Equithérapie

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Jean
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Equithérapie

Message par Jean »

Le Monde - Dimanche 25 Juillet 2010
Le cheval, meilleur ami des enfants handicapés

L'équithérapie aide à la rééducation fonctionnelle et à la socialisation des jeunes en difficulté et des autistes

Comme chaque mardi, Mylène et Alexandre (les prénoms ont été changés) sont arrivés en fauteuil roulant, accompagnés de leurs éducateurs spécialisés. Recroquevillés, les membres déformés, la tête penchée, ils ne peuvent ni se tenir debout ni parler. Elle a 18 ans, lui 16 ans, mais leur handicap moteur et mental leur confère une apparence enfantine. Alexandre est aveugle, Mylène, perdue dans son monde, triture sans fin le cordon de son tee-shirt. On a peine à le croire, mais dans quelques minutes, ils seront à cheval. Pour l'instant, ils attendent, cloués dans leur fauteuil, qu'on prépare leur monture. Alexandre parvient à passer deux ou trois coups de brosse à Cocaïne, sa ponette, avant de se rendre dans le manège, un endroit couvert, dont le sol meuble et souple permet de faire travailler les chevaux.

Julianne Bic et Michel, tous deux éducateurs spécialisés, prennent l'adolescent dans leurs bras, montent sur une estrade et le posent sur sa ponette. On se demande par quel miracle il parvient à rester assis. Etonnamment, sa tête s'est relevée et il se tient droit, le visage lumineux. On le sent heureux de quitter son carcan, de sentir les mouvements du cheval, d'être au-dessus des autres. " La chaleur de l'animal provoque une détente des muscles. Un cheval qui marche va mobiliser chez le cavalier 300 muscles, explique une éducatrice. Pour des personnes qui ne peuvent pas se mouvoir, c'est extraordinaire. Ce qui est fabuleux, c'est de voir la tonicité qu'elles retrouvent sur leurs montures. " Les jeunes cavaliers sortent dans la campagne, leurs animateurs tenant leurs chevaux par la longe. Alexandre pousse des petits cris stridents, vocalise pour exprimer sa joie, caresse son cheval, la main bien à plat. " Avant, il avait toujours les mains crispées, il ne pouvait pas tenir une brosse " , commente son éducateur. Mylène, qui monte Fadette, a tendance à glisser, mais parvient, seule, à se rééquilibrer. Elle ne veut surtout pas qu'on la tienne et repousse les mains de l'éducatrice. La ferme équestre de Mange-Seille, à Lixières (Meurthe-et-Moselle), accueille des personnes handicapées, des enfants atteints de troubles du développement, comme l'autisme, mais aussi des cavaliers ordinaires pour ne pas faire de l'endroit un ghetto. Isabelle Claude et Etienne Albert, tous deux éducateurs spécialisés, ont constitué l'association -Equit'aide - Handi Cheval Lorraine et ont fait l'acquisition de la ferme en 2004 - aidés par les collectivités territoriales - pour pratiquer l'équithérapie. Son principe : utiliser le cheval comme partenaire thérapeutique afin d'atteindre des objectifs fixés en fonction des désordres psychiques ou physiques du patient (rééducation fonctionnelle, réinsertion des jeunes en difficulté, socialisation et tolérance à la frustration pour les autistes, etc.).


" On a tous un cheval dans la tête, qu'on le veuille ou non. Il fait partie de nos représentations, explique Isabelle Claude. Le cheval permet, par ses qualités - vigilance à son environnement, capacité à porter, hypersensibilité, sensualité -, un transfert de lien symbolique et révèle nos émotions. "

A la ferme, la plupart des publics sont accueillis, lors de séances hebdomadaires, dans le cadre d'un projet thérapeutique défini avec leur établissement d'accueil (hôpital de jour, établissement pour polyhandicapés, institut médical pédagogique, etc.). D'autres viennent dans un cadre privé, à l'initiative de leur famille, comme Patrice Harmand, 30 ans. Ce jeune homme trisomique fréquente le centre depuis huit ans. Il aide à nettoyer les boxes, à rentrer le foin, et s'occupe des chevaux. " On a essayé une intégration en centre d'aide par le travail mais ça s'est très mal passé. Depuis qu'il vient à la ferme, lui qui était colérique, caractériel, est devenu plus calme. Il respire la joie de vivre. Etre avec des animaux l'apaise et, ici, il n'est pas perçu comme un handicapé " , explique sa mère, Michelle Harmand.

Cet après-midi, c'est au tour du petit Lucien, 5 ans, de venir à sa séance hebdomadaire. Il court dans l'écurie, incapable de tenir en place. Lucien souffre de troubles comportementaux sévères et ne sait dire que quelques mots. Son quotidien se partage entre l'école et un hôpital de jour. Catherine, son éducatrice, l'emmène choisir son poney dans le champ voisin. " C'est un atelier formidable pour les enfants, commente-t-elle. Travailler avec le vivant, c'est vraiment différent des autres activités. Cela cadre les petits, leur apprend les règles. On ne fait pas n'importe quoi avec un cheval. Si on le tape, il mord. Et il faut le préparer avant de le monter. " Dans le champ, Lucien est attiré par tout : tantôt par une fleur, tantôt par le crottin, tantôt par une mouche. Son choix se porte sur une petite ponette dont il douche les jambes en s'esclaffant.

Ensuite, il s'applique à sécher sa monture avec une sorte de raclette. " Avant, commente Catherine. Il refusait ces tâches et piquait de grosses colères. "


Une fois dans le manège, Lucien, après de multiples sollicitations, s'empare enfin de l'escabeau pour monter sur son petit cheval. Et là, métamorphose. L'enfant s'apaise, s'allonge spontanément sur la croupe de sa monture, en confiance. Il a fallu plusieurs mois pour arriver à canaliser l'énergie de Lucien, mais le résultat est bien là. Le bambin s'accroche à une touffe de crins et se laisse mener à la longe dans la campagne. Le petit trublion s'est transformé en bouddha aux yeux clos et au sourire d'ange, bercé au rythme du pas du cheval. Mais la promenade a une fin. Le retour à la terre ferme ne va pas sans frustration. Après une petite colère quand il est arrivé au manège, Lucien a pu reprendre le chemin de l'hôpital.

Martine Laronche

Une activité en quête de reconnaissance

L'ÉQUITHÉRAPIE (usage du cheval comme partenaire thérapeutique) est apparue en Norvège dans les années 1900 et se développe en France depuis une trentaine d'années. Aujourd'hui, elle concerne les domaines de la rééducation fonctionnelle, mais aussi la socialisation des jeunes en difficulté et des enfants autistes. Elle est utilisée pour redonner confiance aux malades en rémission. Bien qu'en plein essor, le métier d'équithérapeute ne fait pas l'objet d'une réglementation. " Beaucoup se disent équithérapeutes sans avoir de formation spécifique, explique Isabelle Claude, présidente de la Fédération nationale Handicheval. Et certaines pratiques peuvent se révéler dangereuses. " La Fédération nationale des thérapies avec le cheval (Fentac) et la Société française d'équithérapie (SFE) tentent de faire émerger ce métier.

De son côté, la Fédération française d'équitation (FFE) a créé, en 2009, un brevet fédéral d'encadrement Equi-Handi, afin de familiariser les enseignants d'équitation aux publics en situation de handicap. La Fondation Adrienne et Pierre Sommer et la Société d'ethnozootechnie (SEZ) ont organisé, le 18 juin, un colloque intitulé " Un cheval pour vivre " et présenté des expériences utilisant l'animal comme médiateur. Comme celle du centre de pédopsychiatrie du CHU de Tours pour les enfants autistes ou atteints de troubles apparentés. Laurence Hameury, pédopsychiatre, reconnaît avoir " obtenu une nette amélioration en termes de communication, de socialisation, de régulation cognitive, émotionnelle et motrice ". Jacqueline Bockenmeyer, psychanalyste et psychologue à l'hôpital Robert-Debré, à Paris, travaille avec l'association Les P'tits Cracks, qui organise des sorties équestres pour les enfants sortant d'une longue hospitalisation. Elle explique : " A l'hôpital, l'enfant ne s'appartient plus. Il est surinvesti par sa famille, son corps est abandonné aux soignants. " Comme le doudou, le cheval apparaît comme un objet transitionnel. " L'enfant va lui confier ses secrets et se laisser aller, enfin, à ressentir son corps comme objet de plaisir et de liberté et non plus de douleur.

Martine Laronche
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bernard
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Re: Equithérapie

Message par bernard »

Jean a écrit :Le cheval, meilleur ami des enfants handicapés
Je confirme.

De nombreuses émissions TV ont montré des exemples époustouflants de ce qui peut être fait dans ce domaine.
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Jean
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Re: Equithérapie

Message par Jean »

Équithérapie et autisme
L. HameuryCorresponding Author Contact Information, a, E-mail The Corresponding Author, P. Delavousa, B. Testea, C. Leroya, J.-C. Gaboriaua and A. Berthiera
a Centre universitaire de pédopsychiatrie, CHRU de Tours, 37044 Tours cedex 9, France

Résumé
L’activité d’équithérapie est utilisée en complément des soins réalisés au centre de pédopsychiatrie. Elle est inclue dans le programme thérapeutique établi pour chaque enfant, dans le cadre d’un projet de soins personnalisé. L’objectif est d’appliquer les principes et les techniques thérapeutiques développées pour les troubles du développement de l’enfant dans un cadre extrahospitalier, une ambiance apaisante et ludique, et avec l’aide du cheval comme médiateur. Une évaluation quantitative des résultats a été réalisée pour six enfants présentant un trouble autistique. Les résultats montrent une nette amélioration dès la première séance d’équithérapie. Toutes les fonctions impliquées dans le développement sont améliorées, surtout celles concernant la communication, l’imitation, la régulation perceptive, émotionnelle et motrice. L’équithérapie constitue donc une rééducation efficace de la communication et de la socialisation, ainsi que de la régulation cognitivo-émotionnelle. Elle permet des échanges appropriés, des acquisitions cognitives, sensorielles et motrices. L’enfant est stable, apaisé par les mouvements du poney, il sollicite l’équithérapeute dans une interaction adaptée et prend conscience de l’effet de ses actions sur le poney, excellent cothérapeute favorisant aussi l’attachement.

Annales Médico-psychologiques, revue psychiatrique
Volume 168, Issue 9, November 2010, Pages 655-659
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omega
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Re: Equithérapie

Message par omega »

Jean a écrit :L’enfant est stable, apaisé par les mouvements du poney
Une explication peut-être très basique de l'effet de l'équitation, c'est qu'à cheval on est bercé par les allures. Mouvement de balancement + régularité "immuable": pas besoin de faire un dessin. :)
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Re: Equithérapie

Message par Jean »

Emission de radio :
On est fait pour s'entendre du 12 sept. 2012 - Quand les animaux nous soignent : la zoothérapie - avec François Beiger, fondateur de l’institut français de Zoothérapie
Flavie Flament

Aujourd'hui, Flavie et son équipe vous proposent de dialoguer autour du thème suivant : Quand les animaux nous soignent : la zoothérapie
François Beiger a écrit les ouvrages "L'enfant et la médiation animale" et "Autisme et zoothérapie" (Dunod)

A partir de 18ème mn, Isabelle, d'Asperger Amitié, de l'alliance des 4 A.
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