patic a écrit :Et puis il y a quelque chose que j'ai développé à l’extrême, c'est la volonté de porter attention à l'autre, d'essayer de me mettre à sa place. Mais tout cela se passe de façon réfléchie, ce ne sont pas des automatismes. Souvent j'y pense même encore après la situation vécue. Donc contrairement à ce que j'ai pu voir sur l'autisme avec des enfants qui ne partagent pas avec l'autre leur intérêt, je prends une vision globale des choses. Je ne suis pas au centre, je fais partie de l'ensemble et j'essaie de m'y trouver une place sans pour autant prendre celle d'un autre.
Ca me semble pouvoir être cohérent avec des traits autistiques, sans forcément être "vraiment" autiste. Comme si tu ne ressentais pas spontanément le lien social et que du coup tu l'interprétais mentalement. Comme vivre avec la tête plutôt qu'avec le coeur pour résumer. Je pense faire ça aussi.
Tu as parlé de faux self, ça peut peut-être aussi en faire partie. Dans une certaine incapacité à être soi-même, je pense qu'on peut avoir tendance à donner trop d'importance à l'autre.
Tu verras au diagnostique, tu n'auras peut-être pas le diag d'autiste, mais de douance ou HPI.
patic a écrit :Je fais un truc bizarre par exemple, comme personne d'autre apparemment (c'est ce qu'on m'a dit). Dans une grande ville en France, les trottoirs sont généralement petits et croiser quelqu'un nécessite de faire attention. Du coup, quand je marche, même accompagner avec quelqu'un, je suis en alerte permanente pour voir si j'ai quelqu'un derrière qui veut passer ou bien si j'ai quelqu'un en face à croiser. Pratiquement sans regarder, juste avec le son, je me décale au maximum pour laisser la place. Cela peut paraître normal, mais en réalité j'ai clairement observé que les gens ne le faisaient pas et réagissent au dernier moment quand l'autre personne l'invective presque.
Vu ton enfance, on peut supposer que tu aies été sur tes gardes en permanence, du coup tu es très alerte à ton environnement. Si en plus t’as une tendance à l’hyperacousie ou ce genre de ressenti…
Je me reconnais un peu dans ce que tu dis sur le trottoir. Moi il y a 9 chances sur 10 que je sois alerte, conscient de qui arrive en face, de qui me suit, de si j’ai doublé quelqu’un ou si quelqu’un me rattrape (rarement puisque je marche souvent vite et seul), et conscient de tout ce qu’il y a dans ma vision périphérique, et à l’inverse il y a une chance sur deux que les autres personnes soient dans leurs pensées, en train de discuter, de regarder leur smartphone, alors c’est souvent moi qui bouge avant eux.
Mais il y a aussi tout un protocole plus ou moins conscient dans ma tête, si c’est quelqu’un d’âgé/enceinte/encombré je vais bouger, mais si c’est plusieurs personnes qui arrivent en face, y’a pas de raison que je m’écrase pour leur laisser toute la place sous prétexte que je marche seul, ils peuvent faire une pause de 5 secondes dans leur conversation en se mettant en file indienne le temps de me croiser.
Et j’ai remarqué que quand je ne suis pas alerte je suis en gros « comme les autres », donc je n’anticipe pas, donc ils doivent faire plus attention et se poussent plus que quand c’est moi qui fait attention.
Par ailleurs je te trouve dur avec toi-même, quand tu dis « je suis bizarre, et je n’ai jamais rencontré personne d’aussi tordu que moi », le mot « bizarre », passe encore, bien que déjà pas très flatteur, mais « tordu » est pour moi péjoratif.
Je ne te fais pas la leçon, et je comprends vu ton enfance que tu puisses avoir ces mots là, mais essaie d’avoir plus de bienveillance envers toi-même.
Pour revenir à ce qui a été dit plus haut, j’entends la colère des autistes contre la psychanalyse, et je suis justement en train de tout réinterpréter sous l'angle de traits autistiques.
Mais je ne jette pas pour autant TOUTES les théories psychanalytiques, mais je comprends que c’est justement quelque chose que les aspies ont du mal à faire, ils ont besoin de règles absolues, blanc/noir, et pas gris, ça c’est compliqué pour eux.
Comme je l’ai expliqué dans mon sujet, qu’on remette en doute les théories d’origine de Freud, ok, mais quand je parle d’analyse transactionnelle avec le triptyque Enfant/Adulte/Parent et la façon dont l’éducation modèle le comportement de l’enfant, ça me semble simplement logique, mais maintenant que je comprends les différences cognitives des autistes, il est clair qu’il est IMPERATIF d’adapter la thérapie à un autiste (et donc de l’avoir diagnostiqué) sinon on va travailler en grande partie dans le vide, même avec une TCC.
En ce qui me concerne, vu que je pense que mon père est aspie ou borderline et vu mes difficultés, je pense aussi avoir des traits aspie dont je me dis qu’ils auraient pu être aisément surmontables, sauf qu’à ces traits aspie se sont donc ajoutés les difficultés de mon père (comme le dit Attwood, c’est toute la famille qui encaisse les difficultés du parent aspie), et ça m’a bien foutu dedans, mais c’est là que ces réflexions sur la part inné/acquis sont importantes pour moi, et je ne veux donc pas rejeter toute théorie psychanalytique.
Ma soeur vient elle aussi de commencer à prendre conscience de ses difficultés, jusqu’à maintenant elle les attribuait au hasard ou se dévalorisait, et (non sans mon insistance) elle a enfin trouvé une psychothérapeute qui comprend le problème, et commence à comprendre que ses difficultés viennent en grande partie des « protections mentales » qu’elle a mis en place dans le climat familial anxiogène.
Et notez bien que je fais la différence entre la pratique psychanalytique (un mec allongé qui raconte sa vie à son psy, ce qui ne sert pas à grand chose pour un aspie) et les théories psychanalytiques (dont il y en a des bonnes et des mauvaises).
C’est peut-être simplement une incompréhension sur les mots employés.
Je lis sur wikipedia qu’Eric Berne a théorisé l’analyse transactionnelle (basée sur les rapports entre individus) après avoir été refusé dans un institut psychanalytique, mais après 16 ans d’apprentissage de la psychanalyse.
Donc j’ai déjà entendu parler de l’analyse transactionnelle comme une « petite soeur » de la psychanalyse, mais en même temps c’est assez différent.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Analyse_transactionnelle
Je trouve ça dommage que des aspies rejettent en bloc toute théorie psychanalytique (en mettant dans le même sac Freud et tout ce qu’on a théorisé depuis, comme l’analyse transactionnelle), ils passent à côté de théories plus récentes qui les concernent aussi, mais différemment des neurotypiques.
Quand on voit les difficultés que peuvent avoir les relations entre neurotypiques, on imagine aisément les difficultés des aspies (voir ici les différents « modes » qui ne sont perceptibles qu’en sous-entendus
https://fr.wikipedia.org/wiki/Analyse_t ... ansactions et donc assez imperceptibles aux aspies).
Diagnostiquer son autisme c’est une chose, le comprendre c’est la suivante, mais comprendre comment ça a affecté son développement et le rapport aux autres sur le long terme c’est une autre étape à laquelle je n’ai pas l’impression que les TCC répondent entièrement. Les TCC corrigent, mais elles ne permettent pas forcément de comprendre.