J'ai téléchargé puis écouté Cyrulnik hier soir.
Toujours aussi intéressant ce personnage !
J'aime bien quand il compare le déni avec le plâtre
qu'on pose sur une jambe cassée. Dans les deux cas,
cela permet de soulager la douleur, et de donner
du temps à l'organisme pour se reconstituer,
mais cela ne doit durer qu'un temps ...
Autres phrases intéressantes :
- "il ne faut pas oublier le traumatisme, il faut en faire
quelque chose pour ne pas s'y soumettre" ;
- "il faut en faire un livre [...] il faut en faire des poésies [...]
il faut en faire un engagement social ..." ;
- "on est contraint à l'oubli parce qu'on ne peut pas tout
mettre en mémoire, et on est contraint à l'arrangement
des souvenirs de façon à donner une cohérence à ce qui
nous est arrivé, et ensuite on est contraint à partager un récit ... " ;
- "si je reste seul avec mon récit intime, que je ne peux pas partager
[...] si je reste comme ça c'est un prix humain exorbitant " ;
- "je l'oublie, mon souvenir devient clair, et je le remanie,
et là, enfin, je peux vous proposer un récit ..." ;
Ses précisions sur la mémoire sont passionnantes.
Il explique que la neuro-imagerie du cerveau montre
que les mêmes circuits sont actionnés lorsque :
- on cherche à se rappeler un souvenir
(qu'ai je fait Dimanche dernier ?) ;
- on cherche à imaginer l'avenir
(que ferais-je Dimanche prochain ?).
Le rappel d'un souvenir est donc une reconstitution
à partir d'éléments disparates, remis en cohérence
au moment du rappel, dans le contexte de ce moment,
ce qui explique les altérations qu'on note parfois ...
Il explique également qu'un traumatisme entraîne
une tranformation génétique. Les hormones de stress
provoque la mise en place, sur l'ADN, de marqueurs
qui modifient l'expression des gènes (j'ai entendu
quelque chose comme "méthylome", à vérifier).
La conséquence, c'est que les enfants héritant
d'une partie de l'ADN parental, héritent de fait
d'une partie des conséquences (méthylations)
des traumatismes de leurs parents.
C'est la première fois que j'entends ça ...
Pour revenir à la fonction réparatrice du récit d'un traumatisme :
- "C'est le travail du récit qui fait qu'une zone
cérébrale consomme beaucoup d'énergie et entraîne
le cerveau à fonctionner autrement.
On photographie sans peine cette zone cérébrale là,
qui est une zone des émotions ..." ;
- "[...] la parole donne un degré de liberté, parce qu'à
ce moment là, en parlant, non pas la parole
mais le travail de la parole, nous permet de modifier
la représentation de soi, l'idée qu'on se fait de soi ..." ;
- "Le récit n'a une fonction émotionnelle que s'il est partagé.
Si je me fait un récit tout seul dans mon coin, on appelle ça
une rumination, et ça c'est le tapis roulant vers la dépression." ;
- "Si je partage un récit, la parole, à ce moment là,
a une fonction affective, bien plus qu'informative.
Je m'adresse à vous, et selon vos réactions,
vous structurez mes propres émotions.
Si vous êtes attentifs à moi, je me sens bien avec vous,
je me sens en sécurité, donc vous êtes mon tranquillisant
relationnel, vous êtes mon tranquillisant culturel. " ;
Ces dernières notes m'inspirent des réflexions, mais pour
ne pas polluer cette discussion, je les place dans ma
présentation ...
Mofidications :
- 2013/06/22 : remplacement
de "les enfants [...] héritent de fait des traumatismes de leurs parents."
par "les enfants [...] héritent de fait d'une partie des conséquences (méthylations) des traumatismes de leurs parents.".
TCS = trouble de la communication sociale (24/09/2014).