(désolée si c'est en décalage, j'ai commencé ce message longtemps avant les débats précédants)
Alceste a écrit :Je viens de parcourir différents sujets, et une fois de plus je constate que certains expriment une réticence à accepter l'idée qu'on puisse être diagnostiqué autiste et
ne pas se "sentir" handicapé
ou
avoir une activité professionnelle nécessitant de nombreuses interactions dans des environnements variés
ou
vivre en couple sans difficulté apparente.
Je reprends un peu le message initial.
Tout est dans les "ou". Si tout va bien à tous les niveaux, ceux que tu évoques et d'autres, dans un environnement non spécifique, c'est surprenant. Comme l'autisme est un ensemble de multiples particularités pouvant toutes êtres présentes ou non à différents degrés, et dont l'impact dépend directement de l'environnement, on ne peut pas affirmer "un autiste ne peut pas faire telle chose".
Se sentir handicapé n'a pas une signification précise. Pouvoir vivre en autonomie, et
en apparence comme tout le monde, ok. Pouvoir vraiment vivre comme tout le monde, faire les mêmes choses dans les mêmes conditions, je suis dubitative.
Il me semble que quelques autistes avérés (Anthony Hopkins...) ont "une activité professionnelle nécessitant de nombreuses interactions dans des environnements variés". Ce qui ne signifie pas qu'ils le font comme tout le monde, sans effort ni fatigue, sans que leur différence soit perceptible, avec la même durée et la même fréquence qu'un non autiste qui aurait une activité équivalente. Il y a d'autres cas, hors célébrités, de commerciaux, vendeurs, hôtesse d'accueil, avocat, etc. Souvent, il me semble que les interactions sont codifiées, le temps limité, la discussion porte sur un domaine précis, technique ou lié à un intérêt, ou le discours peut être préparé.
Rien ne peut nous permettre de juger les compensations mises en place et les impacts réels pour la personne sur la base de quelques apparences.
Pour le couple aussi, ça peut tout à fait se passer sans difficultés majeures. Le fonctionnement d'un couple n'est pas apparent. Si, par exemple, pour pallier à l'hypersensibilité du conjoint autiste le couple a choisi de faire chambre à part, on peut dire qu'il y a eu un aménagement pour sortir d'une situation de handicap. Pour autant ce n'est pas un couple "classique", les particularités de la personne avec un TSA n'ont pas disparu. On peut d'ailleurs remarquer que c'est le cas pour un très grand nombre de handicaps : une fois chez eux, tout est aménagé pour faire disparaître, ou diminuer au maximum, leurs difficultés.
1) nous ne ressentons sans doute pas tous les difficultés de la même manière.
Nous n'avons pas les mêmes difficultés, ce serait une formulation plus juste.
Je comprends relativement bien les implicites, je sais conduire, je ne sais pas me faire de repas, je suis hypersensible au toucher et à l'ouïe, je n'ai pas d'amis irl, je suis alexithymique, je réponds au téléphone dans un cadre professionnel, j'ai été en couple pendant 13 ans.
A, Asperger, comprend très mal les implicites, ne sait pas conduire, est hyposensible au chaud, n'arrive pas à téléphoner dans un cadre professionnel ce qui met en danger son emploi, a des amis, a un métier qui demande beaucoup d'échanges sociaux directs sans que ce soit une réelle difficulté, n'arrive pas à maintenir une relation de couple.
B, Asperger, bardé de diplômes, est sans emploi. Parle peu mais bien, ne regarde pas dans les yeux.
C, Asperger, parle en continu à 40 cm de ton visage sans qu'il soit possible de lui faire comprendre d'arrêter, a un emploi technique et une vie de famille.
D, autiste atypique, n'a presque aucune capacité à échanger de manière réciproque, ses phrases ne laissent aucune ouverture, n'attendent pas de réponse, et sont généralement assénées hors contexte, une heure après que le sujet a été abordé. D ne comprend pas les codes sociaux et peut avoir des comportement ou poser des questions très gênants en public, a été rejeté d'un emploi en milieu protégé, a été jugé déficient intellectuel jusqu'à son diagnostic qui montre un haut potentiel.
E, autiste typique, non verbal, mais montre une vraie volonté d'échanger en essayant d'imiter les phrases qu'il entend.
F, autiste typique, fait des aller-retours en flappant et en poussant de petits cris, s'arrête parfois pour poser une question incongrue, repart sans attendre la réponse, recommence avec quelqu'un d'autre.
Dans cette liste,
3 disent être en situation de handicap,
2 disent ne pas être handicapés, l'autisme est une différence,
2 n'ont pas d'avis sur la question.
Dans l'ordre.
2) la définition du syndrome est suffisamment floue pour que les extrémités du spectre correspondent à des réalités très différentes.
Un handicapé moteur peut avoir perdu ses membres, ou leur usage, il peut en avoir perdu 1, 2, 3 ou 4.
Il peut ne plus pouvoir se déplacer, ou courrir avec des spatules en carbone plus vite qu'un valide.
Pourquoi ne pas admettre cette diversité chez les autistes.
Je ne vois toujours pas qui ne l'admet pas ?
Je rappelle tout de même que malgré la diversité apparente sur ce forum, nous sommes tous (pour ceux qui ont effectivement un TSA) "à l'extrémité du spectre". Dans le sens où seuls des profils très particuliers participent, avec des capacités d'échange relativement correctes, une envie de communiquer, un bon accès au langage, la possibilité de sortir de ses intérêts particuliers, une intelligence normale à supérieure. Tous ces traits peuvent être affectés dans l'autre sens par l'autisme...
Du coup, je ne vois pas comment nier la diversité du spectre. Si déjà c'est aussi visible sur notre petit échantillon...
J'ai l'impression que tu veux insister sur cette diversité de l'extrémité du spectre (pour reprendre tes termes, parce que je n'aime pas voir le spectre autistique comme une représentation en deux dimensions).
Est-ce que ton questionnement ne s'explique pas plutôt parce que tu as pris personnellement une remarque sur les TSA, jugé qu'elle était négative et ne pouvant s'appliquer à toi ?
C'est dommage de ne pas parvenir à partager cette vision très large de la réalité des uns et des autres, parce que les échanges en pâtissent.
Je ne comprends pas, il me semble que c'est toi qui n'accepte pas qu'on parle ouvertement des particularités alimentaires des autistes, alors que ça fait bien partie de la réalité de certains.
Il faudrait évoquer cette diversité ici mais pas en public ?
Certains n'osent (parfois, quand la polémique est vive) exprimer leur point de vue qu'en message privé.
Je ne peux que les encourager à s'exprimer. Même si les échanges peuvent être un peu stricts dans la forme, confronter ses idées et le meilleur moyen de les faire évoluer. Le débat, si chacun essaie de respecter quelques règles, profite à tous.
Je suis sans doute maladroit, mais mon intention n'est que de faire progresser l'acceptation de tous ceux qui sont autistes, également malgré leurs différences.
Au risque d'être un peu directe : que connais-tu des autistes en général ?
Moi-même, très peu. J'ai rencontré irl au moins une centaine d'autistes, échangé avec beaucoup plus en ligne, et lu énormément sur le sujet, mais j'admets volontiers n'avoir qu'une petite idée de la diversité des personnes puisqu'il y a un énorme biais de sélection et que je suis régulièrement surprise par de nouveaux profils. Je crois qu'en voulant faire progresser l'acceptation de "l'autisme" je risque toujours de militer pour la reconnaissance de ce qui me touche moi, directement ou non.
Diagnostiquée Autiste Asperger et TDA.
Mère de 3 enfants : fils Aîné TDAH et TSA atypique, cadet TSA de type Asperger, benjamin TDAH.