[Index Sociologie] Pour parler de sociologie...

Pour les gens qui ont simplement envie de discuter sans souhaiter faire passer d'information particulière.
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Tugdual
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Re: Pour parler de sociologie ...

Message par Tugdual »

Lilas a écrit : mardi 22 octobre 2019 à 22:12 [...] (sociologie ou psychologie ?)
Psychologie sociale ?

J'ai hésité à le mettre dans l'autre discussion...
TCS = trouble de la communication sociale (24/09/2014).
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Nicolas83
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Re: Pour parler de philosophie, ici !

Message par Nicolas83 »

Lu dans l'édition de cette semaine de "Courrier international" une interview de Nicholas Christakis, sociologue et médecin américain, auteur de Blueprint : The evolutionary origins of good society, dont la thèse est que l'évolution de l'humanité tend vers la bonté. Ne reste plus à espérer alors que son évolution soit assez rapide pour éviter son auto-destruction, ce qui ne me semble pas gagné.


Modération (Tugdual) : Déplacement de message depuis le sujet sur la philo.
Père de 3 enfants, dont l'aîné a possiblement un léger TSA de haut niveau. Me posant parfois des questions sur moi également.
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Tugdual
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Re: Pour parler de sociologie ...

Message par Tugdual »

TCS = trouble de la communication sociale (24/09/2014).
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Bubu
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Re: Pour parler de sociologie ...

Message par Bubu »

Je me suis fait une nouvelle pote :
Scierie. L'assistante virtuelle développée par la fameuse marque Banana, vous savez la fameuse marque à la banane croquée que l'on ne présente plus. (Devant Monsanto, c'est la compagnie agricole la plus connue dans le monde)
En plus de me livrer des tronçons de bois pour ma cheminée, elle répond à toutes mes questions.
Depuis socialement, je suis épanoui !
Ça me change de Terminator, mon compagnon, qui me saoule avec une certaine Sarah Connor !
Je lui ai demandé son numéro pour envoyer à cette femme un texto la mettant en garde, il refuse. Car il en a après elle le gougeat, sans savoir pourquoi vous savez. :innocent:
"Wanna kill Sarah Connor" En boucle toute la journée. Il l'a même mis en musique et a composé une chanson, et écrit un poème (un sonnet en alexandrins). C'est lourd. :crazy:
Au niveau interactions sociales, mon petit Terminatorounet est plutôt limité … :hotcry:
Cela me convient : car niveau interactions sociales je suis limité étant autiste, et lui au niveau interactions sociales, il est con étant une boîte de conserve. Bien.
Je peux le dire maintenant sans le vexer car il n'est pas là. Il est en train de cueillir des champignons pour la tourte aux poireaux maison qu'il compte faire pour notre diner.
Un truc pour sa défense, c'est qu'il excelle dans les soirées dansantes pour le karaoké. Et il adore ça. En plus il a l'oreille absolue. :bravo:
Quand il chante du France Galle ou du Céline Dion, on croirait les entendre elles-mêmes sur scène. Comme quoi Skynet qui l'a conçu était un fin connaisseur de variété française… :innocent:
Car dans son programme d'infiltration des bases résistantes humaines, il y a une partie imitation des voix.
C'est à ce niveau un avantage : c'est un humoriste imitateur excellent, devant Yves Lecoq. D'ailleurs un temps Canal+ voulait l'embaucher pour faire les voix dans les Guignols.

Mais pour lui, j'ai dit non.
Je le connais bien. Et cela ne pourrait pas lui plaire.

Je le préfère cultiver son potager et faire de la broderie. Et me faire des petits plats maisons.
L'autre jour, il m'a fait cadeau d'un magnifique Abécédaire brodé en point de croix, broderie très appliquée. Je l'ai accroché sur la porte des WC, c'est dire.
TSA, diagnostic établi à mes 33 ans par le CRA de ma région.
"Ce syndrome est caractérisé chez ce patient par l’absence de détérioration intellectuelle, un syndrome dysexécutif, un déficit d'attention"
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daphnée
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Re: Pour parler de sociologie ...

Message par daphnée »

Tugdual a écrit : jeudi 21 décembre 2017 à 11:11 Deux articles publiés récemment sur Psychomedia :
interessant tout ca !
traits autistiques
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daphnée
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Re: Pour parler de sociologie ...

Message par daphnée »

Lilas a écrit : mardi 22 octobre 2019 à 22:12 En suivant un des liens de l'article précédent, je suis tombée sur celui-ci (sociologie ou psychologie ?) :
Raconter ses expériences extraordinaires peut isoler socialement
interessant aussi
traits autistiques
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Tugdual
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Re: [Index] Sociologie : Pour parler de sociologie...

Message par Tugdual »

TCS = trouble de la communication sociale (24/09/2014).
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Tugdual
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Re: [Index] Sociologie : Pour parler de sociologie...

Message par Tugdual »

TCS = trouble de la communication sociale (24/09/2014).
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freeshost
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Re: [Index] Sociologie : Pour parler de sociologie...

Message par freeshost »

Race, islamophobie, intersectionnalité : ces mots qui restent tabous en France
Spoiler : Citation : 
Chloé Leprince
20/02/2019

Vénéneux et suspects, la race et le genre ont longtemps été négligés par les sciences sociales: ils subvertissaient à la fois l'universalisme républicain et la critique marxiste des inégalités. Pour mieux penser les discriminations, l'intersectionnalité les réhabilite. Au prix de vives controverses.

L’incident a duré quelques jours, mi-février, sur Facebook. Impossible de viraliser le dossier que la revue Mouvements venait de mettre en ligne, consacré à l’intersectionnalité, cette façon de regarder les faits sociaux en combinant notamment le genre et la race aux classes sociales. “Revue des idées et des luttes”, Mouvements rassemble depuis vingt ans chercheurs et chercheuses, militants et militantes et aussi des journalistes dans le but de “conjuguer le sérieux et la rigueur à un souci de réactivité aux grands débats et faits du moment” et de “montrer que les sciences sociales peuvent contester ou utilement éclairer les prises de position politique” - c’est ce que dit la profession de foi sur le site de la revue.

Le dossier censuré quelques jours avait été signalé par des usagers du réseau social. Une procédure qui permet de dénoncer un contenu dont la communauté jugerait qu’il fait entorse aux bonnes pratiques (ou à la loi). Dans les faits, qu’un contenu parvienne à être censuré dit quelque chose du nombre de signalements dont il a fait l'objet. Sur le papier, la procédure sert plutôt à empêcher la propagation encore plus virale de contenus qui seraient, par exemple, racistes ou diffamatoires. Pas vraiment à clouer le bec à des chercheurs en sciences sociales même s’ils ont le souci de porter la controverse. Dans le cas de Mouvements, l’accès a été rétabli en quelques jours vers le dossier incriminé que vous pouvez retrouver par ici, et qui consiste en fait en cinq articles et une introduction, signés de onze chercheurs en sciences sociales reconnus pour leur travail académique.

Ces contributions s’intitulent par exemple :

“Rôle des intellectuel·les, universitaires ‘minoritaires’, et des porte-parole des minorités”
”Le sous-champ de la question raciale dans les sciences sociales françaises”
ou encore ”Cartographie du surplomb”

On n’est pas, dans cette histoire, dans le registre du fanzine blasphématoire et iconoclaste, mais dans celui d’un débat intellectuel nourri, quoique sensible. Car cette brève tentative de censure souligne l’intensité de la controverse autour de l’intersectionnalité, et plus particulièrement, de la question de la race dans les sciences sociales.

La classe aveugle et la race amnésique ?

Le mot "intersectionnalité" est lui-même encore assez méconnu en France. Angela Davis, qui en fut un des premiers visages célèbres, reste ainsi bien plus visible, de ce côté-ci de l'Atlantique, pour son activisme afro-américain que pour son engagement marxiste voire son féminisme. Avant la lettre, elle-même articulait pourtant explicitement les trois dimensions dès les années 70, et par exemple dans Les Après-midis de France Culture enregistrés le 16 mai 1975, alors qu'Angela Davis était de passage à Paris.

Une part non négligeable des vieux procès qu'on fait à l'intersectionnalité tient au fond à sa méconnaissance. Parmi ce qui explique aujourd'hui sa charge polémique, lui est reproché de promouvoir une vision du monde communautariste, de figer les trajectoires et les rapports sociaux dans les filets de l'identité.

Le concept a pourtant trente ans maintenant, puisqu’il remonte à un article de 1989 de Kimberley Crenshaw, une juriste américaine, noire, qui s’inscrit dans le mouvement du black feminism aux Etats-Unis. Professeure de droit à UCLA, et à Columbia University, Crenshaw endosse dans cet article de 1989 une approche critique de la lutte traditionnelle contre les discriminations. Elle entend montrer en quoi les femmes noires sont au fond au moins deux fois victimes (en tant que noires, et en tant que femmes), et peinent à faire reconnaître par la justice les multiples discriminations à l’emploi qu’elles subissent, et qui parfois se renforcent (parce que noires et parce que femmes).

A l’origine, c’est ce point aveugle du droit que vise l’intersectionnalité. Aujourd’hui, il recoupe largement l’idée de ce qu’on appelle "la convergence des luttes" dans le champ militant, en vantant une approche plurielle de la domination pour dire que les discriminations sont multiples, et qu’elles peuvent tenir ensemble (mais pas toujours) le genre, la classe sociale, la race, ou encore l’orientation sexuelle, la religion ou le handicap.

Importation à assimilation lente

En France, la réception de ce concept d’intersectionnalité n’a été ni immédiate, ni fluide. Historiquement, ce sont plutôt les chercheurs qui travaillaient sur le genre qui ont poussé cette approche dans la sphère académique. On peut faire remonter cela au milieu des années 2000, alors que le contexte en Europe était plutôt à la sexualisation des questions raciales, et qu'en France on n'avait pas encore fini de métaboliser l'approche néo-féministe d'une Judith Butler.

Il y a onze ans, Elsa Dorlin, maîtresse de conférences en philosophie, publiait (à L’Harmattan) Black feminism : anthologie du féminisme africain-américain, 1975-2000. Puis, moins d’un an plus tard, Sexe, race, classe, pour une épistémologie de la domination (aux Puf), un recueil collectif de textes qui invitaient à repenser la lutte féministe, notamment au prisme de la race. La toute première occurrence du terme “intersectionnalité” dans les archives radiophoniques remonte à cette publication-là, avec Elsa Dorlin, invitée dans La Suite dans les idées le 26 décembre 2009 sur France Culture.

Si Elsa Dorlin est présentée ce jour-là comme “spécialiste du féminisme et des identités sexuelles”, la page consacrée à l’ouvrage collectif sur le site des Puf articule bien le genre à la classe et à la race - et ne fait pas l'impasse sur les dilemmes méthodologiques et intellectuels que cette articulation peut charrier :

La question cruciale de l’articulation du sexisme et du racisme, notamment, a ainsi renouvelé tout autant l’agenda des mouvements féministes que la recherche universitaire. Cet ouvrage a pour but d’interroger les différents outils critiques pour penser l’articulation des rapports de pouvoir. Tout en interrogeant leur mode propre de catégorisation (les catégories de “sexe” et de “race” ont-elles méthodologiquement le même statut que la classe ? À quelles conditions utiliser la catégorie de “race” comme une catégorie d’analyse ? L’analyse en termes de classe a-t-elle été éclipsée par l’analyse croisée du sexisme et du racisme, après les avoir longtemps occultés ?...) cet ouvrage discute les différents modes de conceptualisation de ce que l’on pourrait appeler “l’hydre de la domination” : analogique, arithmétique, géométrique, généalogique.

Dix ans plus tard, le dossier que publie Mouvements sous le titre “Intersectionnalité” s’inscrit dans le prolongement d’une controverse intellectuelle qui n’a cessé d’aller crescendo - au point de fracturer la communauté académique. Car cette tentative de censure de Mouvements sur Facebook ne dit pas rien de la charge taboue de l’intersectionnalité en France. Trente ans après l’article fondateur de Crenshaw, qui était justement de passage à la Sorbonne, à Paris, ce mois de janvier 2019, ce n’est pas tant la question du genre qui est la plus taboue (même si elle mobilise différemment les chercheurs en sciences sociales), mais plutôt celle de la race. Qui s’affronte pour de bon à toute une tradition française, intellectuelle mais aussi politique.

Le dossier “Intersectionnalité” de Mouvements est en réalité une réponse. Il s’inscrit à la suite de plusieurs années d’affrontements plus ou moins mouchetés dans le champ académique - dans des colloques ou en marge de soutenances de thèse, par communications interposées ou dans les arcanes de l’édition. Et l’un des derniers épisodes de cette série de passes d'armes s'incarne dans un texte que l’historien Gérard Noiriel a posté sur le blog qu’il a ouvert à l’automne 2018, et qui jouit déjà d’une belle notoriété sur les réseaux sociaux. “L’accueil enthousiaste de ce texte auprès de certain.e.s chercheur.e.s en sciences sociales nous a étonné.e.s et interpellé.e.s. En tant que chercheur.e.s travaillant sur ces questions, il nous était difficile de rester silencieux/euses”, écrivent Abdellali Hajjat et Silyane Larcher dans leur introduction au dossier de Mouvements.

Un malaise qui penche à gauche

Gérard Noiriel est pourtant loin de passer pour l’historien le plus réactionnaire du champ universitaire. Il est l'un des fondateurs de la socio-histoire en France, et son dernier livre Une histoire populaire de la France (jumeau au catalogue Agone du classique d’Howard Zinn de 1980, Histoire populaire des Etats-Unis), a par exemple été largement médiatisé à la faveur de la mobilisation des “gilets jaunes”. Notamment parce que Noiriel réinscrit la colère actuelle des classes populaires dans le temps long d’une domination économique, sociale, et politique qui avait été en partie mise sous le tapis.

Mais il a aussi été un pilier en France de l’histoire de l’immigration, figure scientifique centrale au moment de la création du premier Musée de l’histoire de l’immigration dans l’ancien palais colonial de la Porte dorée à Paris... jusqu’à en claquer la porte le 31 mai 2007, pour protester contre la création d’un ministère de “l’immigration et de l’identité nationale”.

Ce jour-là, trois semaines après l’élection de Nicolas Sarkozy, ils sont huit universitaires à démissionner après avoir participé, pendant quatre ans, à la préparation du projet scientifique du musée qui s’élaborait comme “un nouveau lieu de l’histoire de France” depuis 2002 et Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élection présidentielle. Parmi les démissionnaires, Gérard Noiriel, Patrick Weil, et aussi Patrick Simon, démographe à l’INED, reconnu pour ses travaux sur les discriminations... et aujourd’hui l'une des figures de la revue Mouvements. Ce n’est pas un détail mondain, une bataille de noms (ou d’égos) encapsulée dans un petit microcosme universitaire : ça raconte dix ans au cours desquels un fossé s’est creusé au sein des sciences sociales, y compris chez des chercheurs qui ont en commun d’être plutôt classés à gauche.

Ce fossé est scientifique, épistémologique, il est sans doute aussi politique et peut en partie témoigner, depuis la communauté universitaire, d’un malaise qui va s’épaississant, à gauche. Et pour lequel le concept d’intersectionnalité fait un peu office de thermomètre - y compris dans ce que dit sa difficulté à s’imposer.

En dénonçant les points aveugles d'un féminisme marxiste à la française tel qu’il s’était installé dans les années 70, les tenants de l’intersectionnalité se sont d’abord heurtés à une partie des réseaux militants féministes - endossant par exemple le slogan du black feminism, “Toutes les femmes sont blanches, tous les Noirs sont hommes, mais nous sommes quelques-unes à être courageuses” .

Ils s’affrontent aujourd’hui à ceux qui se réclament notamment de l’universalisme républicain, ce modèle français dont s’étonnaient deux figures de la pensée intersectionnelle américaine, Laura Frader et Joan Scott, en 2004, date de leur passage à France Culture dans La Fabrique de l'histoire.

1947 : Simone Veil et "la race juive"

Contrairement aux Etats-Unis d’où viennent Scott et Frader, la tradition française républicaine se veut aveugle à la race et à la couleur, et ça explique en partie les résistances à l’intersectionnalité. Qui se doublent souvent d’une réticence très concrète, sur le terrain, chez des militants, à faire cortège commun pour manifester, au nom de la convergence des luttes, aux côtés de féministes musulmanes et voilées, de militantes lesbiennes, gays ou queer, de gardiens du temple marxistes, ou encore avec des collectifs de lutte contre l’islamophobie. Dire “race” fait souvent sursauter dans la France de 2019. Ce n’est pas nouveau mais ça n’a pas été aussi constant qu’on l’entend dire parfois : ainsi, on trouve dans les archives radiophoniques cette émission Réponses à tout de mars 1947 qui s’intitulait "Le racisme". On pouvait y entendre Simone Veil, âgée de 20 ans, raconter devant les députés à l’Assemblée nationale “les différences dans la race juive” suite à son expérience concentrationnaire. Au perchoir, on la présente comme “déportée raciale” et le mot "race" rebondit sans faire frémir tout au long de l'émission.

Dans le champ académique, l’intersectionnalité ne s’oppose pas seulement à cette tradition républicaine universaliste qui s’est imposée avec d’autant plus de souffle que le Troisième Reich avait pratiqué la sélection raciale avec la complicité de l’Etat français à Vichy. L’approche intersectionnelle se heurte aussi aujourd’hui à la question d’une concurrence des objets de recherche. Pour faire court, la question est de savoir si la race ne joue pas contre la classe.

Le 29 octobre 2018, Gérard Noiriel a ainsi repris sur son blog une idée qu’il développait déjà dans son Histoire populaire de la France où il écrivait :

La crise du mouvement ouvrier a considérablement affaibli les luttes sociales au profit des conflits identitaires. Le projet d’écrire une histoire populaire du point de vue des vaincus a été accaparé par les porte-parole des minorités (religieuses, raciales, sexuelles) pour alimenter des histoires féministes, multiculturalistes ou postcoloniales, qui ont contribué à marginaliser l’histoire des classes populaires.

Le gros sel de la domination

Compte tenu de l'ensemble de ses travaux depuis plus de quarante ans, il y aurait quelque chose d’un peu aberrant à résumer au gros sel (dans la plaie) Gérard Noiriel comme un chercheur suprémaciste blanc. Et l'historien est loin d’être le seul à endosser cette lecture critique des travaux au prisme de la race. Il fait partie de ces intellectuels qui déplorent depuis plusieurs années déjà l’affaiblissement du concept de “classe sociale” et cette marginalisation des classes populaires dans les médias, dans les programmes scolaires, et donc, aussi, dans les sciences sociales elles-mêmes. Et finalement, l'effacement progressif de l’idée d’une société divisée par classes, qui porte au fond en elle l’idée que ceux qui ont plus de pouvoir, de richesse, de capacité à se faire entendre, dominent ceux qui sont au bas de l’échelle sociale.

Cet effacement, qui coïncide avec la dévalorisation du marxisme sur la scène politique, a bien une réalité tangible, quantifiable et irréfutable. Ainsi en octobre 2018, un précédent article intitulé “Classes sociales, un concept en voie de disparition”, citait sur franceculture.fr les travaux d'Alexis Spire et Emmanuel Pierru, qui datent précisément à 1984 le “déclin très net” des termes “classe sociale” ou “classe ouvrière” si l’on passe au peigne fin l’ensemble des références au catalogue de la Bibliothèque nationale. Trente-cinq ans plus tard, on peut lier ce recul, bien réel, de la lecture en termes de classes sociales au mépris de classe sans filtre et sans vergogne qu’on peut palper un peu partout aujourd’hui.

La question de savoir si c’est la race qui a dévitalisé la lutte des classes (et si, au fond, la classe devrait primer sur la race ou le genre) est loin d’être tranchée, qu’on regarde la controverse depuis l’université ou du côté de la sphère militante. Mais sur son blog comme dans son Histoire populaire de la France, Gérard Noiriel va plus loin - et c'est ce que lui reprochent aujourd'hui ses détracteurs.

Il ne s’en tient pas à déplorer la marginalisation des classes populaires. Il accuse en fait les chercheurs qui travaillent sur le genre ou la race d’avoir raflé la mise. Dans le même texte, l’historien écrit un peu plus loin :

Il suffit de consulter la bibliographie des articles et ouvrages publiés en histoire ces dernières années ou de regarder les recrutements sur des postes universitaires pour être convaincu [que] des histoires féministes, multiculturalistes ou postcoloniales, ont contribué à marginaliser l’histoire des classes populaires.

Dans un des articles du dossier de Mouvements, Inès Bouzelmat a cherché à lui répondre à travers une approche sociologique fine et ce qu’on appelle, dans le jargon sociologique, “une analyse des correspondances multiples” (pour faire court, une modélisation cartographique héritée de Pierre Bourdieu, qui croise le quantitatif et le qualitatif). En regardant à la fois les publications, les postes, la visibilité des uns et des autres, ou encore de nombreuses autres variables, et en citant anonymement des entretiens menés auprès de plus de cent de ses collègues à l'approche intersectionnelle, la chercheuse entend montrer que “les travaux sur la question minoritaire, la racialisation ou le postcolonial demeurent des domaines de “niche”, largement circonscrits à des revues et des espaces académiques propres, considérés comme des objets scientifiques à la légitimité discutable et bénéficiant d’une faible audience dans le champ académique comme dans l’espace public – à l’exception de quelques productions vulgarisées.” Pour elle, “les thématiques de l’intersectionnalité demeurent dominées”... tout comme les chercheurs qui s’en saisissent le sont eux aussi.

"De la question sociale à la question raciale"... et son point d'interrogation

Ce que le dossier révèle, comme du reste le blog de Gérard Noiriel, c’est que la sphère académique s’est fracturée sur la race, et que la fracture est allée s’élargissant. Eric et Didier Fassin, deux chercheurs de renom en sciences sociales, sont parmi ceux qui se sont saisis très tôt d’une approche intersectionnelle. En 2006, ils coordonnaient, à La Découverte, un ouvrage collectif intitulé De la question sociale à la question raciale ? (dont le point d’interrogation fait partie du titre).

Au sommaire de ce livre qu’on peut regarder aujourd’hui comme un moment-charnière, on trouve parmi les contributeurs :

les frères Fassin, à raison de plusieurs textes chacun (dont “Aveugles à la race ou au racisme ?” par Eric Fassin et “Nommer, interpréter. Le sens commun de la question raciale” par Didier Fassin)
Pap Ndiaye (“Questions de couleur. Histoire, idéologie et pratiques du colorisme”)
Stéphane Beaud et Michel Pialoux, pour un quatre-main devenu classique, “Racisme ouvrier ou mépris de classe ? Retour sur une enquête de terrain” (qui faisait suite à vingt ans de travaux de Michel Pialoux d'abord, puis de Pialoux avec Beaud, dans les usines automobile du côté de Sochaux)
et donc, parmi d’autres, Gérard Noiriel et sa contribution “Color blindness” et construction des identités dans l'espace public français

Ce livre collectif voyait le jour quelques mois après le soulèvement de 2005 dans les quartiers populaires (on dira “les émeutes de banlieue”). Il montrait, sous forme chorale et pas monolithique, que les sciences sociales s’interrogeaient sur la manière d’envisager une réalité et une histoire qui articulaient le social, l’économique, le racial, et aussi (moins visible dans l’ouvrage), le genre.

A l’époque, Eric Fassin était venu défendre l'ouvrage sur France Culture dans La Suite dans les idées le 28 novembre 2006.

L’approche d’Eric Fassin se distinguait déjà de celle d’un Gérard Noiriel à la sortie de De la question sociale à la question raciale ? Mais les archives témoignent encore d’un dialogue nourri sur ces questions controversées. Ainsi, le 5 février 2008, La Suite dans les idées recevait le même jour, Eric Fassin, Gérard Noiriel et Patrick Weil, venus dialoguer sur l’idée d’un modèle républicain aveugle à la couleur ou à la race.

Des programmes de colloques ou de journées d’études à la même époque montrent que l’on débattait encore des termes pour raconter la domination, sans forcément dire qui serait le plus dominé des deux, du noir discriminé ou de la mère célibataire paupérisée.

"Chercheurs minoritaires", porte-paroles et entrepreneurs d'une cause

Aujourd’hui, un livre choral comme De la question sociale à la question raciale ? serait-il possible ? Avec les mêmes chercheurs, poids-lourds de leurs domaines respectifs ? Et conserverait-il son point d’interrogation en bout de titre ? Rien n’est moins sûr.

Treize ans plus tard, plusieurs des chercheurs du livre ont poursuivi leurs travaux dans une visée intersectionnelle et n’ont rien cédé à l’approche par la race. Ils ont, entre-temps, été rejoints par d’autres, parmi lesquels ceux qui signent aujourd’hui le dossier dans Mouvements et entendent répondre spécifiquement à Gérard Noiriel. Pourquoi lui ? Notamment parce qu’il a écrit noir sur blanc que ces chercheurs-là agissent en “porte-paroles des minorités”. Gérard Noiriel utilise l’expression dans son texte, mais d’autres aussi disent “chercheurs minoritaires”.

Audrey Célestine, Abdellali Hajjat et Lionel Zevounou leur répondent dans l’article “Rôle des intellectuel·les, universitaires ‘minoritaires’, et des porte-parole des minorités” : ils refusent cette assignation, l’idée qu’ils seraient porte-paroles ou entrepreneurs d’une cause (“un soupçon de militantisme”), et aussi ce renvoi à des origines ou à des trajectoires personnelles. Pour répondre, les trois chercheurs exhument un article de 2004 (dans la revue Hommes et migrations) dans lequel Gérard Noiriel regardait déjà des travaux comme les leurs depuis des "dispositions à la rébellion" qui seraient le fruit d’une histoire personnelle :

On oublie généralement que les dispositions pour la rébellion que l’on rencontre fréquemment dans les milieux issus de l’immigration s’expliquent par le fait qu’ils cumulent les formes les plus graves de souffrance sociale. Bien souvent ces personnes ne peuvent construire leur identité qu’en cultivant le potentiel de révolte qu’ils ont en eux. L’investissement dans l’écriture, dans la recherche, dans les activités culturelles en rapport avec l’expérience vécue peut être une façon de canaliser ce potentiel dans des formes qui soient compatibles avec le principe de la démocratie, avec le respect des biens et des personnes.

“Emotion” ? Audrey Célestine, Abdellali Hajjat et Lionel Zevounou répondent ceci :

La réduction de la professionnalisation des minoritaires dans le monde académique à une révolte non-violente pose question. Assigner leur travail scientifique à une émotion, la révolte, n’est-ce pas nier le fait que les minoritaires peuvent tout à fait être chercheur.e sans qu’ils.elles soient déterminé.e.s par une improbable disposition à la rébellion ?

Ils écrivent “les minoritaires dans le monde académique” et pas “les racisés” tandis que les mots “racisation” et “racialisation” peinent eux aussi à s’imposer, dans le langage commun comme dans la sphère intellectuelle. La preuve ? Pas la moindre occurrence, dans les archives radiophoniques, du nom de Colette Guillaumin, la chercheuse à l’origine du terme “racisation”, en 1972, tandis qu’elle cherchait à affiner le concept de “racialisation”, de Franz Fanon, pour décrire les mécanismes concrets, pratiques, de discriminations liées à la race (comme le rappellent Lila Belkacem, Lucia Direnberger, Karim Hammou et Zacharias Zoubir dans "Prendre au sérieux les recherches sur les rapports sociaux de race").

L'OPA des "décolonisés", cinquième colonne académique ?

Ce dossier de Mouvements est aussi à regarder depuis un contexte. L’incrédulité des auteurs à voir des collègues les renvoyer ainsi à leurs origines ou à des trajectoires personnelles, puis à faire d’eux des entrepreneurs d’une cause communautaire sous prétexte qu’ils n’auraient pas rien à voir avec une histoire de l’immigration tout en travaillant sur les discriminations raciales ou religieuses, ne flotte pas dans un air éthéré. Elle s’enracine dans plusieurs saillies de l’automne 2018, qui a vu fleurir dans la presse les accusations de communautarisme à l’université.

Le 28 novembre 2018, Le Point publiait une tribune signée par 80 intellectuels (dont les universitaires Jean-Louis Fabiani, Jean-Claude Michéa, Robert Redeker ou encore Jean-Pierre Le Goff), contre le “décolonialisme” qui, “sous couvert de lutte pour l’émancipation, réactive l’idée de « race» ”.

Deux jours plus tard, c’est dans L’Obs que Matthieu Aron dénonçait à son tour un communautarisme “décolonial” qui noyauterait la sphère académique - dans un article à charge qui mélange approche intersectionnelle, culture de l’excuse, racisme anti-blanc et chercheuses voilées. D’après l’auteur, plusieurs chercheurs en place dénonceraient (sous le sceau d’un anonymat assez commode en l’espèce) l’OPA en cours à laquelle se livreraient des chercheurs issus de l’immigration. Et plus particulièrement, des universitaires qui travaillent sur l’islam, renvoyés aux "Indigènes de la République", un collectif anti-raciste radical, anti-impérialiste et anti-sioniste, accusé de longue date de racisme ou d’antisémitisme et de collusion avec l’islamisme.

Le lien avec les chercheurs intersectionnels ? Le même vieux procès qu’on leur fait depuis maintenant une dizaine d’années : être des faux-nez de l'islamisme dans le monde académique. Car on est bien obligé de constater qu'une large part des critiques adressées à l’approche par la race tient moins à la couleur qu’à la religion - et, au fond, à l’islam.

Qu’Abdellali Hajjat (qui a soutenu en 2009 une thèse intitulée “Assimilation et naturalisation : socio-histoire d'une injonction d'Etat”) soit monté au front dans Mouvements ne tient ainsi pas du hasard : en 2013, il avait déjà essuyé des procès en sorcellerie, lorsqu’il avait sorti, avec le sociologue Marwan Mohammed, le livre Islamophobie (à La Découverte). Sous-titre : “Comment les élites françaises fabriquent le «problème musulman»”. A l'époque, 8 actes sur 10 répertoriés comme "islamophobes", visaient des femmes, souvent issues de milieux populaires : l'islamophobie est aussi une intersectionnalité.

Ce terme d'“islamophobie” est un néologisme controversé depuis son origine, et Vincent Geisser, le premier à le réactiver dans la période récente, avec La Nouvelle islamophobie, paru en 2003 (déjà à La Découverte), avait lui-même été brocardé parce qu’il distinguait une singularité, parmi toutes les discriminations, qui mettait en lumière un rapport spécifique à l’islam. C’est dans la voix de Vincent Geisser, invité de 21 août 2003 sur France Culture, qu’on trouve première occurrence du mot dans l'indexation des archives radiophoniques.

Pourtant, malgré la charge dont il avait fait les frais à l’époque, Vincent Geisser n’avait pas été taxé de “chercheur minoritaire”. Aldellali Hajjat et Marwan Mohammed, si.

Invités de La Grande table le 27 septembre 2013 sur France Culture, les deux auteurs répondaient ceci à ceux qui leur reprochaient (déjà) de céder au militantisme… ou (déjà) de négliger les classes sociales au bénéfice de l’islam :

Marwan Mohammed : “L’islamophobie s’articule avec un discours qui se veut progressiste. [...] Il y a toujours eu cette articulation entre le racial et le religieux sauf qu’aujourd’hui, les termes se sont modifiés. Il faut aussi envisager les catégories comme le sexe ou la classe."
Adellali Hajjat : “Nous sommes des transfuges de classes. Nous vivons dans des quartiers populaires. Tout savoir est un savoir situé. Ce n’est pas un essai, ce n’est pas un livre à thèse, nous avons voulu faire un livre à portée scientifique à partir de faits."

Cinq ans plus tard, le même Abdellali Hajjat écrit avec ses co-auteurs dans Mouvements :

Plusieurs travaux britanniques et étasuniens ont documenté l’expérience vécue par les universitaires minoritaires, marquée par les procès d’intention, les micro-agressions et les censures publiques qu’ils subissent au quotidien, leur rappelant qu’ils ne sont pas totalement à leur place ou qu’ils.elles ne sont pas des universitaires à part entière.
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Message par freeshost »

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Re: [Index] Sociologie : Pour parler de sociologie...

Message par freeshost »

Une insulte insinue (ou insuffle) une certaine connotation à des mots et à des caractéristiques. Une insulte est (donc) toujours de l'ordre du jugement. Elle est donc, à mon sens, inapte à l'humanisme.

Après, je ne nie pas ses effets sur les personnes visées/cibles, notamment celles qui ne se savent pas encore spectro-autistes.

Mais, de manière plus générale, le langage non verbal aura un effet (et sera plus signifiant que le seul langage verbal) délétère sur la personne visée (notamment si celle-ci "joue le jeu" [= interprète le mot comme une insulte et accepte/intériorise cette interprétation]).

Image

Lucky Luke - L'héritage de Rantanplan :mrgreen:
Spoiler : Ces jugements de valeur, tsé ! : 
Une insulte découle toujours d'un jugement de valeur, en l'occurrence négatif (alors que le compliment découle d'un jugement de valeur positif). On est donc en pleine heuristique de jugement (lire les divers ouvrages de Kahneman, entre autres). Voir aussi l'effet de halo. En fait, c'est surtout cet effet de halo qui m'aide à expliquer que peu de gens sont neutres.

D'un certain point de vue, l'insulte est une figure de style, qui ne fait donc pas toujours son effet. Il n'y a qu'à voir les divers "essais de complicité" ratés lorsqu'on entend le "je n'avais pas compris ta blague / ton jeu" (l'émetteur croyant que son destinataire comprendrait son jeu).

Rien ne m'oblige à comprendre l'insulte, encore moins à faire croire que je l'ai comprise. Je peux faire croire que je ne l'ai pas comprise, et passer mon chemin, continuer mon chemin comme si de rien n'était (pour autant que je maîtrise un tant soit peu l'expression de mes émotions).

D'un autre point de vue encore... une insulte basée sur un signifiant ne peut être [signifiante] que si ce signifiant est mal compris, méconnu, flou. Et oui ! Un signifiant clair, univoque, verrait tout de suite ses connotations (notamment négatives) brisées par la sagesse citoyenne et humaniste. [En effet, une personne humaniste ne se laisse pas entraîner facilement par des courants jugeurs, anti-humanistes.]

Bon, en fait, dans un contexte C1, quand I1 envoie une insulte à la victime V1, ben... en soit, ce n'est pas si difficile pour V1 de prendre de la distance avec l'attaque de I1. Ce qui est plus difficile surtout... ce sont les réactions des personnes alentours :

- absence de réactions,
- réactions qui encouragent/félicitent le comportement de I1 (notamment par conformisme réconfortant, "sécurisant", "se sentir du côté des "gagnants"")).

Ne prenons donc pas trop à cœur les insultes, prends plutôt du recul. Si les insultes produisent leurs effets, elles peuvent devenir des prophéties auto-réalisatrices.
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Message par freeshost »

Article wikipedia en français

Chaque contre-valeur est le revers de la médaille d'une valeur. :mrgreen:

L'insulte décodée

On peut parfois y voir, dans certains contextes, des liens avec la théorie de la dominance sociale.

Il peut être intéressant se procurer Histoire du blasphème en Occident. Fin XVIe - milieu XIXe siècle

Insult, Aggression, and the Southern Culture of Honor:An "Experimental Ethnography"

From Insult to Injury: Explaining the Impact of Incivility

On peut aussi voir que l'insulte est un des moyens possibles (pas forcément nécessaires, mais souvent "ornemental") pour désigner des boucs émissaires, plus souvent pour en renforcer la représentation.

On peut aussi se rappeler que les insultes ne sont pas forcément verbales, et que les signifiants peuvent varier d'une région/culture à une autre. [Le majeur de certaines régions se traduit avec le V (formé par l'index et le majeur) dans d'autres régions. Il y a aussi divers autres exemples. D'ailleurs, des personnes ont bien commencé à intérioriser une certaine signification de la quenelle de Dieudonné. Rien de nouveau pour Pavlov et son chien. :mrgreen: ]

Après, comme chaque mot, chaque expression, chaque insulte a sa propre histoire et ses propres relations.

Nous pouvons changer le cours de l'histoire du mot "autiste". :mrgreen: [Et d'autres mots "mésusés" : "schizophrène", "trisomique", etc.]

On peut éventuellement se questionner éthiquement quand l'insulte fait référence à un être fictif. "Arrête de faire ton Abdallah !"
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Re: [Index] Sociologie : Pour parler de sociologie...

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« Politiquement correct » :
TCS = trouble de la communication sociale (24/09/2014).
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Re: [Index] Sociologie : Pour parler de sociologie...

Message par freeshost »

Blue sky thinking: is it time to stop work taking over our lives?
Spoiler : Quotation : 
Elle Hunt

Sun 4 Oct 2020 10.00 BST

Anthropologist James Suzman says now is the perfect time to rein in our unsustainable work habits. But is it possible?

Three encounters loom large in the anthropologist James Suzman’s memory of his brief but informative stint in the corporate world. The first was early on, when he told a colleague that he didn’t need to spend the half-million pounds allocated for a task because he could do it for free. His colleague was horrified. “If you don’t spend your budget,” he said, “they won’t think we’re doing anything!”

Soon afterwards, Suzman was chatting with a board director about what they’d do if they won the lottery. Suzman thought of the director’s massive townhouse and annual bonus. He was surprised when the man told him that, even with a colossal windfall, he’d continue working.

Later, the same director observed to Suzman and the rest of the senior management team that they spent more time with each other than they did with their families. He delivered the line matter-of-factly, as though it were just the way work was. But Suzman knew that it didn’t have to be.

Before he took his job, Suzman had spent some 15 years based among the Ju/’hoansi “Bushmen” of eastern Namibia, who were notable for having sustained a foraging society well into the 20th century. And while he lived among them, he witnessed first-hand how the hunter-gatherer life was far from the constant struggle for survival many of us imagine it to have been. In 1966, a landmark anthropology paper had found that the Ju/’hoansi were generally well nourished and lived long, content lives. They used the bulk of their time to rest, or have fun. Astonishingly, they spent just 15 hours a week finding food, and they stored little for the future, trusting in the surrounding desert to provide when required. Any individual surpluses were redistributed among the group. With social sanctions for selfishness and self-importance, their economy functioned in such a way as to eradicate inequality and material desires. Anthropologists concluded that the Ju/’hoansi worked almost exclusively to meet their immediate needs, beyond which their wants were few.

By contrast, in the corporate world – the world we know, where we might work 80-hour weeks largely untethered from any question of what is required and what is lusted after – our desires seem limitless, driven by an ever-escalating demand for growth and productivity.

To Suzman, the implications of this contrast were seismic. First, it suggested that the assumptions underpinning our modern economy – that we are competitive by nature, that our desires will always exceed our means – were wrong. And second, it meant that for the vast majority of our history, while we roamed the Earth as hunter-gatherers, we enjoyed more leisure time than we do today. In an age of increasing inequality, ill health, dissatisfaction and even desperation around work – and, with the coronavirus pandemic, more uncertainty than ever – it presents a hopeful thought: maybe it doesn’t have to be like this.

“Half the value of understanding hunter-gatherer society is to recognise that lots of these things that we think we are hostage to are actually not a part of our nature,” says Suzman, emphatically. “We can trace our work ethic, we can understand why we became obsessed with scarcity, we can understand why it’s different now… Maybe there are other ways of doing things.”

Our understanding of work as a means to an end has been so derailed it often feels as though we never stop working. We work for free and monetise our hobbies. We work on our bodies, our relationships, our selves. For many of us, maybe more than might like to admit it, work may be our primary identity.

It has been the driving force of my life for nearly 20 years, the unquestioned catalyst for me to move to another country or stay up all night. Given the option of a lighter load, my preference has been for slightly too much – occasionally misjudging the line.

“You’re a worker, I’m a worker,” says Suzman freely, when we meet at a café in Cambridge, where he lives. “I identify myself very much with my work. I’m actually rudderless when I’m not working; doing things like a pure leisure holiday, I find unbearable.” At its most fundamental level, says Suzman, work is the process of capturing and expending energy – so it seems fitting that he should have so much of it. He is breezy about his knowledge and persuasive in his arguments, and his mind draws links across human history just about as fast as he can express them.

Suzman looks back on his seven years in a corporate role as “fieldwork in big business”. But he still seems to feel conflicted about the experience, not least when he tells me who he worked for: the diamond-mining giant De Beers.

He joined in 2007 as its global director of public affairs, wooed by its talk of wanting to go green and give back. Under his leadership, the company was repeatedly recognised by the industry for its sustainability-reporting practices and environmental and social performance. As an anthropologist, Suzman learned the company culture and quickly scaled its ranks, “But the longer I was there, the more I internalised it,” he says. “I began to dislike myself terribly, sitting there thinking: ‘How’s my bonus going to look this year?’”

During the 2009 recession, De Beers’s profits plum meted 99%, forcing a company restructure and redundancies that gutted his team. “I was just miserable,” he says. Suzman ended up walking out of the job in 2013. “It was one of the happiest days of my life, marching out of there – and then I went straight back to the Kalahari.”

He set up the Anthropos think-tank, offering anthropological approaches to present-day problem-solving (at a corporate rate of up to £1,400 per day – half for NGOs), and later wrote a book, Affluence Without Abundance, about what the western world could learn from the Bushmen.

Suzman says his time at De Beers taught him to empathise. “It’s really easy to make a caricature of business people, but they’re cultural creatures – we all try to establish meaning and legitimacy around what we do with our lives.”

Many of us are unsuccessful. In a 2015 YouGov survey, 37% of Britons said their work did not meaningfully contribute to the world. In 2017, a Gallup poll of 155 counties found that only one in 10 western Europeans described themselves as engaged by their jobs. This has been framed as a workplace issue – actually, says Suzman, “it is a problem with the nature of work”. It reflects the 20th century boom in what the late anthropologist David Graeber dubbed “bullshit jobs”, creating work for work’s sake. From “human relations” departments that exist to improve attitudes to work and with it productivity, to pay and bonus structures to further favour top earners, Suzman says there has emerged “a whole class of people who were utterly invested in this idea that they were actually creating value”. The key to corporate success is convincing everyone else you’re important and worthwhile, as Suzman learned for himself at De Beers.

“You developed vast bureaucracies which were ultimately pointless, but that was the skill: the bigger your bureaucracy, the more power you wielded and the more important you became. I established this vast empire – I don’t think it made a jot of difference to anything when I got out.”

For a self-identifying worker, it was an important reminder: if work is a transaction of energy, our own is finite.

Not long ago, we dreamed of being liberated from work altogether. In 1930, the economist John Maynard Keynes imagined a future in which technological innovation, efficiency gains and long-term capital growth might usher in a “golden age of leisure” in which we could satisfy our needs by working no more than 15 hours a week.

But a century of efforts to reduce work disappeared after the Second World War. Though labour productivity has increased roughly four- or five-fold in industrialised nations since then, average weekly working hours have remained stubborn at just under 40 hours a week. This is in part a result of our innate drive to keep ourselves occupied, says Suzman: “People like to be busy. This is an absolute fundamental thing: we like to be skilled, we like to whittle, we like to carve.”

In his new book, Work: A History of How We Spend Our Time, Suzman takes a discursive path through millennia of milestones to trace our contemporary relationship to work – and concludes that the problem is a “very simple set of assumptions about human nature, which are clearly and demonstrably wrong”.

Chief among them is our preoccupation with scarcity – a hangover from the early agricultural state some 12,000 years ago, when we went from foragers to farmers. Somewhat paradoxically, in being able to cultivate and store food, we became fixated on the possibility we might not have enough – even as our productivity was turbo-charged by the agricultural and industrial revolutions.

The necessity – not to mention, moral good – of hard work was a cultural mantra that became hardwired over time, and persisted even as the driver switched from survival to financial capital. The emergence of cities 8,000 years ago created a whole new kind of work driven not by our material needs – those were met by farmers – but by desires: for status, pleasure, wealth and power.

“Greed became institutionalised with cities,” says Suzman. Our new physical proximity to wealth also exacerbated our anxiety over scarcity, focusing our minds on how we were lacking. “Suddenly there was now this confrontation, this contrast in wealth, and I think that began to shape people. It created this melancholy of constant aspiration.”

Signs of this are everywhere, says Suzman, from grand country-house gates in front of a humble semi-detached to the global trade in counterfeit luxury goods. Social media works as an “ostentation-amplifier”, reassuring ourselves of our success but further escalating our material desires.

“As a species, when we see inequality, we try to either level it down, which is what the Bushman approach was – or we try to level up to it,” says Suzman. We may not even be conscious of the path we’ve chosen, with people routinely underestimating the extent of material inequality in their home countries.

A recent report by Tax Justice found that Britons think accumulating wealth is positive and morally right, and are broadly supportive of the ultra-rich, believing them to have been rewarded for sacrifice and ambition. Tellingly, even the ultra-rich have not made it off the treadmill, tending to work longer hours and spend less time on leisure. But growth has become such an obsession, says Suzman, that, “We now spend most of our energy doing utterly pointless things” – which is damaging not only to our health but to that of the planet through emissions. As an ex-smoker, Suzman likens it to a nicotine addiction. “We pump crap into the atmosphere. It doesn’t make us happy. I can’t work out who benefits.”

As Suzman is talking, I consider work as the source of both my greatest satisfactions and my most miserable lows. I’d continue to do my job, and maybe even to periodically burn out, even if I had no material need to do so. My relationship to work may be the most significant in my life – but I am often made uncomfortably aware that the feeling isn’t mutual.

For me, I tell Suzman – as I have told successive therapists, and with no small sadness – the hollowness emerges from a system that makes it seem both joyless and endless. “It’s that at the moment,” he agrees. “But it’s that feeling that makes me vaguely optimistic that we won’t put up with this any more.”

In just six months, coronavirus has underscored much of what wasn’t working about work, and created the opportunity for change. “Essential workers” have been celebrated and revealed to be undervalued and underpaid. The successful switch to working from home may make punishing commutes – or even inner-city business districts – a thing of the past. Social media has abandoned “every day I’m hustling” in favour of a new catch cry: “You don’t have to be productive during a pandemic.” And the furlough scheme opened many people’s eyes to how the economy could be put to work for everybody. Support for once-fringe ideas that might redress a work-life balance skewed beyond proportion, such as a universal basic income (UBI) or a four-day week, has been voiced even from conservative corners.

It is proof to Suzman that as “stupidly intransigent” as humans can be with regards to culture, “they do change when change is forced upon them” – a hopeful thought for the looming climate crisis. What we must do now, Suzman says, is to seize the opportunity to explore new approaches to organising capital.

“We know that there’s a problem: there’s the environmental aspect, the misery aspect. What we have to do is acknowledge that we actually have these problems… and take experimentation seriously.” Trialling a UBI, or ways of turning office blocks into housing, are two such possible steps towards a “future world order”, says Suzman. We are, after all, unable to go back.

Even the Ju/’hoansi could not return to a hunter-gatherer economy today, says Suzman, but; “I think an economy based on abundance is a cultural possibility, and a choice.” The Ju/’hoansi view of the world as “fundamentally a sharing place… cascaded through everything about their society,” he says. “There’s a recognising that when you take things out of a hierarchy, there’s a great deal more freedom.”

In imagining a new way to work, we might start by asking ourselves if our desires really are infinite – and what we are prepared to pay for them. Suzman is hopeful. “I don’t know anybody with infinite desires,” he says. “I think for most people, they’re pretty modest.”

Work: A History of How We Spend Our Time, by James Suzman, is out now (Bloomsbury, £25). Buy a copy for £21.75 from guardianbookshop.com

Desk and chair in main picture from cmscambridge.co.uk
When sense is getting nonsense, nonsense is getting sense. :lol:

Qu'elles soient rémunérées (financièrement, socialement, psychiquement, etc.) ou non, vos activités ont-elles du sens ?

Penser en termes de rémunérations, c'est sous-entendre des idées sous-jacentes de justice. Summum jus, summa injuria.

On attend des retours sur investissement, mais le temps ne revient pas en arrière. :lol:
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Re: [Index] Sociologie : Pour parler de sociologie...

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