hazufel a écrit :Comment peux-tu le savoir si tu ne lis jamais le livre ?
Tu n'auras jamais dans un film le ressenti de John Coffee face à la douleur des autres, la fascination de Paul Edgecombe pour cet être si spécial qu'est John, tu n'auras jamais toute la complexité des sentiments d'Harry Potter face à son destin particulier, la douleur diffuse de Rogue, la richesse, les liens des peuples, leurs cultures de l'univers fantastique de Tolkien, la richesse de mécanique cognitive de Sherlock Holmes, les détails d'une époque aussi riche que l'Angleterre du XIX, les sentiments retenus et pour autant violents de toutes ses femmes qui traversent les ouvrages de Jane Austen, des soeurs Brontë, de Daphne du Maurier, de Wilkie Collins, les détails de l'Histoire traversée de toutes ses vies rencontrées chez Hugo, Zola, ou Ken Follett.
Un livre laisse ton imagination trouver les reliefs d'un personnage, les couleurs d'un décor, selon le ressenti de ceux qui le traversent. Dans un film, tout ça est imposé.
Je n'ai jamais vu un film qui ait supplanté un livre. Même s'il y a surement des cas.
Concernant Stephen King spécifiquement, pas besoin de lire les livres pour sentir quand les adaptations sont mauvaises.
Mais quand je dis mauvaise je parle du résultat final, c'est pas vraiment une comparaison puisque par définition le film c'est une réinvention complète d'une œuvre donc on pourrait dire qu'un film et un roman présentent deux histoires différentes deux œuvres presque indépendante, leur seul point commun étant l'idée de scénario initial.
Sur le "ressenti" des personnages, même si dans un film ça passe par un filtre particulier : celui de l'acteur et de son interprétation du rôle qu'il est sensé joué, je trouve ça plus intéressant de pouvoir le lire sur les visages des acteurs, leurs gestes, le ton de leur voix (et là VO et VF offrent encore une double lecture), la musique choisies pour l'ambiance que de se "contenter" des mots de l'auteur. Bien sûr, tout ça n'est valable que dans un "bon film" ou dans un "bon livre".
Voilà pourquoi je dis que l'adaptation de la ligne verte est bonne.
Le ressenti de John Coffee face à la douleur des autres, la fascination de Paul Edgecombe pour cet être si spécial qu'est John... Si dans le film tu le sens bien quand même.
Pour Harry Potter cela dit, je te rejoins. J'ai lu tous les HP et c'est vrai que les films se concentrent trop sur les décors, pas assez sur la psychologie des personnages et donc tout cet aspect est bâclé et seuls les livres peuvent compenser.
On dit souvent que le livre fait d'avantage travailler l'imagination que le cinéma mais c'est faux, il le fait travailler différemment. Les mots d'un auteur enferment autant que les images, par contre mots et images offrent des possibilités différentes.
Quand tu lis un livre, si tu ne sais pas ce que signifient les mots que tu as sous les yeux, tu ne peux pas faire travailler ton imagination. Une fois que tu as ouvert un dictionnaire ou une encyclopédie pour en comprendre le sens, tu peux ensuite poursuivre la lecture et remettre en marche l'imagination. Le cinéma pousse à la démarche inverse : tu vois des choses, tu ressens des choses mais tu ne peux pas forcément mettre des "mots" sur ce que tu viens d'apprendre et de comprendre.
"Orgueils et Préjugés" est aussi un très bon exemple. J'adore le film avec Keira Knightley (la série de téléfilms avec Colin Firth par contre est un peu ennuyeuse, bien que plus proche de l’œuvre originale). Je trouve que les personnages, leurs sentiments et leurs motivations sont très différentes entre le film (qui au final est très moderne d'ailleurs) et le roman (où le contexte historique est respecté puis qu’écrite de la main d'une contemporaine de la période décrite) que j'ai lu récemment.
Je trouve que les personnages du film sont plus sympathiques que ceux du roman, le film gomme énormément les défauts de Darcy et d'Elisabeth. Ceux des autres aussi en y réfléchissant bien (notamment Mrs Benett et Mr Collins sont bien moins casse-bonbon dans le film).
Je reconnais les qualités du livre et du film, mais ce sont deux œuvres radicalement différentes. Je préfère le film pour la dimension romantique et je préfère le livre pour sa dimension morale (c'est une leçon de vie ce roman).
Bon après, je blablate mais je pense que c'est une affaire de goûts et d'habitude.