
Je souhaiterais vous faire partager une réflexion qui m'a soulagée, je me dis qu'elle peut servir à d'autres.
Quand quelqu'un d'autre fait quelque chose qui vient nous heurter dans notre fonctionnement on peut ressentir non-seulement une grande gêne, voire une souffrance, mais aussi une impression que l'autre ne fait pas attention à nous ou même qu'il le fait exprès.
On ressent donc de la souffrance ET de la colère (sentiment d'injustice, de persécution, etc.). Ce qui démultiplie la souffrance ressentie.
Personnellement c'est ce que je ressentais, la plupart du temps en tous cas.
Puis il m'est arrivé ceci :
Je vis en collocation avec ma sœur et elle a un fonctionnement complètement différent du mien : là où j'ai besoin que tout soit rangé, à sa place, accessible... elle laisse traîner, elle remet à plus tard, elle fait les choses à son rythme à elle.
Un jour alors qu'on sortait, elle enlève le sac poubelle plein pour l'emporter et se rend compte que le fond de la poubelle commence à être sale. Elle la laisse donc dans l'évier de la cuisine pour la nettoyer plus tard.
Déjà là j'ai tilté

Plus tard, le lendemain je crois ou le soir-même, alors que j'avais fait tout ce qu'il y avait à faire pour être disponible à ce que je souhaitais faire ensuite (m'occuper de mon site internet) et qu'il ne me restait plus qu'à manger vite-fait... je retrouve cette poubelle dans l'évier. Et elle me bloque parce que j'ai besoin de cet évier pour me faire à manger et ensuite pour faire ma vaisselle et avoir enfin l'esprit libre pour mon site.
Je me sens gênée dans mon besoin, c'est une chose, mais je ressens aussi de la colère contre ma sœur. Je me dis qu'elle ne fait pas attention aux besoins des autres, qu'on est deux à vivre dans cet appartement et que le minimum serait qu'elle n'encombre pas les parties qu'on utilise en commun, etc. Grosse colère intérieure, sentiment d'injustice, de ne pas être prise en compte, etc.
J'en parle quelques jours après avec elle (on attend toujours que la colère soit redescendue pour se faire des remarques, ça passe mieux à froid, ça préserve notre relation) et elle est un peu surprise, elle ne pensait pas du tout que ça me gênerait, de son côté elle m'explique ce qu'elle aurait fait (elle aurait soit nettoyé la poubelle, ça ne lui pose pas de problème, soit posé la poubelle au sol dans un coin et ne s'en serait pas plus préoccupée que ça). Je lui explique que moi ça me gêne dans mon fonctionnement, que je n'ai pas sa souplesse à elle, que ça m'est déjà difficile d'éliminer mes propres tâches à effectuer alors que j'en ai terriblement besoin pour me sentir disponible à autre chose, alors quand quelqu'un vient m'en rajouter une c'est comme un grain de sable dans mon fonctionnement, etc.
Elle me comprend, je comprends aussi que ce n'était pas du tout malveillant de sa part ou je-m'en-foutiste, qu'elle a juste fait en fonction de son fonctionnement à elle qui est de devoir laisser une tâche qu'elle remet à plus tard en évidence pour ne pas l'oublier (comme ici la poubelle dans l'évier).
Elle va faire plus attention à ne pas encombrer les parties communes et de mon côté je vais essayer de m'assouplir si jamais ça se reproduit : je mets le truc de côté et je n'y pense plus.
Grâce à cette anecdote j'ai donc pu différencier la gêne de la colère. Quand quelque chose du genre se reproduit je peux être gênée dans mon fonctionnement (et encore, la discussion avec elle m'a aidée à trouver des solutions pour y remédier), mais je n'en veux plus à l'autre, je n'ai donc plus de sentiment d'injustice voire de persécution (qui sont auto-destructeurs). Ma souffrance en est largement amoindrie.
Voilà, je ne sais pas si ça vous parle.

On en veut parfois aux autres de nous faire souffrir alors qu'ils n'en ont pas du tout l'intention. C'est injuste pour eux (surtout si la colère nous fait passer à l'acte contre eux), mais c'est surtout nous-mêmes que nous faisons souffrir avec ce ressenti. Donc si on peut s'en débarrasser...
