Les Aspies peuvent être d'excellents employés

Je suis autiste ou Asperger, j'aimerais partager mon expérience. Je ne suis ni autiste ni Asperger, mais j'aimerais comprendre comment ils fonctionnent en le leur demandant.
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Jean
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Les Aspies peuvent être d'excellents employés

Message par Jean »

Les Aspies peuvent être d'excellents employés
29 juillet 2008 - The Herald-Dispatch quotidien d'Huntington (Virginie-Occidentale - USA)

Le syndrome d'Asperger provoque plus de stress pour la personne "Aspie" qu’à son ou ses collègues de travail.

Les différences entre Aspies et Neurotypiques (NT = personnes avec un fonctionnement cérébral classique, comme la majorité de la population), peuvent parfois conduire à des conflits inutiles dans le milieu de travail. Mais avec un peu d'éducation et de compréhension, les deux parties peuvent être heureuses et productives.

Avec la récente explosion de l'information sur l'autisme et le syndrome d’Asperger, de nombreux employeurs ont entendu parler çà et là de quelques découvertes de la recherche : ils se font alors une certaine idée, incomplète, des types d'emplois les mieux adaptés pour une personne atteinte d'un «trouble du spectre autistique » (TSA). Le TSA recouvre un large éventail de diagnostics, dont le syndrome d'Asperger, l'autisme et les troubles envahissants du développement. L'autisme est un trouble neurologique du développement qui altère l'interaction sociale et la communication; il est la cause de comportements répétitifs ou d’intérêts restreints, ceux-ci faisant leur apparition avant 3 ans. Les autres troubles du spectre, comme le syndrome d'Asperger, sont plus atténués.

Il a été dit que si le syndrome d'Asperger n'existait pas, il n’y aurait pas Internet, ni d’ordinateurs. Cela pose la question " Qu'est-ce que les Aspies ont fait avant que l'ordinateur soit inventé ? " La réponse est presque tout. Ils ont conçu et construit les télescopes, les machines à vapeur, les ampoules électriques, les téléphones et les automobiles. Ils ont créé des œuvres d'art telles que le mont Rushmore et la Statue de la Liberté. Ils ont créé des bâtiments élégants que nous admirons encore aujourd'hui.

Beaucoup de récits récents conduiraient de nombreuses personnes à penser que les personnes avec TSA ne sont utiles que dans des domaines bien spécialisés comme la mécanique ou les mathématiques. Ce n'est pas le cas. L'idée que toutes les personnes vivant avec TSA ne sont pas en mesure de bien communiquer est complètement fausse. Beaucoup de gens avec TSA sont auteurs, éditeurs et rédacteurs de discours. Il est vrai que, pour beaucoup, "parler de la pluie et du beau temps" [pour entretenir des relations] peut être difficile, mais un employeur peut être agréablement surpris de découvrir que son nouveau employé a beaucoup lu pour savoir comment s'entendre sur le lieu de travail avec toutes sortes de personnes. Un grand nombre d'Aspies sont prudents et diplomates, préférant éviter de donner des avis sur la politique, la race ou la religion. Sachant très bien comment ces sujets peuvent être polémiques, nombreux sont ceux qui détestent en discuter au travail.

Les distributions de gâteaux dans le bureau ou les fêtes d'anniversaire peuvent être un obstacle. Beaucoup de gens avec TSA ne supportent pas certains aliments [« sélectivité alimentaire »], et avec les chansons, les jeux et les libations en plus, ils peuvent se sentir dépassés par les évènements.

Il est fréquent que les personnes neurotypiques forment des groupes sur le lieu de travail, mangent ensemble, pratiquent le covoiturage et même se rendent visite entre eux. Beaucoup de gens avec TSA comprennent que les "NT" ont besoin de le faire, mais préfèrent ne pas être tisser des liens d'amitié avec leurs collègues de travail.

Beaucoup d’"Aspies" sont mariés, ont des enfants à charge et préfèrent se détendre après le travail avec leurs familles. N’importe quel gestionnaire expérimenté vous dira que des amitiés au bureau se défont parfois, conduisant rapidement à des rumeurs et souvent au sabotage des tâches des collègues. Cela peut être amusant pour quelques neurotypiques qui voient leur employeur comme une sorte de proviseur de collège, mais de nombreux Aspies voient où çà mène : en gâchant le travail de quelques-uns, on finit par faire couler l'entreprise.

Les gens avec TSA qui ont grandi en voulant se couler dans le moule ont souvent étudié et observé les usages sociaux. Ils sont réservés pour discuter de leur vie personnelle et sont parfois surpris par les questions indiscrètes que leurs collègues peuvent poser au sujet de leur conjoint, de leurs enfants ou de leur passé. Souvent, ils hésitent à répondre parce qu'ils ont peur d'ennuyer leur collègue. Les Aspies ont souvent des hobbys calmes que les NT trouveraient ennuyeux.

Donc, si vous êtes en mesure d'embaucher quelqu'un, s’il vous plaît, ne considérez pas que les personnes avec TSA ne sont bons qu'à une tâche particulière. Il est vrai que leur cerveau est «connecté différemment», mais s'il est traité équitablement, sans condescendance, un employé avec TSA peut être un atout précieux et novateur sur le lieu de travail avec un désir de faire les tâches prévues de façon la plus efficiente, efficace et rentable.

Kathy Ferrell est une illustratrice née à Huntington et qui réside y encore. Son syndrome d'Asperger est devenu évident au cours de ses années de maternelle quand elle a montré son habileté en dessin, sa capacité de se concentrer intensément, sa mémoire et sa capacité à imiter une voix, entre autres symptômes. Ses oeuvres d'art ont été publiées dans de nombreux livres et revues, aux Etats-Unis et à l'étranger.


Traduction par Google (puis adaptée) de la page : http://www.herald-dispatch.com/news/x11 ... -employees

Qu'en pensez-vous ? Est-ce une bonne argumentation?
Modifié en dernier par Jean le mardi 19 août 2008 à 23:10, modifié 1 fois.
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bernard
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Message par bernard »

Ca montre le bon côté des choses.
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jakesbian
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Message par jakesbian »

au niveau "attitude sociale", je suis tout à fait d'accord...

... au niveau du travail, je pense que le problème ne se trouve pas là; il y a des travaux que nicolas fait comme tout le monde... et d'autres (par exemple la vaisselle) qu'il mettra 3 fois plus de temps...

... ce qui fait que, même sachant tout faire comme les autres, il ne peux occuper certains postes, par manque de rentabilité;

il y a aussi les travaux où il faut organiser, réfléchir, suivre des consignes, tenir en comptes des contraintes de temps et des imprévus, supporter des gens pas toujours sympas (comme serveur dans un restaurant)... c'est mission impossible... alors qu'un boulôt qu'il connait par coeur ou maitrise tous les rouages... il devient champion.

enfin, avis personnel;
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papa fredoc
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Message par papa fredoc »

jakesbian a écrit :au niveau "attitude sociale", je suis tout à fait d'accord...

... au niveau du travail, je pense que le problème ne se trouve pas là; il y a des travaux que nicolas fait comme tout le monde... et d'autres (par exemple la vaisselle) qu'il mettra 3 fois plus de temps...

... ce qui fait que, même sachant tout faire comme les autres, il ne peux occuper certains postes, par manque de rentabilité;

il y a aussi les travaux où il faut organiser, réfléchir, suivre des consignes, tenir en comptes des contraintes de temps et des imprévus, supporter des gens pas toujours sympas (comme serveur dans un restaurant)... c'est mission impossible... alors qu'un boulôt qu'il connait par coeur ou maitrise tous les rouages... il devient champion.

enfin, avis personnel;

ouais je me reconnais bien la

a une epoque je m'etais force a faire un metier qui m'obligeait a aller au contact des gens... ca a pas trop mal marche pour la formation, je faisais mon show et comme je maitrisais a fond mon sujet je n'etais jamais destabilise par les questions et autres interactions avec mon public

en revanche quand je me suis essaye a des metiers plus commerciaux ca n'a pas du tout passe, j e me refugiais dans la technique ou j'excellais et mon client etait content de m'avoir pour ca mais je me cantonnais a un role technique ou la aussi je connaissais tous les tenants et aboutissants

depuis cinq ans je refais du developement et de la technique pure
j'ai toujours bcp de mal quand il doit y avoir de l'interaction avec des gens c'est le point faible....
alexis
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Message par alexis »

Ce texte parle d'une population plus large que les aspergers.

J'ai tenu ce genre de discours la semaine dernière à mon futur ex-employeur. Mais l'expliquer après l'apparition de symptômes dépressifs, synonymes de réduction de salaire pour pas que les autres se sentent lésés... Il y avait peu de chance que ça marche.

Antérieurement, j'ai déjà été refusé dans des entretiens d'embauche juste pour avoir utilisés les mots difficultées alimentaires et sociales. Et ça malgré un C.V. en béton, plusieurs années d'expérience et l'absence d'autre candidat.

Il n'y a que quand je n'en parle pas et que je fait semblant d'être bien comme il faut que je réussi des choses positives pour tout le monde. Juste suivre la manière de faire imposée par la majorité NT et encaisser le stresse en silence.
alexis
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Message par alexis »

Il est vrai que leur cerveau est «connecté différemment», mais s'il est traité équitablement, sans condescendance, un employé avec TSA peut être un atout précieux et novateur sur le lieu de travail avec un désir de faire les tâches prévues de façon la plus efficiente, efficace et rentable.
"un atout précieux" devient vite "un homme à abattre" pour les autres employés, notamment ceux en difficultées.

Mes employeurs ont toujours eu une très mauvaise communication lors de mon arrivée pour me présenter aux anciens. La pire étant de changer leur comportement en m'accordant plus d'attention ou de respect. Ca met une pression sur les anciens qui se sentent menacés.
Il vaut mieux rester discret quand on veut employer quelqu'un de différent, et avec un statut dans l'entreprise qui lui est propre.

C'est complexe, tout le monde est victime et persécuteur de l'autre en même temps.

Sensibiliser les employeurs n'est pas suffisant, il faut s'adresser aussi aux futurs collègues de travail. Leur expliquer que tout le monde n'est pas NT, que certains vivent mal les traditions de l'entreprise, et être équitable nécessite de faire des adaptations pour ne pas pénaliser ces gens différents et minoritaires.
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bernard
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Message par bernard »

Pour reprendre ce que disait Jakesbian, dans le livre "Laissez entrer les idiots" que je viens de finir (voir rubrique "livres" de ce forum), l'auteur parle du cas de son copain d'enfance, lui aussi autiste (il ne cite pas le qualificatif d'asperger), et qui finit par être renvoyé comme coursier car il s'attache trop aux détails : chaque fois que son vélo fait un bruit bizarre, il s'arrête, sort la trousse de réparation et prend le temps qu'il faut pour le remettre en état et faire disparaitre ce petit bruit métallique. Bien sur, il arrive en retard en livraison et finit par être pénalisé puis renvoyé. Mais il ne peut pas s'empêcher de faire ses réparations.
On peut imaginer que certains aspies puissent aussi perdre du temps avec ce genre de détails, et finissent par être moins productif pour l'entreprise. D'un autre côté, je dirai qu'ils ne ménagent pas leur peine et travaillent souvent avec passion et sans compter, ce qui fait que l'un dans l'autre, l'employeur de bonne foi s'y retrouve.
Question : est-il toujours de bonne foi ?
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jakesbian
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Message par jakesbian »

un jour, j'ai lu sur un autre forum, une dame qui parlait de son mari autiste; il avait été salarié pendant 20 ans... 20 ans de souffrance...

... puis, il se sont installés à leur compte; une petite entreprise à eux deux et 2 ou 3 salariés... et çà marchait à merveille...

... disons, qu'il n'avait plus la contrainte de quelqu'un qui lui disait qu'il ne faisait pas ce qu'il fallait, ou pas assez vite...
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Mars
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Message par Mars »

Alexis, doit-on comprendre que tu quittes ton emploi ? Pour des raisons liées à ton "handicap" ?
Atypique sans être aspie. Maman de 2 jeunes filles dont une aspie.
alexis
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Message par alexis »

Alexis, doit-on comprendre que tu quittes ton emploi ? Pour des raisons liées à ton "handicap" ?
Non, je quitte à cause dépression et comportement des patrons et collègues qui me poussent vers le fond au lieu de m'aider.

Pour se protéger, un collègue ancien copain de classe a utilisé l'argument de l'alimentation pour démontrer un refus de m'intégrer dans l'équipe en ne mangeant pas avec eux le midi. Les patrons me regardent plus pareil, mais ça ne m'empêche de travailler et eux de continuer à me confier des dossiers importants. Mais je confirme que ça fait bizarre de changer de statut du jour au lendemain.

C'est surtout les retards du matin qui posent problème, il paraît que c'est pas difficile de se lever et d'arriver à l'heure, je le fais forcément exprès (les patrons ne sont pas du genre dépressif). Du coup j'ai réduction de salaire et je ne peux plus payer le loyer.

La depression dure depuis 1 an 1/2, les questions à l'origines sont complexes et ne viennent que de moi, j'y travaille, mais ça ne se règle pas rapidement, en attendant faut bien vivre de quelques chose.

Là, en reprenant le travail il y a 3 mois, j'ai fait un mauvais choix stratégique, petite équipe de 5 personnes avec ambiance plutôt malsaine, càd hyper tendue et beaucoup d'habitudes étouffantes.

Comme je me laisse pas faire très longtemps, je cherche un autre travail avec des meilleurs conditions.
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Mars
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Message par Mars »

As-tu déjà des pistes pour un autre emploi ?
Je comprends parfaitement que l'entourage peut te pourrir ta vie professionnelle. Je suis d'accord avec toi quant à l'information donnée : j'ai des exemples au collège, les profs, les élèves et toute l'équipe éducative doivent être sensibilisés pour que ça marche. Par ailleurs quand l'information arrive alors que la situation est déjà détériorée, ça ne marche pas bien non plus, difficile de se refaire "une virginité" alors que tout le monde s'est forgé une opinion (cas d'un autre élève).
Par contre, j'ai un exemple qui ressemble fort à ce que tu as vécu et il semblerait que le retour de la personne au boulot après un épisode dépressif se passe plutôt bien. Il s'agit d'un jeune homme autiste tellement stressé par son boulot (un CAE dans un secrétariat à l'hôpital) qu'il faisait reculer sans cesse sa date de reprise du travail. Il se sentait mal compris et n'osait pas formuler ses craintes à sa tutrice.
Des amis ont rédigé un texte présentant son handicap (ignoré par son milieu professionnel) et signalant toutes les occasions de stress qui lui faisaient perdre pied. L'équipe a tenu compte de ce document et l'a encouragé. Il a fini sa première semaine sans encombre.
Tout est affaire de personnes et tu es sans doute le plus à même de sentir si ta situation peut être rétablie. Je te signale quand même cet épisode au cas où un médiateur pourrait intervenir en ta faveur.
Bon courage.
Atypique sans être aspie. Maman de 2 jeunes filles dont une aspie.
alexis
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Message par alexis »

Oui, j'ai des pistes, et je peux retrouver facilement. Mais j'aimerai bien trouver un endroit stable. Là, je cumule les expériences de courtes durées, interrompues à cause des conditions invivables.

Les conseils de Jean que a reporté sont assez vrais dans l'ensemble. Surtout "vendre ses compétences et non sa personnalité".

Le milieu professionnel dans lequel je travaille (architecte) est surtout composé de penseurs visuels, càd beaucoup de personnalités rebelles et très sûres d'elles, persuadées de détenir la vérité et refusant tout ce qui ne s'accorde pas avec leur idée sur comment il faut faire, et comment il faut être.

Au travail, le problème principal des penseurs visuels est qu'ils ne savent pas communiquer leurs idées, càd les traduire en langage verbal, les structurer pour les rendre présentables. Ils sont brouillons, désorganisés et passent pour des gens incompétents à cause de ça (ce qui n'est pas le cas).

Ma différence est qu'en plus des trucs de penseur visuel, je sais aussi comprendre, accepter et faire le travail structuré plus traditionnel. Je sais traduire mes idées visuelles dans un langage séquentiel, càd en utilisant la logique qui plait aux gens non-visuels.

Cette compétence se voit immédiatemment dans mes CV et portfolio, ils sont faciles à lire, clairs, structurés, élégants, efficaces. Alors que les employeurs ont l'habitude de recevoir des CV "torchons" qui ne renseignent pas sur les qualités des candidats.

Je décroche toujours les jobs en 2 minutes, mais mon problème est de trouver un environnement adapté. On m'engage pour ma capacité à faire aboutir les choses, mon organisation. Mais une fois embauché, je suis confrontés en permanence à des gens qui n'acceptent pas ce qu'ils ne comprennent pas et sont insupportables. Je ne stresse pas par rapport au travail, mais par rapport à l'attitude pesante des gens que je fréquente.

En ce moment, je réfléchis à comment améliorer ma cohabitation, ma communication avec les autres visuels, càd apporter mes compétences en évitant les tensions. En sachant que techniquement, je n'ai la possibilité d'agir que sur mon propre comportement.
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Jean
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Message par Jean »

alexis a écrit :En ce moment, je réfléchis à comment améliorer ma cohabitation, ma communication avec les autres visuels, càd apporter mes compétences en évitant les tensions. En sachant que techniquement, je n'ai la possibilité d'agir que sur mon propre comportement.
"Techniquement", oui, mais pratiquement, il doit être possible de s'inspirer des conseils de Temple Grandin et Kate Duffe sur les "Conditions de succès d’une expérience de travail". Il y en a 11 :
  • 1- Faire des transitions graduelles
    2- Chercher des employeurs encourageants
    3- Trouver des mentors
    4- Éduquer les employeurs et les employés
    5- Envisager le travail autonome
    6- Faire un portfolio
    7- Faire votre propre page Web pour mettre votre travail en valeur
    8- Développer des habiletés
    9- Rechercher un emploi dans un secteur où vous excellez
    10-Demander de l’aide pour les dossiers financiers et la conservation de dossiers officiels
    11-Gérer votre tempérament, votre anxiété et vos habiletés sociales
Les items 1, 6, 8, 9 ne te semblent pas poser problème. Tu n'as vraiment pas besoin du 7, si tu trouves rapidement un employeur. Pour le 10, je ne sais pas (sur la base de tes messages, tu ne sembles pas avoir besoin spécialement d'aide sur ce plan).
Tu portes donc ton effort sur le 11. En effet, les NT étant majoritaires, il faut bien qu'un TED apprenne à gérer sa différence.

Si on met de côté le 5 (travail indépendant), les 2-3-4 visent à "éduquer" l'environnement de travail. En France, les entreprises ont une obligation d'emploi minimum de 6% de travailleurs handicapés. L'obligation d'emploi est remplie à un peu plus de la moitié. Les entreprises ne remplissant pas leur obligation doivent payer une redevance à un fonds public, l'AGEFIPH.

Cependant, une partie des entreprises, les plus petites (moins de 20 salariés, me semble-t-il) ne sont pas tenues à cette obligation. C'est peut-être le cas de beaucoup de cabinets de ton secteur.

A noter quand même que dans la réalité, les organismes qui s'occupent d'insertion ou de maintien dans l'emploi de travailleurs handicapés trouvent un accueil aussi bon dans les petites entreprises non assujetties à l'obligation d'emploi que dans les autres.

A se rappeler également que cette obligation d'emploi sanctionnée financièrement concerne aussi les 3 fonctions publiques (Etat, territoriale, hospitalière) et qu'il y a là du chemin à faire. Une procédure de titularisation sans concours au bout de 2 ans existe désormais.

Pour être concerné par cette obligation d'emploi, il faut remplir un certain nombre de conditions (par exemple AAH, pension d'invalidité, carte d'invalidité etc...). Le plus simple est d'obtenir la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (appelée barbarement RQTH). La demande doit être déposée auprès de la MDPH du département. Un diagnostic d'autisme, de syndrome d'Asperger ou de TED ne peut qu'entraîner l'obtention de cette "qualité".

Une fois qu'on l'a obtenue, il ne faut l'utiliser qu'à bon escient, quand c'est nécessaire (et possible). D'après la cour de cassation, un employeur ne peut pas se plaindre de ne pas avoir été averti.

Lorsqu'une entreprise a une politique d'embauche de travailleurs handicapés, il est sans doute judicieux de faire état de la RQTH dès l'envoi du CV. En effet, cela garantit sans doute la convocation à un entretien. Temple Grandin parle d'entrer dans la porte de derrière, et non celle de la DRH, mais ce biais est aussi une porte dérobée. Pour savoir si une entreprise a une politique de ce type, il faut passer par des entreprises du réseau CAP-Emploi, Prométhée... Les conseillers ANPE doivent les connaitre. Et parfois il y a des accords d'entreprise ou de branche connus publiquement (il me semble que le Crédit Agricole ou une autre banque a fait une campagne de pub sur ce sujet).

Une question délicate pendant l'entretien sera de parler de son handicap. Cela restera dans le non-dit, ou dans le fait que ce n'est pas un handicap physique visible... Il faudra peut-être l'expliquer ou indiquer que certains postes de travail ne sont pas indiqués.

Dans d'autres cas, il faudra peut-être informer l'interlocuteur du handicap quand on s'apercevra que l'entretien tourne en eau de boudin. Mas normalement l'interlocuteur est un habitué à évacuer sans trop laisser paraître,... et un TED n'est pas très performant en matière d'interaction sociale.

Lorsque l'étape de l'embauche est franchie, il y a contrat à durée déterminée (CDD) ou contrat à durée indéterminée (CDI). En cas de CDI, il y a période d'essai. Si des problèmes apparaissent à ce moment, il sera peut-être indispensable de faire connaitre le handicap. Comment savoir s'il y a problème ? Couramment, ce n'est que le dernier jour que l'employeur dira que le CDD n'est pas renouvelé ou que l'essai est rompu. Auparavant cependant, il est possible que les réponses soient très évasives quand la question est posée du renouvellement ou de la titularisation. Il peut y avoir des reproches fréquents, des tâches supprimées sans explication, des collègues qui ne prennent plus la peine de répondre ...

Dans ce cas, s'il faut avoir un entretien avec l'employeur, le cadre ou le responsable du personnel, il faudra pouvoir expliquer en quoi consiste le handicap et comment ses manifestations ont une conséquence sur le travail ou son environnent. Il faudra peut-être aussi avoir une idée des solutions possibles.

C'est bien de pouvoir en parler précisément auparavant avec un interlocuteur extérieur : ami, parent, association, éducateur, médecin, conseiller emploi etc... Il faut mieux rédiger un aide-mémoire. Dans certains cas, il suffira de le donner.

Par exemple :
  • - je suis anxieux (d'où mes maladresses, mon arrêt de travail, mon eczéma, ma colère...) parce que j'ai peur de ne pas bien faire;
    - il faut me dire régulièrement si je fais bien mon travail pour limiter mon anxiété;
    - les consignes doivent m'être données de façon explicite;
    - si la procédure de travail n'est pas écrite, il vaut mieux que je prenne des notes;
    - quand je me trompe, il est préférable de me le dire clairement pour que je fasse en sorte de rectifier ma façon de faire;
    - si je travaille trop lentement, il faut me le dire, et me donner des repères;
    - j'ai besoin de décompresser régulièrement : il faudrait que je puisse le faire dans un endroit discret;
    - si je fais une erreur de manipulation, il ne suffit pas de me dire que ce sera grave : il faut m'indiquer comment l'éviter ou que faire dans ce cas (qui avertir, comment, mesures à prendre); cela m'évitera de stresser tout le temps.
    - je suis anxieux à l'idée d'aller à tel endroit, car il est isolé, et que je crains d'avoir une crise de panique : limitation des occasions, ou dispositif d'alarme ?
    - il ne faut pas attendre de moi que je participe aux repas communs, aux pots ou aux soirées d'anniversaire: çà me stresse, mais çà ne veut pas dire que je n'aime pas travailler avec mes collègues.
    - j'ai du mal à reconnaître que j'ai tort. Cela ne veut pas dire que je suis réellement arrogant ou que je ne suis pas en mesure de comprendre ce qu'on me dit.
    - je suis incapable de me rappeler du prénom de mes collègues ou de les reconnaître dans la rue : cela ne veut pas dire que je les snobe.
    - je les traite tous pareils : pas de bise pour les uns ou de serrage de louche pour les autres, ce sera "bonjour" à la cantonade sans regarder personne en particulier
Quand les premières étapes sont franchies, c'est comment rester. C'est "un peu moins risqué".... mais aussi délicat. Faire en sorte que l'employeur soit compréhensif (il est sensible aux problèmes humains, il a intérêt parce qu'il a besoin de son quota ... ou de tes compétences), trouver un interlocuteur dans l'entreprise qui soit un mentor (en France, on appellera çà plutôt un tuteur) - mais cela pourrait être aussi quelqu'un à l'extérieur -, apprendre à l'employeur et aux salariés NT comment faire.

C'est à la personne avec TED de se débrouiller pour tout çà : il vaudrait mieux avoir des personnes spécialisées en la matière pour servir d'interface. Ces personnes spécialisées pourront d'ailleurs très bien être des personnes avec TED.

J'arrête là, parce que je suis en train de théoriser. Votre point de vue sur le sujet ?