de mes collègues. En quoi avoir été peinée parce qu'un midi, tous mes collègues soient partis hyper vite au restaurant alors que depuis mon arrivée j'y vais toutes les semaines avec eux est injustifié ? N'ai-je pas le droit d'avoir des sentiments ? De les dire ?
Je ne comprends plus rien, je ne sais plus quoi faire et j'en viens à penser que je suis vraiment un monstre pour mettre à ce point mal à l'aise mes collègues (le mot "oppressant" pour moi est très lourd de sens, je ne sais pas vous ?). Suis-je à ce point inadaptée à société ?

Je m'en remets à vos retours. Soyez sincères, il se peut que ce soit moi qui soit dans l'erreur.
Merci d'avance,
Bien à vous,
Alietha
Diagnostic SA féminin posé en Avril 2019, QI hétérogène
Avatar du membre
lulamae
Intarissable
Messages : 5692
Enregistré le : dimanche 25 février 2018 à 15:10

Re: Mes collègues me donnent l'impression d'être un monstre...

Message par lulamae »

Aliehta a écrit : dimanche 16 juillet 2023 à 22:20 Des adaptations ont été mises en place : j'ai un bureau pour moi toute seule, avec la possibilité d'avoir un collègue. Il y a peu de passage dans mon couloir, on m'a donné deux trois personnes référentes à qui poser des questions.
Vous vous demandez sans doute, quel est le problème ?
(...)
Donc, pas de problème au début. J'ai tenu à prévenir le manager de la section où je dispensais 80% de mes cours de mes antécédents psychologique et demandé à faire une réunion des collègues de mon bâtiment afin de leur annoncé que j'avais un TSA. J'ai fais simple, pas la peine de rentrer dans les détails je me suis dis que s'ils voulaient mieux comprendre, ils iraient se renseigner. J'ai juste annoncé que j'avais du mal avec les règles sociales et que tout ce qui était implicite, blague/humour, second degré, j'avais du mal. On m'a dit "Pas de soucis, tu verras, on est sympa !"
Que de déception depuis...
Les blagues j'y ai le droit régulièrement et je me sens vraiment idiote de ne jamais les comprendre.
Mes impaires sociaux sont critiqués dans mon dos. On me dit que c'est très surprenant de s'inquiéter qu'un apprenti, qui n'est pas le mien, ce soit coupé un doigt au point d'aller aux urgences pour se le faire recoudre. Qu'avec ma maladie (oui, oui, je suis malade aux dernières nouvelles !), il est difficile d'interagir avec moi, que je pose trop de questions au point d'être oppressante. Qu'en voulant être serviable, on te dit clairement qu'il faut que tu ne te mêles pas de tes affaires et qu'en respectant la consigne, tu n'es plus serviable !
On me dit que lorsque j'attends sagement dans le couloir que mon manager ait fini de parler avec la personne dans son bureau, je fais le pied de grue et que c'est oppressant. Mes collègues eux ne font pas le pied de grue vu qu'il frappe et entre sans attendre quoi que ce soit, voir ne frappe pas et se mette à taper la discussion avec mon manager alors que je suis là...
On me dit que parce que je ne suis pas à 100% tous les conseils et avis qu'on me donne (que j'ai été demandé par soucis de bien faire), je suis très oppressante et que de toute façon il ne sert à rien de discuter avec moi puisque je ne comprends rien. Dans quel monde doit-on appliquer un conseil qui va à l'encontre de qui l'on est et de ce en quoi l'on croit ?

Bref, je me sens mal au boulot. Le peu d’interaction que j'ai pu avoir avec mes collègues ont été vécu comme une véritable oppression. Je n'ai pas le droit d'avoir des sentiments, d'être susceptible sur certains points mais on peut se permettre de me dire que ma présence est insignifiante, que je suis bête.
Que faire ? Cela fait des jours que tout cela tourne dans ma tête, j'ai essayé d'en parler avec mon manager, il m'a dit d'être mon susceptible. J'ai essayé d'en parlé avec la responsable pédagogique, elle m'a dit qu'il fallait que je comprenne les autres et que je fasse des efforts.
(...)
Je ne comprends plus rien, je ne sais plus quoi faire et j'en viens à penser que je suis vraiment un monstre pour mettre à ce point mal à l'aise mes collègues (le mot "oppressant" pour moi est très lourd de sens, je ne sais pas vous ?). Suis-je à ce point inadaptée à société ?
Je cite tout cela, car je me retrouve beaucoup dans ce que j'ai vécu cette année, également dans l'Éducation Nationale, mais plus comme enseignante (je suis en reclassement). Je n'ai malheureusement pas de solution, car j'ai dû serrer les dents et supporter ça un an, sachant que je n'y resterai pas au-delà de juillet. J'ai eu un arrêt maladie de 10 jours, le temps de prendre un traitement anti-dépresseur et qu'il commence à faire effet.

J'en ai quand même tiré quelques enseignements, que je te partage :
- Si tu peux l'éviter, ne fais pas l'information sur le TSA toi-même. Ils ont besoin d'une institution qui soit derrière toi et surveille ce qu'ils font par rapport à ton handicap (et non maladie). Tu n'es pas dans l''ÉN, mais il y a peut-être des référents handicaps dans votre structure, sinon CAP Emploi peut t'aider. Le réseau PAS de la MGEN peut te recevoir aussi peut-être (psychologue du travail).
- Avoir un handicap dans un environnement peu vertueux est un rapport de force : tu ne peux donc pas te lancer seule. Est-ce que tu as une RQTH aussi ? L'idéal serait qu'il y ait toujours un tiers avec toi, qui arbitre et soit témoin de ce qui est dit, pour qu'on ne retourne pas contre toi tes difficultés. Les phrases comme "tu devrais comprendre les autres", "fais un effort", "sois plus sociable" n'ont pas lieu d'être. Ne laisse pas dire non plus que c'est une maladie.
- Parler du TSA c'est juste, mais évite peut-être d'être trop franche sur tout ce qui est dépression ou autre détresse psychologique. Tiens-t'en aux faits, non aux ressentis. L'anxiété, le trouble anxieux ça passe encore.

Je te dis ça et je n'y suis pas arrivée, enfin je veux dire que le chef d'établissement et l'adjointe me parlaient mal, m'attribuaient des erreurs qui n'étaient pas les miennes et se sont énervés plusieurs fois parce que j'ai résolu des problèmes de parents ou d'élèves en "creusant" (par exemple, retrouvé un dossier urgent pour une spécialité rare qui "dormait" sur le bureau de la CPE). Je crois qu'à la longue, je leur faisais un peu peur et ils se sont vengés mesquinement. Quand j'ai compris que c'était de la peur (je ne suis pas douée pour décoder les sentiments), j'ai repris de la force. Ça ne s'est pas arrangé, mais j'ai fini avec dignité, sans me laisser écraser.

- Tu n'as pas à jouer leur jeu à fond. Sociabiliser dans le bruit (pause, repas) te fatigue : ne t'oblige pas à le faire, car ils ne t'en sauront pas gré lorsqu'ils voudront te reprocher quelque chose. Alors ça ne t'aidera pas, mais au moins, tu te fatigueras moins. Tu n'es pas obligée d'être exploitée pour être acceptée. Essaie de faire le point sur ce que tu peux/veux accepter à long terme, pour tenir le coup. Accepte peut-être temporairement d'endosser ce rôle de "méchante", "d'oppressante" : tu fais du bon travail et tu es consciencieuse, ils le savent. Tu n'es pas un monstre, ce sont eux qui font de la projection : comme ils te maltraitent, ou sont complices de cette maltraitance, pour ne pas se voir en face ils t'attribuent leurs propres défauts. Si tu leur renvoie de l'indifférence,ou une simple humanité ("oui, ça me touche, mais je ne le prends pas comme vrai"), tu pourrais être surprise par le fait que les choses n'empirent pas. Ou alors, tu peux argumenter : "vous dites que..., mais vous savez que j'ai des difficultés sociales, qu'est-ce que vous proposez ?" Ainsi tu les forces, eux, à se montrer constructifs.

- Autre chose encore : si tu n'as pas de témoin, ça peut arriver : amène-les à exprimer leurs reproches par écrit, ça fait des preuves. Demande-leur par mail ce qu'ils te reprochent exactement, ou reprends une conversation par mail et imprime les mails, ou demande-leur d'accuser réception. Tout ce qui fait juridique, ça calme.

J'espère t'avoir un peu aidée. Trouve-toi des personnes plus gentilles et passe du temps avec elles. Cette année, je m'entendais bien avec pas mal de profs et avant de partir, je leur ai envoyé un mail de remerciements, leurs retours m'ont fait du bien. J'ai parlé anglais dans les couloirs avec la jeune femme de ménage nigériane, elle m'a parlé du Bac de français de sa fille ; je suis souvent allée voir les deux agentes d'accueil, elles étaient cool et me comprenaient, je blaguais facilement avec elles. Ce n'est pas grand-chose, mais ça m'a aidée à passer l'année. Une chose qui peut paraître bête aussi : regarde autour de toi si quelqu'un est dans la même situation de rejet, parfois on peut s'entraider et ça fait du bien aussi. Ménage tes forces, essaie de mettre du bon envers les personnes qui le méritent, et essaie d'être objective envers toi-même, et non de prendre pour argent comptant les reproches qu'on te fait. Trouve des antidotes : on me reproche ça, mais pourtant, j'ai un exemple contraire. Ce n'est pas pour te sentir parfaite et sans faute, mais pour relativiser le négatif, et ne pas t'accabler toi-même.

J'espère t'avoir un peu aidée. :)
Diagnostic d'autisme juillet 2019.
Avatar du membre
lulamae
Intarissable
Messages : 5692
Enregistré le : dimanche 25 février 2018 à 15:10

Re: Mes collègues me donnent l'impression d'être un monstre...

Message par lulamae »

Aliehta a écrit : dimanche 16 juillet 2023 à 22:20 Des adaptations ont été mises en place : j'ai un bureau pour moi toute seule, avec la possibilité d'avoir un collègue. Il y a peu de passage dans mon couloir, on m'a donné deux trois personnes référentes à qui poser des questions.
Vous vous demandez sans doute, quel est le problème ?
(...)
Donc, pas de problème au début. J'ai tenu à prévenir le manager de la section où je dispensais 80% de mes cours de mes antécédents psychologique et demandé à faire une réunion des collègues de mon bâtiment afin de leur annoncé que j'avais un TSA. J'ai fais simple, pas la peine de rentrer dans les détails je me suis dis que s'ils voulaient mieux comprendre, ils iraient se renseigner. J'ai juste annoncé que j'avais du mal avec les règles sociales et que tout ce qui était implicite, blague/humour, second degré, j'avais du mal. On m'a dit "Pas de soucis, tu verras, on est sympa !"
Que de déception depuis...
Les blagues j'y ai le droit régulièrement et je me sens vraiment idiote de ne jamais les comprendre.
Mes impaires sociaux sont critiqués dans mon dos. On me dit que c'est très surprenant de s'inquiéter qu'un apprenti, qui n'est pas le mien, ce soit coupé un doigt au point d'aller aux urgences pour se le faire recoudre. Qu'avec ma maladie (oui, oui, je suis malade aux dernières nouvelles !), il est difficile d'interagir avec moi, que je pose trop de questions au point d'être oppressante. Qu'en voulant être serviable, on te dit clairement qu'il faut que tu ne te mêles pas de tes affaires et qu'en respectant la consigne, tu n'es plus serviable !
On me dit que lorsque j'attends sagement dans le couloir que mon manager ait fini de parler avec la personne dans son bureau, je fais le pied de grue et que c'est oppressant. Mes collègues eux ne font pas le pied de grue vu qu'il frappe et entre sans attendre quoi que ce soit, voir ne frappe pas et se mette à taper la discussion avec mon manager alors que je suis là...
On me dit que parce que je ne suis pas à 100% tous les conseils et avis qu'on me donne (que j'ai été demandé par soucis de bien faire), je suis très oppressante et que de toute façon il ne sert à rien de discuter avec moi puisque je ne comprends rien. Dans quel monde doit-on appliquer un conseil qui va à l'encontre de qui l'on est et de ce en quoi l'on croit ?

Bref, je me sens mal au boulot. Le peu d’interaction que j'ai pu avoir avec mes collègues ont été vécu comme une véritable oppression. Je n'ai pas le droit d'avoir des sentiments, d'être susceptible sur certains points mais on peut se permettre de me dire que ma présence est insignifiante, que je suis bête.
Que faire ? Cela fait des jours que tout cela tourne dans ma tête, j'ai essayé d'en parler avec mon manager, il m'a dit d'être mon susceptible. J'ai essayé d'en parlé avec la responsable pédagogique, elle m'a dit qu'il fallait que je comprenne les autres et que je fasse des efforts.
(...)
Je ne comprends plus rien, je ne sais plus quoi faire et j'en viens à penser que je suis vraiment un monstre pour mettre à ce point mal à l'aise mes collègues (le mot "oppressant" pour moi est très lourd de sens, je ne sais pas vous ?). Suis-je à ce point inadaptée à société ?
Je cite tout cela, car je me retrouve beaucoup dans ce que j'ai vécu cette année, également dans l'Éducation Nationale, mais plus comme enseignante (je suis en reclassement). Je n'ai malheureusement pas de solution, car j'ai dû serrer les dents et supporter ça un an, sachant que je n'y resterais pas au-delà de juillet. J'ai eu un arrêt maladie de 10 jours, le temps de prendre un traitement anti-dépresseur et qu'il commence à faire effet.

J'en ai quand même tiré quelques enseignements, que je te partage :
- Si tu peux l'éviter, ne fais pas l'information sur le TSA toi-même. Ils ont besoin d'une institution qui soit derrière toi et surveille ce qu'ils font par rapport à ton handicap (et non maladie). Tu n'es pas dans l''ÉN, mais il y a peut-être des référents handicap dans votre structure, sinon CAP Emploi peut t'aider. Le réseau PAS de la MGEN peut te recevoir aussi peut-être (psychologue du travail).
- Faire respecter un handicap dans un environnement peu vertueux est un rapport de force : tu ne peux donc pas te lancer seule. Est-ce que tu as une RQTH aussi ? L'idéal serait qu'il y ait toujours un tiers avec toi, qui arbitre et soit témoin de ce qui est dit, pour qu'on ne retourne pas contre toi tes difficultés. Les phrases comme "tu devrais comprendre les autres", "fais un effort", "sois plus sociable" n'ont pas lieu d'être. Ne laisse pas dire non plus que c'est une maladie.
- Parler du TSA c'est juste, mais évite peut-être d'être trop franche sur tout ce qui est dépression ou autre détresse psychologique. Tiens-t'en aux faits, non aux ressentis. L'anxiété, le trouble anxieux ça passe encore.

Je te dis ça et je n'y suis pas si bien arrivée cette année, enfin je veux dire que le chef d'établissement et l'adjointe me parlaient mal, m'attribuaient des erreurs qui n'étaient pas les miennes et se sont énervés plusieurs fois parce que j'ai résolu des problèmes de parents ou d'élèves en "creusant" (par exemple, j'ai fait retrouver en insistant le dossier urgent d'un élève pour une spécialité rare qui "dormait" sur le bureau de la CPE). Je crois qu'à la longue, je leur faisais un peu peur et ils se sont vengés mesquinement. Quand j'ai compris que c'était de la peur (je ne suis pas douée pour décoder les sentiments), j'ai repris de la force. Ça ne s'est pas arrangé, mais j'ai fini avec dignité, sans me laisser écraser.

- Tu n'as pas à jouer leur jeu à fond. Sociabiliser dans le bruit (pause, repas) te fatigue : ne t'oblige pas à le faire, car ils ne t'en sauront pas gré lorsqu'ils voudront te reprocher quelque chose. Alors ça ne t'aidera pas, mais au moins, tu te fatigueras moins et tu ne seras pas la seule à faire des efforts. Tu n'es pas obligée d'être exploitée pour être acceptée, et même si tu es exploitée, ça ne garantit pas d'être acceptée. Essaie de faire le point sur ce que tu peux/veux accepter à long terme, pour tenir le coup. Accepte peut-être temporairement ou ponctuellement d'endosser ce rôle de "méchante", "d'oppressante" : tu fais du bon travail et tu es consciencieuse, ils le savent. Tu n'es pas un monstre, ce sont eux qui font de la projection : comme ils te maltraitent, ou sont complices de cette maltraitance, pour ne pas se voir en face ils t'attribuent leurs propres défauts. Si tu leur renvoies de l'indifférence,ou une simple humanité ("oui, ça me touche, mais je ne le valide pas"), tu pourrais être surprise par le fait que les choses n'empirent pas. Ou alors, tu peux argumenter : "vous dites que..., mais vous savez que j'ai des difficultés sociales, donc qu'est-ce que vous proposez ?" Ainsi tu les forces, eux, à se montrer constructifs.

- Autre chose encore : si tu n'as pas de témoin, amène-les à t'exprimer leurs reproches par écrit, ça fait des preuves. Demande-leur par mail ce qu'ils te reprochent exactement, ou reprends une conversation désagréable par mail, en disant que tu n'as pas compris concrètement ce qu'ils attendaient de toi et imprime les mails, ou demande-leur d'accuser réception. Tout ce qui fait juridique et écrit, ça calme. S'ils ne répondent pas, la fois d'après, dis-leur que tu reprendras la discussion quand ils auront répondu à ton mail du ... (tant).

J'espère t'avoir un peu aidée. Trouve-toi des personnes plus gentilles et passe du temps avec elles. Cette année, je m'entendais bien avec pas mal de profs et avant de partir, je leur ai envoyé un mail de remerciements, leurs retours m'ont fait du bien. J'ai parlé anglais dans les couloirs avec la jeune femme de ménage nigériane, elle m'a parlé du Bac de français de sa fille ; je suis souvent allée voir les deux agentes d'accueil, elles étaient cool et me comprenaient, je blaguais facilement avec elles. Je parlais aussi manga avec un agent d'entretien. Pas mal de gens dans un établissement sont souvent largement aussi intelligents ou ont une richesse humaine supérieure aux dirigeants ou autres membres de l'administration. Ce n'est pas grand-chose, mais ça m'a aidée à passer l'année. Une chose qui peut paraître bête aussi : regarde autour de toi si quelqu'un est dans la même situation de rejet, parfois on peut s'entraider et ça fait du bien aussi. Ménage tes forces, essaie de mettre du bon envers les personnes qui le méritent, et essaie d'être objective envers toi-même, et non de prendre pour argent comptant les reproches qu'on te fait. Trouve des antidotes : "on me reproche ça, mais pourtant, j'ai un exemple contraire". Ce n'est pas pour te sentir parfaite et sans faute, mais pour relativiser le négatif, et ne pas t'accabler toi-même.

J'espère t'avoir un peu aidée. :)
Diagnostic d'autisme juillet 2019.
Zuflane
Occasionnel
Messages : 13
Enregistré le : jeudi 18 novembre 2021 à 14:25

Re: Mes collègues me donnent l'impression d'être un monstre...

Message par Zuflane »

Je vais peu sur ce forum, surtout quand je vis une situation difficile et que je cherche à voir si d'autres ont ce même vécu...
C'est mon cas aujourd'hui, des difficultés avec ma cheffe et hop, je tombe sur ton poste Aliehta et sur ta réponse Lulamae.
Je n'ai pas grand-chose à apporter comme solutions, je travaille dans une petite assoc depuis 3 ans, une "sensibilisation TSA" a été faite par un organisme extérieur en réunion auprès de mes collègues et de ma nouvelle cheffe, il y a un an, après avoir obtenu ma rqth.
Des aménagements ont été mis en place, lumière, bureau etc.
Je suis bonne dans mon métier, très bonne et reconnue en tant que telle par ma hiérarchie, mes collègues sont plutôt sympas et je n'ai pas de soucis avec eux, parce que je fais de gros efforts et quand je ne peux pas faire ces efforts, je m'isole et c'est globalement compris.
Par contre, quand je dis "mais ça, j'ai du mal à comprendre, ou à faire", il y a une énorme incompréhension de la part de l'interlocuteur.ice. Bah oui, je suis capable de faire tellement de trucs et remplir un planning j'y arrive pas, non mais quand même !
Ma cheffe me reproche en ce moment de ne pas être "dans le cadre", de ne pas "faire comme les autres", j'entends des phrases du style "quand même c'est pas si compliqué de... tu n'as qu'à faire ci ou ça". Je viens de me faire engueuler comme une gamine, enfin je suppose qu'elle m'a engueulée, elle était rouge et faisait bouger des tas de papier sur son bureau !
Je sens que ma créativité, ce que je pourrais apporter à cette structure et qui sort du cadre est écrasé, annihilé petit à petit. Comme dans mes autres tafs en fait...

Donc ce que j'ai constaté avec ce recul de plus d'un an entre mon "coming-out" pro et maintenant, c'est que ok, je peux être autiste, pas de problème tant qu'il s'agit d'adapter des trucs matériels, par contre, les autres ne s'adapteront jamais à moi, ils se demanderont la plupart du temps pourquoi j'ai droit à un "traitement de faveur". Et pire, on me reprochera d'être différente.
Ce n'est pas parce qu'ils savent qu'ils comprennent, ça, ça n'arrivera pas sauf avec des personnes elles-même TSA ou ayant des proches TSA.

Alors j'éprouve beaucoup de peine et de compassion pour toi Aliehta, pour toi Lulamae, pour moi-même et pour toutes les autres qui vont quand même bosser, qui se battent avec elles mêmes pour essayer de se faire accepter et qui n'y arrivent pas.
La solution serait de travailler seule? Mais ce n'est pas possible pour tout le monde. Ou alors d'en avoir rien à faire et de s'entourer de quelques personnes qui font du bien, comme tu le dis Lunamae.
Courage à vous
Diagnostic posé par le CRA de ma région: TSA sans déficience intellectuelle (novembre 2021)
HPI (octobre 2016)
Avatar du membre
lulamae
Intarissable
Messages : 5692
Enregistré le : dimanche 25 février 2018 à 15:10

Re: Mes collègues me donnent l'impression d'être un monstre...

Message par lulamae »

Zuflane a écrit : jeudi 20 juillet 2023 à 18:34 Par contre, quand je dis "mais ça, j'ai du mal à comprendre, ou à faire", il y a une énorme incompréhension de la part de l'interlocuteur.ice. Bah oui, je suis capable de faire tellement de trucs et remplir un planning j'y arrive pas, non mais quand même !
Ma cheffe me reproche en ce moment de ne pas être "dans le cadre", de ne pas "faire comme les autres", j'entends des phrases du style "quand même c'est pas si compliqué de... tu n'as qu'à faire ci ou ça". Je viens de me faire engueuler comme une gamine, enfin je suppose qu'elle m'a engueulée, elle était rouge et faisait bouger des tas de papier sur son bureau !
Je sens que ma créativité, ce que je pourrais apporter à cette structure et qui sort du cadre est écrasé, annihilé petit à petit. Comme dans mes autres tafs en fait...
C'est exactement ce que j'ai vécu cette année : régulièrement ce présupposé qu'ils m'avaient suffisamment expliqué, en sachant pertinemment que je ne suis pas spécifiquement formée dans certains domaines.

Pour l'orientation par exemple, ou plutôt les affectations, c'est compliqué et cela varie d'un niveau à l'autre, ou entre le Bac général ou technologique.

J'ai souvent rencontré dans l'attitude des deux chef.fes d'établissement un parti-pris selon lequel si je ne comprenais pas comme eux, ou immédiatement comme ça les arrangeait, j'étais donc stupide. C'est très déstabilisant. C'est un peu la même chose avec la surdité : souvent, quand je n'ai pas entendu quelque chose, on en déduit automatiquement que je n'ai pas compris.

Je ne sais pas comment nous avons glissé toxiquement de cette supposition que j'étais bête, ou lente de compréhension (ce qui n'est pas vrai en plus) à "c'est cool, on peut s'acharner sur elle et lui parler mal". Mais quand vous avez les deux seuls membres de votre hiérarchie contre vous, et que la seule personne qui assiste à chaque fois à ça ne vous soutient pas, il est difficile de vous rebiffer, même si je l'ai fait. Mais à quel prix... ?!!
Diagnostic d'autisme juillet 2019.