Ouest-France / Bretagne / Lorient / Archives du lundi 27-02-2012
« Faisons évoluer les choses ensemble » - Lorient
Gwendal Rouillard, député PS de la 5 e circonscription, est secrétaire du groupe d'études sur l'autisme à l'Assemblée nationale ; groupe que préside le député UMP Daniel Fasquelle. L'élu lorientais a un frère autiste.
Pourquoi soutenez la proposition de loi de Daniel Fasquelle, visant l'arrêt des pratiques psychanalytiques dans l'accompagnement des personnes autistes ?
Certains psychiatres et psychanalystes français persistent à considérer l'autisme comme une psychose résultant d'une aliénation maternelle, voire d'une fusion incestueuse à la mère... Je m'attaque aux pratiques, pas aux personnes ni aux psychanalystes. Je rappelle, ceci dit, qu'il n'y a pas de diplôme sanctionnant la pratique de la psychanalyse. En tant qu'élu, je défends la dignité humaine et je prends en compte les avancées scientifiques. Je fais par ailleurs la distinction entre les psychanalystes qui s'arc-boutent sur le système, pour des raisons de business, et ceux qui évoluent.
Deux thèses s'affrontent : l'autisme est une maladie mentale ou un trouble neuro-développemental ?
Les études scientifiques ont montré qu'il s'agissait d'un dysfonctionnement d'une zone du cerveau. La classification internationale de l'autisme est faite en ce sens. Or, la France est le seul pays à considérer que l'autisme est une maladie mentale ! Du coup, l'approche psychiatrique et psychanalytique est privilégiée. Et le suivi en hôpital psychiatrique, aussi... L'une des conséquences est qu'en 2004, la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme pour absence de politique éducative. Par ailleurs, il faut savoir que la prise en charge d'un patient qui a pour destin l'hôpital psychiatrique à vie coûte 120 000 € par an... La France doit tirer les enseignements des résultats scientifiques qui démontrent, aux États-Unis ou ailleurs, le bien-fondé de nouvelles approches, notamment neurologiques. La réflexion doit porter en priorité sur le diagnostic précoce, la politique éducative, la formation des professionnels, le financement de la recherche.
Que pensez-vous de la polémique suscitée par le film Le Mur ?
Sur le fond, la réalisatrice pose une pierre à l'édifice du débat démocratique sur l'autisme. De notre côté, les élus, nous avons posé un acte politique. Il y a eu les premières rencontres parlementaires sur l'autisme, en janvier dernier. Nous prenons rendez-vous avec les prochains gouvernement et parlement, quels qu'ils soient. Faisons évoluer les choses ensemble.
Recueilli par C.J.
Voir l'interview d'une psychiatre de Lorient.
Questions et interventions de parlementaires
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Re: Questions et interventions de parlementaires
père autiste d'une fille autiste "Asperger" de 41 ans
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Re: Questions et interventions de parlementaires
Autisme. «Un combat pour la dignité»
Le télégramme - 3/04/2012 - Lorient
Gwendal Rouillard veut mettre un terme à l'approche psychanalytique de l'autisme et à ses conséquences sur les enfants.
Une lumière bleue, hier, pour la Journée mondiale de l'autisme. Une autre, plus crue est aussi braquée sur les méthodes de prise en charge des autistes en France. Gwendal Rouillard, secrétaire du groupe «Autisme» à l'Assemblée, réclame d'urgence une loi-cadre.
Pourquoi y a-t-il urgence à revoir la prise en charge de l'autisme en France?
Il faut savoir qu'en France cohabitent deux conceptions très tranchées de la prise en charge de l'autisme. L'approche psychanalytique, longtemps dominante, considère l'autisme comme une maladie mentale. A l'image de beaucoup d'associations de parents, en guerre contre les psys, je défends une approche neurologique, basée sur des preuves scientifiques, qui retient une cause génétique. Plusieurs gènes seraient, en effet, impliqués. C'est une différence fondamentale et symbolique: l'enfant autiste n'est pas un malade mental mais une personne souffrant d'un handicap cognitif. Et donc réclamant une thérapie adaptée en conséquence. Aujourd'hui, ce débat est très vif et controversé.
Que reprochez-vous à la psychanalyse?
Je n'ai rien contre les psys mais leur approche, appliquée à l'autisme, est très traumatisante pour les enfants et les parents. Les méthodes sont en cause mais également les résultats. Leurs interventions sont un échec. Ce n'est pas moi qui l'affirme, mais le dernier rapport de la Haute autorité de santé (mars2012). L'Agence nationale d'évaluation (l'Anesm) le dit très clairement: «L'absence de données sur leur efficacité et la divergence des avis exprimés ne permettent pas de conclure à la pertinence des interventions fondées sur des approches psychanalytiques». C'est une recommandation lourde de sens mais aussi un espoir.
Vous évoquez des pratiques traumatisantes?
Tout part de ce postulat, infondé à mes yeux, de maladie mentale. Il faut savoir qu'en France, 60% des personnes placées en isolement plus de 30 jours en hôpital psychiatrique sont des autistes. La Haute Autorité conclut également à l'absence de pertinence du «packing» (cette technique consiste à envelopper les enfants dans des linges froids et humides pour provoquer un choc thermique). Dans les pays du Nord, ces traitements ont disparu depuis longtemps sauf en France. Bien d'autres choses me choquent. Imaginez-vous que les psys réclament la séparation de la mère et de l'enfant au motif que l'autisme leur serait imputable. Cette culpabilité est dramatique. Lors de mes permanences, je reçois régulièrement des parents en grande souffrance. Il faut que cela cesse.
Quelle est votre implication dans ce débat?
Député, j'ai rejoint le groupe d'études «Autisme» à l'assemblée nationale (80 parlementaires), présidé par Daniel Fasquelle (UMP). J'en suis le secrétaire. On veut que la France s'engage sur des priorités: le diagnostic précoce avant trois ans, essentiel pour construire un projet de vie; une politique éducative digne de ce nom englobant une réforme des aides de vie scolaire. En France, seuls 20% des enfants souffrant d'autisme sont scolarisés contre 80% en Italie. Nous sommes très en retard. Il faut aussi insister sur la formation de l'ensemble des professionnels (médecins généralistes, pédiatres...)
Concrètement, quel sera votre levier d'action?
Notre action va prendre la forme d'une proposition de loi. Nous réclamons l'interdiction des traitements psychanalytiques appliqués à l'autisme. Avec pour conséquence le non-remboursement des soins dont les effets ne sont pas reconnus ou efficients. Il faut savoir que le suivi d'un enfant revient à 45.000 € par an. 50% d'entre eux seront des adultes autonomes grâce aux approches éducatives. En hôpital psychiatrique, entre 14 ans et 65 ans, le coût avoisine les 290.000€/an. On tient à cette disposition car c'est un point central. Ces millions ainsi récupérés seront ainsi réaffectés au financement d'une politique basée sur une démarche scientifique et à un nouveau «plan Autisme».
Ce dossier demeure très conflictuel. Avez-vous des chances d'aboutir?
Je ne m'attaque pas aux personnes mais c'est un combat humaniste qu'il faut mener. À nous de convaincre les acteurs de la société. Car l'autisme n'est pas une question marginale. En 1995, on comptait une personne autiste sur 500. En 2012, le ratio est tombé à une sur 100. Les politiques de diagnostic précoce portent leurs fruits. On cherche et on commence à trouver. C'est cette politique que je défends avec force.
Propos recueillis par Régis Nescop
Le télégramme - 3/04/2012 - Lorient
Gwendal Rouillard veut mettre un terme à l'approche psychanalytique de l'autisme et à ses conséquences sur les enfants.
Une lumière bleue, hier, pour la Journée mondiale de l'autisme. Une autre, plus crue est aussi braquée sur les méthodes de prise en charge des autistes en France. Gwendal Rouillard, secrétaire du groupe «Autisme» à l'Assemblée, réclame d'urgence une loi-cadre.
Pourquoi y a-t-il urgence à revoir la prise en charge de l'autisme en France?
Il faut savoir qu'en France cohabitent deux conceptions très tranchées de la prise en charge de l'autisme. L'approche psychanalytique, longtemps dominante, considère l'autisme comme une maladie mentale. A l'image de beaucoup d'associations de parents, en guerre contre les psys, je défends une approche neurologique, basée sur des preuves scientifiques, qui retient une cause génétique. Plusieurs gènes seraient, en effet, impliqués. C'est une différence fondamentale et symbolique: l'enfant autiste n'est pas un malade mental mais une personne souffrant d'un handicap cognitif. Et donc réclamant une thérapie adaptée en conséquence. Aujourd'hui, ce débat est très vif et controversé.
Que reprochez-vous à la psychanalyse?
Je n'ai rien contre les psys mais leur approche, appliquée à l'autisme, est très traumatisante pour les enfants et les parents. Les méthodes sont en cause mais également les résultats. Leurs interventions sont un échec. Ce n'est pas moi qui l'affirme, mais le dernier rapport de la Haute autorité de santé (mars2012). L'Agence nationale d'évaluation (l'Anesm) le dit très clairement: «L'absence de données sur leur efficacité et la divergence des avis exprimés ne permettent pas de conclure à la pertinence des interventions fondées sur des approches psychanalytiques». C'est une recommandation lourde de sens mais aussi un espoir.
Vous évoquez des pratiques traumatisantes?
Tout part de ce postulat, infondé à mes yeux, de maladie mentale. Il faut savoir qu'en France, 60% des personnes placées en isolement plus de 30 jours en hôpital psychiatrique sont des autistes. La Haute Autorité conclut également à l'absence de pertinence du «packing» (cette technique consiste à envelopper les enfants dans des linges froids et humides pour provoquer un choc thermique). Dans les pays du Nord, ces traitements ont disparu depuis longtemps sauf en France. Bien d'autres choses me choquent. Imaginez-vous que les psys réclament la séparation de la mère et de l'enfant au motif que l'autisme leur serait imputable. Cette culpabilité est dramatique. Lors de mes permanences, je reçois régulièrement des parents en grande souffrance. Il faut que cela cesse.
Quelle est votre implication dans ce débat?
Député, j'ai rejoint le groupe d'études «Autisme» à l'assemblée nationale (80 parlementaires), présidé par Daniel Fasquelle (UMP). J'en suis le secrétaire. On veut que la France s'engage sur des priorités: le diagnostic précoce avant trois ans, essentiel pour construire un projet de vie; une politique éducative digne de ce nom englobant une réforme des aides de vie scolaire. En France, seuls 20% des enfants souffrant d'autisme sont scolarisés contre 80% en Italie. Nous sommes très en retard. Il faut aussi insister sur la formation de l'ensemble des professionnels (médecins généralistes, pédiatres...)
Concrètement, quel sera votre levier d'action?
Notre action va prendre la forme d'une proposition de loi. Nous réclamons l'interdiction des traitements psychanalytiques appliqués à l'autisme. Avec pour conséquence le non-remboursement des soins dont les effets ne sont pas reconnus ou efficients. Il faut savoir que le suivi d'un enfant revient à 45.000 € par an. 50% d'entre eux seront des adultes autonomes grâce aux approches éducatives. En hôpital psychiatrique, entre 14 ans et 65 ans, le coût avoisine les 290.000€/an. On tient à cette disposition car c'est un point central. Ces millions ainsi récupérés seront ainsi réaffectés au financement d'une politique basée sur une démarche scientifique et à un nouveau «plan Autisme».
Ce dossier demeure très conflictuel. Avez-vous des chances d'aboutir?
Je ne m'attaque pas aux personnes mais c'est un combat humaniste qu'il faut mener. À nous de convaincre les acteurs de la société. Car l'autisme n'est pas une question marginale. En 1995, on comptait une personne autiste sur 500. En 2012, le ratio est tombé à une sur 100. Les politiques de diagnostic précoce portent leurs fruits. On cherche et on commence à trouver. C'est cette politique que je défends avec force.
Propos recueillis par Régis Nescop
père autiste d'une fille autiste "Asperger" de 41 ans