«Snow Cake», sujet glissant
Autour d'une autiste, Marc Evans réussit un film pudique.
Par Alexis BERNIER
LIBERATION : mercredi 31 janvier 2007
Snow Cake de Marc Evans avec Alan Rickman, Sigourney Weaver, Carrie-Anne Moss. 1 h 52.
En 2002, le Britannique Marc Evans a réalisé un film d'horreur à petit budget, inédit en France mais visible en DVD et programmé en ce moment sur le câble. My Little Eye se distinguait du tout-venant de l'épouvante formatée moins par son sujet, par ailleurs plutôt malin (un tueur dans le Loft ), que par son traitement jouant à merveille l'esthétique glacée de la surveillance via caméra infrarouge, webcam et autres gadgets.
Moins paranoïaque mais aussi stylisée (couleur froide, ambiance documentaire...) avec Snow Cake , sa mise en scène pudique réussit l'exploit de faire passer la pilule d'un scénario bien écrit mais incroyablement casse-gueule. Qu'on en juge : en plein hiver au Canada, un quinquagénaire britannique flapi (Alan Rickman, parfait en cocker au bout du rouleau) voit mourir à ses côtés la jeune fille exubérante qu'il a prise en stop. Tourmenté par la culpabilité, bien qu'il ne soit en rien responsable de l'accident, il décide d'aider quelques jours la mère célibataire de la jeune fille, Linda, une autiste à «l'univers étrange et fantasque» . Comme de juste «il sortira transformé» de cette expérience.
On imagine le genre d'obscénité larmoyante dont aurait pu accoucher Hollywood. Au contraire, Snow Cake , produit par Revolution Films, la so-ciété du toujours intriguant Michael Winterbottom, est d'une grande réserve. Un film non pas sur l'autisme, «mais dont un des personnages est un autiste» comme l'explique Evans. S'interdisant toute grimace inutile, Sigourney Weaver se tire avec les honneurs de ce rôle impossible. Cette volonté d'éviter la lourdeur tout en se coltinant des thèmes aussi difficiles que le deuil, la culpabilité, l'échec ou la maladie mentale font de Snow Cake un film d'une belle humanité. Quand à Carrie-Anne Moss, rescapée de Matrix , elle est sublime dans le rôle de Maggie, une femme indépendante échouée dans les neiges de l'Ontario et auprès de laquelle le personnage incarné par Rickman va trouver un peu de réconfort.
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