Y a t il d'autres anthropologues, ethnologues, sociologues, archéologues, historien•ne•s, etc par ici ?
Je suis étudiante en anthropologie sociale (en L2), après chaque cours et chaque ethnographie étudiée, je vois le monde d'une autre façon. Je me rends compte que je fais de l'anthropologie depuis toute petite puisque je considère que mon environnement m'est toujours aussi étranger par ici...
Intéressant de considérer la société dans laquelle je vis sous l'oeil anthropologique et non pas forcément sociologique (la différence est que dans le premier cas, je me considère comme un élément extérieur de la société étudiée tandis que dans le deuxième cas, ce serait étudier la société dans laquelle je me retrouve, qui m'est familière).
Changer mon point de vue me permet de prendre du recul et ne pas tomber dans une déprime du style "notre société est pourrie", "notre société est excluante", "notre société marginalise ceux qui ne sont pas dans la norme" ; c'est quand même tentant. En fait, il ne s'agit pas d'émettre un jugement mais tenter de voir ce qui m'entoure plus objectivement.
Ça me permet d'essayer de comprendre les engrenages et les mécanismes de notre système en mettant de côté ma colère immense, qui forcément influence catégoriquement mes observations.
D'autre part, en regardant ce qui se passe ailleurs, ça transforme ma vision de ce qu'est un système social, de part ce qu'on apprend - ou pas - en grandissant. On grandit avec beaucoup d'injonctions, rien que quand on voit la notion de "norme" ici, on peut se poser des questions...
Et bien étudier d'autres sociétés permet de se rendre compte que les normes sont façonnées.
Exemple : les personnes qui chez nous sont vues comme "folles" et qu'on enferme en institutions sous prétexte de sécurisation, pourraient être vues ailleurs comme des magicien•ne•s ou des guérisseu•se•r•s. Qu'on soit d'accord ou non avec ça, l'important est, je pense, de justement s'entraîner à prendre du recul pour comprendre tout ça en délaissant les jugements et embrasser l'altérité. C'est un peu comme un énorme puzzle à échelle mondiale.
Me jeter dans les études anthropologiques me sauve des rechutes dépressives. Parce que dès que j'ouvre un livre ethnographique, je me dis que je suis peut être juste née au mauvais endroit et mon estime de moi cesse de chuter indéfiniment. L'anthropologie me permet de mieux me comprendre en regardant ailleurs, en ouvrant mon horizon. J'ai compris qu'en restant ancrée avec des oeillères avec ce qu'on nous balance comme infos ici-bas ne me suffit plus. Et puis, je me réconcilie avec mon environnement, je prends les choses de façon moins dramatique (ça demande de l'entraînement..!).
Mon but n'est donc pas de dire "là-bas c'est bien, ici c'est pourri". Mon but est de comprendre que les sociétés se construisent et se déconstruisent, qu'elles sont flexibles, que les structures ne sont pas figées. En regardant chez les Autres, on peut mieux comprendre ce qui peut marcher/ne pas marcher, pourquoi, comment, etc. Et surtout, on se rend compte que les Autres ne sont pas si différents de nous, finalement.

Pour finir, j'ai cette sensation profonde que plus je travaille dans ce domaine, plus ma foi en l'humanité grandit. C'est pas rien à notre époque et en nos lieux qui sont quand même difficiles à vivre, je trouve.
Voilà, je suis ouverte aux échanges, avec des initié•e•s ou des passioné•e•s, peu importe !