Récemment, je me suis découvert une hyperémotivité dont j'ignorais tout jusqu'alors. La première occurrence est survenue lors d'un rendez-vous chez le médecin pour des mots de ventre. J'étais accompagnée de ma mère. Je précise également que je n'étais pas allée chez le médecin depuis plusieurs années, et que celui que j'allais voir à ce moment n'avait aucun rapport avec celui que je voyais auparavant. Un inconnu donc.
J'ai découvert que dès qu'on est gentil avec moi - je parle d'une gentillesse désintéressée, sincère, le genre d'attitude qui veut dire "Je ne vous juge pas et j'essaie de vous mettre à l'aise", typique du corps médical - je suis aussitôt prise d'une terrible et quasi-irrépressible envie de me mettre à pleurer comme une gamine terrifiée. Malheureusement pour moi, j'ai dû subir je ne sais trop quel traumatisme ayant provoqué chez moi une peur irrationnelle du fait de pleurer en public. Vive la contradiction. (L'image de ces enfants âgés de 4 à 10 ans qui ont pour habitude de fixer avec avidité et fascination le visage larmoyant d'un camarade en pleurs comme si ce dernier avait une malformation particulièrement déroutante sur la figure provoque encore chez moi des frissons d'horreur).
Je me suis donc retrouvée, pendant les deux bons tiers finaux de la durée du rendez-vous, la gorge horriblement serrée, les yeux larmoyants et la goutte au nez sans aucune explication rationnelle en dehors du fait que monsieur le médecin ait osé me traiter de manière exemplaire. Logique.
Je n'y suis plus retournée, mon mal de ventre est passé tout seul finalement.

Je pensais pouvoir éviter ce genre d'occurrences émotionnelles indésirables en comptant tout simplement sur le bon fonctionnement de mon "système immunitaire en béton" comme j'aime le désigner. Sauf que.
A mes 18 ans, j'ai pris la décision de réaliser un vieux rêve. Apprendre à jouer de l'alto. J'ai donc tâché de dénicher une école de musique, une prof de violon et un instrument digne de ce nom, et c'est avec joie et excitation que j'entamais une nouvelle étape de ma petite vie d'étudiante. J'étais vraiment très très enthousiaste. J'avais déjà pris des cours de piano auparavant. J'ai commencé vers 4 ans, et arrêté à 16 ans après mon bac car j'allais poursuivre mes études dans une autre ville. Mon prof de piano avait la particularité d'être une patience exemplaire. Mon frère et moi n'étions pas des élèves faciles. Je ne parlais pratiquement jamais, et je ne faisais aucun effort niveau solfège. Mon frère, quant à lui, a passé ses premières années d'études à toucher à tout dans la pièce sauf le piano, et le prof l'a tout naturellement laissé faire jusqu'à ce qu'il ait examiné attentivement tous les objets présents dans la salle pour finalement décider de lui-même de revenir vers l'instrument. "Normal, après tout il est payé pour ça" c'est ce que j'avais tendance à dire. Sauf que j'ai eu l'occasion de réaliser qu'une telle patience ce n'est pas très commun, peu importe si on est payé ou pas.
Pour faire court, j'ai rencontré ma prof et elle a hautement surestimé mon niveau lors du premier cours. Résultat : elle m'a donné des exercices bien au dessus de mes capacités, j'ai passé la semaine entière à m’entraîner (de la mauvaise manière), et au moment de lui faire un compte rendu de mon travail, je me suis fait stopper dans ma lancée dès la première note, en me demandant où est-ce que j'avais pu échouer. En vérité il me manquait beaucoup de bases. Mon archet n'allait pas droit, ma main était positionnée n'importe comment, enfin bref, ça n'allait pas aller aussi vite qu'on l'avait toutes les deux imaginé.
C'est là qu'a démarré l'enseignement pur et dur. En commençant par le commencement.
Et durant les cours qui ont suivi, j'ai eu l'impression d'avoir plus exaspéré ma prof qu'autre chose

La vérité, c'est que je fais de mon mieux. Mais les deux derniers cours, je suis sortie de la salle au bord des larmes et la lèvre inférieure tremblante (De un, choc psychologique, et de deux, honte suprême de réagir ainsi).
Je suis on ne peut plus consciente de ma réaction disproportionnée. C'est normal qu'elle soit dure, ce n'est pas un instrument simple, et quand on a tendance à avoir des problèmes d'attention ça n'arrange pas les choses. Elle m'a dit elle-même que les bases s'acquièrent au tout début, et que si je les intègre, il sera facile de corriger les quelques petits défauts restants plus tard. La vérité c'est que je ne suis pas habituée à ce qu'on me traite aussi durement. Je sais que d'un côté la faute est mienne : une personne avec de la force de caractère n'aurait jamais réagi ainsi : élevé la voix peut-être en cas de sérieuse offense, mais pas larmoyé pitoyablement sur son sort. Mais j'ai l'impression qu'elle ne se prive pas non plus. Elle peut dire ce qui l'arrange, mais je crois que ce qui me blesse le plus, c'est lorsque j'ai l'impression qu'elle perçoit chez moi une "envie de mal faire" ou une "intention de faire les choses mal" alors qu'en vérité il n'en est rien.
Quand elle me montre quelque chose et que j'essaie de le reproduire en oubliant malencontreusement une étape : ce n'est pas parce que je n'ai pas bien écouté ou parce que je n'ai pas envie d'inclure cette étape à mon exercice... C'est simplement qu'il y a tellement de choses sur lesquelles veiller à la fois, que si j'ai le malheur de trop me concentrer sur une chose particulière, une autre pourrait bien passer à la trappe. Parfois je réalise mon erreur, et avant même que je puisse reprendre position pour tout reprendre au départ, elle intervient comme si j'avais commis un affront. Je met du temps a assimiler chaque chose et j'ai vraiment l'impression que ça l'exaspère.
Voilà.
J'estime que les problèmes avec ma prof sont secondaires. Pour les régler, ou au moins trouver la force, le courage de lui faire face, de m'expliquer sans avoir à me concentrer à laisser de longs blancs entre mes phrases pour empêcher ma voix de trembler, il faudrait que j'arrive à gérer mes émotions. A éviter d'être sur le point de déborder, de peine et de honte, en permanence. Je réagit, effectivement, comme une enfant de 6 ans qu'on réprimande, et j'ai du mal à imaginer qu'on puisse prendre quelqu'un comme ça au sérieux. De plus elle n'est pas très âgée, sans doute quelques années de plus que moi (4 ou 5 sans doute), ce qui fait que j'ai l'impression d'avoir en face de moi quelqu'un qui pourrait très bien être un(e) camarade de fac, et cette distanciation, ce jugement que je ressens de son côté me rabaisse et n'améliore pas mon estime de moi.
Désolée d'écrire autant à chaque fois


L'instant questions maintenant (je crois que je pourrais simplement poser ces questions sans mon pavé de contextualisation et que ça reviendrait quasiment au même

Avez-vous tendance à être trop émotifs ?
Si oui, dans quelles circonstances ?
En avez vous honte ? Et pourquoi ?
Connaissez-vous des manières efficaces de gérer les crises, ou au moins de ne plus en avoir honte ?
Si au contraire vous avez tendance à savoir très bien contrôler vos émotions, avez vous des astuces, des conseils ?
Y'a-t-il des situations (quotidiennes/sociales/exceptionnelles) qui provoquent chez vous des "débordements" comme la gentillesse et l'incompréhension le font pour moi ?
Y êtes vous souvent confrontés ? Quand vous y êtes confrontés, les affrontez-vous ou avez-vous tendance à les fuir ?
(D'ailleurs à ce propos, l'idée de "fuir" et de changer de prof m'a vaguement effleuré l'esprit... Mais je pense que si je prenais cette décision, je ne réglerais rien, et j'aurais encore plus honte de moi et de ma lâcheté. J'aimerais vraiment être capable d'affronter ces situations, de les surmonter).