Geogaddi a écrit :Je comprendrai que tu n'aies pas envie de développer, mais j'avoue ne pas avoir vraiment compris ce qui était choquant.
J'ai personnellement de gros soucis avec le changement (même microscopique), mes routines m'empoisonnent la vie et j'aimerais bien arriver à apprendre à détecter qu'on se moque de moi avant mes 80 ans.
Quand j'ai vu le titre du topic, j'ai directement pensé que j'y lirais des solutions, des pistes, ou des liens vers des analyses pertinentes à ce sujet. Donc j'ouvre, et je commence à lire.
Et en réalité, je vois (résumé un peu grossier): "bon, alors moi en fait, ces difficultés là, je ne les ai pas, celles là non plus, celles là non plus, celles là non plus, non plus, non plus... Ca je gère hyper bien, ça aussi, ça aussi, ça aussi... Tel truc ne me pose aucun souci non plus, tel autre est ok, tel autre aussi... ...Mais je suis fatiguée (ah ben merde alors!
)"
=>"Mais comment ça se fait que j'ai reçu un diagnostic d'autisme, du coup?" (au hasard: parce que tu es allée le chercher activement et que tu t'es entêtée après un 1er avis négatif argumenté?)
Et le pompon:
mais j'ai du mal à m'y retrouver du point de vue identitaire.
Le fameux "point de vue identitaire". Celui qui me passe à 40 km au dessus de la tête, que je n'arrive pas malgré mes efforts à voir autrement que comme une sorte de "souffrance de l'automoi-sclérosé", et qui cause tant de dégâts dans la perception de l'autisme.
Celui qui fait qu'encore de nos jours des parents s'entendent dire qu'ils "font des histoires/se montent la tête/raisonnent trop en termes de
cases-étiquettes" alors qu'ils s'épuisent juste à tenter de faire comprendre les
difficultés réelles et majeures de leurs enfants.
Celui qui renvoie les autistes adultes demandant la prise en compte de leurs particularités en contexte pro direct dans leurs buts au motif que "oh hein ça va tout le monde a mal au ventre vous êtes pas le centre du monde/yen a marre de vos jérémiades et revendications d'enfants gâtés/tout ça pour se mettre en avant et faire son intéressant franchement c'est lamentable/etc...etc...etc..."
Imagine toi quelqu'un qui a juste un peu de mal à marcher, à qui on livre (à sa demande) un fauteuil roulant, et qui vient dire "ah quand même ce fauteuil roulant j'ai du mal à m'y identifier d'un point de vue identitaire". C'est pas un peu indécent?
Le malentendu majeur, c'est que le diagnostic autisme c'est une métaphore du fauteuil roulant. Le diagnostic permet d'identifier des choses in-améliorables sans prise de conscience/psychoéducation en amont (ex: quand j'ai découvert la notion de mentalisation via U.Frith et que d'un coup la lumière s'est allumée), c'est sa raison d'être. Et tout ce qu'on met en place par la suite seul ou accompagné représente une sorte de "fauteuil roulant invisible" qui va nous permettre d'évoluer un minimum dans le monde au lieu de se contenter d'y survivre (ou de s'en exclure totalement et volontairement pour les lassés de la "mission survie" permanente).
Les non-autistes projettent tout un tas de choses absurdes sur les autistes, une des pires me semble être ce fameux "point de vue identitaire". A la fois c'est un peu risible, parce que maintenant que les connaissances ont évolué, des aidants/pros se retrouvent à devoir essayer de convaincre des autistes "flagrants" mais qui traînent des diags lourds/hyperstigmatisants mais boiteux genre "schizophrénie atypique/asymptomatique" d'aller chercher un
vrai diag (peu y vont parce qu'en fait ils s'en tapent copieusement, des diagnostics et des considérations identitaires); et à la fois les conséquences ne sont pas du tout risibles parce que c'est l'argument majeur quand on veut décrédibiliser un autiste. Autiste qui le plus souvent s'en tape aussi, du diagnostic et de la "composante-automoi", mais qui a besoin d'aide adaptée.
Ce qui me choque c'est ça, et le fait que plus ça va plus je considère que ces questions identitaires ne sont rien d'autre que des projections de non-autistes (hors codes sociaux/normatifs la notion d'identité n'a pas vraiment de sens en soi).
Que quelqu'un vienne ici vampiriser le temps et l'énergie de parents et d'autistes adultes qui galèrent déjà à mort avec de telles considérations superficielles et contextuellement absurdes me dérange. Que ce soit fait de manière aussi décomplexée, sur un topic qui annonce totalement autre chose (littéralement, en tout cas), me choque carrément.
Voilà, désolée.