Mes parents étaient très inquiets quand j'étais petite, et même encore jusqu'à l'an dernier au moment de partir au Japon pour mes études (ils avaient souscrit une assurance au cas où je mettais le feu à mon appart, pour vous situer l'inquiétude...). Finalement j'étais très peu autonome avant de devoir partir 1 an à 11000 km seule (à peine capable de me faire cuire des pâtes), mais le fait de partir a été certes très stressant et compliqué au début, mais salvateur ! Du coup voilà ma situation actuellement à 24 ans:
Voyager : J'ai eu la chance d'avoir des parents qui m'ont trimbalée partout autour du monde, enfant c'était très éprouvant car j'avais besoin de routines, donc ça finissait systématiquement en larmes et angoisse, mais avec le recul ça a quand même été un enrichissement. Sans ces expériences, partir seule au Japon pour le travail aurait été inconcevable. Maintenant j'adore voyager, surtout seule car je sature vite quand je suis avec qqun H24. Voyager seule a été très compliqué et stressant au début (je me perds tout le temps plusieurs heures), mais j'en suis maintenant complètement capable et c'est une des choses que je préfère dans ma vie. Cela dit, il semblerait que je fatigue très vite, là où je connais des gens qui peuvent enchaîner 7/8 visites dans la même journée, je peux en faire que la moitié, avec le besoin d'une pause à l'hotel/ sur un banc/ dans un café calme entre chaque. Quand je partais avec mes parents, il était pas rare que je me mette à pleurer de fatigue psychologique et qu'ils doivent me laisser sur un banc le temps de finir leurs visites. Je pensais que j'étais juste flemmarde, mais depuis qu'on connaît le SA, mes parents pensent que c'est à cause de ça.
L’hygiène : Petite j'avais tendance à avoir besoin qu'on me pousse, maintenant je n'ai aucun problème, mes amis neurotypiques me trouvent même "trop propre"
Les courses : Si j'ai planifié avant, aucun problème, cela dit je préfère commander sur internet car ça reste fatigant.
Entretenir mon appartement : Je suis très très bordélique donc il me faut une routine très stricte voire un peu de "pression" (famille ou amis qui doivent passer etc), sans routine et sans pression, ce serait énormément le bordel.
Les trucs administratifs: Pas impossible mais très stressant, j'ai souvent des soucis car je respecte pas les délais ou je remplis mal ce qu'il faut faire.
Me déplacer en ville: Incapable de passer mon permis, donc je serai limitée quand je devrai déménager de chez mes parents. Sinon, je n'ai aucun sens de l'orientation, c'est affolant, du coup j'utilise quasiment tout le temps un GPS si c'est pas une ville que je connais depuis des années, même pour aller chercher le pain à 100 mètres. J'ai par contre jamais eu de problèmes avec les transports, je suis d'ailleurs "fascinée" par les plans de lignes donc mes proches me demandent tout le temps de leur réciter les stations quand ils doivent sortir
Sport: J'ai pas une bonne perception de mon corps dans l'espace donc j'ai toujours été très très nulle en sport, SAUF en vélo ! C'est un des seuls sports que je peux faire.
Evénements sociaux: Je tolère très mal les événements sociaux car j'ai des problèmes pour me lier aux groupes. En soi j'aimerais m'intégrer, mais ça m'est très difficile, donc à moins que ce soit des petites sorties en tout petit comité ou un événement social avec des gens que je connais très très bien sur un de mes intérêts restreins, ça m'est très compliqué et épuisant, et je crois que c'est ce qui m'attriste le plus.
Gérer les finances: Ayant des parents très dépensiers souvent à découvert, j'ai grandi avec la peur de manquer, donc tout en essayant de ne pas être radine je fais extrêmement attention, donc pas de soucis.
Travail: J'ai bossé dans le commerce (milieu que j'ai toujours détesté) avant d'avoir des soupçons de SA. Ca se passait très mal, insultes de la part de certains managers, stress constant, pb de coordination et de logique qui ont causé pas mal de problèmes. J'ai pourtant toujours gardé mes postes car à côté de ça, obsédée par l'envie de bien faire, j'étais très docile (la seule à accepter de bosser de nuit, à faire plein d'heures sup), j'ai une énorme mémoire et on m'a recrutée pour des compétences que personne d'autre dans l'équipe n'avait (intérêts restreints), du coup ça aurait pu être pire. Il y a quand même eu beaucoup d'accrochages avec les équipes qui comprenaient pas comment je pouvais d'un côté être incapable de faire un noeud, et de l'autre retenir le catalogue produits de toutes les boutiques en 2 jours, et moi non plus à l'époque, je ne comprenais pas. Je devais partir en réserve m'isoler très régulièrement, je pleurais sans raison, et on m'a bien sûr reproché plein de fois mon "manque de cohésion avec l'équipe" (j'ai pas pris un repas avec eux) et ma trop grande honnêteté avec le client (vendre des produits en sachant pertinemment que c'est du mensonge, c'est au-dessus de mes forces). Bref, j'ai pris sur moi pendant des années car non informée sur le SA, et ma famille très "travailleuse" me culpabilisait beaucoup, je pensais juste que j'étais "trop fragile" mais que j'avais pas le choix. Maintenant que je sais qu'il y a de fortes chances que je sois Asperger, si le diagnostic se confirme, je sais déjà que je travaillerai à mon compte, retourner dans le commerce avec des équipes est inenvisageable.
Femme, 24 ans, IDF. Diagnostiquée autiste en février 2019.