Londres bloque l'extradition du pirate informatique Gary McKinnon aux Etats-Unis
Le Monde.fr avec AFP | 17.10.2012
Gary McKinnon, le pirate informatique accusé d'intrusion dans des ordinateurs de l'armée américaine, ne sera pas extradé aux Etats-Unis en raison de son état de santé, a annoncé mardi 16 octobre la ministre de l'intérieur britannique, Theresa May, après une saga judiciaire de dix ans. Washington s'est dit "déçu" par la décision de Londres, tout en assurant que son alliance avec le Royaume-Uni n'en souffrirait pas.
"M. McKinnon est accusé de délits graves mais il est indubitablement gravement malade", a déclaré la ministre devant le Parlement, soulignant que son extradition contreviendrait aux droits humains et ferait courir le risque qu'il se suicide. "Par conséquent, j'ai retiré l'ordre d'extradition visant M. McKinnon", a-t-elle ajouté. Désormais, le parquet britannique devra décider si le pirate doit être poursuivi ou non au Royaume-Uni, a-t-elle précisé.
"LE PLUS IMPORTANT PIRATAGE DU SYSTÈME INFORMATIQUE MILITAIRE"
Gary McKinnon, un Britannique de 46 ans, qui souffre d'une forme d'autisme, avait été arrêté à Londres en 2002 pour avoir piraté des dizaines d'ordinateurs de l'armée américaine et de la NASA, rendant trois cents appareils d'une base militaire inopérants peu de temps après les attentats du 11 septembre 2001. M. McKinnon n'a pas nié les faits mais a toujours soutenu qu'il ne faisait que rechercher des documents américains secrets prouvant l'existence des extraterrestres.
Accusé d'être l'auteur du "plus important piratage de tous les temps dans le système informatique militaire" américain, il encourait, selon ses défenseurs, jusqu'à soixante ans de prison aux Etats-Unis. Washington a évalué à 800 000 dollars (615 000 euros) les dommages qu'il a causés. Son extradition avait été réclamée en juillet 2006, en vertu du traité signé en 2003 par les Etats-Unis et le Royaume-Uni après les attentats du 11 septembre pour faciliter le transfert de suspects dans le cadre de la lutte antiterroriste.
Il est devenu un symbole de la campagne au Royaume-Uni visant à revoir, dans un sens plus contraignant, l'accord d'extradition entre Londres et Washington. Le premier ministre britannique, David Cameron, avait même soulevé à deux reprises le problème de l'extradition de M. McKinnon avec le président américain Barack Obama, soulignant le fait qu'il s'agissait d'un "jeune homme vulnérable".
"TROUBLES MENTAUX SÉVÈRES"
Les avocats de M. McKinnon ont introduit de nombreux recours sur la base de rapports médicaux attestant qu'il souffrait "de troubles mentaux sévères" et présentait "un sérieux risque de suicide en cas d'extradition", mais ils ont tous été rejetés. M. McKinnon est atteint du syndrome d'Asperger, une forme d'autisme diagnostiquée en 2007 après qu'un expert de cette maladie eut observé le Britannique lors d'une interview à la télévision.
La mère du pirate informatique, Janis Sharp, qui a mené activement campagne contre l'extradition de son fils, a fait part de sa satisfaction à l'annonce du blocage de l'extradition. "Merci Theresa May, du plus profond de mon cœur. J'ai toujours su que vous aviez la force et le courage de prendre la bonne décision", a-t-elle réagi.