Vos questionnements m'intéressent et j'ai passé tellement de temps ces dernières années - avant de découvrir l'Asperger et de me rendre compte à quel point il expliquerait les choses - à réfléchir sur moi même, mes difficultés et leurs origines que je pense pouvoir avancer quelques hypothèses qui valent ce qu'elles valent...
Pourquoi se reposer sur un proche pour résoudre une difficulté à laquelle on est capable de faire face en cas de besoin ?
- Le simple pragmatisme peut éventuellement jouer un petit rôle à mon avis. Au fil du temps j'ai compris je pense que certaines choses qui sont
très difficiles pour moi même sont
extrêmement simples pour les autres. Dès lors n'est-il pas tentant - sinon logique - de laisser l'autre s'en charger puisque la gêne sera bien moins importante pour elle ? Autant garder son énergie, c'est tellement épuisant de lutter contre l'anxiété chaque jour...
- La présence d'une personne proche
peut-être un réconfort dans certaines situations, dans d'autres je crois qu'elle constitue plutôt un handicap. Résoudre un problème peut déjà être difficile, le résoudre sous
le regard/à proximité de quelqu'un d'autre rend la chose encore plus difficile (c'est en tous cas mon expérience).
Déjà il y a il me semble un principe simple et je pense assez répandu chez tout le monde : celui qui m'a toujours fait cesser d'écrire (sinon protéger ma copie du bras) lorsqu'un professeur était
trop près de moi.
Mais surtout présence et le regard du proche - même rempli de toute la bienveillance du monde - contribue en quelque sorte à la
différence , il peut entretenir
la crainte paralysante de ne pas faire les choses comme il faudrait. Je m'explique : quand on est
seul il n'y a que le résultat qui compte, quand on est avec quelqu'un la manière de faire les choses semble importante... Si on a
du mal avec les conseils/reproches qui plus est (d'une part j'ai toujours eu des difficultés à différencier les conseils des reproches je crois sans compter qu'à force d'entendre des conseils même bien intentionnés ils deviennent odieux, insupportables... D'où l'absence de volonté/incapacité/refus de faire certaines choses à proximité d'un proche).
J'illustre d'un exemple simple bien qu'un peu caricatural peut-être. Passer à une caisse, attendre dans la file (en choisir une d'ailleurs), emballer ses courses... S'assoir dans un bus... C'est simple, très simple... Pourtant, lorsque j'étais enfant/adolescent et que je devais faire ce genre de chose en présence de ma mère ou de ma soeur on trouvait toujours quelque chose à redire sans que je comprenne forcément bien pourquoi ! Alors que lorsque j'étais seul les détails sur lesquels on pouvait me reprendre n'existaient pas... (parce qu'ils étaient insignifiants sans doute et parce que lorsque l'on se sent observé, qu'on veut être à la hauteur par rapport à quelqu'un, on perd plus facilement encore ses moyens - c'est un point important ça : l'envie d'être normal,
la peur de décevoir le proche).
- La personne à proximité peut vouloir aider à résoudre le problème. Là - dans mon vécu - ça se complique : je suis très vite à fleur de peau, prêt à totalement déconnecter/exploser/abandonner pour peu que je n'éprouve pas le besoin d'aide, que j'ai l'impression que l'autre ne tient pas compte de mon avis (outrepassant son rôle d'aide) ou bien s'acharne à vouloir m'expliquer des choses que j'ai compris depuis longtemps ou que je n'arrive pas à comprendre. Toute coopération est délicate avec moi... (paradoxalement je suis d'une patience réellement sans bornes s'agissant d'apprendre en regardant l'autre...)
- Laissez l'autre faire peut constituer une occasion d'
apprendre en regardant et/ou en écoutant. Apprendre en regardant peut être enrichissante, faire en ayant le sentiment plus ou moins fondé de ne pas être à la hauteur peut s'avérer plus embarrassant,
traumatisant que pédagogique.
(s'agissant de mes études il y aurait beaucoup à dire... Mais pour faire bref après ce pavé... Vous connaissez bien sûr l'expression qui dit qu'une personne est en train de couler. Et bien imaginez que j'ai touché le fond et que les coraux sont en train de me recouvrir...

)