Leanox a écrit : ↑dimanche 26 novembre 2023 à 1:07
Bonjour,
En lisant votre post initial, je suis interpellée. J'ai eu un pré-diagnostic de TSA/TDAH, une validation du HPI il y a 1 an et suis encore en parcours diagnostic.
Pour éviter un burn out (autistique a priori) en janvier 2023, j'ai décidé de m'arrêter du travail et de prendre une pause de vie pour apprendre à me comprendre, me faire aider en thérapie pour cela et apporter ainsi aussi de bons éléments de compréhension pour obtenir un diagnostic pertinent.
J'ai notamment constaté cette extrême difficulté chez moi à pouvoir en un claquement de doigt savoir que ce que je fais tous les jours a du sens (me lever, aller au travail, faire la vaisselle, appeler un ami qui a besoin de réconfort suite à une séparation, acheter un petit cadeau pour une copine qui a un anniversaire et me rendre à cet anniversaire prévu dans quelques jours, mettre certains vêtements avec un style donné dans une situation sociale professionnelle ou plus décontractée, etc.)
Ce savoir de "pourquoi" je fais les choses déjà se pose. Pourquoi faire toutes ces choses? Je l'attribue déjà au HPI chez moi qui va tout questionner (la mise de sens chez moi est vitale et elle passe par des réflexions intenses seule, des lectures en autonomie et des discussions sur le monde et la vie en général avec des proches sur ce mode de fonctionnement aussi) pour commencer.
Ensuite, cela ne va pas expliquer pourquoi moi je rame autant à accéder rapidement au "pourquoi." En effet, cela fait au moins 800 fois que je me répète pourquoi en effet c'est bien important et positif de faire la vaisselle au minimum tous les 2 jours, pourquoi mon chat a besoin d'être nourri tous les jours (...), pourquoi cette robe a un style adapté à mon environnement professionnel et cette autre robe plutôt pour une soirée avec des amis. Au moins 800 fois pour ne pas dire 8000 fois (car les raisons pour aller au bout sont les mêmes que celles pour aller à l'école essentiellement: avoir mon autonomie, décider de ma vie, me sentir confortable, sereine, heureuse, et pouvoir d'autant plus être une personne positive pour les autes, quand on va bien, on est davantage bienveillants, pertinent pour aider les autres, les écouter activement, etc.) et ça ne rentre toujours pas.
ça ne rentre pas et ce n'est pas chez moi un problème de déficit d'intelligence (comme certains ne savent pas calculer 1+2=3), c'est autre chose. La logique des choses qui finalement sont très associées aux codes sociaux (pourquoi telle robe est plus adaptée lors d'une réunion et telle autre à un mariage), à des logiques abstraites (pourquoi les humains en 2023 sont-ils obligés pour manger tous les jours de gérer des emails, remplir des formulaires et rester assis sur une chaise devant un écran? Alors qu'autrefois ils pouvaient aller chasser dans la forêt et cultiver leur lopin de terre en plus d'échanger avec les voisins pour d'autres produits?). Je connais la réponse à ces choses là mais je dois faire un laborieux effort de quelques microsecondes tous les jours pour me rappeler les réponses à ces questions puis pouvoir aller au travail, choisir la robe adaptée à l'évènement qui vient dans 30 minutes (le boulot ou rejoindre des amis). Cette latence de quelque micro-secondes et surtout cet effort cognitif de devoir repasser ma leçon de "pourquoi je fais les choses" en revue avant d'agir est épuisante. Cela multiplié par dix, vingt, cent fois par jour, m'épuise. Au bout d'un moment, en l'ajoutant à la surcharge sensorielle, lumineuse, les bruits, je n'ai plus d'énergie cognitive. Et souvent cela se termine en burn out ou si comme cette année, je le repère vite, cela m'évite le pire et me plonge dans un "burn out léger" dont je sors au bout de 4 mois au lieu de 9 mois en moyenne.
Un bon côté de ce fonctionnement qui remet toujours en question les choses est que j'ai tendance à ne rien prendre pour acquis et redécouvrir la sensation de l'émerveillement de ce que je vis et fais presque à chaque fois. Avoir toujours un peu ce pincement au coeur de fierté de me dire "woww j'ai un travail et j'y vais ce matin, c'est merveilleux!!!" comme si c'était mon premier jour de travail, tout nouveau, toute fière de l'avoir décroché suite à mon travail régulier, mes efforts. Sur des situations où une méthode est tout rôdée pour faire les choses, je peux requestioner les choses plus facilement: j'utilise toujours le produit vaisselle machin, ok mais j'ai des valeurs écologiques, donc je vais plutôt prendre ce produit écologique. Par exemple, et cela va faciliter l'évolution en fait, l'inventivité pour résoudre des problèmes. Par contre, le fait de devoir laborieusement réfléchir à pourquoi je fais les choses avant de les faire va aussi m'épuiser donc et je vais avoir tout autant tendance surtout dans les moments de fatigue cognitive (réguliers) à forcer pour faire ce que j'ai toujours fait. Ainsi, je vais avoir tendance dans la vie à reproduire un grand nombre de fois une habitude et à en changer brutalement, d'un coup. Du jour au lendemain. Parce qu'à un moment, j'aurai un peu d'énergie et que je vais mettre en place la nouvelle habitude que ma créativité a imaginée et ensuite que je vais répéter un très grande nombre de fois jusqu(à mettre une nouvelle habitude en place.
En somme, dans mon cas, il y a un double problème de manque d'intégration des savoirs liés à des logiques sociales, des codes sociaux, et il y a un problème aussi de gestion de l'énergie cognitive qui a une incidence directe sur comment je peux donc rester bloquée dans des routines un grand nombre de fois et tout aussi bien en imaginer une très créative et la mettre en place d'un coup du jour au lendemain dès que j'aurai eu un peu d'énergie en plus à un moment.
Je me demande si ce que vous vivez pourrait bien s'expliquer par cela aussi. Si cela peut faire sens dans votre vécu. Je n'ai pas parcouru toute la littérature sur le TSA. Il me semble cependant qu'assurément il y a un problème au niveau des fonctions exécutives et qu'il y a de grosses difficultés aussi au niveau de l'intégration des codes sociaux, ils ne sont pas acquis (ils sont connus, et ne se font pas en une fraction de seconde, d'un claquement de doigt. Paf, je me lève, je prends mon pti-déj, ma douche, je suis prêt, je prends la route pour le boulot, fais ma journée, gère les situations au bout, rentre, je mange, fais la vaissele, et je m'endors fatigué et après une journée gloabelement satisfaisante aujourd'hui).
Certaines personnes peinent à savoir leur table de multiplications et il faut en permanence que laborieusement elles cherchent dans leur mémoire ou comptent sur leurs doigts le résutlat. Alors que d'autres vont rapidement à la conclusion de la multiplication, 6 fois 6 c'est 36, paf. Et je me demande si sur des "équations sociales" laborieuses à réaliser (Pourquoi je dois aller au travail ce matin? Pourquoi je dois faire la vaisselle tous les 2 jours? Pourquoi je dois dire bravo à mon ami qui a réussi son concours? Pourquoi je dois mettre un pantalon et pas le bermuda alors qu'il fait 30°C dans mon bureau au travail?), si cela peut bien en effet être causé par du TSA.