Des microsillons cérébraux dictent les hallucinations auditives
L'origine des voix entendues par les schizophrènes -« dans la tête » ou venues d'ailleurs -dépend de l'anatomie
Plus de deux schizophrènes sur trois entendent des voix. Certains croient qu'elles s'adressent à eux directement « dans leur tête». D'autres croient percevoir un discours extérieur. Ces hallucinations pourraient s'expliquer par de subtiles différences dans l'anatomie de leur cerveau, selon les observations d'une équipe française publiées en ligne le 7 août sur le site de la revue Schizophrenia Bulletin.
Les hallucinations auditives verbales font partie des symptômes les plus courants de la schizophrénie: ces phénomènes délirants seraient présents chez 70% des personnes atteintes par la maladie, une pathologie qui touche i % de la population selon l'organisation mondiale de la santé. Les deux psychiatres à l'origine, il y a un siècle, du concept de schizophrénie, Emil Kraepelin et Eugen Bleuler, distinguaient deux grandes classes d'hallucinations auditives verbales, selon qu'elles étaient perçues comme venant de l'intérieur aide l'extérieur de leur tête.
Des études plus récentes ont confirmé cette distinction et identifié trois dimensions indépendantes pour ces hallucinations: la complexité du langage, qui devient hermétique pour les tiers, les erreurs d'attribution (à soi ou à un autre) et la localisation spatiale des voix. Si les deux premières ont déjà été documentées par l'imagerie médicale, cela restait à faire pour la localisation spatiale.
C'est ce qu'a réalisé, au moyen de l'imagerie par résonance magnétique (IRM), l'équipe réunie autour d'Arnaud Cachia (Unité de recherche Inserm-CEA, Orsay), qui comprenait aussi des psychiatres de l'Assistance publique -Hôpitaux de Paris.
Pour leur étude, les chercheurs ont recruté45 patients (29hommes et 16fem- mes, tous droitiers) ayant eu un diagnostic établi de schizophrénie et ayant des hallucinations auditives persistant depuis au moins un an et de façon quotidienne au cours du dernier trimestre écoulé, malgré un traitement. Vingt personnes chez les- quelles l'absence de symptômes psychiatriques avait été vérifiée ont été incluses pour permettre des comparaisons.
Les 27 patients schizophrènes pour lesquels la localisation de l'hallucination auditive était nette ont été subdivisés en deux groupes :ceux pour lesquels elle prenait uniquement la forme d'une voix intérieure (15 patients) et ceux pour lesquels la L 8 I J La position de la jonction de sillons conditionne l'origine des «voix». CEAIAP-HP voix était extérieure (12 patients). L'IRM a révélé des différences dans une région impliquée dans la localisation spatiale des sons et située dans le cortex temporo-pariétal de l'hémisphère droit.
Dérives
L'anomalie a été précisée grâce à des techniques d'analyse détaillée d'images 3D, développées à NeuroSpin, la plate-forme d'imagerie située à Saint-Aubin- Saclay (Essonne). Elle concerne la jonction entre deux sillons du cortex cérébral : le sillon temporal supérieur et le sillon angulaire. En comparaison de ce que l'on observe chez le sujet sain, la jonction est déplacée vers l'avant du cerveau chez les sujets entendant des voix extérieures. Elle est au contraire située plus en arrière chez ceux percevant une voix intérieure. Les sillons apparaissent sur le cerveau au cours de la vie foetale, notamment au troisième trimestre de la grossesse. L'anomalie de position de la jonction, qui conditionne la localisation de l'hallucination auditive, pourrait découler de dérives lors de la mise en place de l'organisation fonctionnelle du cerveau. Mais l'étude ne dit rien de l'origine de l'hallucination elle-même.
Paul Benkimoun (Le Monde – 22.08.2009)
"Where Do Auditory Hallucinations Come From?"—A Brain Morphometry Study of Schizophrenia Patients With Inner or Outer Space Hallucinations
Schizophrénie, localisation des hallucinations
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Vous savez, je ne me vexe pas pour si peu. Et j'étais perplexe pour savoir où classer ce sujet.
Cette publication m'a fait réagir positivement, car elle est à l'image de la publication des recherches de Monica Zilbovicius il y a 4 ou 5 ans, qui établissait un traitement particulier (par rapport aux NT) de la voix humaine chez les autistes.
A l'époque, j'ai lu dans un forum de psy un message sur le thème : "rendez-vous compte, on a perdu les trisomiques, on veut nous enlever les autistes, qu'est-ce qu'il nous restera quand on nous enlèvera les schizophrènes ?".
Cette réflexion d'un cynisme marchand époustouflant n'a même pas soulevé l'indignation.
En simplifiant (plutôt en regroupant les quelques idées éparses que j'ai sur le sujet), il est intéressant de noter différences et convergences.
La trisomie est lié à un gêne identifié il y a 50 ans (Pr Lejeune de sinistre mémoire pour les féministes).
L'autisme a une très forte suspicion d'origine génétique : dans 28% des cas, elle est déterminée, inconnue mais suspectée dans les autres.
Pour la schizophrénie, c'est aussi le cas, mais à un degré un peu moindre.
Deux différences essentielles entre autisme et schizo :
- l'âge d'apparition : début de l'âge adulte ou fin de l'adolescence pour les schizo, 12-18 mois pour les autistes;
- la prévalence: la schizophrénie est 6 à 10 fois plus répandue.
La question de la prise en charge éducative ou thérapeutique ne se pose pas de la même façon pour le bébé que pour l'adulte ...
Il est important de faire la différence entre les 2, non pas pour stigmatiser l'une, mais pour adapter la façon de faire.
Or, comme de toute façon, l'enfant suivi est considéré comme un psychotique, bien des professionnels considèrent qu'on peut passer de l'un à l'autre comme çà (cf. le sujet "divagations" ou des publications des PUR).
Lors d'un débat, un spécialiste de l'autisme expliquait qu'il avait été formé par un grand clinicien. Celui-ci expliquait que le quart de la population souffrait d'hallucinations auditives - ce qui était le cas de ce clinicien.
Mais ce qui le différenciait d'un schizophrène, c'est que celui-ci croyait à ce qu'il entendait.
C'est vachement rassurant pour un professionnel de mettre une étiquette "adéquate".
Il m'apparaît donc intéressant d'être au courant des recherches sur la schizophrénie.
Cette publication m'a fait réagir positivement, car elle est à l'image de la publication des recherches de Monica Zilbovicius il y a 4 ou 5 ans, qui établissait un traitement particulier (par rapport aux NT) de la voix humaine chez les autistes.
A l'époque, j'ai lu dans un forum de psy un message sur le thème : "rendez-vous compte, on a perdu les trisomiques, on veut nous enlever les autistes, qu'est-ce qu'il nous restera quand on nous enlèvera les schizophrènes ?".
Cette réflexion d'un cynisme marchand époustouflant n'a même pas soulevé l'indignation.
En simplifiant (plutôt en regroupant les quelques idées éparses que j'ai sur le sujet), il est intéressant de noter différences et convergences.
La trisomie est lié à un gêne identifié il y a 50 ans (Pr Lejeune de sinistre mémoire pour les féministes).
L'autisme a une très forte suspicion d'origine génétique : dans 28% des cas, elle est déterminée, inconnue mais suspectée dans les autres.
Pour la schizophrénie, c'est aussi le cas, mais à un degré un peu moindre.
Deux différences essentielles entre autisme et schizo :
- l'âge d'apparition : début de l'âge adulte ou fin de l'adolescence pour les schizo, 12-18 mois pour les autistes;
- la prévalence: la schizophrénie est 6 à 10 fois plus répandue.
La question de la prise en charge éducative ou thérapeutique ne se pose pas de la même façon pour le bébé que pour l'adulte ...
Il est important de faire la différence entre les 2, non pas pour stigmatiser l'une, mais pour adapter la façon de faire.
Or, comme de toute façon, l'enfant suivi est considéré comme un psychotique, bien des professionnels considèrent qu'on peut passer de l'un à l'autre comme çà (cf. le sujet "divagations" ou des publications des PUR).
Lors d'un débat, un spécialiste de l'autisme expliquait qu'il avait été formé par un grand clinicien. Celui-ci expliquait que le quart de la population souffrait d'hallucinations auditives - ce qui était le cas de ce clinicien.
Mais ce qui le différenciait d'un schizophrène, c'est que celui-ci croyait à ce qu'il entendait.
C'est vachement rassurant pour un professionnel de mettre une étiquette "adéquate".
Il m'apparaît donc intéressant d'être au courant des recherches sur la schizophrénie.
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Re: Schizophrénie, localisation des hallucinations
L'article date de 2007, mais il me semble intéressant à connaître :
« Éléments de diagnostic différentiel clinique entre le syndrome d’Asperger et la personnalité Schizoïde/Paranoïaque »
Laurent Mottron, Isabelle Soulières et Edith Ménard
Santé mentale au Québec, vol. 32, n° 1, 2007, p. 367-375.
Résumé : Les personnes avec syndrome d’Asperger soumise à une hostilité objective développent des états de méfiance généralisée pouvant conduire à des actes hétéro-agressifs. Ceux-ci peuvent être confondus avec des syndromes de persécution entrant dans le cadre d’une personnalité schizoïde ou schizothymique. Ces deux entités posées sur l’axe 2 sont en effet des diagnostics différentiels du syndrome d’Asperger, du fait de leur caractère commun de permanence et de la présence d’atypie de la socialisation. À partir de deux cas cliniques, cet article propose une série de critères cognitifs (profile Wechsler), développementaux (chronologie des actes de violences), discursif (aspect qualitatif du discours rapportant les événements) permettant de faire le diagnostic différentiel d’une situation d’hostilité vis-à-vis de l’entourage. Les conséquences dans le support à apporter à ces personnes sont également exposées.
Texte intégral :
http://www.erudit.org/revue/SMQ/2007/v3 ... 6526ar.pdf
« Éléments de diagnostic différentiel clinique entre le syndrome d’Asperger et la personnalité Schizoïde/Paranoïaque »
Laurent Mottron, Isabelle Soulières et Edith Ménard
Santé mentale au Québec, vol. 32, n° 1, 2007, p. 367-375.
Résumé : Les personnes avec syndrome d’Asperger soumise à une hostilité objective développent des états de méfiance généralisée pouvant conduire à des actes hétéro-agressifs. Ceux-ci peuvent être confondus avec des syndromes de persécution entrant dans le cadre d’une personnalité schizoïde ou schizothymique. Ces deux entités posées sur l’axe 2 sont en effet des diagnostics différentiels du syndrome d’Asperger, du fait de leur caractère commun de permanence et de la présence d’atypie de la socialisation. À partir de deux cas cliniques, cet article propose une série de critères cognitifs (profile Wechsler), développementaux (chronologie des actes de violences), discursif (aspect qualitatif du discours rapportant les événements) permettant de faire le diagnostic différentiel d’une situation d’hostilité vis-à-vis de l’entourage. Les conséquences dans le support à apporter à ces personnes sont également exposées.
Texte intégral :
http://www.erudit.org/revue/SMQ/2007/v3 ... 6526ar.pdf
père autiste d'une fille autiste "Asperger" de 41 ans