[People] Jim Sinclair
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Re: Jim Sinclair
Jim Sinclair est personne intersexe, et a écrit des articles intéressants sur l'intersexuation.
Je trouve que ses articles posent des questions intéressantes par rapport à la psychiatrie, à la notion de normalité et aux interventions admissibles des parents (sur les conseils des médecins) sur leurs enfants.
Il y a 50 ans, il y a eu les émeutes de Stonewall. Cet anniversaire est une occasion d'approfondir la question des LGBTQI+ et de l'autisme.
Je trouve que ses articles posent des questions intéressantes par rapport à la psychiatrie, à la notion de normalité et aux interventions admissibles des parents (sur les conseils des médecins) sur leurs enfants.
Il y a 50 ans, il y a eu les émeutes de Stonewall. Cet anniversaire est une occasion d'approfondir la question des LGBTQI+ et de l'autisme.
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Re: Jim Sinclair
Non, ça ne donne que ma question (sinon je n'aurais pas demandé). Il y a peu sur le web aussi. J'espérais qu'elle avait produit des écrits sur l'autisme.
Diagnostic d'autisme juillet 2019.
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Re: Jim Sinclair
Pas moteur de recherche (permettant de trouver mention du lien http://www.aspitude.blogspot.com/) mais site d'archives conservant peut-être le contenu ancien du lien aujourd'hui mort, comme https://archive.org/ (sauf que ce matin on ne peut pas y chercher le lien voulu car ils sont en maintenance).
TSA de type syndrome d'Asperger (03/2017) + HQI (11/2016).
4 enfants adultes avec quelques traits me ressemblant, dont 1 avec diagnostic TSA et 1 au début du parcours de diagnostic.
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Re: Jim Sinclair
Merci @Olivierfh, je regarderai ça. Je ne connaissais pas cette fonction. Je vais quand même refaire une recherche sur ce qu'elle a écrit, mais je crois qu'elle a seulement participé à un ouvrage collectif.olivierfh a écrit : ↑mardi 25 juin 2019 à 7:57 Pas moteur de recherche (permettant de trouver mention du lien http://www.aspitude.blogspot.com/) mais site d'archives conservant peut-être le contenu ancien du lien aujourd'hui mort, comme https://archive.org/ (sauf que ce matin on ne peut pas y chercher le lien voulu car ils sont en maintenance).
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Re: Jim Sinclair
archive.org est revenu, le site disparu en question est archivé sur web.archive.org/web/20181225205003/http://aspitude.blogspot.com/
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Re: Jim Sinclair
Merci, tu es doué (enfin, surtout je ne le suis pas ). Ca donne un bon aperçu, quoi qu'il n'y ait qu'une page. Je reste sur ma faim quand à ses papiers sur la surdité.olivierfh a écrit : ↑mardi 25 juin 2019 à 21:27 archive.org est revenu, le site disparu en question est archivé sur web.archive.org/web/20181225205003/http://aspitude.blogspot.com/
Sur son profil Linkedin, on peut télécharger ses ouvrages en PDF.
https://www.linkedin.com/in/elesiaashkenazy
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Re: Jim Sinclair
Les liens de la page ont des chances d'être archivés aussi (selon le hasard du moteur de balayage/"crawler" de l'archive): regarde en colonne de droite dans les mots-clés du blog (Labels): deafness.
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Re: Jim Sinclair
J'avais regardé, mais les mots-clés ne sont pas actifs ; j'ai également trouvé la page du calendrier avec les snapshots conservés, il y en avait plusieurs, mais c'était des pages d'erreur (dommage, j'aurais pu en trouver 74).
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Re: Jim Sinclair
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Jim Sinclair - Auto-introduction à la Société Intersexuée d'Amérique du Nord
Dossier Stonewall 50 ans après : LGBTQI+ et autisme
Jim Sinclair, 1997
J'ai plus de chance que beaucoup de personnes intersexuées, en ce sens que mon intersexualité est une question d'anatomie "non développée" plutôt que "mixte". On a simplement supposé que j'étais une femme jusqu’au milieu de l'adolescence, de sorte que je n'ai pas subi d'interventions chirurgicales ou d'autres interventions invasives au début de ma vie.
On s'attendait à ce que je sois une fille et à ce que je m'identifie comme telle, cependant, et j'ai senti très tôt qu'il y avait quelque chose "qui n'allait pas" à ce sujet. Ce n'était qu'une des nombreuses choses inhabituelles pour lesquelles les parents et les médecins attendaient "que je les dépasse", et comme j'avais aussi de graves problèmes de communication et d'autres problèmes de développement, ce n'était pas vraiment une priorité - jusqu'à ce que j'aie douze ou treize ans, et non seulement cela ne s'est pas passé, mais a) je ne me suis pas "développé" physiquement du tout comme on s'y attendait, et b) j'avais suffisamment bien développé ma capacité à communiquer pour dire très clairement que je n’étais PAS une fille.
La première réaction a été de m'envoyer suivre une psychothérapie intensive pour essayer de me laver le cerveau afin que j'accepte l'identité et le rôle d’une femme. En fait, j'ai failli être hospitalisé dans un établissement psychiatrique pour cela, mais mes parents se sont contentés d'un lavage de cerveau en ambulatoire. Pendant plusieurs années, les choses ont été confuses et ambivalentes : quand j'ai atteint l’âge de quatorze ans, pratiquement tout le monde en dehors de ma famille m'acceptait socialement comme un garçon, mais au terme de mes seize ans, un médecin a proposé de me mettre sous œstrogènes pour faire pousser mes seins.
J'ai fini par être évalué par une équipe de "spécialistes" de l'intersexualité à seize ans et demi. L'examen physique à cette époque n'était qu'externe, plus un examen digital à la recherche de testicules et/ou d'un utérus. Il s'est avéré que je n'avais ni l'un ni l'autre. La recommandation à l'époque était que, puisque j'étais catégorique sur le fait de ne pas être une femme, il faudrait que je commence des injections de testostérone pour avoir l'air plus masculin.
Cela s’est bien passé pendant un certain temps ; d'après mon expérience des trois dernières années, le fait d'être identifié comme un garçon signifiait avant tout une libération bienvenue des pressions et des attentes de m'identifier comme une fille. Je n'avais jamais vraiment ressenti de pression similaire pour être ou agir comme un garçon - ma famille ne me considérait pas vraiment comme un garçon, et même de nouvelles relations qui ne connaissaient rien de mon histoire, et qui, au premier abord, me prenaient pour un homme, me trouvaient toujours "différent" (probablement en partie parce que je ne semblais apparemment pas mûr du tout physiquement pour un garçon de mon âge) et ne semblaient ni surprises ni fâchées quand je n’étais pas tout à fait en adéquation avec ce rôle.
Mais avec la testostérone, ma voix qui commençait à devenir légèrement plus grave et l’apparition d’une pilosité faciale ont ravivé mon sentiment que cela aussi était un piège, modifiant mon corps d'une façon qui ne me semblait pas naturelle. J'ai arrêté les injections et j'ai dit à mon endocrinologue que j'étais absolument certain de ne pas vouloir être une femme, mais que je n'étais pas du tout certain de vraiment vouloir être un homme. J'ai pensé qu'il pourrait y avoir une troisième option, celle de rester "entre les deux". Il n'était pas content de cela.
Une chirurgie exploratoire a été faite avec mon consentement quand j'avais dix-huit ans. Il n'y avait pas d'ovaires ou de testicules différenciés. Je ne divulgue pas la nature ou la direction des tissus mal différenciés, ni mon génotype, car d'après mon expérience, ce genre d'information est utilisé pour m'"assigner" à un sexe non pertinent.
A 21 ans, j'ai eu une réparation des voies urinaires et j'ai dû repousser un chirurgien trop zélé qui était déterminé à faire une phalloplastie.
Je reste ouvertement et fièrement neutre, physiquement et socialement.
https://web.archive.org/web/20090207013 ... ef_bio.htm
Campagne contre les mutilations intersexes : https://stop-mutilations-intersexes.org/
Jim Sinclair - Auto-introduction à la Société Intersexuée d'Amérique du Nord
Dossier Stonewall 50 ans après : LGBTQI+ et autisme
Jim Sinclair, 1997
J'ai plus de chance que beaucoup de personnes intersexuées, en ce sens que mon intersexualité est une question d'anatomie "non développée" plutôt que "mixte". On a simplement supposé que j'étais une femme jusqu’au milieu de l'adolescence, de sorte que je n'ai pas subi d'interventions chirurgicales ou d'autres interventions invasives au début de ma vie.
On s'attendait à ce que je sois une fille et à ce que je m'identifie comme telle, cependant, et j'ai senti très tôt qu'il y avait quelque chose "qui n'allait pas" à ce sujet. Ce n'était qu'une des nombreuses choses inhabituelles pour lesquelles les parents et les médecins attendaient "que je les dépasse", et comme j'avais aussi de graves problèmes de communication et d'autres problèmes de développement, ce n'était pas vraiment une priorité - jusqu'à ce que j'aie douze ou treize ans, et non seulement cela ne s'est pas passé, mais a) je ne me suis pas "développé" physiquement du tout comme on s'y attendait, et b) j'avais suffisamment bien développé ma capacité à communiquer pour dire très clairement que je n’étais PAS une fille.
La première réaction a été de m'envoyer suivre une psychothérapie intensive pour essayer de me laver le cerveau afin que j'accepte l'identité et le rôle d’une femme. En fait, j'ai failli être hospitalisé dans un établissement psychiatrique pour cela, mais mes parents se sont contentés d'un lavage de cerveau en ambulatoire. Pendant plusieurs années, les choses ont été confuses et ambivalentes : quand j'ai atteint l’âge de quatorze ans, pratiquement tout le monde en dehors de ma famille m'acceptait socialement comme un garçon, mais au terme de mes seize ans, un médecin a proposé de me mettre sous œstrogènes pour faire pousser mes seins.
J'ai fini par être évalué par une équipe de "spécialistes" de l'intersexualité à seize ans et demi. L'examen physique à cette époque n'était qu'externe, plus un examen digital à la recherche de testicules et/ou d'un utérus. Il s'est avéré que je n'avais ni l'un ni l'autre. La recommandation à l'époque était que, puisque j'étais catégorique sur le fait de ne pas être une femme, il faudrait que je commence des injections de testostérone pour avoir l'air plus masculin.
Cela s’est bien passé pendant un certain temps ; d'après mon expérience des trois dernières années, le fait d'être identifié comme un garçon signifiait avant tout une libération bienvenue des pressions et des attentes de m'identifier comme une fille. Je n'avais jamais vraiment ressenti de pression similaire pour être ou agir comme un garçon - ma famille ne me considérait pas vraiment comme un garçon, et même de nouvelles relations qui ne connaissaient rien de mon histoire, et qui, au premier abord, me prenaient pour un homme, me trouvaient toujours "différent" (probablement en partie parce que je ne semblais apparemment pas mûr du tout physiquement pour un garçon de mon âge) et ne semblaient ni surprises ni fâchées quand je n’étais pas tout à fait en adéquation avec ce rôle.
Mais avec la testostérone, ma voix qui commençait à devenir légèrement plus grave et l’apparition d’une pilosité faciale ont ravivé mon sentiment que cela aussi était un piège, modifiant mon corps d'une façon qui ne me semblait pas naturelle. J'ai arrêté les injections et j'ai dit à mon endocrinologue que j'étais absolument certain de ne pas vouloir être une femme, mais que je n'étais pas du tout certain de vraiment vouloir être un homme. J'ai pensé qu'il pourrait y avoir une troisième option, celle de rester "entre les deux". Il n'était pas content de cela.
Une chirurgie exploratoire a été faite avec mon consentement quand j'avais dix-huit ans. Il n'y avait pas d'ovaires ou de testicules différenciés. Je ne divulgue pas la nature ou la direction des tissus mal différenciés, ni mon génotype, car d'après mon expérience, ce genre d'information est utilisé pour m'"assigner" à un sexe non pertinent.
A 21 ans, j'ai eu une réparation des voies urinaires et j'ai dû repousser un chirurgien trop zélé qui était déterminé à faire une phalloplastie.
Je reste ouvertement et fièrement neutre, physiquement et socialement.
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Re: Jim Sinclair
Je double ici ma demande :Jean a écrit : ↑jeudi 27 juin 2019 à 15:29 blogs.mediapart.fr
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Dossier Stonewall 50 ans après : LGBTQI+ et autisme
Je ne comprends pas.Spoiler :
Diagnostic d'autisme juillet 2019.
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Re: Jim Sinclair
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Re: Jim Sinclair
Dossier LGBTQI+ et autisme
Dossier reprenant les 9 articles sur ce thème : textes de Jim Sinclair, personnes autistes transgenres, enquête d'Asperansa.
Une introduction : 50 ans après les émeutes de Stonewall
5 articles de Jim Sinclair, personne autiste intersexuée
2 articles sur les personnes autistes transgenres
1 article extrait de l'enquête d'Asperansa (vie amoureuse et orientation sexuelle)
https://blogs.mediapart.fr/jean-vincot/ ... et-autisme
Dossier reprenant les 9 articles sur ce thème : textes de Jim Sinclair, personnes autistes transgenres, enquête d'Asperansa.
Une introduction : 50 ans après les émeutes de Stonewall
5 articles de Jim Sinclair, personne autiste intersexuée
2 articles sur les personnes autistes transgenres
1 article extrait de l'enquête d'Asperansa (vie amoureuse et orientation sexuelle)
https://blogs.mediapart.fr/jean-vincot/ ... et-autisme
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Re: Jim Sinclair
dsq-sds.org Vol 30, No 1 (2010)
Being Autistic Together
Etre autiste ensemble
Jim Sinclair
Introduction
Les personnes autistes sont généralement considérées comme incapables de partager des intérêts communs avec les autres, déconnectées de la participation sociale et de la camaraderie, et inaccessibles à la transmission sociale des comportements et des attitudes. Ce sont des aspects essentiels de ce qui a été décrit comme la "solitude", le "retrait" et la "déconnexion" des autistes, les autistes "vivant dans leur propre monde", étant "piégés" dans des "coquilles" ou derrière des "murs invisibles", et de nombreux termes similaires utilisés par les personnes neurotypiques (NT) pour décrire leur perception que les autistes sont incapables d'être "ensemble" avec d'autres personnes. (Voir par exemple Frith, 1992 ; Maurice, 1994 ; Kaufman, 1995 ; Claiborne Park, 1968 ; Tustin, 1990).
Pour les personnes autistes, la situation n'est pas aussi claire. Certains d'entre nous, à certains moments de notre vie (généralement dans la petite enfance), ne sont pas vraiment conscients des autres personnes, de leurs activités ou de leurs tentatives de se mettre en relation avec nous. D'autres d'entre nous sont conscients des personnes qui nous entourent, mais les trouvent difficiles ou impossibles à comprendre. Certains d'entre nous ont des sensibilités sensorielles qui rendent la présence d'autres personnes pénible pour nous, soit à cause des personnes elles-mêmes (attouchements non désirés, conversations bruyantes, parfums et autres odeurs envahissantes), soit à cause des caractéristiques sensorielles des environnements dans lesquels nous rencontrons d'autres personnes. Certains d'entre nous ne sont pas intéressés par les mêmes choses que celles qui intéressent les gens qui nous entourent, et nous n'avons pas d'impulsion naturelle pour nous intéresser aux choses simplement parce que nous observons que d'autres personnes les trouvent intéressantes. Certains d'entre nous s'intéressent vivement aux autres personnes, à leurs intérêts et à leurs activités, mais nous ne savons pas comment nous engager avec d'autres personnes autour de ces intérêts communs.
Au moment où nous atteignons l'âge adulte, l'expérience de " communauté " des personnes autistes a probablement consisté en une combinaison de plusieurs éléments : être dérangé par d'autres personnes qui veulent que nous nous engagions avec elles, alors que nous ne partageons pas ce désir ; être intéressé et curieux des autres, mais les trouver déroutants et accablants ; essayer de s'engager avec d'autres personnes, et avoir des rencontres frustrantes et infructueuses ; réussir à s'engager "avec succès" avec d'autres personnes, et se trouver épuisé et peut-être même blessé à cause de ce que nous avons dû faire pour "réussir". "
Après une vie d'expériences aussi pénibles et décourageantes, il ne serait pas étonnant que les personnes autistes choisissent de se retirer des contacts humains. Pourtant, au cours des 20 dernières années, grâce notamment à l'Internet, de plus en plus d'autistes ont pris contact et créé des liens, ont créé une communauté et découvert nos propres styles de vie commune.
En tant que co-fondateur de l'Autism Network International (ANI, http://www.ani.ac) et en tant que coordinateur depuis sa création en 1992, j'ai eu la chance d'assister à une grande partie de cette évolution. À ma connaissance, l'ANI a été la première communauté d'autistes à être créée de manière naturelle par des personnes autistes, et elle reste la plus grande organisation gérée par des autistes à organiser régulièrement des rassemblements physiques de personnes autistes. Je suis avant tout en mesure de vous parler de la culture qui s'est développée au sein de cette communauté d'autistes particulière. D'autres communautés d'autistes, fondées et peuplées par d'autres "goûts" d'autistes, peuvent avoir des cultures très différentes. Je connais mieux certaines d'entre elles que d'autres. Les liens entre les autistes se sont développés et se sont considérablement élargis depuis la création de l'ANI. Les autistes communiquent, se mettent en réseau et nouent des relations sociales en plus grand nombre qu'une seule personne ne peut le faire.
Brève histoire de l'ANI
Autism Network International a été fondé en février 1992 par Donna Williams, Xenia Grant (anciennement Kathy Lissner-Grant) et moi-même (Sinclair, 2005). Nous nous étions initialement contactées par le biais d'une liste de correspondants tenue par une organisation gérée par les parents. Xenia et moi nous étions également brièvement rencontrées, ainsi que quelques autres adultes autistes, lors de conférences sur l'autisme. Mais la visite de Donna en 1992 était la première fois que nous étions ensemble, en personne, dans "l'espace autistique" : L'appartement de Xenia, où il n'y avait pas de NT qui organisaient l'environnement ou établissaient l'ordre du jour (Williams, 1994).
Au départ, l'ANI consistait en un bulletin d'information et une liste de correspondants. La liste de correspondants a rapidement été abandonnée en raison du harcèlement de plusieurs de nos membres par un harceleur très persistant.
Fin 1994, l'ANI a lancé son propre forum de discussion sur Internet, appelé ANI-L. La publication du bulletin d'information imprimé est devenue peu fréquente et sporadique à mesure que les gens se sont mis à communiquer en ligne.
De petits groupes de membres de l'ANI ont continué à se réunir en personne chaque fois que nous le pouvions, parcourant souvent de longues distances pour passer quelques jours ensemble chez un membre. L'ANI avait parfois des stands de présentation lors de conférences grand public, où les membres pouvaient passer du temps ensemble (bien que dans des conditions sensorielles difficiles et dans des atmosphères très négatives), et où les nouveaux venus pouvaient nous trouver.
En 1995, on m'a demandé de développer un volet de sessions pour les personnes autistes "de haut niveau" dans le cadre d'une conférence plus large axée sur les parents. J'en ai fait un projet ANI dans lequel d'autres personnes autistes ont travaillé avec moi pour planifier ce que nous avons appelé le programme ANI (et non pas le "programme pour les personnes autistes de haut niveau"). Cette conférence a marqué la première fois qu'un grand nombre de membres de l'ANI - qui ne sont généralement pas tous considérés comme des "personnes autistes de haut niveau" - se sont réunis en personne.
À bien des égards, cette conférence s'est avérée être une terrible épreuve pour les membres de l'ANI qui y ont participé, en particulier pour ceux d'entre nous qui ont organisé le programme de l'ANI. Il y a eu des ruptures de communication persistantes avec les principaux organisateurs de la conférence. Le lieu de la conférence a été un cauchemar sensoriel pour de nombreuses personnes autistes. L'hébergement était inabordable pour la plupart de nos membres. Plusieurs participants autistes (et tous les organisateurs du programme ANI) se sont plaints d'un traitement grossier ou condescendant de la part des organisateurs ou des participants NT à la conférence .
D'autre part, le temps que les personnes autistes ont pu passer ensemble était précieux pour beaucoup d'entre nous. Les gens l'appréciaient et en voulaient davantage. Les présentations du programme ANI ont été stimulantes, significatives et précieuses pour de nombreuses personnes, y compris un grand nombre de parents et de professionnels NT qui y ont participé. Nous avons commencé à réaliser tout ce que les personnes autistes ont à offrir à nous-mêmes et à nos pairs.
Nous avons donc décidé d'organiser notre propre événement pour les autistes, indépendamment des directeurs ou des sponsors NT. En 1996, l'ANI a présenté le premier Autreat (http://www.autreat.com) : une conférence de type séminaire organisée par et pour les personnes autistes, conçue pour accueillir autant que possible les personnes autistes, avec des présentations axées sur les intérêts des personnes autistes. Depuis, Autreat a eu lieu chaque année, à l'exception de 2001.
De nombreux forums pour autistes plus récents ont fleuri sur Internet depuis la création de l'ANI-L en 1994. Un certain nombre de groupes locaux de rencontre sociale ou de soutien pour les personnes autistes ont été créés dans le monde entier. Certains grands événements organisés pour les autistes, tels que Autscape au Royaume-Uni (http://www.autscape.org/), Empowerment-Päivät en Finlande (http://www.puoltaja.fi/blogi/vuoden-200 ... t-alkaneet) et Aspies e.V. Sommercamp en Allemagne (http://www.aspies.de/sommercamp.php), existent maintenant ou sont en cours de planification. Bien que chaque groupe et chaque événement ait son propre caractère unique, il existe un grand nombre d'échanges d'informations et de doublons, car certaines des mêmes personnes participent à plusieurs événements.
L'ANI a été fondée, et nos principales activités ont été développées, par un noyau de membres fondateurs qui avaient certaines caractéristiques en commun : nous étions tous fortement verbalisés (sans nécessairement parler aisément) et à l'aise avec la communication écrite (un facteur de sélection intégré lorsque la plupart des contacts se faisaient par courrier électronique) ; nous avions tendance à être plus sur la défensive que sur la recherche de sensations ; plus enclins à l'arrêt qu'à l'effondrement en cas de surcharge ; la plupart d'entre nous n'avaient pas de difficultés majeures avec le contrôle des impulsions ; nous comprenions et respections les limites personnelles et de propriété. Quelles que soient nos difficultés de fonctionnement - et ces difficultés peuvent être assez graves, limitant notre capacité à nous nourrir et à prendre soin de nous-mêmes - nos difficultés n'interfèrent généralement pas avec les autres personnes autour de nous.
La communauté ANI s'est donc développée en s'appuyant fortement sur la langue écrite comme moyen de communication, et en se dotant de coutumes et de règles qui mettent davantage l'accent sur la protection des frontières des personnes que sur la liberté totale d'expression. Les personnes qui ont besoin de se protéger contre la surcharge sensorielle et sociale sont plus susceptibles de se sentir à l'aise et soutenues par les règles et les coutumes de l'ANI, tandis que les personnes qui ont besoin d'une stimulation intense et/ou qui luttent contre le contrôle des impulsions peuvent trouver certaines de nos règles inconfortablement restrictives. Au fil des ans, notre communauté s'est élargie et nos membres se sont diversifiés. Nous avons essayé de répondre au mieux aux différents besoins des gens. La culture de l'ANI continue de changer et d'évoluer en fonction des besoins changeants de nos membres. Et pour les personnes qui trouvent que l'ANI ne correspond tout simplement pas à leurs besoins personnels, il existe un nombre croissant d'autres options de regroupement des autistes.
Être autiste dans l'espace NT
Comme indiqué précédemment, la plupart des adultes autistes ont connu toute leur vie des difficultés et des déceptions dans leurs relations interpersonnelles. Être autiste chez les personnes neurotypiques consiste probablement à ne pas comprendre ce que font les autres, ou pourquoi ils le font, ou ce qu'ils attendent de nous ; à ne pas être compris lorsque nous posons des questions ou essayons de nous joindre à eux ; être mal compris et mal interprété de manière blessante (par exemple, être accusé de malhonnêteté ou d'hostilité par manque de contact visuel ou d'"affect plat", ou être perçu comme étant ivre, drogué, délirant ou même dangereux) (Debbaudt, 2002) ; être contraint ou forcé de participer à des activités que nous trouvons inintéressantes ou même détestables ; être exclu des activités auxquelles nous voulons participer ; être critiqué ou rejeté pour avoir exprimé des intérêts "bizarres" ou pour avoir eu des comportements "bizarres" (y compris certains comportements qui s'adaptent pour nous aider à fonctionner) ; être délibérément intimidé, ridiculisé ou maltraité de toute autre manière ; être rabaissé ou traité avec condescendance par des personnes bien intentionnées mais ignorantes qui pensent nous "aider" ; être soumis à des stimuli sensoriels nocifs comme prix de la participation sociale ; et être censé maintenir un niveau et un rythme de participation qui sont écrasants et épuisants pour nous.
D'un autre côté, il y a les avantages que les NT apportent aux situations sociales : Ils ont tendance à être beaucoup plus orientés que nous dans les rencontres sociales. Ils savent ce qu'il faut faire (ou du moins ils savent faire semblant de savoir ce qu'il faut faire). Parfois, les NT sont prêts à nous expliquer des choses et à nous coacher. Beaucoup d'autistes qui ont "réussi" socialement ont appris la stratégie consistant à choisir un ou plusieurs modèles de NT socialement compétents et à s'y fier pour obtenir des indices, même si ces NT n'encadrent pas activement ou ne sont pas conscients qu'ils sont utilisés comme points d'orientation (ou même, en fait, s'il s'agit de personnages fictifs et pas du tout de personnes réelles). Les NT (personnes réelles qui sont physiquement présentes) sont susceptibles de pouvoir prédire les besoins sociaux d'autres personnes. Parfois, ils sont même capables de prédire les besoins sociaux des personnes autistes et de nous fournir des indications et des signaux utiles. La plupart des NT sont meilleurs que la plupart des autistes pour ce qui est du multitâche, et de rester organisés malgré les distractions et les interruptions, et d'autres manifestations du fonctionnement exécutif. Même les personnes les plus désorganisées et distraites NT remarquent généralement quand elles ont faim, et se souviennent de manger ! Les personnes autistes peuvent ne pas remarquer ou se souvenir de ces besoins fondamentaux pour prendre soin d'eux-mêmes. Les NT peuvent fournir des indices et des rappels utiles.
Être autiste dans son propre espace
Les personnes autistes qui ont la chance d'avoir leur propre espace privé, en particulier les adultes qui ont leur propre maison mais aussi, dans une certaine mesure, les personnes vivant en colocation qui ont leur propre chambre, ont un refuge contre les nombreux stress liés à l'espace NT. Les personnes qui vivent dans leurs propres espaces personnels ont un grand contrôle sur ce qui se passe dans ces espaces. Dans les limites des lois, des réglementations de zones et de toute règle fixée par les propriétaires, les gens sont libres d'aménager les environnements comme ils le souhaitent. Je suis libre de peindre tous mes murs en violet, de remplacer les lumières aveuglantes par des ampoules basse consommation, de jouer la même musique encore et encore et encore et encore et encore (à condition que je ne la joue pas si fort que cela dérange mes voisins) et de jouer avec des figurines "inappropriées pour l'âge", parce que c'est ma propre maison et que personne d'autre ne peut venir me dicter ce que je dois y faire. En fait, à quelques exceptions près, personne d'autre ne peut entrer, sauf si je décide de les laisser entrer. Avoir son propre espace signifie avoir le contrôle sur l'espace lui-même, sur ce que l'on y fait et sur les personnes qui y ont accès. Il y a des limites minimales à ce que l'on peut faire dans son propre espace. On peut stimuler, faire des tic, persévérer, rester debout toute la nuit, dormir toute la journée, porter les mêmes vêtements pendant plusieurs jours, ou ne pas en porter du tout - on peut faire un certain nombre de choses que la plupart des autres personnes trouveraient ennuyeuses ou même désagréables, et s'il y a quelqu'un d'autre qui le remarque, c'est qu'il y a un accord mutuel et un niveau de confort partagé dans le fait d'avoir cette personne dans son espace.
Mais cette liberté accrue dans son propre espace s'accompagne d'une structure extérieure réduite. Beaucoup d'autistes ont beaucoup de mal à gérer les soins de routine et les fonctions d'entretien sans personne pour nous rappeler et nous aider. Nous pouvons facilement trouver nos espaces et nos vies se transformer en chaos si nous vivons complètement seuls, sans personne d'autre dans notre espace (Smith, n.d. a ; Zaks, 2006).
Être autiste dans l'espace NT et être autiste dans son propre espace implique d'être "le seul" - la seule personne autiste dans l'environnement. C'est l'une des principales différences entre le fait d'être autiste dans l'espace autistique partagé et le fait d'être autiste ailleurs.
A suivre
Being Autistic Together
Etre autiste ensemble
Jim Sinclair
Introduction
Les personnes autistes sont généralement considérées comme incapables de partager des intérêts communs avec les autres, déconnectées de la participation sociale et de la camaraderie, et inaccessibles à la transmission sociale des comportements et des attitudes. Ce sont des aspects essentiels de ce qui a été décrit comme la "solitude", le "retrait" et la "déconnexion" des autistes, les autistes "vivant dans leur propre monde", étant "piégés" dans des "coquilles" ou derrière des "murs invisibles", et de nombreux termes similaires utilisés par les personnes neurotypiques (NT) pour décrire leur perception que les autistes sont incapables d'être "ensemble" avec d'autres personnes. (Voir par exemple Frith, 1992 ; Maurice, 1994 ; Kaufman, 1995 ; Claiborne Park, 1968 ; Tustin, 1990).
Pour les personnes autistes, la situation n'est pas aussi claire. Certains d'entre nous, à certains moments de notre vie (généralement dans la petite enfance), ne sont pas vraiment conscients des autres personnes, de leurs activités ou de leurs tentatives de se mettre en relation avec nous. D'autres d'entre nous sont conscients des personnes qui nous entourent, mais les trouvent difficiles ou impossibles à comprendre. Certains d'entre nous ont des sensibilités sensorielles qui rendent la présence d'autres personnes pénible pour nous, soit à cause des personnes elles-mêmes (attouchements non désirés, conversations bruyantes, parfums et autres odeurs envahissantes), soit à cause des caractéristiques sensorielles des environnements dans lesquels nous rencontrons d'autres personnes. Certains d'entre nous ne sont pas intéressés par les mêmes choses que celles qui intéressent les gens qui nous entourent, et nous n'avons pas d'impulsion naturelle pour nous intéresser aux choses simplement parce que nous observons que d'autres personnes les trouvent intéressantes. Certains d'entre nous s'intéressent vivement aux autres personnes, à leurs intérêts et à leurs activités, mais nous ne savons pas comment nous engager avec d'autres personnes autour de ces intérêts communs.
Au moment où nous atteignons l'âge adulte, l'expérience de " communauté " des personnes autistes a probablement consisté en une combinaison de plusieurs éléments : être dérangé par d'autres personnes qui veulent que nous nous engagions avec elles, alors que nous ne partageons pas ce désir ; être intéressé et curieux des autres, mais les trouver déroutants et accablants ; essayer de s'engager avec d'autres personnes, et avoir des rencontres frustrantes et infructueuses ; réussir à s'engager "avec succès" avec d'autres personnes, et se trouver épuisé et peut-être même blessé à cause de ce que nous avons dû faire pour "réussir". "
Après une vie d'expériences aussi pénibles et décourageantes, il ne serait pas étonnant que les personnes autistes choisissent de se retirer des contacts humains. Pourtant, au cours des 20 dernières années, grâce notamment à l'Internet, de plus en plus d'autistes ont pris contact et créé des liens, ont créé une communauté et découvert nos propres styles de vie commune.
En tant que co-fondateur de l'Autism Network International (ANI, http://www.ani.ac) et en tant que coordinateur depuis sa création en 1992, j'ai eu la chance d'assister à une grande partie de cette évolution. À ma connaissance, l'ANI a été la première communauté d'autistes à être créée de manière naturelle par des personnes autistes, et elle reste la plus grande organisation gérée par des autistes à organiser régulièrement des rassemblements physiques de personnes autistes. Je suis avant tout en mesure de vous parler de la culture qui s'est développée au sein de cette communauté d'autistes particulière. D'autres communautés d'autistes, fondées et peuplées par d'autres "goûts" d'autistes, peuvent avoir des cultures très différentes. Je connais mieux certaines d'entre elles que d'autres. Les liens entre les autistes se sont développés et se sont considérablement élargis depuis la création de l'ANI. Les autistes communiquent, se mettent en réseau et nouent des relations sociales en plus grand nombre qu'une seule personne ne peut le faire.
Brève histoire de l'ANI
Autism Network International a été fondé en février 1992 par Donna Williams, Xenia Grant (anciennement Kathy Lissner-Grant) et moi-même (Sinclair, 2005). Nous nous étions initialement contactées par le biais d'une liste de correspondants tenue par une organisation gérée par les parents. Xenia et moi nous étions également brièvement rencontrées, ainsi que quelques autres adultes autistes, lors de conférences sur l'autisme. Mais la visite de Donna en 1992 était la première fois que nous étions ensemble, en personne, dans "l'espace autistique" : L'appartement de Xenia, où il n'y avait pas de NT qui organisaient l'environnement ou établissaient l'ordre du jour (Williams, 1994).
Au départ, l'ANI consistait en un bulletin d'information et une liste de correspondants. La liste de correspondants a rapidement été abandonnée en raison du harcèlement de plusieurs de nos membres par un harceleur très persistant.
Fin 1994, l'ANI a lancé son propre forum de discussion sur Internet, appelé ANI-L. La publication du bulletin d'information imprimé est devenue peu fréquente et sporadique à mesure que les gens se sont mis à communiquer en ligne.
De petits groupes de membres de l'ANI ont continué à se réunir en personne chaque fois que nous le pouvions, parcourant souvent de longues distances pour passer quelques jours ensemble chez un membre. L'ANI avait parfois des stands de présentation lors de conférences grand public, où les membres pouvaient passer du temps ensemble (bien que dans des conditions sensorielles difficiles et dans des atmosphères très négatives), et où les nouveaux venus pouvaient nous trouver.
En 1995, on m'a demandé de développer un volet de sessions pour les personnes autistes "de haut niveau" dans le cadre d'une conférence plus large axée sur les parents. J'en ai fait un projet ANI dans lequel d'autres personnes autistes ont travaillé avec moi pour planifier ce que nous avons appelé le programme ANI (et non pas le "programme pour les personnes autistes de haut niveau"). Cette conférence a marqué la première fois qu'un grand nombre de membres de l'ANI - qui ne sont généralement pas tous considérés comme des "personnes autistes de haut niveau" - se sont réunis en personne.
À bien des égards, cette conférence s'est avérée être une terrible épreuve pour les membres de l'ANI qui y ont participé, en particulier pour ceux d'entre nous qui ont organisé le programme de l'ANI. Il y a eu des ruptures de communication persistantes avec les principaux organisateurs de la conférence. Le lieu de la conférence a été un cauchemar sensoriel pour de nombreuses personnes autistes. L'hébergement était inabordable pour la plupart de nos membres. Plusieurs participants autistes (et tous les organisateurs du programme ANI) se sont plaints d'un traitement grossier ou condescendant de la part des organisateurs ou des participants NT à la conférence .
D'autre part, le temps que les personnes autistes ont pu passer ensemble était précieux pour beaucoup d'entre nous. Les gens l'appréciaient et en voulaient davantage. Les présentations du programme ANI ont été stimulantes, significatives et précieuses pour de nombreuses personnes, y compris un grand nombre de parents et de professionnels NT qui y ont participé. Nous avons commencé à réaliser tout ce que les personnes autistes ont à offrir à nous-mêmes et à nos pairs.
Nous avons donc décidé d'organiser notre propre événement pour les autistes, indépendamment des directeurs ou des sponsors NT. En 1996, l'ANI a présenté le premier Autreat (http://www.autreat.com) : une conférence de type séminaire organisée par et pour les personnes autistes, conçue pour accueillir autant que possible les personnes autistes, avec des présentations axées sur les intérêts des personnes autistes. Depuis, Autreat a eu lieu chaque année, à l'exception de 2001.
De nombreux forums pour autistes plus récents ont fleuri sur Internet depuis la création de l'ANI-L en 1994. Un certain nombre de groupes locaux de rencontre sociale ou de soutien pour les personnes autistes ont été créés dans le monde entier. Certains grands événements organisés pour les autistes, tels que Autscape au Royaume-Uni (http://www.autscape.org/), Empowerment-Päivät en Finlande (http://www.puoltaja.fi/blogi/vuoden-200 ... t-alkaneet) et Aspies e.V. Sommercamp en Allemagne (http://www.aspies.de/sommercamp.php), existent maintenant ou sont en cours de planification. Bien que chaque groupe et chaque événement ait son propre caractère unique, il existe un grand nombre d'échanges d'informations et de doublons, car certaines des mêmes personnes participent à plusieurs événements.
L'ANI a été fondée, et nos principales activités ont été développées, par un noyau de membres fondateurs qui avaient certaines caractéristiques en commun : nous étions tous fortement verbalisés (sans nécessairement parler aisément) et à l'aise avec la communication écrite (un facteur de sélection intégré lorsque la plupart des contacts se faisaient par courrier électronique) ; nous avions tendance à être plus sur la défensive que sur la recherche de sensations ; plus enclins à l'arrêt qu'à l'effondrement en cas de surcharge ; la plupart d'entre nous n'avaient pas de difficultés majeures avec le contrôle des impulsions ; nous comprenions et respections les limites personnelles et de propriété. Quelles que soient nos difficultés de fonctionnement - et ces difficultés peuvent être assez graves, limitant notre capacité à nous nourrir et à prendre soin de nous-mêmes - nos difficultés n'interfèrent généralement pas avec les autres personnes autour de nous.
La communauté ANI s'est donc développée en s'appuyant fortement sur la langue écrite comme moyen de communication, et en se dotant de coutumes et de règles qui mettent davantage l'accent sur la protection des frontières des personnes que sur la liberté totale d'expression. Les personnes qui ont besoin de se protéger contre la surcharge sensorielle et sociale sont plus susceptibles de se sentir à l'aise et soutenues par les règles et les coutumes de l'ANI, tandis que les personnes qui ont besoin d'une stimulation intense et/ou qui luttent contre le contrôle des impulsions peuvent trouver certaines de nos règles inconfortablement restrictives. Au fil des ans, notre communauté s'est élargie et nos membres se sont diversifiés. Nous avons essayé de répondre au mieux aux différents besoins des gens. La culture de l'ANI continue de changer et d'évoluer en fonction des besoins changeants de nos membres. Et pour les personnes qui trouvent que l'ANI ne correspond tout simplement pas à leurs besoins personnels, il existe un nombre croissant d'autres options de regroupement des autistes.
Être autiste dans l'espace NT
Comme indiqué précédemment, la plupart des adultes autistes ont connu toute leur vie des difficultés et des déceptions dans leurs relations interpersonnelles. Être autiste chez les personnes neurotypiques consiste probablement à ne pas comprendre ce que font les autres, ou pourquoi ils le font, ou ce qu'ils attendent de nous ; à ne pas être compris lorsque nous posons des questions ou essayons de nous joindre à eux ; être mal compris et mal interprété de manière blessante (par exemple, être accusé de malhonnêteté ou d'hostilité par manque de contact visuel ou d'"affect plat", ou être perçu comme étant ivre, drogué, délirant ou même dangereux) (Debbaudt, 2002) ; être contraint ou forcé de participer à des activités que nous trouvons inintéressantes ou même détestables ; être exclu des activités auxquelles nous voulons participer ; être critiqué ou rejeté pour avoir exprimé des intérêts "bizarres" ou pour avoir eu des comportements "bizarres" (y compris certains comportements qui s'adaptent pour nous aider à fonctionner) ; être délibérément intimidé, ridiculisé ou maltraité de toute autre manière ; être rabaissé ou traité avec condescendance par des personnes bien intentionnées mais ignorantes qui pensent nous "aider" ; être soumis à des stimuli sensoriels nocifs comme prix de la participation sociale ; et être censé maintenir un niveau et un rythme de participation qui sont écrasants et épuisants pour nous.
D'un autre côté, il y a les avantages que les NT apportent aux situations sociales : Ils ont tendance à être beaucoup plus orientés que nous dans les rencontres sociales. Ils savent ce qu'il faut faire (ou du moins ils savent faire semblant de savoir ce qu'il faut faire). Parfois, les NT sont prêts à nous expliquer des choses et à nous coacher. Beaucoup d'autistes qui ont "réussi" socialement ont appris la stratégie consistant à choisir un ou plusieurs modèles de NT socialement compétents et à s'y fier pour obtenir des indices, même si ces NT n'encadrent pas activement ou ne sont pas conscients qu'ils sont utilisés comme points d'orientation (ou même, en fait, s'il s'agit de personnages fictifs et pas du tout de personnes réelles). Les NT (personnes réelles qui sont physiquement présentes) sont susceptibles de pouvoir prédire les besoins sociaux d'autres personnes. Parfois, ils sont même capables de prédire les besoins sociaux des personnes autistes et de nous fournir des indications et des signaux utiles. La plupart des NT sont meilleurs que la plupart des autistes pour ce qui est du multitâche, et de rester organisés malgré les distractions et les interruptions, et d'autres manifestations du fonctionnement exécutif. Même les personnes les plus désorganisées et distraites NT remarquent généralement quand elles ont faim, et se souviennent de manger ! Les personnes autistes peuvent ne pas remarquer ou se souvenir de ces besoins fondamentaux pour prendre soin d'eux-mêmes. Les NT peuvent fournir des indices et des rappels utiles.
Être autiste dans son propre espace
Les personnes autistes qui ont la chance d'avoir leur propre espace privé, en particulier les adultes qui ont leur propre maison mais aussi, dans une certaine mesure, les personnes vivant en colocation qui ont leur propre chambre, ont un refuge contre les nombreux stress liés à l'espace NT. Les personnes qui vivent dans leurs propres espaces personnels ont un grand contrôle sur ce qui se passe dans ces espaces. Dans les limites des lois, des réglementations de zones et de toute règle fixée par les propriétaires, les gens sont libres d'aménager les environnements comme ils le souhaitent. Je suis libre de peindre tous mes murs en violet, de remplacer les lumières aveuglantes par des ampoules basse consommation, de jouer la même musique encore et encore et encore et encore et encore (à condition que je ne la joue pas si fort que cela dérange mes voisins) et de jouer avec des figurines "inappropriées pour l'âge", parce que c'est ma propre maison et que personne d'autre ne peut venir me dicter ce que je dois y faire. En fait, à quelques exceptions près, personne d'autre ne peut entrer, sauf si je décide de les laisser entrer. Avoir son propre espace signifie avoir le contrôle sur l'espace lui-même, sur ce que l'on y fait et sur les personnes qui y ont accès. Il y a des limites minimales à ce que l'on peut faire dans son propre espace. On peut stimuler, faire des tic, persévérer, rester debout toute la nuit, dormir toute la journée, porter les mêmes vêtements pendant plusieurs jours, ou ne pas en porter du tout - on peut faire un certain nombre de choses que la plupart des autres personnes trouveraient ennuyeuses ou même désagréables, et s'il y a quelqu'un d'autre qui le remarque, c'est qu'il y a un accord mutuel et un niveau de confort partagé dans le fait d'avoir cette personne dans son espace.
Mais cette liberté accrue dans son propre espace s'accompagne d'une structure extérieure réduite. Beaucoup d'autistes ont beaucoup de mal à gérer les soins de routine et les fonctions d'entretien sans personne pour nous rappeler et nous aider. Nous pouvons facilement trouver nos espaces et nos vies se transformer en chaos si nous vivons complètement seuls, sans personne d'autre dans notre espace (Smith, n.d. a ; Zaks, 2006).
Être autiste dans l'espace NT et être autiste dans son propre espace implique d'être "le seul" - la seule personne autiste dans l'environnement. C'est l'une des principales différences entre le fait d'être autiste dans l'espace autistique partagé et le fait d'être autiste ailleurs.
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Re: Jim Sinclair
Suite :
L'espace des autistes et les places pour les autistes
Certains autistes ont connu des situations dans lesquelles les personnes autistes sont majoritaires, mais les NT sont toujours chargés de créer la structure et de fixer l'agenda. Les salles de classe d'éducation spécialisée, les ateliers protégés, les programmes de formation continue, les établissements résidentiels, les programmes de thérapie de groupe spécialisés et les programmes de loisirs/récréatifs "spéciaux" pour les autistes sont autant d'exemples d'environnements que les NT créent pour les autistes, selon la perception qu'ont les NT de ce dont les autistes ont besoin.
Dans le débat entre les partisans de l'inclusion et les partisans de programmes séparés pour les autistes, les arguments en faveur de programmes spéciaux soulignent les avantages d'avoir un personnel qui connaît les besoins des étudiants/clients autistes et d'avoir des contacts avec des pairs autistes au lieu d'être le seul autiste d'un groupe de NT (Sinclair, 1998 ; Broun, 1996). Ces avantages peuvent en effet être importants, indépendamment de la personne qui dirige le programme et qui le dote en personnel. Certains éducateurs et prestataires de services des NT ont une bonne compréhension des besoins des autistes et de leurs styles de fonctionnement, et offrent un excellent environnement dans lequel les autistes peuvent apprendre, travailler, développer des compétences et s'amuser.
Il existe également des éducateurs et des prestataires de services ignorants, mal informés et mal orientés qui créent des environnements qui peuvent être très désagréables et même nuisibles pour les personnes autistes (en particulier pour les personnes qui y sont "placées" contre leur gré sans avoir la possibilité de faire un choix adapté à leur niveau de développement) (Baggs, 2006a ; Judd, 2009, Shapiro, 1991). Dans ce type d'environnement, le fonctionnement autistique est dévalorisé et le traitement de l'autisme est entravé. Dans le même temps, les personnes vivant dans ces environnements sont confrontées à ces obstacles environnementaux, elles sont entourées par des pairs autistes également stressés qui subissent les effets de la même dévalorisation et du même affaiblissement, et réagissent en conséquence. Les personnes qui vivent de telles situations peuvent développer des associations négatives sur l'autisme et sur le fait d'être en compagnie d'autres personnes autistes.
Qu'ils soient bons ou mauvais, les environnements créés et gérés par les personnes NT ne sont pas des espaces autistiques, même si la majorité des personnes qui s'y trouvent sont autistes. Un bon professeur NT, un thérapeute, un coach professionnel, un conseiller en autonomie fonctionnelle ou un autre prestataire de services peut certainement créer un environnement dans lequel les personnes autistes ont des expériences positives et acquièrent des compétences utiles. Mais même ces environnements positifs et utiles présentent des caractéristiques des "espaces NT", car ce sont les NT qui sont aux commandes et ce sont les NT qui font les règles. Le fait même que les NT créent et gèrent un programme ou un service, au profit des participants autistes, donne l'impression que les autistes sont impuissants et dépendent des NT pour prendre soin de nous.
Dans un espace autistique partagé, les autistes sont aux commandes. Les autistes déterminent nos besoins et les personnes autistes prennent les décisions sur la manière de les satisfaire (Schwarz, 1999 ; Shapiro, 1991).
Etre autiste ensemble
Les espaces autistiques, qu'il s'agisse de petits rassemblements informels au domicile des gens, de forums de discussion en ligne ou de grands événements organisés par des autistes comme Autreat, sont destinés à offrir aux autistes les avantages du contact et de la participation avec d'autres personnes, tout en répondant aux besoins des autistes qui peuvent rendre les espaces NT si difficiles.
Être autiste dans un espace autistique partagé peut être plus facile que d'être autiste dans un espace NT ou dans son propre espace personnel - ou cela peut être plus difficile. Les gens viennent parfois dans l'espace autistique en s'attendant à une sorte d'utopie où il n'y aura pas de difficultés interpersonnelles ou environnementales. En réalité, il y a simplement des difficultés différentes.
Une difficulté fréquente que les personnes autistes peuvent rencontrer lors de leur première rencontre avec l'espace autiste est que les choses ne leur sont pas familières. Le fait d'être dans l'espace des NT ou dans son propre espace peut présenter des difficultés, mais à l'âge adulte, nous nous sommes habitués à vivre avec ces difficultés. La plupart d'entre nous ont développé des stratégies pour nous aider à fonctionner dans une certaine mesure. Les gens arrivent souvent dans un espace autistique partagé sans savoir à quoi s'attendre ou, pire, avec des attentes qui ne correspondent pas à la réalité. Nos stratégies d'adaptation habituelles, qui nous servent bien dans l'espace NT, peuvent ne pas fonctionner aussi bien chez d'autres autistes. Elles peuvent même se retourner contre eux et être reçues négativement.
Pourquoi l'espace autistique est différent de l'espace NT
La raison pour laquelle l'espace autistique est différent de l'espace des NT n'est pas seulement que les autistes sont différents des NT. Les personnes autistes sont également très différentes les unes des autres (Spicer, 1998). Dans presque tous les domaines où l'on peut penser que l'homme varie, la gamme de variabilité parmi les autistes semble être encore plus grande que la gamme parmi les personnes NT : graphique linéaire illustrant différentes distributions en cloche d'un hypothétique trait de caractère au sein des populations d'autistes et de NT; la courbe pour les populations d'autistes est plus plate et plus large que pour les populations de NT
La sensibilité sensorielle et l'intérêt social sont peut-être les deux meilleurs exemples de cette variabilité. Les stéréotypes courants sont que les personnes autistes, dans l'ensemble, sont sur la défensive sur le plan sensoriel et ne s'intéressent pas aux contacts sociaux. Si ces stéréotypes étaient exacts, il serait relativement simple de créer des espaces autistiques confortables. Il suffirait d'élaborer des coutumes et des règles et de modifier l'environnement pour qu'il y ait moins de stimulation sensorielle et moins de contacts interpersonnels que ne le font les normes dans les environnements des NT.
La réalité est que de nombreux autistes sensoriellement défensifs sont facilement dépassés par les niveaux de stimulation habituels dans les environnements NT. Mais il y a aussi des autistes de faible niveau qui tolèrent - et même ont besoin - d'une stimulation plus intense que celle que les personnes NT les plus sensibles trouveraient confortable.
En outre, la "défensive sensorielle" n'est pas uniforme d'une modalité sensorielle à l'autre. Il est possible, par exemple, qu'une personne soit facilement dépassée par les stimuli auditifs mais cherche une stimulation visuelle intense, ou qu'elle soit extrêmement sensible au toucher mais ait envie (et crée également) de beaucoup de sons forts, ou encore qu'elle évite certains types ou gammes de stimuli visuels/auditifs/tactiles/olfactifs/gustatifs tout en cherchant d'autres types ou gammes de stimuli, ou un certain nombre d'autres combinaisons de sensibilité défensive et de recherche de sensations chez la même personne.
Cette extrême variabilité autistique présente des difficultés pour répondre aux besoins sensoriels dans l'espace autistique. Les types de stimuli sensoriels qui sont blessants pour certains autistes peuvent être nécessaires pour d'autres.
De même, les personnes autistes ont en commun (par définition, dans le cadre des critères de diagnostic de l'autisme) des anomalies ou des "déficiences" dans la communication et l'interaction sociale. Mais nous ne sommes pas tous anormaux de la même manière. Nos façons d'interagir sont différentes des normes du NT - et aussi différentes les unes des autres ! - et la quantité d'interaction que nous souhaitons varie également sur un éventail encore plus large que celui des NT. Nous pouvons ne vouloir aucun contact social du tout (ce qui est le stéréotype commun, mais rarement la réalité), vouloir un certain contact social mais avoir besoin de plus de temps libre que la plupart des NT (même introvertis), vouloir une quantité de contact normale pour les NT, vouloir ou avoir besoin d'un contact constant, même plus que ce que les NT extravertis "normaux" peuvent tolérer.
Créer un espace social confortable pour les autistes n'est pas une simple question de supprimer les pressions sociales des NT et d'attendre que les autistes se laissent naturellement aller. Même sans aucune influence des NT, certains autistes chercheront à établir des liens sociaux d'une manière qui semblera intrusive aux autres autistes, et certains autistes affirmeront leur besoin d'espace personnel d'une manière qui semblera rejeter les autres autistes. Et étant donné que nous sommes également différents les uns des autres, au moins autant que nous sommes différents des NT, dans nos styles de communication verbaux et non verbaux, nous ne sommes pas automatiquement capables de deviner les préférences et les besoins des autres.
Espaces virtuels et physiques
Ce n'est pas par hasard que le concept d'"espace autistique" et les racines de la communauté autistique sont nés dans le cyberespace. Pour ceux d'entre nous qui sont à l'aise avec la communication écrite, le contact en ligne offre la possibilité de rencontrer et d'interagir avec d'autres personnes tout en restant chez soi dans son environnement familier. Nous n'avons pas besoin de sortir dans des espaces publics bruyants et bondés et de risquer des agressions sensorielles incontrôlables. Nous pouvons accueillir les communications et y répondre à notre propre rythme, au lieu d'avoir à suivre une conversation en temps réel. Nous pouvons participer à des discussions en ligne avec de grands groupes de personnes, et comme nous ne lisons qu'un seul courriel à la fois, nous pouvons suivre qui dit quoi. Nous pouvons recueillir les commentaires de chacun si nous le voulons, ou choisir ceux que nous voulons lire et ceux que nous voulons filtrer. Nous ne passons pas à côté de ce qu'une personne dit pendant que nous écoutons quelqu'un d'autre. Il est assez facile en ligne de filtrer les contributions des personnes dont nous trouvons l'écoute inintéressante ou désagréable. Et beaucoup des pièges de communication que nous rencontrons dans la communication face à face avec les NT - être censé comprendre des signaux non verbaux, faire en sorte que les gens essaient de lire le sens de notre propre comportement non verbal et de notre apparence - n'existent pas dans la communication uniquement textuelle. (Je suis encore abasourdi lorsque les NT se plaignent de cela comme étant un inconvénient de la communication en ligne).
Se réunir avec d'autres personnes dans un espace physique, même lors d'événements comme Autreat qui sont soigneusement planifiés pour accueillir les personnes autistes, ne peut pas s'empêcher d'inclure certaines des difficultés et des défis que la communication en ligne évite. Quitter la maison pour assister à une réunion physique signifie éprouver le stress du voyage, suivi du stress d'être dans un environnement inconnu sur lequel nous avons beaucoup moins de contrôle que sur nos espaces personnels à la maison. Être entouré d'autres personnes signifie inévitablement être exposé aux comportements et aux stimuli sensoriels que les autres personnes produisent.Être dans un espace partagé signifie qu'on nous demande de modifier notre propre comportement pour répondre aux besoins des autres. Être entouré de beaucoup d'autres personnes à la fois signifie qu'il est impossible de prêter attention à ce que chacun dit sans rien manquer. Assister à un événement "communautaire" comme Autreat (par opposition à un événement privé où l'on peut choisir qui est invité) signifie éventuellement rencontrer des gens que l'on ne connaît pas, ne comprend pas et/ou n'aime pas. En termes d'interprétations (et d'éventuelles erreurs d'interprétation) du comportement non verbal, les personnes autistes varient autant dans notre communication non verbale qu'à d'autres égards. Les malentendus basés sur l'apparence et le comportement non verbal peuvent être minimisés par la prise de conscience de nos différences, mais les personnes autistes ne sont pas à l'abri d'une mauvaise interprétation des autres.
Quitter nos espaces personnels familiers pour se retrouver dans l'espace physique des autistes n'est pas toujours facile ni confortable. Ceux d'entre nous qui font l'effort de se réunir physiquement (du moins ceux qui reviennent sans cesse) le font non pas parce que c'est facile et sans problème, mais parce que les avantages que nous en retirons valent les difficultés et les désagréments.
De nombreuses caractéristiques de l'espace physique autistique peuvent être vécues comme des avantages ou des difficultés, selon le point de vue de chacun. Les défis peuvent devenir des opportunités si l'on est prêt à les aborder comme des exercices de découverte de soi.
Certains autistes ont écrit des récits émouvants et dramatiques de personnes qui se sentent immédiatement "chez elles" parmi d'autres autistes, qui ont un sentiment naturel d'"appartenance" et qui reconnaissent d'autres autistes comme "leur propre genre" de personnes (French, 1993 ; Williams, 1994 ; Cohen, 2006).
Mes propres mots pour décrire la visite de Xenia et Donna en 1992, au cours de laquelle ANI a été fondée, étaient "le sentiment qu'après une vie passée parmi les étrangers, j'avais rencontré quelqu'un qui venait de la même planète que moi". Cette métaphore de la "même planète", ainsi que celles de "parler la même langue" ou d'"appartenir à la même tribu", sont des descriptions très courantes utilisées par les personnes autistes qui ont vécu cette expérience de l'espace autiste. Un participant au premier Autreat en 1996 a résumé la situation en disant : "J'ai l'impression d'être chez moi, parmi mon propre peuple, pour la première fois. Je n'avais jamais su ce que c'était jusqu'à présent".
Pour les personnes autistes qui vivent ce genre d'expérience de l'espace autistique, il s'agit évidemment d'une expérience puissante et souvent marquante. Mais elle peut aussi être profondément déconcertante. Grandir autiste parmi les NT peut conduire à un sentiment d'identité et d'image de soi qui se forme autour du fait d'être "spécial" - la seule personne à avoir une caractéristique autistique particulière, la seule personne qui doit lutter contre des difficultés particulières, la seule personne autiste qui a réussi à atteindre un certain accomplissement malgré son handicap. La société des NT est encline à traiter les personnes handicapées avec une pitié excessive pour nos difficultés et une admiration excessive pour nos forces, insufflant à notre vie quotidienne et à nos activités de routine un sentiment mélodramatique de tragédie sur nos problèmes et d'étonnement sur nos succès (McNabb, 2001).
Ce sentiment de "spécificité" peut être bouleversé par la rencontre d'autres personnes autistes qui présentent un mélange similaire de traits autistiques, qui ont des problèmes similaires (ou même pires) et qui ont atteint des résultats similaires (ou même supérieurs). Dans un véritable groupe de pairs, que la plupart des autistes n'ont jamais connu, chaque personne est unique, mais personne n'est plus "spécial" que les autres.
Le sentiment de "retour à la maison" et d'"appartenance" chez les autres autistes peut également amener les gens à avoir des attentes idéalisées vis-à-vis de ces nouveaux camarades autistes. C'est ce qui caractérise le stade "d'immersion" du développement de l'identité minoritaire (Helms, 1995), au cours duquel les gens embrassent et idéalisent leur propre communauté minoritaire à l'exclusion d'autres types de personnes. Inévitablement, cette idéalisation est finalement suivie de déception et de désillusion, lorsque d'autres membres de son propre groupe se révèlent avoir les mêmes défauts que le reste de la race humaine.
Différences entre les autistes
La grande diversité des personnes autistes signifie que si certaines personnes ont ces expériences puissantes de l'espace autistique en rencontrant des personnes "comme nous" pour la toute première fois, d'autres personnes autistes n'en ont pas. Les personnes qui arrivent dans un espace autistique en s'attendant à ce que tout le monde les apprécie et à ce que tout le monde soit "comme eux", à ce que tout le monde les comprenne et à ce que tout le monde soit facile à comprendre et à s'entendre avec elles, risquent d'être déçues. Si les autistes de ce groupe particulier se trouvent être très différents d'eux, ils peuvent finir par se sentir encore plus aliénés et déplacés qu'ils ne le sont dans les environnements familiers NT. Cela peut conduire certaines personnes à remettre en question leur propre statut ("Si je suis si différent de ces personnes, peut-être que je ne suis pas autiste après tout"), ou à douter du statut des autres ("Vous n'êtes pas comme moi, donc vous n'êtes pas vraiment autiste et vous n'avez pas à vous appeler autiste"), ou à dévaloriser certains sous-groupes d'autistes par rapport à d'autres ("Les autistes qui sont comme moi sont meilleurs que les autistes comme ceux de ce groupe qui me mettent mal à l'aise").
Certains groupes d'autistes tentent de minimiser ces malaises en limitant la participation à certains "types" d'autistes seulement. J'ai entendu parler d'incidents au cours desquels des autistes ont été exclus de groupes parce qu'ils étaient "trop peu fonctionnels", pas assez loquaces ou ne se conformaient pas à l'idée que ce groupe se faisait du type d'autistes dont il voulait faire partie (Baggs, 2006b ; Smith, s.d. b).
L'ANI a adopté une approche différente. Si nos coutumes et notre culture sont fortement influencées par les caractéristiques communes qui ont attiré nos premiers membres les uns vers les autres et nous ont permis de travailler ensemble à la mise en place de l'infrastructure nécessaire à la communauté, nous avons toujours fait de notre mieux pour accueillir et accommoder la plus grande diversité possible d'autistes (Autism Network International, n.d. a ; Autism Network International, 2009). (Cela ne signifie pas que nous n'exclurions jamais une personne autiste pour quelque raison que ce soit. Des personnes peuvent être, et ont parfois été, exclues de la participation aux activités de l'ANI - sur la base d'un comportement qui pénalise d'autres personnes, et pas seulement parce qu'elles sont trop différentes ou trop gravement handicapées. Voir Comité de préparation Autreat).
La véritable "magie" des espaces autistiques inclusifs, tels que nous les recherchons dans l'ANI, n'est pas que chaque personne autiste puisse automatiquement s'attendre à trouver d'autres personnes qui lui ressemblent. La véritable "magie" est que presque chaque personne autiste - toute personne capable de participer sans transgresser les contraintes des autres - peut s'attendre à être acceptée pour ce qu'elle est. Voici quelques descriptions typiques de cette expérience :
Le défi associé est que l'on doit également être prêt à accepter les autres pour ce qu'ils sont : Il est normal que vous soyez bizarre, ce qui est libérateur, mais il est également normal que d'autres personnes soient bizarres. Cela peut être surprenant et dérangeant si leurs bizarreries sont très différentes des vôtres.
Interaction spontanée
Les personnes autistes peuvent être moins susceptibles que les NT d'initier spontanément des interactions avec toute personne se trouvant à proximité. Les personnes autistes se plaignent souvent de leur manque d'amabilité, de leur manque d'ouverture et de leur manque d'intérêt pour les autres (Meyerding, 1998 ; Aston, s.d. ; Foden, 2008). Les autistes se plaignent souvent des NT, car ils semblent insistants et exigeants et gaspillent leur énergie de conversation en bavardages dénués de sens (Sinclair, 1995 ; Muskie, 2002 ; Adam, 2009 ; WrongPlanet.net, 2008).
Lors de rassemblements d'autistes comme Autreat, il peut y avoir énormément de communication et d'interaction une fois que les gens ont trouvé un point d'intérêt commun. (Les conférenciers d'Autreat doivent être prêts à limiter les questions et les commentaires du public, ou bien être prêts à accepter le fait qu'ils peuvent ne couvrir qu'une fraction du contenu préparé, car les participants autistes deviennent extrêmement participatifs lorsque notre intérêt est engagé !) Mais il est peu probable qu'il y ait beaucoup d'amorces spontanées de contacts sociaux, en particulier entre des personnes qui n'ont pas encore de relations sociales établies.
C'est un facteur important pour la capacité de certaines personnes autistes à se sentir à l'aise dans l'espace autiste. Beaucoup d'entre nous ont besoin de temps libre pour observer les gens et les activités avant de pouvoir décider s'ils veulent ou non participer. Parfois, nous décidons de commencer à participer après avoir observé pendant un certain temps. Parfois, nous décidons de ne pas participer, mais nous voulons quand même observer ce que font les autres. C'est un grand soulagement de pouvoir être parmi les gens, de participer à tous les aspects de la situation qui nous intéressent, sans être obligé de faire plus de socialisation.
Cela peut également représenter un grand défi pour les personnes autistes qui sont susceptibles de rester bloquées et qui sont habituées à compter sur leur entourage pour les encourager et les aider. Si une personne traîne dans ou près d'un espace social NT sans se joindre au groupe, quelqu'un viendra probablement l'inviter à se joindre à lui. Les autistes peuvent en venir à compter sur les NT pour fournir ce genre d'incitation, de stimulation et d'initiation dans des situations sociales.
Si une personne traîne dans le coin et ne participe pas à Autreat ou à un espace social autistique similaire, il est fort probable que d'autres personnes la laisseront tranquille. Les personnes autistes ont généralement du mal à s'occuper de plusieurs personnes et de plusieurs choses en même temps, donc si nous nous occupons de notre propre activité et de nos interactions avec d'autres personnes qui participent à l'activité avec nous, il se peut que nous ne remarquions tout simplement pas quelqu'un assis tranquillement sur le côté. Si nous le remarquons, nous ne pouvons pas supposer que cette personne souhaite participer. Nous ne pouvons pas deviner si la personne apprécierait l'interaction ou si elle se sentirait envahie. Même si nous soupçonnons que la personne apprécierait une certaine forme d'interaction, nous ne pouvons pas deviner quel type d'interaction serait le bienvenu. Notre propre expérience des interactions indésirables a rendu la plupart d'entre nous très conscients des pièges que représente la lecture des signaux non verbaux d'autres personnes !
Pour la personne qui se retrouve bloquée et qui découvre que personne ne prend l'initiative de venir l'aider, il existe de nombreuses façons de traiter l'expérience comme une opportunité. Voici quelques exemples de la façon dont différentes personnes ont traité ce type d'expérience à Autreat :
ou
ou
ou
(Ce dernier point est une expérience que j'appelle "décompression explosive", et heureusement, cela n'arrive pas très souvent. J'ai vu cela arriver à trois ou quatre personnes au cours des vingt années qui se sont écoulées depuis que j'ai commencé à rechercher d'autres personnes autistes. C'est très terrifiant pendant que cela se produit. Mais il est possible d'y survivre, et cela peut être le premier pas vers la découverte de l'existence d'une personne indépendamment des perceptions et des attentes des autres).
Bien qu'il soit plus courant que les gens apprécient ou soient gênés par le manque d'interaction spontanée dans l'espace autistique, certains autistes initient beaucoup d'interactions spontanées. Même lorsque nous en prenons l'initiative, nous n'avons toujours pas tendance à nous engager dans des discussions de style NT. Nous commençons simplement à parler de n'importe quel sujet qui nous intéresse à ce moment-là.
Lorsque cela se produit dans des contextes sociaux NT, au lieu de se plaindre de l'échec de l'initiation, les NT se plaignent que les autistes approchent les gens de manière inappropriée et parlent de choses étranges ou inintéressantes. Dans l'espace social des autistes, les gens sont moins susceptibles d'être rebutés par des sujets de conversation non standard. Personnellement, je préférerais de loin que quelqu'un s'approche de moi et me dise un fait intéressant que je ne connaissais pas auparavant sur les sauterelles, les hélicoptères ou la médecine légale, plutôt que de me faire aborder sans y être invité pour me dire quelque chose dont je suis parfaitement conscient, comme le fait qu'il y a un jour de soleil ou de pluie. Si vous voulez interrompre le cours de mes pensées et exiger que mon traitement cognitif se concentre sur vous et comprenne ce que vous dites, dites au moins quelque chose d'intellectuellement engageant !
Mais pour quelqu'un qui lutte déjà pour rester orienté parmi des personnes inconnues dans un environnement inconnu, toute interaction inattendue, toute perturbation d'un parcours prévu dans l'espace et le temps, peut être ressentie comme indésirable et intrusive. Et les personnes autistes ne sont pas parfaites ; parfois, nous faisons des choses qui sont vraiment intrusives (c'est-à-dire qui interfèrent avec la capacité des autres à exercer leurs droits et libertés légitimes), et pas seulement inhabituelles.
Étant donné la grande variabilité de la population autiste, tant dans ce que nous voulons que dans la façon dont nous nous exprimons, nous ne pouvons pas nous attendre à pouvoir interpréter les indices des autres ou à deviner leurs souhaits. Dans l'espace social autistique, chaque personne est responsable de communiquer explicitement ses souhaits en matière d'interaction.
Il est acceptable de choisir de ne pas interagir. Il est acceptable de choisir de n'interagir qu'avec certaines personnes, ou seulement à certains moments, et pas avec d'autres personnes ou à d'autres moments. Il est acceptable de parler de ce qui vous intéresse. Il est acceptable de dire à quelqu'un d'autre d'arrêter de vous parler. Il est acceptable d'aborder des personnes qui diffèrent de vous par leur âge, leur sexe, leur race, leur origine ethnique, leur niveau d'éducation, leur niveau de revenu ou d'autres indices de statut social.
Il est acceptable, et attendu, de dire ce que vous voulez dire. Il n'est pas acceptable de s'attendre à ce que les gens comprennent ce dont vous avez besoin, ce que vous voulez ou ce que vous voulez dire, si vous ne le dites pas explicitement. Et il est tout à fait inacceptable d'essayer de dire aux autres ce dont ils ont besoin, ce qu'ils veulent, ce qu'ils ressentent, ce qu'ils pensent ou ce qu'ils ont l'intention de faire. (Lecteurs NT, veuillez prendre note de ce point de l'étiquette autiste : Les NT semblent considérer comme une expression d'"empathie" le fait d'étiqueter les souhaits et les sentiments des uns et des autres. Les personnes autistes n'apprécient guère qu'on leur dise ce qu'elles ressentent. Et si nous ne prenons pas l'initiative d'étiqueter vos sentiments pour vous, cela ne veut pas dire que nous ne nous soucions pas de ce que vous ressentez. Cela signifie seulement que nous ne présumons pas savoir ce que vous ressentez, à moins que vous ne nous le disiez).
Dans l'espace autistique, la communication est la responsabilité de l'individu, et non du groupe.
A suivre
L'espace des autistes et les places pour les autistes
Certains autistes ont connu des situations dans lesquelles les personnes autistes sont majoritaires, mais les NT sont toujours chargés de créer la structure et de fixer l'agenda. Les salles de classe d'éducation spécialisée, les ateliers protégés, les programmes de formation continue, les établissements résidentiels, les programmes de thérapie de groupe spécialisés et les programmes de loisirs/récréatifs "spéciaux" pour les autistes sont autant d'exemples d'environnements que les NT créent pour les autistes, selon la perception qu'ont les NT de ce dont les autistes ont besoin.
Dans le débat entre les partisans de l'inclusion et les partisans de programmes séparés pour les autistes, les arguments en faveur de programmes spéciaux soulignent les avantages d'avoir un personnel qui connaît les besoins des étudiants/clients autistes et d'avoir des contacts avec des pairs autistes au lieu d'être le seul autiste d'un groupe de NT (Sinclair, 1998 ; Broun, 1996). Ces avantages peuvent en effet être importants, indépendamment de la personne qui dirige le programme et qui le dote en personnel. Certains éducateurs et prestataires de services des NT ont une bonne compréhension des besoins des autistes et de leurs styles de fonctionnement, et offrent un excellent environnement dans lequel les autistes peuvent apprendre, travailler, développer des compétences et s'amuser.
Il existe également des éducateurs et des prestataires de services ignorants, mal informés et mal orientés qui créent des environnements qui peuvent être très désagréables et même nuisibles pour les personnes autistes (en particulier pour les personnes qui y sont "placées" contre leur gré sans avoir la possibilité de faire un choix adapté à leur niveau de développement) (Baggs, 2006a ; Judd, 2009, Shapiro, 1991). Dans ce type d'environnement, le fonctionnement autistique est dévalorisé et le traitement de l'autisme est entravé. Dans le même temps, les personnes vivant dans ces environnements sont confrontées à ces obstacles environnementaux, elles sont entourées par des pairs autistes également stressés qui subissent les effets de la même dévalorisation et du même affaiblissement, et réagissent en conséquence. Les personnes qui vivent de telles situations peuvent développer des associations négatives sur l'autisme et sur le fait d'être en compagnie d'autres personnes autistes.
Qu'ils soient bons ou mauvais, les environnements créés et gérés par les personnes NT ne sont pas des espaces autistiques, même si la majorité des personnes qui s'y trouvent sont autistes. Un bon professeur NT, un thérapeute, un coach professionnel, un conseiller en autonomie fonctionnelle ou un autre prestataire de services peut certainement créer un environnement dans lequel les personnes autistes ont des expériences positives et acquièrent des compétences utiles. Mais même ces environnements positifs et utiles présentent des caractéristiques des "espaces NT", car ce sont les NT qui sont aux commandes et ce sont les NT qui font les règles. Le fait même que les NT créent et gèrent un programme ou un service, au profit des participants autistes, donne l'impression que les autistes sont impuissants et dépendent des NT pour prendre soin de nous.
Dans un espace autistique partagé, les autistes sont aux commandes. Les autistes déterminent nos besoins et les personnes autistes prennent les décisions sur la manière de les satisfaire (Schwarz, 1999 ; Shapiro, 1991).
Etre autiste ensemble
Les espaces autistiques, qu'il s'agisse de petits rassemblements informels au domicile des gens, de forums de discussion en ligne ou de grands événements organisés par des autistes comme Autreat, sont destinés à offrir aux autistes les avantages du contact et de la participation avec d'autres personnes, tout en répondant aux besoins des autistes qui peuvent rendre les espaces NT si difficiles.
Être autiste dans un espace autistique partagé peut être plus facile que d'être autiste dans un espace NT ou dans son propre espace personnel - ou cela peut être plus difficile. Les gens viennent parfois dans l'espace autistique en s'attendant à une sorte d'utopie où il n'y aura pas de difficultés interpersonnelles ou environnementales. En réalité, il y a simplement des difficultés différentes.
Une difficulté fréquente que les personnes autistes peuvent rencontrer lors de leur première rencontre avec l'espace autiste est que les choses ne leur sont pas familières. Le fait d'être dans l'espace des NT ou dans son propre espace peut présenter des difficultés, mais à l'âge adulte, nous nous sommes habitués à vivre avec ces difficultés. La plupart d'entre nous ont développé des stratégies pour nous aider à fonctionner dans une certaine mesure. Les gens arrivent souvent dans un espace autistique partagé sans savoir à quoi s'attendre ou, pire, avec des attentes qui ne correspondent pas à la réalité. Nos stratégies d'adaptation habituelles, qui nous servent bien dans l'espace NT, peuvent ne pas fonctionner aussi bien chez d'autres autistes. Elles peuvent même se retourner contre eux et être reçues négativement.
Pourquoi l'espace autistique est différent de l'espace NT
La raison pour laquelle l'espace autistique est différent de l'espace des NT n'est pas seulement que les autistes sont différents des NT. Les personnes autistes sont également très différentes les unes des autres (Spicer, 1998). Dans presque tous les domaines où l'on peut penser que l'homme varie, la gamme de variabilité parmi les autistes semble être encore plus grande que la gamme parmi les personnes NT : graphique linéaire illustrant différentes distributions en cloche d'un hypothétique trait de caractère au sein des populations d'autistes et de NT; la courbe pour les populations d'autistes est plus plate et plus large que pour les populations de NT
La sensibilité sensorielle et l'intérêt social sont peut-être les deux meilleurs exemples de cette variabilité. Les stéréotypes courants sont que les personnes autistes, dans l'ensemble, sont sur la défensive sur le plan sensoriel et ne s'intéressent pas aux contacts sociaux. Si ces stéréotypes étaient exacts, il serait relativement simple de créer des espaces autistiques confortables. Il suffirait d'élaborer des coutumes et des règles et de modifier l'environnement pour qu'il y ait moins de stimulation sensorielle et moins de contacts interpersonnels que ne le font les normes dans les environnements des NT.
La réalité est que de nombreux autistes sensoriellement défensifs sont facilement dépassés par les niveaux de stimulation habituels dans les environnements NT. Mais il y a aussi des autistes de faible niveau qui tolèrent - et même ont besoin - d'une stimulation plus intense que celle que les personnes NT les plus sensibles trouveraient confortable.
En outre, la "défensive sensorielle" n'est pas uniforme d'une modalité sensorielle à l'autre. Il est possible, par exemple, qu'une personne soit facilement dépassée par les stimuli auditifs mais cherche une stimulation visuelle intense, ou qu'elle soit extrêmement sensible au toucher mais ait envie (et crée également) de beaucoup de sons forts, ou encore qu'elle évite certains types ou gammes de stimuli visuels/auditifs/tactiles/olfactifs/gustatifs tout en cherchant d'autres types ou gammes de stimuli, ou un certain nombre d'autres combinaisons de sensibilité défensive et de recherche de sensations chez la même personne.
Cette extrême variabilité autistique présente des difficultés pour répondre aux besoins sensoriels dans l'espace autistique. Les types de stimuli sensoriels qui sont blessants pour certains autistes peuvent être nécessaires pour d'autres.
De même, les personnes autistes ont en commun (par définition, dans le cadre des critères de diagnostic de l'autisme) des anomalies ou des "déficiences" dans la communication et l'interaction sociale. Mais nous ne sommes pas tous anormaux de la même manière. Nos façons d'interagir sont différentes des normes du NT - et aussi différentes les unes des autres ! - et la quantité d'interaction que nous souhaitons varie également sur un éventail encore plus large que celui des NT. Nous pouvons ne vouloir aucun contact social du tout (ce qui est le stéréotype commun, mais rarement la réalité), vouloir un certain contact social mais avoir besoin de plus de temps libre que la plupart des NT (même introvertis), vouloir une quantité de contact normale pour les NT, vouloir ou avoir besoin d'un contact constant, même plus que ce que les NT extravertis "normaux" peuvent tolérer.
Créer un espace social confortable pour les autistes n'est pas une simple question de supprimer les pressions sociales des NT et d'attendre que les autistes se laissent naturellement aller. Même sans aucune influence des NT, certains autistes chercheront à établir des liens sociaux d'une manière qui semblera intrusive aux autres autistes, et certains autistes affirmeront leur besoin d'espace personnel d'une manière qui semblera rejeter les autres autistes. Et étant donné que nous sommes également différents les uns des autres, au moins autant que nous sommes différents des NT, dans nos styles de communication verbaux et non verbaux, nous ne sommes pas automatiquement capables de deviner les préférences et les besoins des autres.
Espaces virtuels et physiques
Ce n'est pas par hasard que le concept d'"espace autistique" et les racines de la communauté autistique sont nés dans le cyberespace. Pour ceux d'entre nous qui sont à l'aise avec la communication écrite, le contact en ligne offre la possibilité de rencontrer et d'interagir avec d'autres personnes tout en restant chez soi dans son environnement familier. Nous n'avons pas besoin de sortir dans des espaces publics bruyants et bondés et de risquer des agressions sensorielles incontrôlables. Nous pouvons accueillir les communications et y répondre à notre propre rythme, au lieu d'avoir à suivre une conversation en temps réel. Nous pouvons participer à des discussions en ligne avec de grands groupes de personnes, et comme nous ne lisons qu'un seul courriel à la fois, nous pouvons suivre qui dit quoi. Nous pouvons recueillir les commentaires de chacun si nous le voulons, ou choisir ceux que nous voulons lire et ceux que nous voulons filtrer. Nous ne passons pas à côté de ce qu'une personne dit pendant que nous écoutons quelqu'un d'autre. Il est assez facile en ligne de filtrer les contributions des personnes dont nous trouvons l'écoute inintéressante ou désagréable. Et beaucoup des pièges de communication que nous rencontrons dans la communication face à face avec les NT - être censé comprendre des signaux non verbaux, faire en sorte que les gens essaient de lire le sens de notre propre comportement non verbal et de notre apparence - n'existent pas dans la communication uniquement textuelle. (Je suis encore abasourdi lorsque les NT se plaignent de cela comme étant un inconvénient de la communication en ligne).
Se réunir avec d'autres personnes dans un espace physique, même lors d'événements comme Autreat qui sont soigneusement planifiés pour accueillir les personnes autistes, ne peut pas s'empêcher d'inclure certaines des difficultés et des défis que la communication en ligne évite. Quitter la maison pour assister à une réunion physique signifie éprouver le stress du voyage, suivi du stress d'être dans un environnement inconnu sur lequel nous avons beaucoup moins de contrôle que sur nos espaces personnels à la maison. Être entouré d'autres personnes signifie inévitablement être exposé aux comportements et aux stimuli sensoriels que les autres personnes produisent.Être dans un espace partagé signifie qu'on nous demande de modifier notre propre comportement pour répondre aux besoins des autres. Être entouré de beaucoup d'autres personnes à la fois signifie qu'il est impossible de prêter attention à ce que chacun dit sans rien manquer. Assister à un événement "communautaire" comme Autreat (par opposition à un événement privé où l'on peut choisir qui est invité) signifie éventuellement rencontrer des gens que l'on ne connaît pas, ne comprend pas et/ou n'aime pas. En termes d'interprétations (et d'éventuelles erreurs d'interprétation) du comportement non verbal, les personnes autistes varient autant dans notre communication non verbale qu'à d'autres égards. Les malentendus basés sur l'apparence et le comportement non verbal peuvent être minimisés par la prise de conscience de nos différences, mais les personnes autistes ne sont pas à l'abri d'une mauvaise interprétation des autres.
Quitter nos espaces personnels familiers pour se retrouver dans l'espace physique des autistes n'est pas toujours facile ni confortable. Ceux d'entre nous qui font l'effort de se réunir physiquement (du moins ceux qui reviennent sans cesse) le font non pas parce que c'est facile et sans problème, mais parce que les avantages que nous en retirons valent les difficultés et les désagréments.
De nombreuses caractéristiques de l'espace physique autistique peuvent être vécues comme des avantages ou des difficultés, selon le point de vue de chacun. Les défis peuvent devenir des opportunités si l'on est prêt à les aborder comme des exercices de découverte de soi.
Défis et opportunités
Similitudes autistiquesCertains autistes ont écrit des récits émouvants et dramatiques de personnes qui se sentent immédiatement "chez elles" parmi d'autres autistes, qui ont un sentiment naturel d'"appartenance" et qui reconnaissent d'autres autistes comme "leur propre genre" de personnes (French, 1993 ; Williams, 1994 ; Cohen, 2006).
Mes propres mots pour décrire la visite de Xenia et Donna en 1992, au cours de laquelle ANI a été fondée, étaient "le sentiment qu'après une vie passée parmi les étrangers, j'avais rencontré quelqu'un qui venait de la même planète que moi". Cette métaphore de la "même planète", ainsi que celles de "parler la même langue" ou d'"appartenir à la même tribu", sont des descriptions très courantes utilisées par les personnes autistes qui ont vécu cette expérience de l'espace autiste. Un participant au premier Autreat en 1996 a résumé la situation en disant : "J'ai l'impression d'être chez moi, parmi mon propre peuple, pour la première fois. Je n'avais jamais su ce que c'était jusqu'à présent".
Pour les personnes autistes qui vivent ce genre d'expérience de l'espace autistique, il s'agit évidemment d'une expérience puissante et souvent marquante. Mais elle peut aussi être profondément déconcertante. Grandir autiste parmi les NT peut conduire à un sentiment d'identité et d'image de soi qui se forme autour du fait d'être "spécial" - la seule personne à avoir une caractéristique autistique particulière, la seule personne qui doit lutter contre des difficultés particulières, la seule personne autiste qui a réussi à atteindre un certain accomplissement malgré son handicap. La société des NT est encline à traiter les personnes handicapées avec une pitié excessive pour nos difficultés et une admiration excessive pour nos forces, insufflant à notre vie quotidienne et à nos activités de routine un sentiment mélodramatique de tragédie sur nos problèmes et d'étonnement sur nos succès (McNabb, 2001).
Ce sentiment de "spécificité" peut être bouleversé par la rencontre d'autres personnes autistes qui présentent un mélange similaire de traits autistiques, qui ont des problèmes similaires (ou même pires) et qui ont atteint des résultats similaires (ou même supérieurs). Dans un véritable groupe de pairs, que la plupart des autistes n'ont jamais connu, chaque personne est unique, mais personne n'est plus "spécial" que les autres.
Le sentiment de "retour à la maison" et d'"appartenance" chez les autres autistes peut également amener les gens à avoir des attentes idéalisées vis-à-vis de ces nouveaux camarades autistes. C'est ce qui caractérise le stade "d'immersion" du développement de l'identité minoritaire (Helms, 1995), au cours duquel les gens embrassent et idéalisent leur propre communauté minoritaire à l'exclusion d'autres types de personnes. Inévitablement, cette idéalisation est finalement suivie de déception et de désillusion, lorsque d'autres membres de son propre groupe se révèlent avoir les mêmes défauts que le reste de la race humaine.
Différences entre les autistes
La grande diversité des personnes autistes signifie que si certaines personnes ont ces expériences puissantes de l'espace autistique en rencontrant des personnes "comme nous" pour la toute première fois, d'autres personnes autistes n'en ont pas. Les personnes qui arrivent dans un espace autistique en s'attendant à ce que tout le monde les apprécie et à ce que tout le monde soit "comme eux", à ce que tout le monde les comprenne et à ce que tout le monde soit facile à comprendre et à s'entendre avec elles, risquent d'être déçues. Si les autistes de ce groupe particulier se trouvent être très différents d'eux, ils peuvent finir par se sentir encore plus aliénés et déplacés qu'ils ne le sont dans les environnements familiers NT. Cela peut conduire certaines personnes à remettre en question leur propre statut ("Si je suis si différent de ces personnes, peut-être que je ne suis pas autiste après tout"), ou à douter du statut des autres ("Vous n'êtes pas comme moi, donc vous n'êtes pas vraiment autiste et vous n'avez pas à vous appeler autiste"), ou à dévaloriser certains sous-groupes d'autistes par rapport à d'autres ("Les autistes qui sont comme moi sont meilleurs que les autistes comme ceux de ce groupe qui me mettent mal à l'aise").
Certains groupes d'autistes tentent de minimiser ces malaises en limitant la participation à certains "types" d'autistes seulement. J'ai entendu parler d'incidents au cours desquels des autistes ont été exclus de groupes parce qu'ils étaient "trop peu fonctionnels", pas assez loquaces ou ne se conformaient pas à l'idée que ce groupe se faisait du type d'autistes dont il voulait faire partie (Baggs, 2006b ; Smith, s.d. b).
L'ANI a adopté une approche différente. Si nos coutumes et notre culture sont fortement influencées par les caractéristiques communes qui ont attiré nos premiers membres les uns vers les autres et nous ont permis de travailler ensemble à la mise en place de l'infrastructure nécessaire à la communauté, nous avons toujours fait de notre mieux pour accueillir et accommoder la plus grande diversité possible d'autistes (Autism Network International, n.d. a ; Autism Network International, 2009). (Cela ne signifie pas que nous n'exclurions jamais une personne autiste pour quelque raison que ce soit. Des personnes peuvent être, et ont parfois été, exclues de la participation aux activités de l'ANI - sur la base d'un comportement qui pénalise d'autres personnes, et pas seulement parce qu'elles sont trop différentes ou trop gravement handicapées. Voir Comité de préparation Autreat).
La véritable "magie" des espaces autistiques inclusifs, tels que nous les recherchons dans l'ANI, n'est pas que chaque personne autiste puisse automatiquement s'attendre à trouver d'autres personnes qui lui ressemblent. La véritable "magie" est que presque chaque personne autiste - toute personne capable de participer sans transgresser les contraintes des autres - peut s'attendre à être acceptée pour ce qu'elle est. Voici quelques descriptions typiques de cette expérience :
- "C'est le premier endroit où je n'ai pas été critiqué pour être différent".
Cela m'a montré qu'il n'y avait rien de mal à être moi et que mes façons de faire n'étaient pas "mauvaises" ou "défectueuses", mais simplement différentes et parfaitement correctes.
Pour la première fois, mes tentatives de communication moins que "normales" ont été reconnues et acceptées.
"Nous aimions le sentiment d'être acceptés et aimions être nous-mêmes !"
Le défi associé est que l'on doit également être prêt à accepter les autres pour ce qu'ils sont : Il est normal que vous soyez bizarre, ce qui est libérateur, mais il est également normal que d'autres personnes soient bizarres. Cela peut être surprenant et dérangeant si leurs bizarreries sont très différentes des vôtres.
Interaction spontanée
Les personnes autistes peuvent être moins susceptibles que les NT d'initier spontanément des interactions avec toute personne se trouvant à proximité. Les personnes autistes se plaignent souvent de leur manque d'amabilité, de leur manque d'ouverture et de leur manque d'intérêt pour les autres (Meyerding, 1998 ; Aston, s.d. ; Foden, 2008). Les autistes se plaignent souvent des NT, car ils semblent insistants et exigeants et gaspillent leur énergie de conversation en bavardages dénués de sens (Sinclair, 1995 ; Muskie, 2002 ; Adam, 2009 ; WrongPlanet.net, 2008).
Lors de rassemblements d'autistes comme Autreat, il peut y avoir énormément de communication et d'interaction une fois que les gens ont trouvé un point d'intérêt commun. (Les conférenciers d'Autreat doivent être prêts à limiter les questions et les commentaires du public, ou bien être prêts à accepter le fait qu'ils peuvent ne couvrir qu'une fraction du contenu préparé, car les participants autistes deviennent extrêmement participatifs lorsque notre intérêt est engagé !) Mais il est peu probable qu'il y ait beaucoup d'amorces spontanées de contacts sociaux, en particulier entre des personnes qui n'ont pas encore de relations sociales établies.
C'est un facteur important pour la capacité de certaines personnes autistes à se sentir à l'aise dans l'espace autiste. Beaucoup d'entre nous ont besoin de temps libre pour observer les gens et les activités avant de pouvoir décider s'ils veulent ou non participer. Parfois, nous décidons de commencer à participer après avoir observé pendant un certain temps. Parfois, nous décidons de ne pas participer, mais nous voulons quand même observer ce que font les autres. C'est un grand soulagement de pouvoir être parmi les gens, de participer à tous les aspects de la situation qui nous intéressent, sans être obligé de faire plus de socialisation.
Cela peut également représenter un grand défi pour les personnes autistes qui sont susceptibles de rester bloquées et qui sont habituées à compter sur leur entourage pour les encourager et les aider. Si une personne traîne dans ou près d'un espace social NT sans se joindre au groupe, quelqu'un viendra probablement l'inviter à se joindre à lui. Les autistes peuvent en venir à compter sur les NT pour fournir ce genre d'incitation, de stimulation et d'initiation dans des situations sociales.
Si une personne traîne dans le coin et ne participe pas à Autreat ou à un espace social autistique similaire, il est fort probable que d'autres personnes la laisseront tranquille. Les personnes autistes ont généralement du mal à s'occuper de plusieurs personnes et de plusieurs choses en même temps, donc si nous nous occupons de notre propre activité et de nos interactions avec d'autres personnes qui participent à l'activité avec nous, il se peut que nous ne remarquions tout simplement pas quelqu'un assis tranquillement sur le côté. Si nous le remarquons, nous ne pouvons pas supposer que cette personne souhaite participer. Nous ne pouvons pas deviner si la personne apprécierait l'interaction ou si elle se sentirait envahie. Même si nous soupçonnons que la personne apprécierait une certaine forme d'interaction, nous ne pouvons pas deviner quel type d'interaction serait le bienvenu. Notre propre expérience des interactions indésirables a rendu la plupart d'entre nous très conscients des pièges que représente la lecture des signaux non verbaux d'autres personnes !
Pour la personne qui se retrouve bloquée et qui découvre que personne ne prend l'initiative de venir l'aider, il existe de nombreuses façons de traiter l'expérience comme une opportunité. Voici quelques exemples de la façon dont différentes personnes ont traité ce type d'expérience à Autreat :
- Je ne savais pas trop quoi faire, ni où aller, ni ce que l'on attendait de moi. Je me sentais perdu et très anxieux. Puis j'ai réalisé que personne ne me regardait ou ne me jugeait, et que personne ne se souciait de savoir si je participais ou non aux activités. Je n'étais pas "obligé" d'aller quelque part ou de faire quoi que ce soit, sauf si je le voulais. J'ai découvert qu'il est normal que je prenne du temps pour m'orienter, et qu'il est normal de ne pas savoir certaines choses, et qu'il est normal de poser des questions quand je ne sais pas ce qui se passe.
ou
- Je ne savais pas trop quoi faire, ni où aller, ni ce qu'on attendait de moi. Je me sentais perdu, anxieux et impuissant. Personne n'a proposé de m'aider. Je me sentais abandonné et plein de ressentiment. Puis j'ai réalisé que je pouvais trouver les informations dont j'avais besoin en regardant mon dossier de programme, ou la signalisation dans le bâtiment, ou en demandant à d'autres personnes où elles allaient. J'ai découvert que je n'ai pas à être anxieuse et impuissante quand je ne sais pas ce qui se passe. Je n'ai pas besoin d'attendre que quelqu'un d'autre vienne me sauver. Je peux trouver les informations dont j'ai besoin et me donner les moyens d'aller les chercher moi-même.
ou
- Je ne savais pas trop quoi faire, où aller ou ce qu'on attendait de moi, et [personne n'a proposé de m'aider] [les gens ont fait des choses qu'ils disaient être de l'"aide" mais que je n'ai pas trouvées utiles]. J'ai réalisé que l'Autreat n'était pas une expérience confortable pour moi. Je me suis donné des moyens en décidant [de ne plus fréquenter Autreat] [de prendre mes propres dispositions pour avoir une aide avec moi si je fréquente à nouveau Autreat].
ou
- Je n'étais pas sûr de ce qu'il fallait faire ou de ce qu'on attendait de moi, et personne ne m'a dit ce que je devais faire. Je me suis sentie très perdue et déconnectée. Sans indices extérieurs me disant ce que je devais faire et être, j'ai commencé à me sentir comme si je n'existais pas du tout. Je me suis rendu compte que j'ai construit une si grande partie de ma vie en essayant d'être ce que les autres attendent de moi que je ne sais pas vraiment qui je suis, ou même si je suis, en dehors des attentes des autres.
(Ce dernier point est une expérience que j'appelle "décompression explosive", et heureusement, cela n'arrive pas très souvent. J'ai vu cela arriver à trois ou quatre personnes au cours des vingt années qui se sont écoulées depuis que j'ai commencé à rechercher d'autres personnes autistes. C'est très terrifiant pendant que cela se produit. Mais il est possible d'y survivre, et cela peut être le premier pas vers la découverte de l'existence d'une personne indépendamment des perceptions et des attentes des autres).
Bien qu'il soit plus courant que les gens apprécient ou soient gênés par le manque d'interaction spontanée dans l'espace autistique, certains autistes initient beaucoup d'interactions spontanées. Même lorsque nous en prenons l'initiative, nous n'avons toujours pas tendance à nous engager dans des discussions de style NT. Nous commençons simplement à parler de n'importe quel sujet qui nous intéresse à ce moment-là.
Lorsque cela se produit dans des contextes sociaux NT, au lieu de se plaindre de l'échec de l'initiation, les NT se plaignent que les autistes approchent les gens de manière inappropriée et parlent de choses étranges ou inintéressantes. Dans l'espace social des autistes, les gens sont moins susceptibles d'être rebutés par des sujets de conversation non standard. Personnellement, je préférerais de loin que quelqu'un s'approche de moi et me dise un fait intéressant que je ne connaissais pas auparavant sur les sauterelles, les hélicoptères ou la médecine légale, plutôt que de me faire aborder sans y être invité pour me dire quelque chose dont je suis parfaitement conscient, comme le fait qu'il y a un jour de soleil ou de pluie. Si vous voulez interrompre le cours de mes pensées et exiger que mon traitement cognitif se concentre sur vous et comprenne ce que vous dites, dites au moins quelque chose d'intellectuellement engageant !
Mais pour quelqu'un qui lutte déjà pour rester orienté parmi des personnes inconnues dans un environnement inconnu, toute interaction inattendue, toute perturbation d'un parcours prévu dans l'espace et le temps, peut être ressentie comme indésirable et intrusive. Et les personnes autistes ne sont pas parfaites ; parfois, nous faisons des choses qui sont vraiment intrusives (c'est-à-dire qui interfèrent avec la capacité des autres à exercer leurs droits et libertés légitimes), et pas seulement inhabituelles.
Étant donné la grande variabilité de la population autiste, tant dans ce que nous voulons que dans la façon dont nous nous exprimons, nous ne pouvons pas nous attendre à pouvoir interpréter les indices des autres ou à deviner leurs souhaits. Dans l'espace social autistique, chaque personne est responsable de communiquer explicitement ses souhaits en matière d'interaction.
Il est acceptable de choisir de ne pas interagir. Il est acceptable de choisir de n'interagir qu'avec certaines personnes, ou seulement à certains moments, et pas avec d'autres personnes ou à d'autres moments. Il est acceptable de parler de ce qui vous intéresse. Il est acceptable de dire à quelqu'un d'autre d'arrêter de vous parler. Il est acceptable d'aborder des personnes qui diffèrent de vous par leur âge, leur sexe, leur race, leur origine ethnique, leur niveau d'éducation, leur niveau de revenu ou d'autres indices de statut social.
Il est acceptable, et attendu, de dire ce que vous voulez dire. Il n'est pas acceptable de s'attendre à ce que les gens comprennent ce dont vous avez besoin, ce que vous voulez ou ce que vous voulez dire, si vous ne le dites pas explicitement. Et il est tout à fait inacceptable d'essayer de dire aux autres ce dont ils ont besoin, ce qu'ils veulent, ce qu'ils ressentent, ce qu'ils pensent ou ce qu'ils ont l'intention de faire. (Lecteurs NT, veuillez prendre note de ce point de l'étiquette autiste : Les NT semblent considérer comme une expression d'"empathie" le fait d'étiqueter les souhaits et les sentiments des uns et des autres. Les personnes autistes n'apprécient guère qu'on leur dise ce qu'elles ressentent. Et si nous ne prenons pas l'initiative d'étiqueter vos sentiments pour vous, cela ne veut pas dire que nous ne nous soucions pas de ce que vous ressentez. Cela signifie seulement que nous ne présumons pas savoir ce que vous ressentez, à moins que vous ne nous le disiez).
Dans l'espace autistique, la communication est la responsabilité de l'individu, et non du groupe.
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