Je deviens mutique quand je dois me concentrer, déployer beaucoup d'efforts cognitifs :
- pour suivre une conversation avec au moins deux autres personnes qui parlent plus vite que moi (et d'autant plus s'il y a d'autres conversations aux alentours),
- dans les jeux qui demandent beaucoup d'observation (poker, échecs face à une personne de niveau similaire ou supérieur, etc.),
- quand il y a beaucoup de bruit non sollicité (fêtes de famille, discothèques, etc.),
- quand il y a beaucoup d'attentes sociales (fêtes de famille, situations où je suis ou risque d'être au centre des attentions, situations auxquelles je ne me suis pas préparé),
- quand il y a une conversation ou une conférence (sur l'autisme, par exemple
) dans une langue autre que la langue française,
- quand je ne sais pas quelles sont les attentes (implicites) des autres, ou quand je les devine mais ne veux pas les honorer*,
- etc.
[D'ailleurs, en psychologie sociale, on apprend qu'on est souvent plus exigent (ayant plus d'attentes) envers les personnes de l'endogroupe qu'envers des personnes des exogroupes. "Plus je suis satisfait (socialement, affectivement, etc.), plus je m'y habitue." Les habitudes deviennent des attentes. Les normes descriptives deviennent des normes prescriptives. Ceci est un facteur qui contribue à ce que diverses personnes préfèrent être avec des personnes qui ne les connaissent pas. Car celles-ci ont peu d'attentes. Mais... ce n'est que provisoire souvent... au bout d'un moment, l'autre personne nous connaît mieux... les attentes germent et croissent... sauf éventuellement chez les personnes qui ont conscience des normes sociales, des attentes, de l'évolution de celles-ci, ou chez les personnes ayant développé des formes de sagesse (humilité, ascèse, etc.) et des formes de lâcher-prise (vivre et laisser vivre, pardonner, sérénité, accepter la réalité et ses imperfections, ou qu'il n'y a rien de parfait, ni même dans nos croyances et espérances, etc.). Comme quoi, la psychologie sociale et la philosophie font partie des disciplines pouvant nous aider.
]
Je reste volontairement taiseux aussi :
- pour ne pas interrompre une conversation entre plusieurs autres personnes,
- parce que je sais que, si je deviens producteur de langage, on va m'en demander encore plus, ["Donne-moi ce que tu m'as déjà donné. Je suis un chien de Pavlov concernant les interactions sociales."
]
- pour laisser d'autres personnes occuper la "sale" job (animer la conversation), que certaines affectionnent avec engouement et répartie (elles ont besoin de se faire remarquer),
- etc.
Je suis moins mutique si je sais ce que je dois/vais faire/dire :
- dans des situations de danger, d'urgence, [On a appris les cours samaritains, par exemple, ainsi que les numéros d'urgence en Suisse.
]
- dès le moment où j'ai pris une décision que je dois communiquer, [au poker notamment]
- dans d'éventuelles situations où je fais confiance à l'autorité, [ordres et questions du personnel policier, par exemple, envoi de factures (bon, il m'était arrivé d'être mutique [mutisme administratif
] quand je n'avais pas assez pour honorer les factures => rappels => poursuites), demande de documents officiels]
- dans les contextes où on peut rigoler, se lâcher, sans devoir honorer trop d'attentes sociales, [exemple : divers forums, dont le forum Asperansa
]
- dans les contextes où je peux réfléchir avant de communiquer, [exemple : les forums, les lettres, les courriels
]
- dans les contextes où on ne voit que ce que je veux partager (je veux partager des messages, pas moi-même), [l'internet en général]
- si je parle avec des personnes sur des domaines spécifiques (notamment avec des personnes spectro-autistes
) et non faire du small talk (et autres manœuvres ayant pour seul ou principal but l'expression sociale, le paraître, la réputation (cette obsession neurotypique
)),
- etc.
Lilas a écrit :La deuxième situation est plus rare heureusement. Elle survient en général quand quelqu'un me contrarie et que je n'arrive plus à gérer l'émotion que cela provoque. Dans ces cas là, prononcer le moindre mot devient difficile, même un simple oui, non, ou bonjour. Et ca peut durer aussi longtemps que la situation à l'origine du problème perdure : quelques secondes, quelques jours ou quelques mois.
Elle est aussi plus rare chez moi, notamment car j'arrive souvent à la prévenir. [On va éviter de discuter de certains sujets politiques, religieux, etc.
]
Par contre, non prévenue, elle laisse les émotions sortir quand je suis seul chez moi, parfois sous forme d'écrits (sur des forums
). Bon, là, il s'agit de sentiment de l'homme révolté (à la Camus).
Si c'est "juste" un désaccord idéologique (discussion politique, religieuse, sociétale, philosophique, éthique, etc.), je vais identifier le point de désaccord, le formuler verbalement et conclure "Sur ce point, nous sommes en clair désaccord".
Mais ma conscientisation citoyenne aux droits humains m'encourage à
witness, à être témoin, à faire déposition, à ne pas passer sous silence, à prendre mes responsabilités en tant que témoin. Je vais donc chercher des stratégies pour jouer mon rôle de témoin au lieu de jouer le rôle de taiseux lâche.