Bubu a écrit :Je viens de commencer la lecture du roman de Balzac :
"Dora l'exploratrice va acheter du schit chez Dédé, son dealer de drogue."
Tu as bien fait d'en parler parce que perso j'ai toujours cru que c'était une oeuvre de Maupassant, ça!
lulamae a écrit :L'équilibre est difficile à trouver entre montrer justement qu'il ne s'agit pas de malheurs virtuels, que c'est sérieux (harcèlement, viol, suicide), et les images choc.
Le problème c'est que soit on parle d'un truc soit on n'en parle pas, et je trouve malhonnête d'aborder des sujets comme les TCA, la drogue ou le harcèlement sans montrer d'images choquantes. C'est décrire des comportements sans décrire les conséquences que peuvent avoir ces comportements: c'est trop facile.
Chez les rock stars il y a des gens qui prônent l'usage de drogue et en font un truc cool, ils n'ont aucun mal à trouver leur public chez des personnes fragiles et influençables, par contre si tu commences à parler de la façon dont Layne Staley a fini ça devient un peu moins cool. C'est triste, parce que justement il voulait que sa déchéance serve d'exemple/repoussoir à ceux qui seraient tentés par la drogue (je pense que c'était un mec génial, et pas que parce que je suis fan d'
Alice in chains).
Seulement voilà: la rock star "rebelle" qui prend de la came à tour de bras et le revendique à chaque nouvel album, c'est carrément plus vendeur que le mec qui n'a plus une seule dent, semble avoir 70 ans alors qu'il en a 25, et ne tient pas debout 10 minutes. Pourtant, la réalité en coulisses c'est ça.
C'est pareil pour l'anorexie parfois vendue comme "chic".
Par ailleurs, tu évoques le fait qu'elle n'ait pas de ressources en elle, ou n'en soit pas consciente, et qu'elle ait beson d'aide extérieure : cela me fait penser qu'une partie de la complaisance reposerait sur une rébellion contre l'univers médical vécu comme carcéral, injuste, etc... C'est là où serait la complaisance ?
Non, c'est juste que le propre de la maladie mentale c'est de t'empêcher d'accéder à ces ressources, dans le cas où tu les as (on n'est pas tous égaux là-dessus). Même dans les cultures chamaniques qui utilisent par exemple les états modifiés de conscience pour traiter les troubles mentaux, il y a toujours quelqu'un pour accompagner le malade. Le "do-it-yourself" dans le cas des maladies mentales c'est juste de la fumisterie. Si la maladie s'est installée, c'est que les distorsions cognitives et perceptions faussées lui ont permis de le faire, et dans le cas de l'anorexie ces distorsions touchent aussi bien la vision de soi, des autres, de la nourriture, de l'environnement...
La complaisance je la vois au sujet des personnes qui ont des comportements absolument pas aidants et dont on minimise la responsabilité avec des grands sourires, des "c'est pas grave" et des "ça doit être dur pour vous, tout ça".
Quelqu'un qui va dire à un dépressif "tu sais, mon pote a guéri de sa dépression en partant vivre dans une cabane de pêche au milieu des bois et en lisant tous les philosophes orientaux + Kant" fait énormément de mal, et lui dire que c'est ok de raconter des âneries pareilles c'est de la complaisance. La dépression, comme l'anorexie, ce sont des désordres chimiques du cerveau: le mec qui est en état de dépression clinique sévère n'est certainement pas en mesure de s'enfiler l'intégrale de Kant (déjà le catalogue Toys r Us, ça nécessite un effort de concentration trop important) et il risque de ne pas pêcher grand chose sans être capable de choisir son coin de pêche ni de décider de l'amorce à utiliser.
La morale américaine à la noix, mix de "survivor concept", de "l'essentiel c'est la famille" (même si ta famille se compose à 99% de connards), et de "les psychiatres ne comprennent rien (à part Keanu Reeves)", c'est bien pour les productions Netflix mais dans la vie ça ne marche pas comme ça.