Reconnaître les visages

[eurydice38]

Bonsoir,

Mon fils, dans sa classe, ne connaît qu'environ 5 prénoms sur 27 (et y associe le visage de l'enfant en question), ce qui ne facilite pas son intégration ! L''an dernier, le collège m'avait donné le "trombinoscope" de la classe, pour l'aider, mais en fait, c'était une photocopie en noir et blanc, souvent les photos sont trop "figées" pour que cela corresponde vraiment au visage de l'enfant et ça ne l'a pas du tout aidé. J'imagine que mon fils n'est pas le seul enfant atteint du SA à avoir ce problème. Avez-vous des trucs pour aider votre enfant à mieux mémoriser les noms, prénoms et visages de ses camarades de classe ?

Parce que par exemple, quand il se passe un incident avec l'un d'eux, déjà qu'avec son trouble attentionnel, il n'a qu'une idée très confuse de ce qui s'est passé, mais en plus, il est incapable de me dire AVEC QUI cela s'est passé ! Alors faire du décryptage de scénarios sociaux dans ces conditions, c'est quasiment mission impossible !

Merci de vos témoignages, avis et conseils !

[Mars]

J'ai toujours su que Lila ne reconnaissait pas ses camarades (beaucoup de profs non plus ) mais c'est après le diagnostic que j'ai compris pourquoi.
Comme tu le dis, c'est un énorme handicap pour communiquer et se faire accepter.
Comme toi, j'ai travaillé avec des photos de classe ou des trombinoscopes mais je dois dire que l'effet était plutôt faible. Je n'ai donc pas de "trucs" miracles pour t'aider, dommage !
Le seul indice qui ait marché pour Lila c'est ce qui est immuable : ex : elle a eu deux chinois dans sa promo de master, elle les a toujours reconnus ainsi qu'une jeune fille qui était rousse. Si certains élèves de sa classe sont aisément reconnaissables en fonction de la couleur de leur peau ou de leur chevelure, il peut déjà tenter de les repérer et de se souvenir de leurs noms.
Ils ne peuvent pas se fier à d'autres indices car ils évoluent tout le temps (surtout chez les ados et jeunes adultes) : Lila n'était pas sûre de reconnaître sa soeur dans le train car elle change souvent de teinture de cheveux et de vêtements mais elle était sûre que le sac de voyage (jaune) était le sien
Pour info, le fait de ne pas reconnaître les visages porte le doux nom de prosopagnosie.

[maho]

Je viens de discuter avec des parents en Angleterre qui viennent juste de decouvrir ce trait chez leur fille, donc ce qui explique beaucoup de confusion.
J'ai appris tardivement aussi (comme le diag ) que mon fils avait sa propre "reconnaissance" des personnes, et j'essaye autant que possible de lui demander ce qu'il repere chez chaque personne. Par contre si il repere "lunettes rouges" par example, il y a confusion quand la personne change de lunette
Il considere par example, la mere de son copain comme "grande avec les cheuveux courts" donc une autre personne similaire doit avoir un autre classement pour lui, pas facile!!

[maho]

J'y pense aussi, les prenoms sont difficiles aussi, par example sa chef d'atelier a l'ESAT a le meme prenom que moi, et coiffé similaire (a part en ce moment avec mes nattes ) il a tendance a nous melanger, si elle se fache au travail, il peut le rapporter sur moi, il pense que je suis faché quand il rentre a la maison.

[Rom]

Coucou...moi j ai un peu ce soucis aussi... Surtout quand les personnes se ressemblent... je me ssouviens qu a mon travail je melangeais souvent les deux secrétaires... ou alors dans un film je me perds dans les personnages... Avant hier j ai appelé la chef avs Pauline...elle m a dit : non moi c est Stéphanie...

[eurydice38]

Ah, merci pour vos réponses, ce n'est pas très encourageant tout ça ! mais au moins, je connais le nom technique, grâce à Mars.

Et j'ai googlé, ce doux nom de prosopagnosie est effectivement associé par certains chercheurs au SA. Pas beaucoup de solutions, je le crains.

C'est vrai que mon fils repère certains enfants de sa classe à leurs particularités physiques (porteur de lunettes, roux, très grand…). Mais ceux qui ont un physique "normal", ils passent inaperçus ! l'autre jour, il a fait une sortie de classe, il a été incapable de me dire si l'accompagnatrice était son actuelle prof d'anglais ou son ancienne prof de SVT ("je sais pas maman, elles se ressemblent").

Je commence seulement à percevoir l'étendue de tous les inconvénients du SA. Mais j'en perçois aussi les avantages : mon fils ne discriminera jamais personne à cause de son physique ou de la couleur de sa peau, il est beaucoup plus tolérant et ouvert à la différence que les gamins de son âge. Toujours ça de pris ! et de fait, ses seuls copains, au collège, ce sont un garçon handicapé physique que beaucoup rejettent ou dédaignent et une fille que les autres garçons trouvent "grosse" (ils changeront d'avis dans quelques années car elle a de très beaux yeux bleus, un beau sourire, et je pense qu'ils la qualifieront alors plutôt de "pulpeuse" que de "grosse" !).

J'ai une autre question qui me tourmente : vos enfants sont-ils "paresseux" ? le mien n'a, de fait, absolument pas le sens de l'effort et on peut penser qu'il est paresseux. Est-ce que cela fait partie de sa personnalité profonde, ou bien la vie quotidienne lui demande de tels efforts permanents d'adaptation que cela le rend effectivement paresseux ou plutôt, il se sent débordé par l'ampleur de la tâche et découragé d'avance, ou encore il est très fatigué et très fatigable. Je prends un exemple récent : ils ont fait un cross au collège, il a fini bon dernier, avec un tour entier de retard sur les derniers. Il est très mauvais pour tous les sports collectifs, les sports de raquette, l'escalade, les sports de combat, etc. Mais la course ? ça ne nécessite pas de compétences particulières et il a un bon coeur (on a vu un cardio l'an dernier). Alors, ça lui vient d'où, cette lenteur pour courir (par exemple). Si vous avez des explications techniques, liées au SA ou au TDA/H, cela m'intéresse, car ça me donne des arguments pour répondre à ceux qui pensent qu'il est tout simplement paresseux et refuse de se donner du mal.

Merci et bon dimanche !

[Schehade]

Bonjour Euridice,

en ce qui concerne la course, une démarche, une coordination particulière des mouvements peut expliquer la lenteur. Je n'ai personnellement pas eut le problème de rapidité malgré une technique de course assez particulière. Mes jambes se croisent et les pieds s'alignent sur le meme axe. J'ai utilisé cette technique jeune après avoir visionné un documentaire sur la façon de courir des guépards. Ils courent comme sur une ligne en abaissant leur centre de gravité. J'ai aussi remarqué qu'en avancant le centre de gravité on augmentait encore un peu la vitesse de course... enfin bref. Mon prof de sport de l'époque trouvait ma façon de courir étrange, mais j'étais le plus rapide du collège, niveaux de classes supérieurs compris. J'ai besoin de rationaliser mes mouvements et leur impact sur l'environnement et les performances.
Je ne sais pas si ca peut t'aider.

Pour ce qui est de la prosopagnosie, je suis vendeur en grande surface, et il m'arrive encore très régulièrement, lorsque je vends une télé ou un ordi de ne pas retrouver mon client quand je reviens deux minutes plus tard de la réserve avec le produit... Je me contente d'en sourire, même si parfois, j'en conviens, ca s'avère génant. Après 6 ans de boîte, je ne reconnais toujours pas les secrétaires (aucune, malgré des physiques différents) et je reste incapable d'associer un nom à un de leur visage. Mes collègues m'indiquent le bureau où je dois aller, ce qui, vu qu'elles sont deux par bureau, m'offre une chance sur deux de m'adresser à la bonne personne
Je crains effectivement qu'il n'y ait pas beaucoup de solutions à ce problème.

[Jean]

Sur la course, on sort de la question des visages. Mais le SA est souvent associé à une difficulté au niveau moteur, avec parfois une maladresse, une démarche particulière.

Ce n'est pas nécessairement incompatible avec une activité sportive : voir ce que fait Franck dans l'ultrafond.

La tendance ira plutôt vers le sport individuel par rapport au sport collectif, à l'endurance par rapport à la vitesse. Mais ce qui est souvent vrai n'est pas pour autant vrai pour tous.

En ce qui concerne les visages, c'est terrible pour moi de connaître des gens depuis plusieurs dizaines d'années, de connaître aussi les noms, mais d'être souvent incertain pour relier nom et visage. Quand j'ai commencé à travailler, il y avait des compteurs - avec une petite loupiote - à la porte du bureau. Tous les jours, je relisais la liste (10) avant d'entrer dans le bureau pour savoir qui était là et essayer de ne pas me tromper. Je crois avoir mémorisé assez rapidement le nom des 3 personnes de mon groupe de travail. Mais cela a été long pour celles du groupe de devant. Sans parler de l'autre bureau.

Trente ans après, une de mes plus grandes épreuves est de distribuer une information écrite aux syndiqués d'un autre service que le mien. Il faut d'un côté que je mémorise la liste des syndiqués (une personne sur 2), et ensuite que je devine qui est qui dans le bureau, en m'aidant de l'annuaire téléphonique et de l'étiquette à l'entrée du bureau. Je vais des va-et-vient entre mon bureau (je dessine l'implantation géographique, j'essaie de mettre des noms) et les bureaux concernés. Et malgré mes efforts, il y a régulièrement une personne dans le bureau qui me dit à la fin de la distribution: "tu m'as oubliée", parce que tout le monde sait que je distribue une information réservée aux syndiqués.

Bien entendu, en tant que délégué, j'ai obtenu qu’au nom du droit à l'image, personne ne soit obligé d'accepter que sa photo soit sur l'annuaire - ce qui me plonge ensuite dans des affres ... Si j'avais su

[Jean]

Sur autisme information science :
A Lack of Left Visual Field Bias When Individuals with Autism Process Faces
Une absence de préférence du champ visuel gauche quand les personnes avec autisme analysent les visages.
Voir les 5 posts sur le thème du visage :
http://autisme-info.blogspot.com/search/label/visage

[Mars]

mon fils ne discriminera jamais personne à cause de son physique ou de la couleur de sa peau, il est beaucoup plus tolérant et ouvert à la différence que les gamins de son âge.

Bien vu Eurydice
Nos enfants sont généralement aussi très attachés à la justice. Défendre "la veuve et l'orphelin", même s'ils ne les reconnaissent pas , c'est un mouvement naturel chez la plupart.

[Murielle]

Je pense qu'au sujet de mon fils, il n'y pas de problème de" prosopagnosie", mais pour pas mal de personne, j'ai remarqué qu'il se fie aux cheveux....Il est vrai que dès que la personne change de coupe, il est un peu perdu.!

Cependant, il m'a fait rire, car il a 3 profs de sports différents, et lorsqu'il cherche à parler de l'une d'entre elle: sa réponse est "oui, celle qui change de couleur de cheveux tout le temps"....

[maho]

Bien vu Eurydice

Oui bien vu!
Ca veut dire que tu vois le coté positive des differences de nos enfants;
Le coté paresseux ou trés lent, souvent c'est du aux efforts fournies toute la journée, trés compliqué pour eux d'evoluer dans ce monde incomprehensible, bruyant, active, plein de couleurs et matieres, a un moment donné ils sont obligés de "deconnecté" un peu; Mais le lenteur, je pense vient de l'incompprehension des consignes peut etre, ils ont souvent une logique a eux memes qui ne corresponds pas forcement a la logique Ed Nat

[Hopla]

Bonjour,

Alors pour le souci de la prosopagnosie, bien avant qu'on soupçonne quoi que ce soit chez moi, j'avais mis en place (au collège) une façon de faire bien à moi : j'apprenais le nom des gens un par un. J'avais besoin de voir le nom écrit, et à peu près en même temps la personne concernée, et pendant une journée, je me concentrais sur cette personne et son nom, répété et répété à chaque fois que j'avais l'occasion de la voir. Bon, ça n'a pas toujours marché au-delà de la journée (parfois même je n'arrivais pas à retrouver la personne le jour même, alors que je savais qu'elle était présente :/ ), il y a des gens dont je n'ai jamais réussi à retenir le nom ni à les reocnnaître dans la rue pour les saluer, mais dans la grande majorité des cas ça a marché (j'imagine que certains ont dû au passage se demander pourquoi je les dévisageais ). Cela dit, c'est une façon de faire qui ne peut venir que de soi, d'une vraie motivation, faut avoir envie d'y arriver, je ne pense pas que ça puisse venir de quelqu'un d'extérieur si soi-même on n'y accorde pas d'importance. Alors je ne sais pas si ça pourrait marcher pour ton fils, Eurydice...

Et je crois que ça ne se "guérit" pas, même quand on voudrait bien remédier vraiment à ce défaut. La semaine dernière encore, j'étais chez quelqu'un où ma fille avait un cours, je discute 20 minutes avec un gars très plaisant, et 2h après, je recroise la même personne, que je n'ai reconnu que parce qu'il est venu vers moi avec un grand sourire, en évoquant le hasard de se revoir le même jour, etc. J'étais très déstabilisée, mais je n'ai pas réussi à le reconnaître parce qu'il avait enfilé un blouson sur son vêtement reconnaissable (et coiffure banale pour un homme, rien de spectaculaire dans ses traits de visage -genre grain de beauté, yeux transparents, etc.-, un jean... bref, rien qui permette une identification !).
Bon, cela dit, ce genre de cas caricatural est rare je trouve (ouf !), la plupart du temps, les gens ne prennent pas mal quand on s'excuse en disant qu'on est particulièrement peu physionnomiste, mais qu'on se souvient très bien de notre dernière conversation avec eux (ce qui est parfois un peu faux, mais bon...).

[Hopla]

désolée, erreur de manip

[eurydice38]

Merci, Hopla, pour votre tuyau sur ce que vous faisiez au collège. Mais vous pointez du doigt un truc important : il faut que mon fils ait envie de connaître ses camarades de classe, et je crois que l'envie, il ne l'a pas, tout simplement ! Moi, ça me désole surtout parce que je sais qu'il y a beaucoup d'incidents (jamais graves, heureusement), parfois il me raconte un truc, d'une manière très confuse, et j'aimerais en savoir plus, car d'après ce qu'il me dit, je me doute que le gamin en face (ou la gamine) se fichait de lui, mais pour pouvoir décrypter la situation, lui dire ce qu'il aurait dû faire (ou ne pas faire), j'ai besoin d'avoir des détails, et je ne les ai jamais ! j'espère qu'un jour, mon fils (qui a 13 ans) aura envie d'en savoir plus sur ce qu'il a exactement et comment il doit faire pour essayer de pallier ses difficultés ; pour le moment, il ne semble pas du tout conscient de sa différence. Il ne comprend pas pourquoi il n'a pas de copains, pourquoi les autres se moquent de lui, etc. Je trouve ça dur ! car sans son envie de comprendre pour mieux s'adapter, rien n'est possible !