Hallucinations courantes chez les adultes autistes

Toutes discussions concernant l'autisme et le syndrome d'Asperger, leurs définitions, les méthodes de diagnostic, l'état de la recherche, les nouveautés, etc.
Avatar du membre
Jean
Modérateur
Messages : 22562
Enregistré le : lundi 24 octobre 2005 à 22:39
Localisation : Finistère

Hallucinations courantes chez les adultes autistes

Message par Jean »

Les hallucinations sont anormalement courantes chez les adultes avec autisme
Hallucinations unusually common in adults with autism
https://spectrumnews.org/news/hallucina ... ts-autism/
par Elizabeth Milne, The Conversation
le 24 mai 2017
traduction py

Avez-vous jamais entendu un son quand rien dans votre environnement ne l’explique ? Ou peut-être avez-vous ressenti la proximité d’une personne quand vous êtes seul ? Certaines personnes ont connu ces perceptions de nombreuses fois. D’autres, quasiment jamais. Quelques troubles mentaux, comme la schizophrénie, peuvent les provoquer. Mais les perceptions inhabituelles se manifestent aussi chez des personnes sans trouble mental. Une nouvelle observation de mon groupe de recherche suggère que les adultes avec autisme sont particulièrement propices à ces sortes d’expériences.

Dans notre étude, nous avons présenté à des adultes avec ou sans autisme une liste de perceptions inhabituelles et leur avons demandé d’indiquer celles qu’ils avaient rencontrées. Les adultes avec autisme ont signalé trois fois plus d’occurrences que les personnes typiques. Par exemple, nous avons constaté que 63% des adultes avec autisme ont répondu oui à cette question : « Avez-vous jamais ressenti que quelqu’un vous touchait, quand en vous retournant vous ne voyiez personne ? », contre seulement 7% des adultes typiques. De la même façon, 47% des adultes dans le spectre ont répondu oui à la question : « Avez-vous jamais vu des formes, des lumières ou des couleurs quand manifestement rien n’est présent ? », contre 14% des adultes typiques.

Jusqu’à ce jour, les scientifiques ne savaient pas que les expériences de type hallucinatoire se présentent dans l’autisme, bien que nous sachions depuis longtemps que l’autisme est associé à une ouïe et une vue plus sensibles.

Toutefois, une perception hallucinatoire inhabituelle est différente d’une sensibilité à des stimuli particuliers. Quelques items de notre questionnaire concernaient les changements d’intensité de stimulation, que nous aurions pu présumer plus présents dans l’autisme. Mais d’autres questions concernaient des perceptions étranges ou déformées. Par exemple : « Avez-vous jamais ressenti des sensations inhabituelles de brûlure ou d’autres sensations étranges dans ou sur votre corps ? » ou « Avez-vous jamais entendu vos propres pensées dîtes à voix haute, de telle façon qu’une personne proche aurait pu les entendre ? » Trois fois plus d’adultes avec autisme ont répondu oui à ces deux questions, indiquant que nos résultats ne reflètent pas uniquement une perception sensorielle plus sensible.
Des niveaux différents de certains éléments chimiques dans le cerveau (les neuro-transmetteurs) pourraient expliquer ces perceptions inhabituelles plus fréquentes. Les migraines, par exemple, sont souvent précédées par des hallucinations, comme voir des lumières ou des formes non présentes. De la même façon, l’épilepsie peut être associée à des perceptions étranges.

La migraine et l’épilepsie ont été reliées à des modifications dans les niveaux du neuro-transmetteur GABA. Dans le cerveau, quelques neuro-transmetteurs ont un rôle excitant et stimulent l’activité neuronale, alors que d’autres ont un rôle inhibiteur et réduisent cette activité. GABA est un neuro-transmetteur inhibiteur. Des niveaux de GABA moins élevés peuvent en conséquence mener à une hyperactivité du cerveau, provoquant à la fois des perturbations visuelles et des crises. Des niveaux modifiés de GABA ont aussi été impliqués dans l’autisme.

Pas de responsable unique

Toutefois, le lien entre une perception inhabituelle et l’autisme pourrait ne pas provenir uniquement de différences innées dans la chimie du cerveau. Des travaux récents suggèrent que les expériences négatives, comme d’avoir été harcelé ou isolé socialement, peuvent mener à des hallucinations.

Malheureusement, de nombreuses personnes dans le spectre souffrent d’isolation sociale et de harcèlement. Ces événements négatifs peuvent contribuer au développement de perceptions inhabituelles. Un article récent de The Conversation a décrit la façon dont les personnes exposées à la discrimination, comme les immigrés, connaissent aussi plus de sentiments hallucinatoires et paranoïaques que les personnes non discriminées. Des processus similaires pourraient être impliqués dans l’autisme.

Outre l’observation que les expériences de perception inhabituelles sont plus fréquentes dans l’autisme, nous avons constaté que ces expériences sont bien plus douloureuses. Il est important de prendre en considération ce qui peut être fait pour soulager cette souffrance. À commencer par la compréhension et l’acceptation.

Si une personne avec autisme connait ces situations, savoir qu’elles sont assez courantes chez les autres personnes avec autisme peut aider à réduire leurs inquiétudes à ce sujet. Les médecins pourraient ne pas toujours penser à poser des questions sur des perceptions inhabituelles aux personnes avec autisme, mais notre recherche suggère que cela peut être un domaine important à aborder dans la clinique, de façon à ce que des méthodes puissent être établies pour une assistance quand cela arrive.

L’importance du développement d’une meilleure compréhension de l’autisme par le grand public est peut-être plus importante encore. De plus en plus de personnes sont diagnostiquées d’un autisme, dont un nombre croissant de personnes n’ayant pas reçu de diagnostic avant l’âge adulte. Souvent, il suffit de petites modifications pour aider les personnes avec autisme à s’insérer dans la société. Ces petits pas peuvent être importants pour réduire l’isolement social.
Si l’isolement et le harcèlement contribuent au développement de perceptions inhabituelles dans l’autisme, la réduction de la souffrance causée par ces perceptions est un des nombreux avantages qu’apporterait une société dans laquelle l’autisme serait mieux reconnu et compris.

Elizabeth Milne est chargée d’enseignement en neurosciences cognitives et directrice du Sheffield Autism Research Lab de l’université de Sheffield, au Royaume Uni.
Cet article a été initialement publié par The Conversation. Il a été légèrement modifié pour être adapté au style de Spectrum.
père autiste d'une fille autiste "Asperger" de 41 ans
Avatar du membre
olivierfh
Prolifique
Messages : 3342
Enregistré le : mercredi 23 novembre 2016 à 21:00
Localisation : Toulouse

Re: Hallucinations courantes chez les adultes autistes

Message par olivierfh »

Ça s'appelle hallucinations ces choses-là? (impression que quelqu'un touche quand on en a juste peur, zone sombre ou lumineuse en rêvassant alors que quand on redevient plus conscient il n'y a rien, impression d'entendre tout haut quand on prépare les mots qu'on dira plus tard, etc.) Parce que pendant mon processus de diagnostic plusieurs intervenants m'ont demandé si j'avais des hallucinations, sans doute pour écarter la schizophrénie, et j'ai dit non.
TSA de type syndrome d'Asperger (03/2017) + HQI (11/2016).
4 enfants adultes avec quelques traits me ressemblant, dont 1 avec diagnostic TSA et 1 au début du parcours de diagnostic.
Avatar du membre
Manichéenne
Modératrice
Messages : 5040
Enregistré le : jeudi 24 octobre 2013 à 9:54

Re: Hallucinations courantes chez les adultes autistes

Message par Manichéenne »

« Avez-vous jamais vu des formes, des lumières ou des couleurs quand manifestement rien n’est présent ? »
Hallucination, ou synesthésie ? :?
Diagnostiquée Autiste Asperger et TDA.
Mère de 3 enfants : fils Aîné TDAH et TSA atypique, cadet TSA de type Asperger, benjamin en cours d'évaluation neuropsy.
Avatar du membre
Salicorne
Passionné
Messages : 420
Enregistré le : dimanche 15 novembre 2015 à 22:28

Re: Hallucinations courantes chez les adultes autistes

Message par Salicorne »

Manichéenne a écrit :« Avez-vous jamais vu des formes, des lumières ou des couleurs quand manifestement rien n’est présent ? »
Hallucination, ou synesthésie ? :?
... ou banal phénomène oculaire de type "persistance rétinienne" ?

Si la formulation reprise dans l'article est exacte, j'aurai répondu "oui" à la question pour cette simple raison... :innocent:
Diagnostic TSA confirmé par le CRA
bidouille
Prolifique
Messages : 3061
Enregistré le : lundi 16 janvier 2012 à 7:15
Localisation : region parisienne

Re: Hallucinations courantes chez les adultes autistes

Message par bidouille »

ou migraine ophtalmique ?? ou un mirage??
Maman bizarroïde d'un grand ado de 16 ans (EIP TDA) et d'un ado de 14 ans Asperger TDAH.

Tous différents , tous humains!
jpeg
Habitué
Messages : 68
Enregistré le : mardi 17 mai 2016 à 23:27

Re: Hallucinations courantes chez les adultes autistes

Message par jpeg »

On peut lier cela à une mauvaise proprioception non? Quand on est dans une hyperactivité sensorielle, ou une mauvaise définition sensorielle, il est possible de ressentir des stimulus qui visiblement n'existent pas.
- Diagnostiqué TSA au centre expert de Créteil 07/2015
Avatar du membre
piedsboueux
Prolifique
Messages : 1814
Enregistré le : mardi 3 mai 2016 à 16:35
Localisation : CILAOS

Re: Hallucinations courantes chez les adultes autistes

Message par piedsboueux »

Ce que je sais de l'autisme, c'est que c'est plutôt du spectre opposé au profil psychotique, et même en partie c'est la raison de l'handicap social: précisément la quasi impossibilité d'halluciner (normalement) quelque chose pour adapter son ressenti à un contexte, c'est à dire de ressentir comme vrai au niveau perceptif quelque chose d'imaginé, ce qui, à l'état "normal" se fait tout naturellement tel le silence à la place d'un bruit persistant, la sensation de bien être en visualisant une "douche d'énergie positive" genre sofro, ressentir ce que ressens l'autre en se mettant à sa place... etc..
les accouphène, les phosphènes, et diverses sensations sont du au fait que en cas d'autisme, l'hallucination "rien à la place de quelque chose" n'est pas présente pour filtrer les artefacts de l'interface sensorielle comme le bruit d'un fond d'un ampli audio ou le grain d'une image..

Les méditants de la pratique de méditation dite de l'attention vigilante ne commencent jamais les yeux fermés ou dans le silence, car quand un certain niveau de vigilance est atteint, ils voient et entendent ces perceptions internes: si ils ont commencé la pratique dans le noir et le silence ils en sont que plus perturbés, car ils se retrouvent dans le spectacle permanent et le bruit venant de ces perceptions.
Modifié en dernier par piedsboueux le mercredi 31 mai 2017 à 20:31, modifié 1 fois.
Diagnostiqué Aspi vers 37 ans (2007)
le reste c'est 100 intérêts
Avatar du membre
freeshost
Intarissable
Messages : 37322
Enregistré le : lundi 15 juillet 2013 à 15:09
Localisation : CH

Re: Hallucinations courantes chez les adultes autistes

Message par freeshost »

Quand je rêve, j'hallucine ? :lol:

Allez ! Une petite paralysie du sommeil comme en-cas nocturne. :lol:

Avez-vous fait des hallucinations (visuelles, auditives, etc.) ?
Pardon, humilité, humour, hasard, confiance, humanisme, partage, curiosité et diversité sont des gros piliers de la liberté et de la sérénité.

Diagnostiqué autiste en l'été 2014 :)
Avatar du membre
gog
Prolifique
Messages : 876
Enregistré le : dimanche 14 février 2016 à 6:08

Re: Hallucinations courantes chez les adultes autistes

Message par gog »

freeshost a écrit :Quand je rêve, j'hallucine ? :lol:

Allez ! Une petite paralysie du sommeil comme en-cas nocturne. :lol:

Avez-vous fait des hallucinations (visuelles, auditives, etc.) ?
Oui, ça m'est arrivé plusieurs fois lors de migraines avec aura, ça donne la même chose que sur la vidéo mais en un peu plus large et plus flashy pour moi.
https://www.youtube.com/watch?v=fo139jYAFzA
je vous conseille de couper le son
Introvertie :mryellow: pas de tsa pour moi
maman d'un petit garçon TSA et TDAH
de Desprey-Sylphe
Régulier
Messages : 45
Enregistré le : lundi 13 mars 2017 à 8:43

Re: Hallucinations courantes chez les adultes autistes

Message par de Desprey-Sylphe »


Avatar du membre
Anahata
Prolifique
Messages : 1386
Enregistré le : mercredi 26 juillet 2017 à 17:51

Re: Hallucinations courantes chez les adultes autistes

Message par Anahata »

Vraiment merci Jean. L'article evoque ces situations que j'ai déjà vécues plusieurs fois. Nouvelles odeurs, sensations de brûlure, ma voix comme en écho dans ma tête, sensation d'être touchée pendant le sommeil, hallucination hypnagogique (je vois des animaux dans le lit), les formes que parfois j'interprète mal le soir, les sensations croisées (synesthésie).... oufffff !!!!!
Au début je croyais que j'étais en plein éveil spirituel mdr mais je suis pas du genre à creuser le délire ! Hein !
:arrow: Diagnostiquée sur le Spectre de l'Autisme :shock: :D :? :cry: :innocent: :wink: :geek: :arrow:
Avatar du membre
piedsboueux
Prolifique
Messages : 1814
Enregistré le : mardi 3 mai 2016 à 16:35
Localisation : CILAOS

Re: Hallucinations courantes chez les adultes autistes

Message par piedsboueux »

... ou banal phénomène oculaire de type "persistance rétinienne" ?
Les autistes sont connus pour ne pas avoir de filtres de perception, le "bruit" vidéo ou audio des sens est donc perçus alors qu'ils sont inconnus de ceux qui les filtrent, ce n'est pas des hallucinations.
Diagnostiqué Aspi vers 37 ans (2007)
le reste c'est 100 intérêts
budakesi
Prolifique
Messages : 563
Enregistré le : samedi 7 décembre 2013 à 11:35

Re: Hallucinations courantes chez les adultes autistes

Message par budakesi »

piedsboueux a écrit :Les autistes sont connus pour ne pas avoir de filtres de perception, le "bruit" vidéo ou audio des sens est donc perçus alors qu'ils sont inconnus de ceux qui les filtrent, ce n'est pas des hallucinations.
C'est aussi mon hypothèse.
On parle souvent des hallucinations comme des "perceptions sans objet" parce que les gens "normaux" ne perçoivent pas des stimuli (internes ou externes) que perçoivent ceux "victimes d'hallucinations".
Jamais on n'envisage que ce qui est perçu par une certaine catégorie d'"hallucinés" (je ne dis pas par tous) correspond à une partie du réel qui est éliminée par les filtres sensoriels que la majorité des gens ont été conditionnés (et de fait habitués) à mettre en place dès l'enfance. Une désensibilisation de masse des uns, plutôt qu'une sensibilisation fausse des autres, en quelque sorte.
"I am, plus my circumstances." José Ortega y Gasset
HPI, diagnostiquée Asperger en janvier 2016
Avatar du membre
Jean
Modérateur
Messages : 22562
Enregistré le : lundi 24 octobre 2005 à 22:39
Localisation : Finistère

Re: Hallucinations courantes chez les adultes autistes

Message par Jean »

Article intégral :

Adults with autism spectrum conditions experience increased levels of anomalous perception

Elizabeth Milne ,
Abigail Dickinson,
Richard Smith

PLOS

Published: May 18, 2017
https://doi.org/10.1371/journal.pone.0177804
père autiste d'une fille autiste "Asperger" de 41 ans
nouvo
Prolifique
Messages : 1429
Enregistré le : dimanche 19 avril 2015 à 19:17

Re: Hallucinations courantes chez les adultes autistes

Message par nouvo »

si c'était chez les enfants, aurai-je été plus aise à répondre

car 2 expériences m'ont marquées jusqu'alors et je devais avoir entre 6 et 10-11 ans

les 2 se firent en montant un escalier

la plus précoce, dans la maison familiale à étages de type vieille maison, j'eus aperçu une forme type fantôme (personne ou femme en blanc)
cela me marqua longtemps et j'eus toujours (pendant pas mal de temps) appréhension à monter seul l'escalier (et aller dans ma chambre ou le grenier qui faisait office de "salle de jeux")

la 2nde, toujours dans un escalier mais j'étais en colo chez "les bonnes soeurs" et dans une vieille bâtisse, en montant j'eus la vision d'une main blanche sur la rembarde, un peu plus haut.

Je pense que la peur, appréhension d'une sorte de zone inconnue en furent responsables.

Je n'ai pas le souvenir d'éléments si manifestes depuis lors.
diagnostiqué asperger en 2015, à 38 ans